UNIVERSITE DE NANTES FACULTE DE MEDECINE MASTER I SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES UNITE D’ENSEIGNEMENT OPTIONNEL MEMOIRE REALISE dans le cadre du CERTIFICAT d’ANATOMIE, d’IMAGERIE et de MORPHOGENESE 2010-2011 UNIVERSITE DE NANTES Radio-Anatomie de la partie antérieure du cercle artériel du cerveau : variations anatomiques et pathologie anévrysmale Par LE RHUN Marianne LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES Président du jury : Pr. R. ROBERT Vice-Président : Pr. J.M. ROGEZ Enseignants : • • • • • • • • • • • • • • • • Laboratoire : Pr. O. ARMSTRONG Pr. O. BARON Pr. G. BERRUT Pr. C. BEAUVILLAIN Pr. D. CROCHET Pr. H. DESAL Pr. B. DUPAS Dr E. FRAMPAS Dr A. HAMEL Dr O. HAMEL Pr. Y. HELOURY Pr A. KERSAINT-GILLY Pr. J. LE BORGNE Dr M.D. LECLAIR Pr. P.A. LEHUR Pr. O. RODAT S. LAGIER et Y. BLIN - Collaboration Technique UNIVERSITE DE NANTES FACULTE DE MEDECINE MASTER I SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES UNITE D’ENSEIGNEMENT OPTIONNEL MEMOIRE REALISE dans le cadre du CERTIFICAT d’ANATOMIE, d’IMAGERIE et de MORPHOGENESE 2010-2011 UNIVERSITE DE NANTES Radio-Anatomie de la partie antérieure du cercle artériel du cerveau : variations anatomiques et pathologie anévrysmale Par LE RHUN Marianne LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES Président du jury : Pr. R. ROBERT Vice-Président : Pr. J.M. ROGEZ Enseignants : • • • • • • • • • • • • • • • • Laboratoire : Pr. O. ARMSTRONG Pr. O. BARON Pr. G. BERRUT Pr. C. BEAUVILLAIN Pr. D. CROCHET Pr. H. DESAL Pr. B. DUPAS Dr E. FRAMPAS Dr A. HAMEL Dr O. HAMEL Pr. Y. HELOURY Pr A. KERSAINT-GILLY Pr. J. LE BORGNE Dr M.D. LECLAIR Pr. P.A. LEHUR Pr. O. RODAT S. LAGIER et Y. BLIN - Collaboration Technique Remerciements Au Pr Olivier Hamel pour m’avoir proposé ce sujet passionnant, pour ses conseils, ses encouragements et sa disponibilité. Au Pr Hubert Desal pour le temps qu’il m’a généreusement accordé, pour l’intérêt qu’il porte à mon sujet, pour les magnifiques images qu’il m’a fait découvrir, pour son aide… tout simplement pour le passionné qu’il est. Au Pr Roger Robert pour m’avoir fait découvrir et aimer la Neuro-Anatomie et pour m’avoir donné la chance de faire ce Master d’Anatomie. Au Dr Jean-Michel N’Guyen pour son aide précieuse en statistique. A Messieurs Stéphane Lagier et Yvan Blin pour leur aide et leur humour qui m’ont été indispensables lors de mes dissections. A l’ensemble de nos Professeurs d’Anatomie pour la qualité de l’enseignement qu’ils nous ont offert et pour nous avoir transmis avec passion et dévouement le goût pour cette formidable matière. A toute l’équipe du Service de Neuro-Radiologie Diagnostique et Interventionnelle de l’Hôpital G. et R. Laënnec du CHU de Nantes pour m’avoir accueillie et m’avoir aidée dans mes analyses. A François pour ses encouragements et ses indispensables conseils tout au long de ces années. A tous mes camarades de Master qui ont partagé ces heures d’analyse d’imagerie et de dissections. Ces moments resteront inoubliables. A mes proches pour leur présence, leur soutien, leur aide… à chaque instant. Table des matières Introduction 1. Rappels anatomiques 1.1. 1.2. Embryologie Anatomie modale 1.2.1. 1.2.2. Artère Cérébrale Antérieure Artère Communicante antérieure 2. Matériel et méthodes 2.1. 2.2. 2.3. 2.4. Patients Angioscanner Multi-Détecteurs Analyse des données Analyse statistique 3. Résultats 3.1. 