le journal du réseau cancer de l`université libre de bruxelles le

N°14 TRIMESTRIEL – OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2009
BELGIQUE/BELGIË
PP/PB
B-714
Bureau de dépôt Bruxelles X Brussel
Éditeur responsable: Harry Bleiberg, 1 rue Héger-Bordet, 1000 Bruxelles – N° d’agréation: P501016 – Autorisation de fermeture B-714 – Ne paraît pas en juillet-août
LE JOURNALDURÉSEAU CANCER DE
L’UNIVERSITÉ LIBRE DE BRUXELLES
LE JOURNAL DU RÉSEAU CANCER DE
L’UNIVERSITÉ LIBRE DE BRUXELLES
En quoi une réforme
du système de santé
peut-elle nous affecter? p. 2
DOSSIER NEUROCHIRURGIE:
Éditeur invité:
Cristo Chaskis pp. 6-13
Le rôle de la chimiothérapie
et des nouvelles drogues
ciblées dans le traitement
des gliomes p. 9
Recherche fondamentale:
les fondements
de la cancérisation p. 14
L’accès précoce aux
nouveaux médicaments p. 22
En quoi une réforme
du système de santé
peut-elle nous affecter? p. 2
DOSSIER NEUROCHIRURGIE:
Éditeur invité:
Cristo Chaskis pp. 6-13
Le rôle de la chimiothérapie
et des nouvelles drogues
ciblées dans le traitement
des gliomes p. 9
Recherche fondamentale:
les fondements
de la cancérisation p. 14
L’accès précoce aux
nouveaux médicaments p. 22
RÉDACTEURS EN CHEF
Harry BLEIBERG
Ahmad AWADA
RÉDACTEUR EN CHEF ASSOCIÉ
Marianne PAESMANS
RECHERCHE CLINIQUE
Ahmad AWADA
RECHERCHE TRANSLATIONNELLE
Fatima CARDOSO
RECHERCHE FONDAMENTALE
Christos SOTIRIOU
Pierre HEIMANN
HÉMATO-ONCOLOGIE
Willy FERREMANS
Philippe MARTIAT
PSYCHO-ONCOLOGIE
Nicole DELVAUX
Darius RAZAVI
SPÉCIALISTES EN ONCOLOGIE
Vincent NINANE
Jean-Luc VAN LAETHEM
BORDET-IRIS
Jean-Pierre KAINS
Martine PICCART
WALLONIE
Vincent RICHARD
ERASME
Marie MARCHAND
COMITÉ DE RÉDACTION
Ahmad AWADA
Harry BLEIBERG
Arsène BURNY
Vincent NINANE
Jean-Claude PECTOR
Martine PICCART
Jean-Luc VAN LAETHEM
CONSEILLERS SCIENTIFIQUES
Marc ABRAMOWICZ
Guy ANDRY
Michel AOUN
Jean-Jacques BODY
Dominique BRON
Dominique DE VALERIOLA
Olivier DE WITTE
André EFIRA
Patrick FLAMEN
Thierry GIL
Michel GOLDMAN
André GRIVEGNEE
Alain HENDLISZ
Jean KLASTERSKY
Denis LARSIMONT
Marc LEMORT
Dominique LOSSIGNOL
Thi Hien NGUYEN
Thierry ROUMEGUERE
Eric SARIBAN
Jean-Paul SCULIER
Philippe SIMON
ASSISTANTE DE RÉDACTION
Martine HAZARD – Tél. 02/541 32 01
COMITÉ DE LECTURE
Marianne PAESMANS
Jean-Claude PECTOR
Marielle SAUTOIS
MISE EN PAGE
Lay-in & Lay-out, Bruxelles
Le contenu des articles publs
dans ce journal n’engage
que la responsabilité de leur(s) auteur(s)
www.jcancerulb.be
1
ÉDITORIAL
2
En quoi une réforme du système de santé des USA peut-elle nous affecter?
Harry Bleiberg
DOSSIER NEURO-ONCOLOGIE
3
La Neuro-Oncologie
Jerzy Hildebrand
4Diagnostic des tumeurs cérébrales:
rôle de la neuroradiologie en 2009
Philippe David, Niloufar Sadeghi et Danielle Balériaux
6La chirurgie des tumeurs cérébrales
Cristo Chaskis, Éditeur invité
9Le rôle de la chimiothérapie et des nouvelles drogues ciblées
dans le traitement des gliomes
Bart Neyns
10 Neuro-Oncologie: développements récents en neuropathologie
et biologie moléculaire
Alex Michotte
12 Le rôle de la radiothérapie dans le traitement
des tumeurs intracrâniennes
Daniel Devriendt
RECHERCHE FONDAMENTALE
14
Les fondements de la cancérisation:
quelques implications pour les traitements
Bassam Badran, Arsène Burny et Céline Mascaux
SÉMINAIRE DU PROGRAMME DE SOINS EN ONCOLOGIE MULTISITE
IRIS-BORDET-ERASME (PSOM)
16
Introduction
Jean Klastersky et Marie Marchand
17 Les cancers tyrosines kinases dépendants
Pierre Heimann
20 Cancers héréditaires
Marc Abramowicz
ACCÈS AUX NOUVEAUX MÉDICAMENTS
22 L’accès précoce aux nouveaux médicaments: usage compassionnel
ou programme médical d’urgence
Geneviève Decoster
L’ONCOLOGIE DANS LA SOCIÉTÉ
24 La Fondation contre le Cancer: partenaire des chercheurs,
des malades et du grand public
Didier Vander Steichel
AU-DELÀ DE LA MÉDECINE
27 Sorj Chalandon: «La légende des pères»
Emmanuel Hollander
28 James Ensor ou le Hareng Saur
Pierre Sterckx
Issu de la recherche Amgen,
premier stimulateur de plaquettes approuvé par l’EMEA
NNplate® démontre son e cacité en pré- et post-splénectomie,
sans immunosuppression 1,2
NPlus de 4 patients sur 5 répondent et Nplate® maintient la
réponse à long terme 1,3
Nouvellemarche
dans le traitement chez ladulte de la
thrombocytopénie immune chronique (PTI)
1. Kuter et al. Lancet 2008;371:395-403 2. Résumé des caracristiques du produit Nplate® 3. Bussel et al. Blood 2009;113:2161-2171 Editeur responsable : A. Hubert/AMGEN/2009/2417
Dénomination du médicament : Nplate 250 microgrammes poudre pour solution injectable, Nplate 500 microgrammes poudre pour solution injectable.
