Aperçus de la première guerre anglo-afghane : 1838-1842
En 1837, année de l’avènement de la reine Victoria, l’Empire
britannique et l’Empire russe, anciens alliés contre Napoléon en
Europe, s’affrontent désormais en Asie. La Russie pèse sur les deux
grands États musulmans à sa lisière méridionale, la Turquie et
l’Iran. La Grande-Bretagne, suzeraine à Delhi depuis 1803, entend
garantir ses possessions indiennes en renforçant au contraire les
monarchies ébranlées de la Turquie ottomane et de l’Iran des
shahs qadjar, à la manière de deux vastes remparts géographiques,
pour barrer aux Russes les chemins terrestres du sous-continent.
La flotte anglaise en Méditerranée assure sa protection au sultan
de Turquie. Mais l’Iran, malgré, au sud, les garanties britanniques de
défense de son intégrité territoriale et la flotte anglaise qui patrouille
dans le Golfe, ploie sous la poussée russe, au nord. La Caspienne
offre un vecteur maritime direct pour la puissance russe, jusqu’au
cœur du Moyen-Orient que représente l’Iran. Au cours de cam-
pagnes répétées entre 1812 et 1828, l’armée russe écrase et chasse
les troupes iraniennes du littoral caspien.
En 1828, par le traité de Turkmantchay, le souverain iranien,
Fath Ali Shah, cède à la Russie toutes les provinces autrefois ira-
niennes du Caucase, et accepte la transformation de l’Iran en pro-
tectorat russe de fait. L’Angleterre s’est avérée impuissante à
protéger Téhéran. La Russie l’avait voulu démontrer.
Saint-Pétersbourg pousse son avantage, en promettant en échange
son soutien à toutes les revendications territoriales du shah d’Iran
aux dépens, cette fois, de l’Afghanistan – détaché de l’empire ira-
nien depuis l’indépendance du royaume de Kaboul en 1747.
En 1837, ce royaume de Kaboul avait déjà éclaté en chefferies
rivales. Le prince Kamran de Herat à l’ouest, ennemi juré de l’émir
Dost Mohammed de Kaboul à l’est, gouvernait son petit fief,
désormais autonome, à la frontière immédiate de l’Iran.
PRÉFACE
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