3.2. Patients Variations anatomiques 4. Discussion Conclusion Références bibliographiques Liste des abréviations Introduction Le cercle artériel de la base du cerveau (CAC) est un système d’anastomose entre les circulations carotidienne et vertébrale. Il constitue un moyen de suppléance majeur en cas d’interruption du flux artériel. Un CAC complet et normal n’est présent que dans 50% des cas. De nombreuses variations anatomiques prédominant sur la partie antérieure du CAC ont été décrites (1). Une connaissance de l’embryologie permet de mieux comprendre l’origine de ces variations. Certains auteurs ont suggéré une forte association entre les variations anatomiques et le développement d’anévrysmes intra-crâniens (AIC) (2,3). Un AIC est une hernie de la paroi d’une artère cérébrale dont la complication presque exclusive est la rupture, responsable de la plupart des hémorragies sub-arachnoïdiennes (HSA). La partie antérieure du CAC et notamment l’artère communicante antérieure (ACoA) est le site le plus fréquent (25-40%) des AIC (1,2). L’angiographie rotationnelle 3D (AR3D) est la technique de référence pour l’analyse de la vascularisation cérébrale. L’angioscanner multi-détecteurs (AMD) est cependant devenu l’examen de première intention en cas de suspicion d’HSA en raison de sa simplicité de réalisation et de son innocuité (4). Il permet non seulement la détection des AIC mais également la discussion de la méthode thérapeutique la plus adaptée. Le but de notre travail a été de rechercher une association entre les variations anatomiques de la partie antérieure du CAC et le risque anévrysmal. Dans un premier temps nous rappellerons les principales bases anatomiques de la partie antérieure du CAC. Nous étudierons ensuite, grâce à l’analyse de nombreux AMD, la prévalence et le type de variations anatomiques observées en cas d’anévrysme de la partie antérieure du CAC et d’AIC d’autre localisation. Enfin, nous confronterons nos résultats à ceux des études menées précédemment. 1. Rappels anatomiques 1.1. Embryologie La connaissance des principes de base de l’embryologie des artères cérébrales permet de comprendre la genèse de la plupart des variations anatomiques de la partie antérieure du CAC. L’embryogénèse des artères cérébrales débute à la 5eme semaine de gestation. A partir des artères primitives intra-craniales, plusieurs branches se développent et forment des anastomoses. Certains segments régressent. A cette période, 4 artères principales sont présentes : les 2 artères carotides internes (ACI) et les 2 artères neurales longitudinales (ANL). Les ACI, issues du 3e arc aortique, sont à l’origine de la partie antérieure du CAC tandis que les ANL forment le système vertébro-basilaire (5,6). Chez le fœtus, le CAC est composé de 3 « artères cérébrales antérieures » (ACA) - les 2 ACA et l’artère médiane du corps calleux (AMCC) - et d’un plexus communicant antérieur (PCoA) reliant ces 3 artères entre elles (Figure 1). L’AMCC et le PCoA doivent normalement régresser. Le CAC est définitivement constitué à la 8e semaine (6). Ventrale Droite Figure 1: Schéma de la partie antérieure du CAC chez le fœtus - vue supérieure La persistance ou la régression anormale de certaines structures vasculaires sont à l’origine de nombreuses variations anatomiques. A titre d’exemples, la persistance de l’AMCC est à l’origine d’une trifurcation de l’ACA, la régression incomplète du PCoA aboutit à une ACoA multiple, la régression d’une ACA entraine une agénésie ou une hypoplasie du premier segment de l’ACA (A1) (6). 1.2. Anatomie modale 1.2.1. Artère Cérébrale Antérieure (ACA) L’ACA est la plus petite des deux branches terminales de l’ACI. A son origine, son diamètre est de 2 à 3 mm. Elle naît de la face ventrale de l’ACI, au niveau de la terminaison médiale de la fissure latérale, à la face latérale du chiasma optique, sous la substance perforée antérieure. Elle s’unit à son homologue controlatérale par l’ACoA. Pendant tout son trajet elle chemine dans l’espace sous-arachnoïdien. Son trajet est généralement divisé en 5 segments : - Le segment A1 (pré-communicant) entre la bifurcation carotidienne et l’ACoA. L’ACA est oblique vers le haut, l’avant et le dedans. Elle passe au-dessus du nerf optique puis sous la bandelette olfactive pour s’engager dans la fissure longitudinale. Sa longueur varie de 7,2 à 18,0 mm (moy : 12,7 mm) (3). - Le segment A2 (sous-calleux) après la naissance de l’ACoA, du rostrum au genou du corps calleux, en se