Composition qualitative et quantitative : Chaque fl acon contient 250 µg de romiplostim. Après reconstitution, un volume injectable de 0,5 ml de solution
contient 250 µg de romiplostim (500 µg/ml). Chaque fl acon contient un sur-remplissage permettant la délivrance de 250 µg de romiplostim. Chaque fl acon
contient 500 µg de romiplostim. Après reconstitution, un volume injectable de 1 ml de solution contient 500 µg de romiplostim (500 µg/ml). Chaque fl acon
contient un sur-remplissage permettant la délivrance de 500 µg de romiplostim. Le romiplostim est produit par la technique de l’ADN recombinant dans des
cellules d’Escherichia coli (E. coli). Indications thérapeutiques : Nplate est indiqué chez l’adulte splénectomisé présentant un purpura thrombopénique
auto-immun (PTI) (idiopathique) chronique, réfractaire aux autres traitements (par exemple corticoïdes, immunoglobulines). Nplate peut être envisagé
comme traitement de seconde intention chez l’adulte non splénectomisé quand la chirurgie est contre-indiquée. Posologie et mode d’administration : Le
traitement doit être surveillé par un médecin spécialisé dans le traitement des maladies hématologiques. Nplate doit être administré une fois par semaine en
injection sous-cutanée. Posologie initiale : La posologie initiale de romiplostim est de 1 µg/kg de poids corporel. Calcul de la posologie
:
Posologie initiale ou posologie hebdomadaire suivante
:
Poids* en kg x Dose en
µg
/kg = Posologie individuelle en
µg
Volume à administrer
:
Posologie en µg x
1ml/500 µg
Posologie en µg x
Exemple
:
6O QBUJFOU EF  LH Ë MB QPTPMPHJF JOJUJBMF EF  tHLH EF SPNJQMPTUJN
.
La posologie individuelle
=75 kg x 1 µg/kg = 75 µg.
Le volume correspondant de solution de Nplate à injecter
= 75 µg x 1 ml/500 µg = 0.15 ml
*
Le poids corporel au moment de l’initiation du traitement doit toujours être utilisé pour le calcul de la posologie de romiplostim. Les ajustements de posologie
sont basés uniquement sur l’évolution des taux de plaquettes et sont eff ectués par palier de 1 µg/kg (voir tableau ci-après).
Ajustement de posologie : Le poids corporel du patient mesuré à l’initiation du traitement doit toujours être utilisé pour le calcul de la dose. La dose hebdomadaire
de romiplostim doit être augmentée par palier de 1 µg/kg jusqu’à ce que le patient atteigne un taux de plaquettes ≥ 50 x 10
9
/l. Le taux de plaquettes doit être
évalué toutes les semaines jusqu’à atteindre un taux stable (≥ 50 x 10
9
/l pendant au moins 4 semaines à la même posologie). Ensuite le taux de plaquettes doit
être évalué mensuellement. Ne pas dépasser la posologie maximale hebdomadaire de 10 µg/kg. L’ajustement de posologie se fait de la façon suivante
:
Taux de plaquettes
(x 109/l)
Action
<50
Augmenter la dose hebdomadaire de 1 μg/kg
>200
pendant 2 semaines consécutives
Diminuer la dose hebdomadaire de 1 μg/kg.
>400
Interrompre le traitement, continuer à évaluer le taux de plaquettes de façon hebdomadaire.
Quand le taux de plaquettes redevient < 200 x 10 9/l, reprendre le traitement hebdomadaire avec la
dernière posologie en la diminuant de 1 μg/kg.
Une perte de réponse ou l’échec de maintien d’une réponse plaquettaire avec le romiplostim aux posologies recommandées doit en faire rechercher rapidement
l’origine (voir rubrique 4.4, perte de réponse au romiplostim). Mode d’administration : Après reconstitution, Nplate solution injectable s’administre par voie
sous-cutanée. Le volume à injecter peut être très faible. Une seringue avec des graduations de 0,01 ml doit être utilisée. Arrêt du traitement : Le traitement
par romiplostim doit être interrompu si, après 4 semaines de traitement à la posologie hebdomadaire maximale de 10µg/kg, le taux de plaquettes n’augmente
pas jusqu’à un niveau suffi sant permettant d’éviter des hémorragies cliniquement importantes. Les patients doivent être suivis régulièrement et la poursuite
du traitement doit être envisagée par le médecin pour chaque patient. La réapparition d’une thrombopénie est possible à l’interruption du traitement.
Patients âgés (≥ 65 ans): Aucune diff érence de tolérance ou d’effi cacité n’a été observée entre les patients < 65 ans et les patients ≥ 65 ans. Ainsi, aucun
ajustement de posologie nest nécessaire chez le patient âgé. Il est toutefois recommandé une surveillance particulière de ces patients en raison du faible
nombre d’inclusions dans les essais cliniques eff ectués jusqu’à présent. Enfants et adolescents (< 18 ans): En l’absence de données suffi santes sur l’effi cacité et
la tolérance, l’utilisation de Nplate nest pas recommandée chez les enfants de moins de 18 ans. Aucune recommandation de posologie dans cette population
ne peut être fournie. Insuffi sance hépatique et rénale : Aucune étude clinique spécifi que n’a été réalisée dans ces populations. Nplate doit être utilisé avec
précaution chez ces patients. Contre-indications: Hypersensibilité connue à la substance active, à l’un des excipients ou aux protéines dérivées d’E. coli.
Eff ets indésirables: Après analyse des données de tous les patients adultes traités pour PTI et ayant reçu du romiplostim dans 4 essais contrôlés et 5 essais
non contrôlés, l’incidence globale des eff ets indésirables chez les patients traités par romiplostim était de 91,5 % (248/271). La durée moyenne de traitement
de cette population de patients était de 50 semaines. Les eff ets indésirables listés dans le tableau ci-dessous sont ceux qui ont été considérés comme reliés
au traitement par les investigateurs et survenant avec une incidence > 1 % (n = 271). Les fréquences sont défi nies comme suit : Très fréquent (≥ 1/10) et
Fréquent (≥ 1/100 et < 1/10). Dans chaque classe de systèmes d’organes MedDRA et chaque groupe de fréquence, les eff ets indésirables sont présentés par
ordre d’incidence décroissant.
