votre colère s'apaise. Mais loin de s'apaiser, leur rage s'enflamme et prend de nouvelles
proportions.
3. « Lors donc que les pontifes et les ministres l'eurent vu ils criaient : Crucifie !
Crucife-le ! Pilate leur dit: Prenez-le, et le « crucifiez, car je ne trouve point de cause en lui.
Les Juifs lui répondirent : Nous avons une loi, et selon la loi il doit mourir, parce qu'il s'est fait
le Fils de Dieu ». Voilà un second motif de haine bien plus grand que le premier. Car c'était
peu de chose à leurs yeux, d'avoir illicitement osé se déclarer roi ; et cependant, dans les deux
cas, Jésus n'a rien usurpé frauduleusement. On ne saurait en douter : il est le Fils unique de
Dieu, et par Dieu il a été établi roi au-dessus de Sion sa montagne sainte; et l'un et l'autre
seraient maintenant démontrés, s'il n'aimait mieux se montrer d'autant plus patient qu'il était plus
puissant.
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4. Quand donc Pilate eut entendu cette parole, il craignit davantage et il entra de
nouveau dans le prétoire et dit à Jésus . « D'où es-tu ? Mais Jésus ne lui donna point de réponse
». Ce silence de Notre-Seigneur Jésus-Christ n'eut pas lieu qu'une seule fois. Si, en effet, nous
comparons les récits de chaque évangéliste, nous verrons qu'il se produisit et chez les princes
des prêtres, et chez Hérode, où, comme le raconte Luc, Pilate l'avait envoyé pour être interrogé,
et chez Pilate lui-même (1). Ainsi se vérifiait la prophétie où il avait été dit de lui : « Comme
l'agneau devant celui qui le tond reste sans voix, ainsi il n'a pas ouvert la bouche (2) ». Elle se
réalisa évidemment quand il ne répondit pas à ceux qui l'interrogeaient. Quoiqu'il ait assez
souvent répondu à certaines questions , cependant, à cause des circonstances où il n'a pas voulu
répondre, il a été comparé à un agneau, afin que son silence le fit reconnaître non comme
coupable, mais comme innocent. Toutes les fois que, dans le cours de son jugement, il a gardé
le silence, c'est en qualité d'agneau qu'il n'a pas ouvert la bouche; en d'autres termes, s'il se
taisait, ce n'était point comme un coupable qui se serait vu convaincre de ses crimes, mais
comme un agneau plein de douceur immolé pour les péchés des autres.
5. « Pilate lui dit donc : Tu ne me parles point? Tu ne sais donc pas que j'ai le pouvoir
de te crucifier et que j'ai le pouvoir de te renvoyer ? Jésus lui répondit : Vous n'auriez sur moi
aucun pouvoir, s'il ne vous avait été donné d'en haut. C'est pourquoi celui qui m'a livré à vous a
un plus grand péché ». Voilà qu'il répond; mais toutes les fois qu'il ne répond pas, il agit non
pas à la manière d'un coupable ou d'un trompeur, mais à la manière d'un agneau, c’est-à-dire
d'un homme simple et innocent qui n'ouvre pas la bouche. Aussi, quand ne répondait pas, il se
taisait comme une brebis; quand il répondait, il enseignait comme un pasteur. Apprenons donc
ce qu'il nous dit, et ce qu'il nous a encore enseigné par l'Apôtre : « Qu'il n'y a point de pouvoir
qui ne vienne de Dieu (3) » ; et que celui qui, par envie, livre au pouvoir un innocent pour le
faire mettre à mort, est plus coupable que le
1. Matth. XXVI, 63; XXVII, 14; Marc, XIV, 61; XV, 5; Luc, XXIII, 7-9; Jean, XIX, 9. — 2. Isa. LIII, 7. — 3. Rom.
XIII, 1.
pouvoir lui-même, s'il le met à mort par crainte d'un pouvoir plus grand. Pilate avait reçu de
Dieu son pouvoir, mais il était toujours sous la puissance de César. C'est pourquoi Notre-
Seigneur lui dit : « Tu n'aurais contre moi aucun pouvoir », c'est-à-dire, si petit que soit celui
que tu possèdes, « si ce pouvoir », quel qu'il soit, « ne t'avait été donné d'en haut ». Mais je sais
ce qu'il est, il n'est pas grand au point de te rendre tout à fait indépendant; « c'est pourquoi celui
qui m'a livré à toi a un plus grand péché ». Celui-là, en effet, m'a livré à ton pouvoir par envie,
et toi, tu n'exerces sur moi ce même pouvoir que par crainte. Sans doute, la crainte ne doit pas
porter un homme à faire mourir son semblable , surtout quand celui-ci est innocent; mais c'est
un plus grand mat de le faire mourir par envie que de le faire mourir par crainte. Aussi le
Maître de vérité ne dit pas: « Celui qui m'a livré à toi » a un péché, comme si, en cela, Pilate
n'en avait pas lui-même; mais il dit : « Il a un plus grand péché », afin de lui faire comprendre