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IEN DIRE
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EST D
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ABORD ÉCOUTER
Au-delà des informations techniques et du dis-
cours rationnel, il s’agit pour le médecin qui
annonce la maladie de favoriser l’écoute et le
dialogue, en restant attentif aux réactions du
malade, à ses émotions et à ses représentations
de la maladie forgées par sa culture, son histoire
personnelle, son environnement affectif et
social, son âge, la période de vie qu’il est en
train de traverser. La représentation de l’hyper-
tension artérielle que se fait le patient condi-
tionne la façon dont il va recevoir le diagnostic et
accepter les contraintes thérapeutiques.
C’est pourquoi il est essentiel pour le praticien
de s’ajuster sur le point de vue du patient pour
instaurer la communication et transmettre l’in-
formation médicale :
“Que représente pour vous
une hypertension artérielle, que savez-vous de
cette maladie ?”
“Si le médecin bride la relation de soin en la
réduisant aux seules discussions sur le traite-
ment et ses modalités, l’ouverture à la réciprocité
ne sera évidemment pas possible” (1).
L’annonce d’un diagnostic n’est pas l’énoncia-
tion d’une sentence, mais au contraire l’ouverture
d’un dialogue pour une information partagée,
adaptée au malade, à sa demande, à ses
besoins. Le risque est grand dans le cadre de
l’hypertension artérielle de résumer la commu-
nication avec le patient à une discussion sur ses
chiffres tensionnels, alors qu’il est nécessaire de
construire sur le long terme une relation de
soins et d’échanges.
Il faut du temps au patient pour s’accepter en
tant que malade souffrant d’une hypertension
artérielle, pour faire le deuil de son être bien-
portant alors qu’aucun signe extérieur ne vient
témoigner d’une quelconque pathologie.
Comment concilier deux vérités contradictoires,
celle d’un sentiment de bien-être physique (le
plus souvent ressenti) et celle d’une menace
réelle liée à une pression artérielle trop élevée ?
En permettant au patient d’exprimer ses
angoisses et ses interrogations, en reconnais-
sant sa souffrance, en évitant de sous-estimer
l’impact psychologique de l’annonce d’une
maladie a priori sans risque vital immédiat, le
médecin favorise l’acceptation de la maladie par
le patient qui, peu à peu, se montrera plus
réceptif à l’idée d’un traitement au long cours et
d’un aménagement de nouvelles règles de vie.
Cette “éducation du patient” doit se penser
comme une mise à disposition d’informations
utiles pour permettre au malade d’évoluer par
rapport à ses propres croyances et lui donner la
liberté de négocier une vision nouvelle de lui-
même, de son corps, de son rapport à la vie, de
son bien-être physique, psychique et social.
L’éducation du malade chronique est souvent
vouée à l’échec quand elle déploie un discours
trop normatif qui englobe les êtres dans une
seule et même représentation de leur santé,
quand elle impose par des “commandements”,
un modèle idéal de “l’être en bonne santé” qui
exclut la singularité de chacun, son histoire, ses
origines, sa culture.
Si la guérison physique ne peut être garantie
dans un certain nombre de pathologies, la guéri-
son psychique reste-t-elle possible ? La question
se pose pour des pathologies telles que l’hyper-
tension artérielle. Guérir psychiquement d’une
maladie chronique, c’est peut-être avant tout,
pour le patient, parvenir à oublier la menace de
la maladie et continuer à accomplir des projets,
à investir et à vivre sa vie dans toutes ses dimen-
sions affectives, professionnelles, sociales, etc.
Cette guérison psychique impose un travail diffi-
cile, celui qui permet au malade d’intégrer la
maladie, les contraintes thérapeutiques, l’incer-
titude et, finalement, de parvenir à “vivre
avec...”. La relation thérapeutique médecin-
patient occupe une place essentielle dans ce tra-
vail de (re)construction psychique de la personne
malade.
1.
Alvin P. L’annonce d’une maladie chronique à l’adolescence.
In: Espace éthique la Lettre 15-16-17, hiver 2001-2002.
2.
Ouvrard P. Toute la formation médicale continue 2001;43:
27-8.
Autre référence :
Moley-Massol I. Hypertension today
2005;1(Bruxelles).
Le rituel de la prise de tension
artérielle
Maladie obscure, tueur invisible
ou simple baromètre des émo-
tions, l’hypertension artérielle est
riche de représentations fantasma-
tiques qui confèrent au rituel de la
prise de tension artérielle un
caractère très particulier et une
place essentielle dans l’examen
clinique.
La prise de tension fait partie de
toute consultation et le malade est
le premier à revendiquer cette
“mesure” médicale, mesure chif-
frée de son équilibre intérieur, de
ses “humeurs”, miroir de ses émo-
tions.
“Et ma tension, docteur, vous ne
me l’avez pas prise !”
Pourquoi cette mesure ritualisée a-
t-elle autant d’importance ?
Pourquoi les patients ont-ils ce
besoin impérieux de connaître ces
deux chiffres sacrés de la pression
systolique et diastolique, dont ils
ignorent le plus souvent la signifi-
cation physiologique exacte ?
Est-ce le malade qui a besoin
d’une appréciation quantifiable
immédiate de son état de santé, ou
le médecin qui a besoin de ce
geste technique pour entrer en
contact avec son patient, comme
“une entrée en matière” ?
La prise de tension représente
d’abord un acte de communica-
tion.
Prendre la tension est une prise de
contact avec le corps du malade,
une mise en relation de l’intérieur
et de l’extérieur de ce corps, une
mise en cohérence de la part
rationnelle (la réalité des chiffres)
et irrationnelle (les émotions) de
sa personne.
Soudain, des données inconnues
deviennent palpables.
La ritualisation de la prise de ten-
sion artérielle ne serait-elle pas
finalement la mise en scène sym-
bolique du rôle premier dévolu au
médecin, celui de rétablir l’équi-
libre, la bonne mesure ? (2).
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Correspondances en Risque CardioVasculaire - Vol. III - n° 1 - janvier-février-mars 2005