.
Classifi cation MedDRA par classe de systèmes d’organes
Très fréquent
Fréquent
Aff ections hématologiques et du système lymphatique
Anomalies de la moelle osseuse* / Thrombopénie*
Aff ections psychiatriques
Insomnie
Aff ections du système nerveux
Céphalées
Vertiges / Paresthésies / Migraine
Aff ections vasculaires
Bouff ées vasomotrices
Aff ections respiratoires, thoraciques et médiastinales
Embolie pulmonaire*
Aff ections gastro-intestinales
Nausées / Diarrhée / Douleur abdominale / Dyspepsie / Constipation
Aff ections de la peau et du tissu sous-cutané
Prurit / Ecchymoses / Rash
Aff ections musculo-squelettiques et du tissu conjonctif
Arthralgies / Myalgies / Douleurs des extrémités / Spasmes musculaires
Douleur du dos / Douleurs osseuses
Troubles généraux et anomalies au site d’administration
Fatigue / Contusion au site d’injection / Douleur au site d’injection / Œdème
périphérique / Syndrome pseudo-grippal / Douleur / Asthénie / Pyrexie / Frissons
/Hématome au site d’injection / Gonfl ement au site d’injection
Lésions, intoxications et complications liées aux procédures
Contusion
Les évènements listés ci-dessous ont été considérés comme reliés au traitement par romiplostim. Thrombocytose : Après analyse des données de tous les patients
adultes traités pour PTI par romiplostim dans 4 essais contrôlés et 5 essais non contrôlés, 3 cas de thrombocytose ont été rapportés, n = 271. Aucune conséquence
clinique associée à cette élévation du taux de plaquettes n’a été rapportée chez aucun des 3 patients. Thrombopénie après arrêt du traitement : Après analyse
des données de tous les patients adultes traités pour PTI par romiplostim dans 4 essais contrôlés et 5 essais non contrôlés, 4 cas de thrombopénie après arrêt du
traitement ont été rapportés, n = 271. Augmentation de la réticuline dans la moelle osseuse : Dans les études cliniques, le romiplostim a été interrompu chez
4patients sur 271 en raison de dépôts de réticuline dans la moelle osseuse. La réticuline a été observée sur biopsie de moelle osseuse chez six autres patients.
Immunogénicité : Dans les études cliniques, les anticorps anti-romiplostim ont été étudiés. Parmi les 271 patients adultes traités pour PTI par romiplostim dans
le programme de développement dans le PTI, un patient a développé des anticorps neutralisants l’activité du romiplostim mais ces anticorps n’ont pas eu de
réaction croisée avec la TPO endogène. Environ quatre mois plus tard, la recherche des anticorps neutralisants romiplostim était négative chez ce patient. Comme
avec toutes les protéines thérapeutiques, il existe un risque potentiel d’immunogénicité. Si vous soupçonnez la formation d’anticorps neutralisants, contactez
Amgen pour que les tests immunologiques puissent être réalisés.
Titulaire de l’autorisation de mise sur le marché: Amgen Europe B.V. Minervum 7061NL-4817 ZK. Numéro d’autorisation de mise sur le marché :
EU/1/08/497/001-02. Date de première autorisation: 4/02/09. Date de mise à jour du texte: 6 mars 2009. Classifi cation du médicament en
matière de délivrance: Médicament soumis à prescription médicale restreinte. Information complète disponible chez: Amgen s.a., avenue Ariane 5,
1200 Bruxelles, tél : +32(2)775.27.11.
Nplate® 250 µg € 645,76*
Nplate® 500 µg € 1284,41*
N°14 – OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2009
Photo de couverture: Exérèse d’un gliome pré-rolandique droit
sous neuronavigation.
2 3
ÉDITORIAL
De tous les événements qui affectent les États-Unis d’Amérique, la réforme des soins de santé est
probablement celle qui touche le moins le citoyen européen. Nous considérons à juste titre que
notre système de couverture sociale en Belgique est parmi les plus performants. Pourtant il souffre
d’un coût élevé et d’une qualité qui pourraient à certains niveaux être suboptimals.
En Belgique, la lutte traditionnelle contre la hausse des coûts utilise surtout des mesures de restric-
tions budgétaires: tentatives de limiter l’accès aux médicaments, retarder leur mise à disposition,
réduire le nombre de médecins. N’y a-t-il pas d’autres voies?
La qualité de notre médecine nous paraît excellente. Est-ce fondé? Pas selon les résultats de l’Euro Health
Consumer Index 2009 (EHCI 2009)1, un classement qui tient compte de divers critères: information au
patient, dossier électronique, facilité d’accès aux soins, accès aux nouveaux médicaments, résultats des traitements et inter-
ventions (entre autres la mortalité infantile ou, pour le cancer, le rapport mortalité/incidence). La Belgique se classe 11esur 33.
Plus inquiétant c’est qu’elle se classe 21esur 33 pour les résultats des traitements et interventions (devenir des patients).
En quoi le plan de réforme de la santé aux USA nous concerne-t-il? Ce plan propose une couverture assurance santé aux 47
millions d’Américains qui n’en disposent pas et une stratégie de contrôle des coûts de santé.
C’est l’approche innovante sur la réduction des coûts qui est attractive car elle est liée à un changement de concept fondé sur
la prévention et le contrôle de qualité.
Quels sont les point essentiels de ce plan?
1. Les fournisseurs de soins devront utiliser des programmes de soins prouvés. Ceci donnera aux médecins une meilleure
information, améliorera la qualité des soins et en réduira le coût.
2. L’implémentation de programmes destinés à améliorer la coordination et l’intégration des soins des patients porteurs de
maladies chroniques sera soutenue.
3. Une transparence totale concernant la qualité et les cts sera exigée. Il faudra aussi que les hôpitaux et les fournisseurs de soins
collectent et rapportent publiquement les mesures prises en matière de coût de santé et de qualité, y compris des données
sur la prévention des erreurs médicales, la proportion malades/membres du personnel infirmier, les infections nosocomiales, le
degré de disparité observé entre les hôpitaux, le pourcentage de la couverture assurance qui va vers les coûts administratifs.