dirigeant vers le haut et l’avant. - Le segment A3 (pré-calleux) contournant le genou du corps calleux. - Les segments A4 et A5 (péricalleux) cheminant d’avant en arrière par un trajet horizontal dans le sillon du corps calleux, entre le corps calleux et le gyrus cingulaire jusqu’à l’origine du splénium. Dans leur trajet horizontal à la base du cerveau, les ACA donnent des branches perforantes pour la vascularisation de structures médiales profondes. Ce sont des branches terminales donc aucune suppléance n’est possible dans ces territoires. Dans leur trajet périphérique, elles donnent des branches corticales pour la vascularisation des structures superficielles. Ces branches sont anastomotiques avec celles des autres artères cérébrales. Ses branches sont profondes et superficielles (Figure 2) : - Les branches profondes comprennent : o Les artères centrales antéro-médiales. o L’artère striée médiale (ou artère récurrente de Heubner) naissant dans l’espace perforé antérieur, prés de l’origine de l’ACoA. - Les branches superficielles comprennent : o L’artère fronto-basale médiale. o L’artère polaire frontale (ou pré-frontale). o L’artère calloso-marginale, la plus volumineuse, cheminant dans le sillon du cingulum. Son artère terminale est l’artère péricalleuse. Elle prolonge le trajet de l’ACA entre le corps calleux et le gyrus cingulaire. Elle donne de nombreuses branches pour ces deux structures. Elle rejoint l’artère péri-calleuse dorsale, branche de l’artère cérébrale postérieure. Craniale Dorsale 5 6 4 3 1 2 Figure 2 : Vue médiale des branches de division de l'ACA sur une coupe sagittale du cerveau (d’après Netter (7)) 1. Artère striée médiale 2. Artère communicante antérieure 3. Artère fronto-basale médiale 4. Artère polaire frontale 5. Artère calloso-marginale 6. Artère péricalleuse Le territoire de distribution de l’ACA est profond et superficiel : - Son territoire profond comprend (Figure 3) : o La partie antérieure et les parties latérales du 3eme Ventricule o Le septum pellucidum o La partie antérieure de l’hypothalamus o L’hypophyse o Le chiasma optique o La tête du noyau caudé o La partie antérieure du noyau lenticulaire (+/-) o La partie antérieure de la capsule interne (+/-) Ventrale Gauche Figure 3 : Schéma en coupe transversale de la vascularisation artérielle des territoires cérébraux profonds – vue inférieure - Son territoire superficiel comprend (Figure 4) : o La face interne de l’hémisphère cérébral jusqu’à la scissure perpendiculaire interne : Le lobe frontal : face orbitaire (gyrus droit et nerf olfactif), gyri frontal supérieur et pré-central (frontal ascendant) Le lobe pariétal : gyrus post-central et le pré-cunéus. Le gyrus cingulaire. Le corps calleux excepté son splénium. o Le bord supérieur de la face externe des lobes frontal et pariétal. Craniale Dorsale vue latérale vue médiale Figure 4 : Schéma de la vascularisation artérielle des territoires cérébraux superficiels L’atteinte de l’ACA pourra donc entraîner des troubles moteurs (hémiplégie controlatérale à prédominance crurale), comportementaux (gyrus pré-frontal), mnésiques (gyrus cingulaire) ou de la discrimination. 1.2.2. Artère communicante antérieure (ACoA) L’ACoA est une artère impaire reliant les deux ACA au-dessus et en avant du chiasma optique. Elle délimite ainsi les segments A1 et A2 des ACA. Sa direction est fonction de l’orientation des ACA. Elle est classiquement horizontale mais peut également être oblique. Sa longueur habituelle est de 3 mm mais elle peut varier (0,3-7,0 mm). Son diamètre est d’environ 1 mm (3). Elle donne seulement des artères centrales antéro-médiales de même distribution que celle des ACA. La partie antérieure du CAC est constituée en avant par l’ACoA et antéro-latéralement par les deux segments A1. Une partie antérieure du CAC modale est composée d’une ACoA unique reliant deux segments A1 de même calibre. Les deux segments A1 et l’ACoA doivent être de taille suffisante