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RÉSUMÉS
Résumé Ce travail s’intéresse aux questions de sécurité et de contrôle social et pose le problème de la
production de l’ordre dans des espaces urbains comme les gares et les centres commerciaux. Quels
acteurs mènent quelles politiques de sécurité envers quels groupes sociaux et pourquoi ? La réponse
s’appuie sur un examen de la littérature théorique et sur une enquête de terrain menée sur quatre sites :
deux gares et deux centres commerciaux à Lyon et à Milan. Les méthodes utilisées sont l’observation
directe, plus de 90 entretiens et l’analyse de documents. Pour expliquer comment des acteurs organisés
produisent de l’ordre, il faut articuler les différents niveaux d’analyse de la sociologie (micro, meso,
macro). La thèse est donc organisée autour de trois problématiques. La première problématique est
celle des acteurs de la production de l’ordre et des enjeux qui animent la définition des politiques de
sécurité qu’ils mettent en œuvre. Dans cette partie, on montre que acteurs et acteurs privés sont animés
par des logiques différentes qui dépendent des enjeux de leurs commanditaires. La police a des enjeux
d’ordre public, qui la conduit à mener des politiques de sécurité bien spécifiques. Les centres
commerciaux et les compagnies ferroviaires ont des enjeux commerciaux, qui les conduisent à mener
des politiques différentes. La situation de concurrence sur le même espace crée des tensions qui sont
résolues différemment en France et en Italie en fonction du contexte institutionnel. La deuxième
problématique est celle des relations de pouvoir qui se jouent au niveau micro sur chaque espace entre
les acteurs de la production de l’ordre et les populations considérées comme potentiellement
menaçantes pour l’ordre. L’enquête de terrain montre que la plupart de ces populations parviennent à
instaurer un rapport de force qui contraint les organisations dans la mise en œuvre des politiques de
sécurité. Les politiques de sécurité réellement mises en oeuvre ne sont donc pas seulement définies par
des organisations, elles sont aussi le produit des interactions quotidiennes au niveau micro entre
acteurs de la production de l’ordre et populations déviantes. La troisième problématique est celle des
groupes-cibles des acteurs de la production de l’ordre. A Lyon et à Milan, dans les deux gares et les
deux centres commerciaux, les populations considérées comme menaçantes sont invariablement les
immigrés en Italie et les enfants des immigrés en France. Ce constat pose un problème
d’interprétation : s’agit-il d’une réponse fonctionnelle à une sur-délinquance ou à la sur-
criminalisation d’un groupe social ? Les données du terrain montrent que la question ne se réduit pas à
une sur-délinquance des immigrés, ni à un effet de structure du marché du travail. Dans les deux pays,
les entretiens révèlent la mise en œuvre de classifications « eux » / « nous » par rapport aux immigrés.
L’incrimination des immigrés n’est donc pas qu’un effet de logiques d’acteurs rationnels. Ce travail
suggère donc de formuler une hypothèse fonctionnaliste de l’incrimination des immigrés : dans des
sociétés européennes en recomposition, assimiler immigration et criminalité permettrait de raffermir la
solidarité du groupe majoritaire.
Summary
This work addresses the issues of security, social control and focuses on the problem of the
production of order in urban spaces such as railway stations and shopping centers. Which actors
follow which security policies towards which social groups and why? The answer is based on
theoretical work and on fieldwork carried out in four sites: two railway stations and two shopping
centers in Lyon and Milan. The methods employed include direct observation, more than 90
interviews and archival research. To explain how order is produced, it is necessary to articulate the
various levels of analysis in sociology (micro, meso, macro). The thesis is therefore organized around
three problems. The first problem is that of the actors of the production of order and the stakes which
animate the definition of the security policies that they implement. Private actors and public actors are
animated by different logics which depend on the stakes of their auspices. The police have stakes of
public order, which lead them to follow specific security policies. Shopping centers and railway
companies have commercial stakes, which lead them to follow different policies. Competition within
the same space creates tensions which are resolved differently in France and Italy according to the
institutional context. The second problem is that of the power relationships one can find at the micro
level on each space between the actors of the production of order and the populations considered as