4. Un institut indépendant en charge des analyses de coût/efficacité sera mis en place.
5. Des dossiers médicaux électroniques seront utilisés. Ils permettront une meilleure coordination des soins, une mesure de la
qualité et la réduction des erreurs médicales.
Pouvons-nous appliquer ces exigences à notre sysme de santé? La médecine d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec le modèle
qui, en 1945, a conduit à son organisation. La couverture sociale reste remarquable. Le concept de liberté diagnostique et thérapeu-
tique tel quil existait a vécu. Aujourd’hui, les traitements sont fondés sur les résultats des études cliniques et chaque médecin devrait
administrer le traitement reconnu actif en appliquant les principes de la médecine basée sur les faits. C’est particulièrement vrai en
canrologie. On sait que lon peut réduire lincidence de certains cancers par des actions appropriées. Aux USA, déjà, linterdiction
du tabac et le dépistage systématique du cancer du côlon ont permis de réduire d’une manière significative l’incidence de ces
maladies et ont entraîné une réduction de leur mortali2. Des résultats similaires pourraient être obtenus chez nous. L’application
de normes de qualité entraînerait une réduction significative des cts à moyen mais aussi à court terme, dès la première année qui
suivrait la mise en place de mesures adéquates. Un exemple concret de chez nous, une chirurgie optimale dans le cancer du rectum
permet de réduire le taux de récidive (et la mortali) de 35% à moins de 5%. Néanmoins, ce type de chirurgie n’est toujours pas
obligatoire en Belgique. Tous ces efforts de dépistage et de qualité des soins des stades opérables conduiraient par ailleurs à
une réduction du nombre de patients métastatiques et réduirait le coût exorbitant des soins lourds et des médicaments.
Evident pour les experts, professionnels de la santé! Mais en général ils sont peu consultés.
Les Pays-Bas sont consis par l’EHCI 2009 comme posdant le meilleur système de santé d’Europe, même pour ‘l’outcome’.
Voici leur hypothèse pour expliquer ce résultat: «un des effets immédiat important du sysme de soins aux Pays-Bas viendrait de
ce que les décisions opérationnelles en matre de soins de santé sont prises, à un niveau inhabituellement élevé par des profes-
sionnels du monde médical avec la coparticipation des patients. Les organismes de financement et les amateurs des soins de
santé que sont les politiques et les bureaucrates ont été tenus à l’écart, plus que dans tout autre pays d’Europe. Ceci, en soi,
pourrait être une raison majeure expliquant l’écrasante victoire des Pays-Bas dans l’EHCI 2001. Une hypotse mais probable-
ment pas la seule.
Qu’espérer? Que nos politiques vont prendre conscience de cette façon alternative de contrôler les coûts? En Belgique, la
dispersion de la politique de santé entre les diverses autorités ministérielles ne permet pas de le rêver3. On peut espérer que le
plan Obama–Biden sera mis en place et que les résultats, par leur ampleur, sauteront aux yeux de nos décideurs.
Harry Bleiberg
Rédacteur en chef
Références
1. © Health Consumer Powerhouse AB, 2009.ISBN 978-91-977879-1-8.
2. Ahmedin Jemal, DVM et al.,Cancer Statistics, 2009. CA Cancer J Clin 2009; 59:225-249.
3. D’hoore W et al.,Le système de santé belge: du mouvement mutualiste aux institutions de la sécurité sociale dans un État pluraliste.
Ruptures, revue transdisciplinaire en santé, 2004; 10: 71-85.
En quoi une réforme du système de santé
des USA peut-elle nous affecter?
N°14 – OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2009 N°14 – OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2009
La Neuro-Oncologie
Jerzy Hildebrand, Consultant à l’Institut Jules Bordet et à l’Hôpital Salpêtrière, Paris
L
aneuro-oncologie est une discipline qui traite du diagnos-
tic et du traitement des complications neurologiques de
cancers systémiques et des tumeurs cérébrales primitives.
Les tumeurs cébrales primitives forment un groupe daffections
très hétérogène allant de lésions bénignes de grade 1 aux can-
cers de très haute malignité de grade 4. Leur incidence dans la
population générale est d’environ 10/100 00. Elles représentent
environ 2% de lensemble des cancers, mais elles sont, après
la leucémie, la tumeur la plus fréquente de l’enfant.
Les tumeurs cébrales sont entes depuis longtemps dans la
pratique des neurochirurgiens et neurologues. Par contre, lintérêt
des neurologues pour les complications des cancers systémi-
ques est plus récent. Il fut stimulé par la publication en 1948 par
Denny-Brown de deux cas de neuronopathie sensitive assoce
au cancer bronchique. Dans les anes qui ont suivi, les neuro-
logues britanniques ont développé le concept des neuropathies
paranéoplasiques (NPN) mais ce fut l’école, principalement,
Posner qui identifia les anticorps spécifiques dirigés contre des
antigènes onco-neuraux exprimés par le système nerveux et
certaines tumeurs. Dans le syndrome de Lambert-Eaton (syn-
drome auto-immune acquis, provoqué par des anticorps diris
contre les canaux calciques voltage-pendants de la terminai-
son nerveuse), et probablement aussi dans la variante paranéo-
plasique du syndrome de la personne raide (rigidité musculaire
axiale associée à des spasmes douloureux) ainsi que dans la
tinopathie associée au cancer (diminution progressive des pho-
tocepteurs, bâtonnets et cônes, le plus souvent associés au
cancer bronchique à petites cellules), ces antines causent la
maladie. Dans d’autres NPN comme l’encéphalite limbique, la
générescence cébelleuse ou la neuronopathie sensitive, leur
le pathonique demeure incertain, mais leur valeur diagnos-
tique est évidente car il existe un rapport étroit entre la présenta-
tion clinique de NPN, la nature de l’anticorps et la pathologie
du cancer associé.
Cependant, les NPN constituent moins d’un pour cent des com-
plications neurologiques des cancers. Par contre, les lésions
métastatiques dont les principales localisations sont le paren-
chyme cébral, l’espace spinal épidural, les leptoméninges, les
nerfs crâniens et péripriques, y contribuent pour plus de
60%. Malgré la grande diversité de leur présentation clinique,
les lésions métastatiques partagent plusieurs caractéristiques
communes.