pour permettre une circulation normale entre les deux ACI (3). Une représentation de l’anatomie modale de la partie antérieure du CAC a été mise en évidence lors des dissections (Figures 5 et 6). Ventrale Gauche Segment A2 droit ACoA Segment A1 droit ACI gauche Figure 5 : Vue inférieure de la partie antérieure du CAC in situ Ventrale Gauche Segment A2 droit ACoA Segment A1 droit ACI gauche Figure 6 : Vue inférieure de la partie antérieure du CAC après résection des hémisphères cérébraux 2. Matériel et méthodes 2.1. Patients Notre étude incluait : - Les patients adressés de Janvier 2009 à Décembre 2010 dans le Service de NeuroRadiologie Diagnostique et Interventionnelle (HGRL) du CHU de Nantes pour embolisation d’anévrysme de la partie antérieure du CAC. Ces patients formaient le groupe « Malades ». - Les patients adressés durant la même période pour embolisation d’anévrysme cérébral d’une autre localisation. Ils formaient le groupe « Témoins ». Tous ces patients ont eu un angioscanner multi-détecteurs (AMD) avant embolisation. 2.2. AMD L’acquisition des images natives a été faite au temps artériel par AMD. Le scanner utilisé a été : - Soit un scanner 64 détecteurs (Light Speed VCT, General Electric Medical Systems, Milwaukee, WI, USA), en utilisant les paramètres d’examen suivants : o Puissance des rayons : 100-120 kV et 3-11 mAs o Epaisseur de coupe : 0,6 mm - Plus rarement, un scanner 16 détecteurs (Sensation 16, Siemens), dans des conditions d’urgence (Hôtel Dieu), en utilisant les paramètres d’examen suivants : o Puissance des rayons : 120 kV et 220 mAs o Epaisseur de coupe : 1 mm Le volume d’acquisition s’étendait de la deuxième vertèbre cervicale au vertex. Pour le rehaussement artériel, 60 à 100 ml de produit de contraste iodé étaient injectés par voie intraveineuse à un débit de 4 ml/s, suivi d’un bolus de solution saline. L’acquisition des images pouvait se faire de façon manuelle (déclenchement de l’acquisition 12-15 sec après l’injection) ou de manière automatisée. Un curseur (traqueur ROI) était alors positionné au niveau de la région d’intérêt (Aorte ou Carotide). Lorsque le produit de contraste arrivait au niveau du curseur, l’acquisition des images débutait automatiquement, permettant ainsi une synchronisation optimale entre injection et acquisition. Les images étaient ensuite transférées sur une station de travail GE Advantage Workstation 4.3 (General Electric Healthcare, Milwaukee, WI, USA) pour analyse post-traitement. 2.3. Analyse des données L’analyse a été limitée à la partie antérieure du CAC (ACA et ACoA). Pour chaque patient nous avons noté : - le nom - le sexe - l’âge - la présence et la localisation des anévrysmes du CAC - la présence et la localisation des variations anatomiques de la partie antérieure du CAC. L’interprétation de l’AMD était basée sur une analyse post-traitement des données. Cette analyse débutait par la visualisation de coupes axiales, sagittales et coronales. Une reconstruction tridimensionnelle (VOI) de la zone d’intérêt était ensuite réalisée en éliminant les structures osseuses afin de mieux localiser les artères étudiées. Les différentes étapes de l’analyse post-traitement sont représentées dans les Figures 7 à 10. Craniale Dorsale Segment A1 droit Figure 7 : Scanner cérébral avec injection - Coupe sagittale (Visualisation d’un anévrysme de la partie antérieure du CAC) Craniale Gauche Figure 8 : Reconstruction tridimensionnelle du crâne – vue antérieure Ventrale Droite Anévrysme de l’ACoA Figure 9 : Analyse tridimensionnelle de la zone d’intérêt - vue supérieure Craniale Droite Anévrysme de l’ACoA Figure 10 : Analyse tridimensionnelle de la zone d’intérêt après élimination des structures adjacentes - vue postérieure Les variations anatomiques recherchées étaient (Figure11) : - Une dominance de l’un des segments A1 - Une trifurcation des ACA - Une ACA azygos - Une fenestration - Une ACoA multiple - Une absence de visualisation