MACBETH
RÉSUMÉ
Macbeth est un noble écossais. Il vient de combattre glorieusement contre les Norvégiens, au
service de son roi : Duncan, roi d’Ecosse. Sur le chemin, il rencontre des sorcières qui lui font
d’étranges prédictions. Il apprend ainsi qu’il portera le titre de « sire de Cawdor » et même celui
de « roi ». C’est alors que le roi Duncan le remercie en lui attribuant effectivement le titre de
« sire de Cawdor », après avoir fait exécuter le noble qui portait auparavant ce nom et qui l’a
trahi. Plutôt que de se satisfaire de cet honneur, Macbeth rêve son avenir et partage son
ambition avec sa femme. Lady Macbeth l’encourage à tuer le roi Duncan et à s’emparer du
pouvoir. Mais le sang appelle le sang et ce meurtre ne sera en vérité que le premier d’une longue
série...
UN COUPLE DÉMONIAQUE
Le meurtre, dans les cas ordinaires où la sympathie va tout entière à la victime, est un incident
d’une horreur banale et vulgaire – parce que l’intérêt se confond avec l’instinct, naturel mais bas,
qui nous rattache à la vie – instinct de conservation, nécessaire pour survivre, et donc également
partagé (bien qu’à des degrés divers) par toutes les créatures vivantes – instinct qui, en
supprimant toute différence, et en ravalant les plus grands hommes au niveau du « pauvre
insecte qu’on écrase », montre la nature humaine dans son attitude la plus abjecte et la plus
humiliante. Comme le propos du poète s’accommoderait mal d’une pareille attitude, quel parti
doit-il prendre ? Il doit reporter son intérêt sur le meurtrier, c’est à lui que doit aller notre
sympathie (bien entendu je veux dire par sympathie une compréhension intime, non la pitié ou
l’approbation). La lutte intérieure de la victime, le flux et le reflux de sa passion et de sa volonté
sont submergés par une seule envahissante panique : la peur de mourir sur l’instant la frappe
« de sa masse pétrifiante ». Tandis que chez le meurtrier, le meurtrier digne d’un poète, doit
forcément se déchaîner l’orage de la passion – jalousie, ambition, vengeance, haine – qui fait
naître un enfer en lui – et c’est sur cet enfer qu’il faut nous pencher.
Dans
Macbeth
, afin de satisfaire son énorme, sa débordante faculté de création, Shakespeare a
introduit deux meurtriers ; et, comme d’habitude sous sa plume, ils sont remarquablement
différenciés ; mais bien que chez Macbeth le conflit spirituel soit plus marqué que chez sa
femme, la férocité moins en éveil, et que ses sentiments lui viennent surtout d’elle, par
contagion – étant donné qu’ils sont également coupables du meurtre, on doit en fin de compte
leur imputer à tous deux un même esprit criminel. Cela devait être dit en clair, tant pour la chose
en elle-même que pour l’opposer, dans de plus justes proportions, à la nature désarmée dans leur
victime, « le gracieux Duncan » ; et pour exposer de manière adéquate « la profonde damnation
de son rapt », cela devait être dit avec la dernière énergie. Nous devions être amenés à sentir
que la nature humaine, autrement dit la nature divine, d’amour et de merci, répandue dans le
cœur de toutes les créatures, et dont il est bien rare qu’elle fasse complètement défaut à
l’homme – nous devions sentir que cette nature s’était retirée, évanouie, éteinte, et que la nature
démoniaque avait pris sa place. […]
Là (dans
Macbeth
), le reflux du cœur humain et l’entrée en scène de l’esprit infernal devaient
être exprimés de façons tangible. Un autre monde a fait irruption ; les meurtriers sont soustraits
à l’atmosphère des choses humaines, des intentions humaines. Ils sont transfigurés : lady
Macbeth n’appartient plus à son sexe, elle est « désexuée » ; Macbeth a oublié qu’il est né d’une
femme ; ils sont tous deux conformes à l’idée qu’on se fait des démons ; et c’est le monde des