1° Elles sont très fréquentes, présentes dans environ 20% de
malades porteurs d’un cancer généralisé.
2° Leur incidence augmente en raison de la survie plus longue
de malades atteints de certains cancers et du fait que le
système nerveux central soit protégé (SNC) par la barrière
hémato-cérébrale.
Elles affectent souvent gravement la durée et la qualité de vie.
Le diagnostic différentiel peut être difficile avec, notamment,
les complications des traitements anticancéreux, les lésions
vasculaires ou les infections.
5° Le traitement, chirurgical ou radiothérapique, est souvent effi-
cace mais il doit prendre en compte le degré de généralisation
et le contle du cancer systémique. Par exemple, pour ps de
la moitié des malades porteurs de métastases cérébrales, le
décès est dû aux lésions systémiques et, dans ces cas, même
un traitement ts efficace des lésions cérébrales aura peu
d’impact sur la survie. En tout cas le traitement des métas-
tases affectant le SNC doit être administré rapidement, car son
succès est inversément proportionnel à la gravité du déficit
neurologique.
Les complications des traitements anticancéreux se voient aujour-
d’hui chez 10 à 15% des malades atteints de cancer géralisé.
Les complications de la radiothérapie sont classées en fonction
du délai entre leur apparition et la fin du traitement. Elles sur-
viennent principalement au décours du traitement des tumeurs
siégeant au niveau ou dans le voisinage du SNC. Les compli-
cations aiguës sont attribuées à l’oedème et répondent aux
corticosrdes. Les complications dites «early delayed» appa-
raissent dans les 4 mois et sont attribes à la démyélinisation.
Les principales complications tardives: nécrose focale (cérébrale
ou médullaire), leucoencéphalopathie diffuse ou fibrose com-
primant les plexus ou les nerfs cniens ou péripriques sont
irréversibles et sans traitement efficace.
Pratiquement tous les agents cytotoxiques sont neurotoxiques,
mais lencéphalopathie, avec ou sans crises épileptiques, est rare
quand ces médicaments sont administs par voie systémique
et à dose conventionnelle. Par contre, les extrémités des nerfs
périphériques ne sont protégées par aucune barrière et la chi-
miothérapie est la principale cause de polynévrite chez les
malades atteints de cancer.
D’autres chapitres de la neuro-oncologie incluent:
Les accidents vasculaires cébraux, dont les causes peuvent
être spécifiques.
– Les infections du SNC, qui difrent de celles de la population
générale.
Les états confusionnels particulrement fréquents en fin de vie.
Les traitements dits «supportifs» destinés à combattre les com-
plications particulièrement fréquentes chez les cancéreux:
corticostéroïdes, antiépileptiques, analgésiques, antipressifs
ou anticoagulants.
Le lecteur trouvera les détails des divers chapitres qui forment
la neuro-oncologie dans les ouvrages, dont une liste non
exhaustive, suit:
– L-M De Angelis, JB Posner. Neurologic Complication of
Cancer. Second Edition. Oxford University Press, 2009.
J. Hildebrand, M. Brada. Differential Diagnosis in Neuro-onco-
logy, Oxford University Press, 2001.
– J. Bougosslavsky, J-M Léger et J-L Mas (edit). Neuro-Onco-
logie, Traité de Neurologie. (Coordinateur J Hildebrand) Doin
2001.
– J. Baehring, J. Piepmeier (edit) Principles of Neuro-Oncology.
Taylor & Francis Group, 2007.
P. McL Black, J-S Loeffler. Cancer of the Nervous System.
Blackwell Science 1996
D O S S I E R N E U R O - O N C O L O G I E
4
DOSSIER NEURO-ONCOLOGIE
Diagnostic des tumeurs cérébrales:
rôle de la neuroradiologie en 2009
Philippe David, Niloufar Sadeghi et Danielle Balériaux, Clinique de Neuroradiologie,
Hôpital Erasme, [email protected]
Limagerie est utilisée à des fins diagnostiques dès que des
symptômes et signes cliniques font suspecter le diagnostic
de tumeur cérébrale. Le CT scanner et limagerie par résonance
magnétique (IRM) sont les outils utilisés en première intention,
permettant une visualisation directe du parenchyme cérébral.
Limagerie apporte des informations morphologiques précieuses
permettant d’identifier la (ou les) lésion(s) tumorale(s) et de déter-
miner ses rapports avec les structures cérébrales et les compli-
cations éventuelles (engagements cébraux, hydrocéphalie…).
Le CT scanner permet d’identifier avec une grande sensibilité les
calcifications et les lésions hémorragiques aigües et s’avère pré-
cieux en cas d’intervention chirurgicale urgente.
L’IRM offre des images d’une plus haute résolution tissulaire et
sera pratiquée dans tous les cas si l’état clinique du patient le
permet. L’imagerie pondérée T1 (bi et tridimensionnelle) et T2
suivies d’une injection de produit de contraste (chélates de
gadolinium) permettent d’obtenir une information morphologique
précise. Des critères sémiologiques permettent d’orienter le
diagnostic et d’aider le neurochirurgien à planifier le traitement
ou la biopsie.
Toutefois, ces éléments sémiologiques, s’ils sont précieux pour
établir des hypothèses quant à la nature histologique de la
tumeur, souffrent de limitations par manque de scificité dans
de nombreux cas.
De nouveaux progrès technologiques ont permis d’obtenir par
IRM des informations supplémentaires de nature métabolique
(spectroscopie protonique, imagerie de diffusion) et hémodyna-
miques (imagerie de perfusion), permettant d’améliorer l’hypo-
thèse diagnostique et de mieux prédire le grade tumoral et
donc le degré de malignité1.
Le suivi et l’étude de la réponse trapeutique béficient éga-
lement de ces progrès.
De nouvelles avancées technologiques permettent de localiser
des zones fonctionnelles (motrices, sensitives, visuelles, …) et
de déterminer leurs rapports avec la lésion tumorale (IRM
fonctionnelle). Une visualisation de faisceaux d’axones impor-
tants (faisceaux pyramidaux par exemple) est devenue possi-
ble avec l’imagerie par tenseur de diffusion. Ces progrès per-
mettent ainsi aux neurochirurgiens d’être plus audacieux tout
en diminuant la morbidité post-opératoire.