de l’ACoA - Une division précoce du segment A2 - Un trajet infra-optique du segment A1 Ventrale Droite Anatomie Modale Dominance Trifurcation ACA Azygos Fenestration de A1 ACoA double Absence d'ACoA Division précoce de A2 A1 infra-optique (d’après Lasjaunias et al. (5)) Figure 11 : Schémas de la partie antérieure du CAC : anatomie modale et variations recherchées - vue supérieure Les définitions et les images obtenues par AMD des variations observées sont présentées dans les figures 12 à 18. Ventrale Droite Segment A1 hypoplasique Figure 12 : Dominance (hypoplasie du segment A1 gauche) - vue supérieure Une dominance est une asymétrie de calibre entre les segments A1, correspondant : o Soit à une agénésie : absence complète d’un segment artériel. o Soit à une hypoplasie : réduction du diamètre vasculaire. Ventrale Droite Trifurcation des ACA Figure 13 : Trifurcation des ACA - vue supérieure Une trifurcation correspond à la présence d’une troisième artère vascularisant le territoire cérébral antérieur et en particulier le territoire péricalleux, généralement de façon bilatérale. Craniale Gauche ACA Azygos Figure 14 : ACA Azygos - vue antérieure Une ACA azygos est un tronc vasculaire unique et médian vascularisant les territoires cérébraux antérieurs droit et gauche. Craniale Droite Fenestration Figure 15 : Fenestration du segment A1 gauche - vue postérieure Une fenestration est une division de la lumière artérielle en deux chenaux séparés, chacun possédant son endothélium et sa musculeuse propre, alors que l’adventice est commune. Ventrale Droite Double ACoA Figure 16 : Double ACoA - vue supérieure Une ACoA multiple peut être de différentes formes : double, plexulaire, en forme de V, de X ou de Y… Ventrale Droite ACoA non visible Division précoce de A2 Figure 17 : ACoA non visible et division précoce du segment droit de A2 - vue supérieure L’absence de visualisation de l’ACoA correspond dans notre étude à une agénésie, à une hypoplasie ou à une simple insuffisance de performance scannographique. Une division précoce du segment A2 est une division survenant en amont du genou du corps calleux. Craniale Gauche A1 infraoptique Figure 18 : Segment A1 droit infra-optique - vue antérieure Un segment A1 infra-optique est une ACA ayant son premier segment passant sous le nerf optique. 2.4. Analyse statistique Nous avons d’abord comparé la proportion de variations anatomiques de la partie antérieure du CAC chez les patients ayant un anévrysme de la partie antérieure du CAC (groupe « Malades ») avec ceux ayant un AIC d’une autre localisation (groupe « Témoins ») en utilisant un test du Khi2. Nous avons ensuite comparé la proportion de chaque variation anatomique dans ces deux mêmes groupes en utilisant également un test du Khi2. Les tests statistiques ont été considérés significatifs pour une valeur de p 0,05. 3. Résultats 3.1. Patients Quatre vingt douze patients présentant un anévrysme de la partie antérieure du CAC ont été adressés pour embolisation. Seuls 36 patients ont été retenus pour former le groupe « Malades ». Les anévrysmes étaient localisés sur l’ACoA (33 patients) ou sur un segment A1 (3 patients). Les autres ont été exclus en raison d’artéfacts, d’insuffisance de résolution des scanners ou de données manquantes. Quatre vingt dix-neuf patients présentant un anévrysme cérébral d’une autre localisation ont été adressés pour embolisation. Seuls 41 patients ont été retenus pour former le groupe « Témoins ». Les anévrysmes étaient localisés sur une artère cérébrale moyenne (27 patients), sur une artère cérébrale postérieure (10 patients) ou sur une artère cérébelleuse postéroinférieure (4 patients). Les motifs d’exclusion étaient les mêmes que ceux du premier groupe. Dans le groupe « Malades », sur 36 patients, 16 étaient des femmes (44%) et 20 étaient des hommes (56%). L’âge moyen était de 51 ans (27-82 ans). Dans le groupe « Témoins », sur 41 patients, 28 étaient des femmes (68%) et 13 étaient des hommes (32%). L’âge moyen était de 53 ans (22-81 ans). 