Le magazine de la Mutualité Socialiste et Syndicale de la province de Liège - n°3 - juin 2010 - bureau de Dépôt : Liège X - Editeur responsable : Fondation Solidaris - 36 rue Douffet - 4020 Liège A force de tirer... Mise en place d’une approche psychosomatique à la clinique André Renard Retrouver le sens caché de certaines maladies et reprendre le contrôle de sa vie Depuis quelques mois un chirurgien spécialisé en chirurgie colo-rectale et un psychothérapeute pratiquant la Psychothérapie du Trauma Ré-associative travaillent ensemble pour permettre aux patients une guérison « en profondeur ». Une initiative unique dans son genre qui envisage le patient dans sa globalité et donne des résultats très efficaces. Nous avons tous notre parcours de vie, avec ses joies, ses douleurs, ses traumatismes aussi parfois (accident de voiture, violences physiques ou psychiques, mort d’un proche, abus sexuels …) auxquels nous réagissons chacun comme nous pouvons, avec « les moyens du bord »… Solidaris n°3 • 2010 En fonction de son importance et de sa violence, le traumatisme (qui vient d’un mot grec signifiant « blessure ») laisse son emprunte dans notre tête bien sûr, mais aussi dans notre corps. Si notre tête, notre mental, met parfois en place des mécanismes visant à nier, enterrer, évacuer ce traumatisme, le corps, lui, le transforme souvent en dou- 18 leurs physiques, en maladies qui se ravivent constamment et qui, si elles sont bien réelles, sont clairement d’origine psychosomatique. Dans ce cas-là, soigner la maladie en tant que telle (par des médicaments ou des opérations chirurgicales) ne suffit pas. Pour en venir à bout il est nécessaire de remonter, en douceur, le fil des émotions jusqu’au trauma déclencheur de la maladie que le patient apprend alors à « mettre à distance ». C’est ce que proposent, en étroite collaboration, le Dr Luc Bruyninx et le psychothérapeute Gérald Brassine (*). Partir de l’émotion derrière la douleur « J’ai suivi une formation auprès de Gérald Brassine il y a quelques années ce qui m’a permis de soigner mes patients autrement, explique le Dr Bruyninx. Je me laisse «impressionner » par les personnes à la manière des plaques argentiques des anciens appareils photos et je pose régulièrement une question qui surprend toujours : « que ressentez-vous comme émotion derrière votre douleur ? »… Cela donne la possibilité à la personne d’exprimer cette émotion (tristesse, colère, honte, peur, culpabilité…) et permet de déceler la présence d’un traumatisme à l’origine d’une réaction psychosomatique. Aujourd’hui je peux proposer à la personne, si elle est d’accord bien entendu, de rencontrer Gérald Brassine (qui est en consultation deux jours par semaine à la clinique) pour qu’il l’aide à faire le lien entre le traumatisme vécu et la maladie ou les douleurs physiques ressenties.» rapide et efficace. Durant la thérapie, le patient ne perd jamais le contrôle de lui-même, en fait il apprend à le retrouver là où le traumatisme le lui a fait perdre. En reprenant ce contrôle, il arrive à éliminer la douleur d’une maladie aux origines nerveuses ou émotionnelles et souvent à supprimer la maladie elle-même… En général quelques séances suffisent. » Pour et autour du patient Quand ils évoquent les différents patients communs dont ils s’occupent, Luc Bruyninx et Gérald Brassine affichent une complicité pleine de respect mutuel, essentielle au bon fonctionnement de cette nouvelle approche psychosomatique. « Bien sûr, prendre cela en compte demande au médecin une « Il n’y a pas de maladies ou de douleurs psychosomatiques certaine ouverture d’esprit. Il faut accepter de perdre un peu « types », l’inconscient ne connait rien à l’anatomie, mais il est de son pouvoir… » sourit le Dr Bruyninx. vrai que ce sont assez souvent les voies digestives qui sont touchées (intestin, estomac, anus…) ou génitales, précise le Une thérapie toute en douceur Dr Bruyninx. Gérald peut intervenir auprès de mes patients Psychothérapeute, fondateur de l’Institut Milton Erickson avant ou après une opération. Si l’opération est nécessaire mais de Belgique, Gérald Brassine s’est spécialisé ces dernièpas urgente et que la personne est dans un état dépressif, je res années dans la prévention et le traitement des abus lui conseillerais d’être d’abord prise en charge par Gérald. Le sexuels. C’est dans ce cadre qu’il a dévetravail que la personne effectuera avec lui favoloppé des outils spécifiques aux traiterisera le bon déroulement de l’opération (qui Permettre au patient ments des traumatismes, des techniques reste elle aussi un traumatisme), améliorera la de « reprendre thérapeutiques regroupées sous le nom cicatrisation et la guérison. Lorsque j’ai affaire le pouvoir » sur sa vie de Psychothérapie du Trauma Ré-assoà un patient qui, par exemple, a déjà subi et sur son corps, ciative (PTR). plusieurs opérations à l’anus sans amélioration et de favoriser ainsi de son état et que cette personne a été abusée le processus « Il s’agit d’une thérapie toute en douceur sexuellement dans son enfance (cela concerne d’auto-guérison. spécialement adaptée aux psycho-traumas 20% de la population mondiale !), le travail et aux maladies psychosomatiques, explique effectué avec Gérald évitera certainement à Gérald Brassine. En établissant une conversacette personne d’être à nouveau opérée. » tion avec le patient et en lui demandant de se souvenir d’une expérience agréable vécue (un bon souvenir de grossesse, de Praticable auprès de tous les patients souffrant de malavacances, d’activités sportives ou culturelles…), je l’amène vers dies ou de douleurs psychosomatiques quels que soient un état modifié de conscience (qui s’apparente un peu à ce leur âge, leur milieu social ou leur culture, la Psychothéqu’on ressent quand on dit être « dans la lune »). Grâce à cet rapie du Trauma Ré-associative ne remplace évidemment état de plénitude lié à une expérience agréable, nous allons pas la médecine traditionnelle, elle la complète efficacepouvoir ensemble « désensibiliser » le souvenir violent et mettre ment en permettant au patient d’être à nouveau acteur la douleur à distance. Il faut savoir, qu’à la base, le traumatisme de sa santé. induit un état modifié de conscience qui est négatif. En utilisant un état modifié de conscience positif (souvenir agréable), la (*) Gérald Brassine est l’auteur d’un livre intitulé « Prévenir, détecter et gérer les abus sexuels subis par les enfants » Editions Dangles PTR permet de « désactiver » le traumatisme de manière Faire ce lien, permet alors au patient de « reprendre le pouvoir » sur sa vie et sur son corps, et de favoriser ainsi le processus d’auto-guérison. Solidaris n°3 • 2010 19