La spectroscopie apporte des informations complémentaires
et non invasives sur le grade de malignité tumorale (Fig 1). Des
rapports de choline sur N-acétyl-aspartate élevés sont ainsi
trouvés dans les gliomes de haut grade2. Les techniques de
spectroscopie multi-voxels rendent compte de l’rogénéité
tumorale et permettent d’identifier des zones de haute mali-
gni tant avant le traitement que dans le cadre de la réponse au
traitement3. La possibilité d’étudier par ce biais l’efficacité de nou-
veaux agents tumoraux est utilisée dans certains protocoles
expérimentaux.
Enfin, le diagnostic différentiel entre récidive tumorale (éléva-
tion de la choline) et radionécrose (pic de lactates) est obtenu
par cette technique.
Limagerie de diffusion permet aisément certains diagnostics de
lésions extra-axiales comme celui de kystes épidermoïdes qui
présentent le même signal en pondération T1 et T2 que les
kystes arachnoïdiens, mais qui se difrencient de ces derniers par
le fait que les coefficients de diffusion apparents sont abaiss4.
Les tumeurs intra-axiales ont des coefficients de diffusion plus
élevés que le parenchyme cérébral sain et des coefficients de
diffusion extrêmement élevés au sein de leurs composantes
nécrotico-kystiques5. Toutefois, certaines tumeurs à cellularité
extrêmement élevée comme les lymphomes (Fig. 2) ont des
coefficients de diffusion diminués.
L’imagerie par tenseur de diffusion permet d’identifier des fais-
ceaux axonaux dans la substance blanche et d’en déterminer
les rapports à la tumeur. Cette technique permet de mieux
orienter la trajectoire d’une biopsie et d’adapter la stratégie
neurochirurgicale6.
L’imagerie de perfusion permet de difrencier les gliomes de haut
grade (en démontrant un volume sanguin cébral élevé au sein
de la tumeur) et peut précéder d’un an la prise de contraste
en cas d’évolution vers un haut grade de malignité7-9.
L’imagerie fonctionnelle permet d’identifier des zones fonc-
tionnelles éloquentes qui apparaissent souvent déplacées par
l’effet de masse tumoral ou voire même déplaes dans d’autres
zones, en raison de la plasticité cérébrale10.
En conclusion, les développements modernes de l’IRM ont per-
mis d’évoluer d’une imagerie strictement morphologique vers
une imagerie plus physiologique et fonctionnelle, permettant
une approche thérapeutique chirurgicale plus audacieuse et
un suivi thérapeutique plus sensible et spécifique.
Glossaire
Pondération T1: Le signal RMN d'un tissu varie donc selon ses caracté-
ristiques T1, T2 et sa densité protonique (Rho) (l’air n'a pas de signal RMN
car la densité protonique y est trop faible). Le T1 correspond au temps
nécessaire pour que l’aimantation longitudinale ait retrouvé 63% de son
amplitude initiale, après avoir été basculée de 90°.
On obtient un contraste d’image pondérée en T1 si on utilise un temps de
répétition court et un temps d’écho court (neutralise les différences de
temps T2), pondération dite «anatomique»: en pondération T1 sur le cer-
veau, la substance blanche apparaît plus claire que la substance grise. Le
liquide céphalo-rachidien, situé entre la substance grise et l’os apparaît,
lui, nettement plus «foncé» (hyposignal).
Pondération T2: On obtient un contraste d’image dite pondérée en T2,
dite aussi pondération «tissulaire» en utilisant un temps de répétition long
et un temps d’écho long. La pondération «T2» est fonction du temps den-
registrement d’un signal difrent entre deux tissus, dû à la différence d’ai-
mantation transversale. Leau et l’œdème apparaissent «claires» (hypersignal).
Produit de contraste: Chélates de gadolinium: aux doses cliniques habi-
tuellement utilisées, les chélates paramagnétiques de gadolinium donnent
principalement un effet T1: la prise de contraste se traduit par un hypersi-
gnal en pondération T1.
Spectroscopie (SRM): La spectroscopie utilise les propriétés de résonance
des atomes placés dans un champ magnétique: elle repose sur l’étude
des signaux de résonance de molécules situées dans les tissus ou les cel-
lules. En spectroscopie protonique (HSRM) le noyau étudié est l’hydrogène
(1H) présent dans les molécules biologiques. Une accumulation succes-
sive de spectres individuels est obtenue; ceux-ci sont en suite moyennés
afin d’améliorer le rapport signal/bruit. Cette méthode permet d'obtenir des
spectres valables avec de faibles quantités dchantillons. Le spectre
contient un certain nombre de signaux correspondant aux différents pro-
tons de la molécule et il convient alors de l'interpréter. Dans un champ
magnétique élevé les protons résonnent à une fréquence spécifique à
chaque molécule. Selon leur environnement, les protons diffèrent et ils
résonneront à cette fréquence spécifique. On exprimera cette différence
(très faible) en ppm du champ Bo.
La HSRM permet ainsi l'étude de la présence et concentration de certains
métabolites (par exemple, choline, créatine,N-acétyl aspartate, lactates,
lipides). Son application demande des IRM de haut-champ (1,5 Tesla mini-
mum et 3 Tesla pour obtenir des pics bien différenciés). Il existe des tech-
niques différentes: la single voxel spectroscopy, qui n’étudie qu’un seul
voxel d’à peu près 1 cm3, la technique multivoxel ou CSI (chemical shift
imaging) qui peut alors être bidimensionnelle si elle utilise plusieurs voxels
(une trentaine) sur une seule coupe ou tridimensionnelle pour couvrir pra-
tiquement toute la tumeur (plus de 100 voxels) sur plusieures coupes.
Imagerie de perfusion: L’imagerie de perfusion permet d’accéder à des
informations hémodynamiques concernant le Volume Sanguin Cérébral
Régional, grâce à l'utilisation de produit de contraste présentant une forte
susceptibilité magnétique, tels que les chélates de Gadolinium. Cette
méthode permet de calculer des volumes sanguins cérébraux, des débits
sanguins régionaux et le temps moyen de transit sanguin cérébral régio-
nal. Ses principales indications sont la pathologie tumorale et la détermi-
nation des territoires ischémiés et leur réversibilité. Le rCBV (Cerebral
Blood Volume) désigne la quantité de sang (en ml) qui passe par unité de
temps pour 100 g de tissu cérébral.