3.2. Variations anatomiques Une variation anatomique de la partie antérieure du CAC était observée chez 47 des 77 (61%) patients présentant un AIC. Dans le groupe « Malades », 12 (33%) patients présentaient une disposition modale. Les 24 (67%) autres patients présentaient 25 variations : 18 A1 dominantes, 3 trifurcations de l‘ACA, 3 ACA azygos et 1 ACoA multiple. Dans le groupe « Témoins », 18 (44%) patients présentaient une disposition modale. Les 23 (56%) autres patients présentaient 30 variations (unique chez 16 patients, double chez 7 patients) : 8 trifurcations de l’ACA, 7 A1 dominantes, 5 fenestrations, 4 ACoA non visibles, 3 ACA azygos, 2 divisions précoces de A2 et 1 ACoA multiple. Le tableau 1 indique la prévalence des différentes variations dans les 2 groupes étudiés. Tableau 1 : Prévalence des variations anatomiques dans les deux groupes de patients étudiés. Partie antérieure du CAC Malades Témoins (n=36) (n=41) Anatomie Modale [n ; (%)] 12 (33) 18 (44) 0,344 Dominance 18 (50) 7 (17) 0,003 Trifurcation des ACA 3 (8) 8 (20) 0,2 ACA Azygos 3 (8) 3 (7) NS Fenestration 0 5 (12) NS 1 (3) 1 (2) NS ACoA non visible 0 4 (10) NS Division précoce de A2 0 2 (5) NS Trajet infra-optique de A1 0 0 NS ACoA multiple p NS : non significatif n : nombre de patients % : pourcentage de patients présentant la variation p : significativité du test L’analyse statistique globale a montré qu’une variation était présente chez 24 des 36 « Malades » (67%) et chez 23 des 41 « Témoins » (56%). Il n’y avait pas de différence significative entre les 2 groupes sur l’existence d’une variation (p=0,344). L’analyse statistique par variation a montré qu’une Dominance de l’un des segments A1 était présente chez 18 « Malades » (50%) et chez 7 « Témoins » (17%). La différence était nettement significative (p=0,003 ; Odd ratio : 4.85). Pour chacune des autres variations, aucune différence n’était significative (p 0,05). 4. Discussion Dans notre série, sur 77 patients présentant un AIC, 47 (61%) avaient une variation anatomique de la partie antérieure du CAC. Cette fréquence était élevée dans nos 2 groupes de patients. Il n’y avait pas de différence significative. La prévalence dans la population générale est très mal connue. Il a été rapporté dans la littérature une fréquence variable, souvent élevée, comprise entre 50 et 60% de variations anatomiques sur l’ensemble du CAC. Il est admis que la partie antérieure du CAC est le site prédominant des variations (1). Dans notre étude, une Dominance (hypoplasie ou agénésie) de l’un des segments A1 a été notée chez 18 des 36 (50%) patients présentant un anévrysme de la partie antérieure du CAC. La différence était significative (p=0,003) par rapport aux patients ayant un AIC d’une autre localisation (17%). Nos résultats suggèrent que la présence d’une Dominance multiplie par 5 (OR : 4,85) le risque de développer un anévrysme de la partie antérieure du CAC. Quelques études antérieures avaient déjà mis en évidence une relation entre la Dominance de l’un des segments A1et le développement d’un anévrysme de l’ACoA. Dans l’étude de Tarulli et Fox (2), la prévalence de la Dominance était de 69% en cas d’anévrysme de l’ACoA alors qu’elle n’était que de 11% en cas d’anévrysme d’une autre localisation. De la même façon, Charbel et al. (8) ont trouvé une prévalence de 57% en cas d’anévrysme de l’ACoA contre 14% chez leurs témoins. Lors d’une asymétrie des segments A1, il existe vraisemblablement des anomalies du flux sanguin entre les ACA et l’ACoA. Ces anomalies pourraient être responsables de modification de la pression s’exerçant sur la paroi de l’ACoA, expliquant ainsi le développement plus fréquent d’anévrysme sur cette artère. En revanche, aucune autre variation étudiée n’était associée au développement d’anévrysme de la partie antérieure du CAC. Cette constatation était déjà rapportée dans les études antérieures : de façon globale (9,10,11) et plus particulièrement sur les fenestrations dans deux études (12,13). Nous avons inclus dans cette étude 2 groupes de patients aussi proches que possible. Seule la localisation des anévrysmes permettait de les différencier. De ce fait, l’observation d’une différence de prévalence d’une variation anatomique suggérait son implication probable dans le développement des anévrysmes de la partie antérieure du CAC. Les patients inclus n’étaient évidemment pas représentatifs de la population générale. Les conclusions portées ont donc été limitées à la population anévrysmale. Notre étude comportait un certains nombre de limites. Il s’agit d’une étude rétrospective monocentrique ayant inclus un nombre relativement faible de patients (77) en comparaison aux études antérieures (nombre compris entre 180 et 230) (2,9,12,13). Un nombre important de patients (60%) a été exclus en raison de conditions non-optimales de réalisation des AMD (artéfacts, insuffisance de résolution), ou de données manquantes. La prévalence des variations a peut-être été sous-estimée pour deux raisons essentielles. D’une part, l’AMD est de résolution inférieure à une AR3D. Certaines variations n’ont donc peut-être pas été détectées. D’autre part, l’existence d’un anévrysme notamment de l’ACoA pouvait masquer une variation de cette même artère (fenestration ou ACoA multiple). Malgré ces limites, l’étude aura permis de montrer une association et de suggérer le rôle probablement primordial de la dominance de l’un des segments A1 dans l’apparition des anévrysmes de la partie antérieure du CAC. Des études incluant des effectifs plus importants et représentatifs de la population générale doivent cependant être recommandées afin de valider ces résultats. Il serait important de connaître la prévalence des variations dans la population générale et d’essayer d’identifier des facteurs de prédisposition éventuels au développement des anévrysmes de la partie antérieure du CAC (prédisposition génétique ? malformation fœtale ? exposition toxique maternelle ? prématurité ?...). En effet, cette meilleure connaissance pourrait éventuellement modifier les modalités thérapeutiques des anévrysmes avant rupture ou proposer une recherche systématique d’anévrysme en cas de facteurs de prédispositions identifiés. Conclusion Ce travail de Radio-Anatomie a permis : 1. d’identifier les différentes variations anatomiques de la partie antérieure du CAC chez des patients ayant un anévrysme cérébral, 2. de confirmer la fréquence importante de ces variations (61%) dans cette population, 3. de démontrer une forte association entre la dominance (hypoplasie ou aplasie) de l’un des segments A1 et l’existence d’un anévrysme de la partie antérieure du CAC et principalement de l’ACoA. D’autres études pourraient être envisagées afin de confirmer ces données, de rechercher d’autres facteurs favorisant le développement des anévrysmes (variations du flux en fonction de l’angle entre les segments A1 et A2 et le développement d’AIC) et de mieux comprendre les mécanismes hémodynamiques et physiopathologiques du flux artériel. Références bibliographiques 1. De Reuck J, Vander Eecken H. Anatomie et embryologie artérielles cérébrales. p.27-39. Livre : Accidents vasculaires cérébraux. Ed. Doin ; Paris ; 1993. 2. Tarulli E, Fox AJ. Potent risk factor for aneurysm formation : termination aneurysms of the anterior communicating artery and detection of A1 vessel asymmetry by flow dilution. AJNR AM J Neuroradiol 2010;31:1186-91. 3. Rhoton AL. The supratentorial arteries. Neurosurgery 2002;51 (s1): p.82-98. 4. McKinney AM, Palmer CS, Truwit CL, Karagulle A, Teksam M. Detection of aneurysms by 64-section multidetector CT angiography in patients acutely suspected of having an intracranial aneurysm and comparison with digital subtraction and 3D rotational angiography. AJNR Am J Neuroradiol 2008;29:594-602. 