IRM fonctionnelle: L’IRMf permet la localisation des zones cérébrales acti-
es basée sur l'effet BOLD (Blood Oxygen Level Dependant), lié à l’ai-
mantation de l’hémoglobine contenue dans les globules rouges du sang.
Une seconde environ après le début de l’activité neuronale, une réponse
hémodynamique apparaît avec une augmentation très importante du
débit sanguin cérébral régional.
L’augmentation importante des apports en oxygène entraîne une hyper-
oxygénation du sang veineux reflétée par une augmentation de la concen-
tration en oxyhémoglobine et une diminution de la concentration en
oxymoglobine. Or la déoxymoglobine est paramagnétique. En alté-
rant l’homogénéité du champ magnétique intra et périvasculaire, la déoxy-
hémoglobine diminue l’intensité du signal de précession émis (T2*) et
constitue un véritable agent de contraste endogène. Ainsi, en réponse à
une activité neuronale, la diminution de la concentration en déoxyhémo-
globine s’accompagne d’une augmentation de signal qui peut atteindre
jusqu’à quelques pourcents. Pour que ces faibles variations de signal
soient mesurables, il faut réter de nombreuses fois les tâches d’activation
et de repos.
Pour obtenir cette information, on demande au patient dalterner des périodes
d’activité (par exemple bouger les doigts de la main droite) avec des
périodes de repos, tout en acquérant des images de l'intégralité du cer-
veau toutes les 1,5 à 6 secondes (correspondant à la résolution tempo-
relle moyenne classiquement utilisée en recherche). On obtient ainsi une
cartographie des zones cérébrales fonctionnelles du patient.
Imagerie de diffusion: L’IRM de diffusion explore les micro-mouvements
des molécules deau. La diffusion de ces molécules peut être libre (comme
dans le LCR) ou restreinte (par les membranes cellulaires, les macromolé-
cules, les fibres…). Elle peut s’effectuer dans toutes les directions de l’espace
(diffusion isotrope) ou de façon préférentielle dans une direction donnée
(diffusion anisotrope) comme dans les fibres nerveuses. L’acquisition doit
être répétée avec des gradients orientés dans chacune des 3 directions
de l’espace.
La technique d'imagerie du tenseur de diffusion est une extension de
l'IRM de diffusion, qui permet de quantifier ces mouvements à l’échelle
microscopique. Cette technique permet de visualiser la position, l’orientation
et l’anisotropie des faisceaux de matière blanche du cerveau.
En associant une couleur à chacune des 3 directions de l’espace (rouge:
gauche-droite; bleu: cranio-caudale; vert: antéro-postérieure), on peut
créer une cartographie des faisceaux indiquant leurs positions, directions
et anisotropies. Des algorithmes de «fiber tracking» permettent de suivre
le faisceau sur toute sa longueur, par exemple du cortex moteur à la
moelle épinière pour le faisceau cortico-spinal (qui transmet l’information
motrice). La localisation de tumeurs par rapport aux faisceaux de matière
blanche environnants (infiltration, déflection) est ainsi rendue possible.
Références
1. Al-Okaili et al.,Radiology, 2007; 243 (2):539-550.
2. Burtscher IM et al.,Am J Neuroradiol, 2000; 21(1):84-93..
3. Dowling C. et al.,Am J Neuroradiol, 2001; 22:604-612
4. Tsuruda et al.,Am J Neuroradiol, 1990; 11:925-931.
5. Tien R. et al.,Am J Roentenol, 1994; 162:671-67.
6. Arfanakis et al.,Oncol Rep, 2006; 15:1061-1064.
7. Law M. et al.,Am J Neuroradiol 2003, 24 :1989-1998.
8. Spampinato et al.,Am J Roentgenol, 2007; 188:204-212.
9. Danchaivijitr N. et al.,Radiology, 2008; 247:170-178.
10.Sunaert et al.,Clin N Am, 2001;11:221-236.
Philippe David
N°14 – OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2009
Figure1: L’IRM met en évidence la présence de lésions plurifocales
frontales et temporo-occipitales gauches, partiellement intraventri-
culaires, hyposignal en pondération T1 avant injection de Gadolinium,
en coupes axiales (A) et coronales (D), discrètement hypersignal
en pondération T2 (B) et FLAIR (C).
Un discret réhaussement est observé après injection IV de Gadolinium
en coupes axiales pondérées T1 (E) et coronales (F).
Figures 1 et 2: Patient de 43 ans présentant des céphalées et une
hémianopsie droite.
Figure 2: L’imagerie de diffusion Trace (A) montre le caractère hypersignal de ces lésions correspondant à une diminution des coefficients de
diffusion, comme le confirme la cartographie des coefficients de diffusion apparents (B). La cartographie du volume sanguin cérébral (rCBV)
ne met pas en évidence d’augmentation de rCBV des lésions tumorales par rapport à la substance blanche normale contralatérale (C,D).
La courbe de signal d’imagerie de perfusion T2* en fonction du temps démontre une surélévation de la ligne de base (courbe bleue) au sein du
tissu tumoral, par rapport à la courbe obtenue au sein de la substance blanche normale du côté contralatéral (courbe jaune), signant une importante
rupture de la barrière hémato-encéphalique (E). Cette sémiologie plaide en faveur du diagnostic de lymphome, confirmé par biopsie.
N°14 – OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2009
5
6
DOSSIER NEURO-ONCOLOGIE
7
La chirurgie des tumeurs cérébrales
Cristo Chaskis, Service de Neurochirurgie, CHU de Charleroi
L
a Neurochirurgie constitue la pierre angulaire du traitement
des tumeurs cébrales. Sur le plan chirurgical, on distingue
les tumeurs sur base de leur localisation anatomique, intra- ou
extra cérébrale, communément désige comme intra- ou extra-
axiale, et de leurs caractéristiques anatomopathologiques.