5. Lasjaunias P, Berenstein A, Ter Brugge KG. Intradural arteries. Dans Surgical neuroangiography, clinical vascular anatomy and variations. 2e edition. Berlin: Springer; 2001. p. 479-613. 6. Padget DH. The development of the cranial arteries in the human embryo. Comtrib Embryol 1948;32:205-61. 7. Netter F.H. Atlas d’anatomie humaine, 4eme Edition. Chapitre Tête et Cou, p.136-143. Masson ; 2007 ; Traduction et adaptation en langue française de P. Kamina. 8. Charbel FT, Seyfried D, Mehta B et al. Dominant A1 : angiographic and clinical correlations with anterior communicating artery aneurysms. Neurol Res 1991;13:253-56. 9. Kayembe MD, Sasahara M, Hazama F. Cerebral aneurysms and variations in the circle of Willis. Stroke 1984;15:846-50. 10. Dimmick SJ, Faulder KC. Normal variants of the cerebral circulation at multidetector CT angiography. Radiographics 2009;29:1027-43. 11. Niederberger E, Gauvrit JY, Morandi X, Carsin-Nicol B, Gauthier T, Ferré JC. Anatomic variants of the anterior part of the cerebral arterial circle at multidetector computed tomography angiography. J Neuroradiol 2010;37:139-47. 12. De Gast AN, Van Rooij WJ, Sluzewski M. Fenestration of the anterior communicating artery: incidence on 3D angiography and relationship to aneurysms. AJNR Am J Neuroradiol 2008;29:296-8. 13. Van Rooij SBT, Van Rooij WJ, Sluzewski M. Fenestration of intracranial arteries detected with 3D rotational angiography. AJNR Am J Neuroradiol 2009;30:1347-50. Liste des abréviations CAC : Cercle Artériel de la Base du Cerveau AIC : Anévrysme Intra-Crânien HSA : Hémorragie Sub-Arachnoïdienne ACoA : Artère Communicante Antérieure AR3D : Angiographie Rotationnelle 3D AMD : Angioscanner Multi-Détecteurs ACI : Artère Carotide Interne ANL : Artère Neurale Longitudinale ACA : Artère Cérébrale Antérieure AMCC : Artère Médiane du Corps Calleux PCoA : Plexus Communicant Antérieur Radio-Anatomie de la partie antérieure du cercle artériel du cerveau : variations anatomiques et pathologie anévrysmale Marianne LE RHUN, Hubert DESAL, Olivier HAMEL, Antoine HAMEL, Stéphane PLOTEAU, Stéphane LAGIER, Yvan BLIN, Roger ROBERT, Jean-Michel ROGEZ Laboratoire d’Anatomie – Faculté de Médecine de Nantes BUT - La partie antérieure du cercle artériel du cerveau (CAC) est la localisation préférentielle des variations anatomiques et des anévrysmes intra-crâniens. La fréquence exacte et le rôle de ces variations dans le développement des anévrysmes est encore mal connu. Le but de notre travail a été de rechercher une association entre ces variations et le risque anévrysmal. MATERIEL ET METHODES - Les patients adressés de Janvier 2009 à Décembre 2010 dans le Service de Neuro-Radiologie Diagnostique et Interventionnelle du CHU de Nantes pour une embolisation d’anévrysme cérébral ont été séparés en 2 groupes selon la localisation anévrysmale : partie antérieure du CAC (groupe « Malades »), autre localisation (groupe « Témoins »). Les angioscanners multi-détecteurs des patients ont été relus afin de déterminer la prévalence exacte de chaque variation de la partie antérieure du CAC dans les 2 groupes. Un test du Khi2 a été réalisé afin de rechercher une association entre l’existence d’une variation et la survenue d’un anévrysme. RESULTATS - Une variation anatomique était observée chez 47 des 77 (61%) patients présentant un anévrysme intra-crânien, sans différence entre les deux groupes. Une dominance (hypoplasie ou agénésie) de l’un des segments A1 était présente chez 18 « Malades » (50%) et chez 7 « Témoins » (17%). La différence était nettement significative (p=0,003 ; Odd ratio : 4.85). Aucune autre variation n’était associée au développement d’un anévrysme. CONCLUSION - 1) Plus de la moitié des patients ayant un anévrysme ont une variation anatomique de la partie antérieure du CAC. 2) Une dominance multiplie par 5 le risque de développer un anévrysme dans cette région. Mots Clés : dominance, variation anatomique, anévrysme cérébral, angioscanner