Les tumeurs intra-axiales sont repsentées principalement par
les gliomes (astrocytomes et oligodendrogliomes) qui sont les
tumeurs cérébrales primitives les plus fréquentes; les métas-
tases, les épendymomes, les papillomes des plexus chordes,
les PNET et les neurocytomes centraux sont nettement plus
rares. Dans les gliomes, la chirurgie joue un rôle fondamental
dans l’établissement d’un diagnostic anatomopathologique et
biomoléculaire précis par la biopsie des zones les plus sus-
pectes en imagerie par résonance et/ou PET scan, et d’autre
part dans l’exérèse la plus complète possible sans induire toute-
fois de morbidité neurologique supplémentaire. En réduisant
le volume tumoral, la chirurgie vise à réduire ou supprimer les
signes neurologiques associés à l’effet de masse.
En cas de lésion profonde, on se limite à la biopsie stéréotac-
tique guidée par IRM, éventuellement couplée au PET scan.
La neuronavigation permet la planification virtuelle du geste chirur-
gical et le guidage opératoire, en intégrant les paratres neu-
roanatomiques de l’IRM morphologique et les dones de l’IRM
fonctionnelle et/ou du PET scan. L’exérèse chirurgicale influence
de manière significative le pronostic des patients lorsqu’elle per-
met d’enlever plus de 95% de
la tumeur (figure 5).
La radicalité de lexése peut
être amélioe par l’administra-
tion d’acide amino-lévulinique
(5-ALA) qui induit au niveau des
cellules gliales malignes la syn-
thèse et laccumulation de
porphyrines, présentant de la
fluorescence lors de l’utilisation
d’une source lumineuse ultra-
violette.
L’imagerie peropératoire par
sonance magnétique nuclé-
aire peut également améliorer
le geste chirurgical mais ne peut
réduire les risques de morbidi
neurologique dans les zones fonctionnelles. Dans les lésions
situées au sein ou à proximité de zones éloquentes, seul le
recours à la chirurgie éveile avec mapping cortical peropéra-
toire permet de réaliser l’exérèse chirurgicale tout en contrô-
lant l’état neurologique du
patient.
Dans la majorité des cas, l’infiltration tumorale microscopique
persiste sur une profondeur d’environ 2 cm du parenchyme céré-
bral péri-tumoral. Pour contrôler cette source de récidive tumorale,
diverses techniques sont actuellement en cours d’investigation.
La mise en place d’implants lirant progressivement un agent
chimiotrapeutique, la lomustine, n’a pas démontré d’aliora-
tion significative de la survie des patients. Un traitement par tra-
pie génique a démontré des résultats prometteurs en phase II
et fait actuellement l’objet d’une étude en phase III avec utilisation
d’un vecteur adénoviral administré par injection des parois de la
cavité opératoire en fin d’intervention et visant à infecter les cel-
lules tumorales résiduelles, de manière à leur transmettre un gène
(transfection) afin de les rendre sensibles à des substances médi-
camenteuses comme les antiviraux. Les résultats sont actuel-
lement en attente. Un traitement de la récidive locale également
évalué de manière prospective dans une étude de phase II est
la vaccination par cellules dendritiques produites au départ de
globules blancs du patient et mises en contact avec les cel-
lules de sa tumeur cérébrale afin de les sensibiliser.
La place de la chirurgie dans les gliomes récidivants est limi-
tée par le caractère infiltrant et parfois multifocal de la récidive
tumorale, rendant l’exérèse souvent impossible. De plus, la
chirurgie seule s’avère toujours insuffisante vu la haute mali-
gnité des lésions, avec une survie moyenne de 2 mois après
la ré-intervention. L’intervention chirurgicale n’est donc envi-
sageable que dans le cadre de protocoles associant égale-
ment des traitements adjuvants de 2eou 3eligne.
Les tumeurs extra-cérébra-
les ou extra-axiales sont
constituées principalement
par les méningiomes, les
schwannomes, les adénomes
hypophysaires et les métas-
tases. La majorité des ménin-
giomes est localisée au niveau
de la convexité crânienne mais
ceux-ci affectent également
la base du cne, où ils peu-
vent présenter un caractère
infiltrant également dénom
«en plaqu. Le traitement de
ces tumeurs est chirurgical,
visant lexése complète dans la majorité des cas, à l’exception
de certaines lésions infiltrant les parois des sinus veineux ou de
la base du crâne.
Dans les lésions évolutives, le geste chirurgical doit être accom-
pagné dun traitement par radiochirurgie (irradiation focale sté-
otactique en dose unique) ou par radiothérapie focale frac-
tionnée, selon le volume à traiter (figure 9).
Les schwannomes, tumeurs dévelopes au départ des cellules
assurant l’isolation des nerfs crâniens, concernent principale-
ment la branche vestibulaire du nerf acoustique, et plus rare-
ment le nerf trijumeau et les nerfs mixtes. Actuellement, les
lésions de taille inférieure à 3 cm et n’occasionnant pas d’effet
de masse sur le tronc cérébral sont traitées préférentiellement
par radiochirurgie, seules les lésions présentant un volume
tumoral plus important étant abordées chirurgicalement.
>>>
>>>
Figure 1: Tumeur cérébrale
primitive intra-axiale:
Globlastome (OMS grade IV)
Figure 2: Tumeur intra-axiale:
métastases multiples
de mélanome.
Figure 6: Mapping cortical
peroratoire lors d’une
chirurgie éveillée:
dans le cadre d’un
astrocytome OMS grade II
frontal gauche, en avant
de l’aire de Broca.
Figure 7: Image de récidive
tumorale dans un glioblastome
avec infiltration cérébrale diffuse.
N°14 – OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2009 N°14 – OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2009
Figure 4: Principe de la biopsie stéréotactique: IRM en conditions stéréotactiques
et fusion de l’imagerie par IRM et PET scan pour déterminer la zone de biopsie
et les coordonnées de celle-ci; intervention sous anesthésie locale.
Figure 5: Principe du guidage peroratoire
par neuronavigation: dans le cadre d’un astrocytome
anaplasique (OMS III) pariétal gauche attenant à l’aire
de Wernicke.
Figure 8: Images de méningiomes respectivement localisés
à la base avec hyperostose sévère (a), de la convexité pariétale (b),
sphéno-temporal avec invasion du sinus caverneux gauche (c) et
de la faulx avec infiltration du sinus sagittal supérieur (d).
Figure 3: Tumeur extra-axiale:
Méningiome
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