Soins Libéraux Pédiatrie Quand l’enfant est hyperactif Les manifestations comportementales du trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH), qui se caractérise par l’association de plusieurs troubles, perturbent gravement la vie de l’enfant comme celle de son entourage. L a prise en charge de ces enfants comprend, dans un premier temps, les volets éducatif, pédagogique, psychothérapique, et lorsque ces approches demeurent inefficaces et que le diagnostic est solidement étayé, on a recours au traitement médicamenteux. Douze symptômes Les enfants atteints de TDAH ont un ensemble de comportements perturbateurs où l’hyperactivité, l’inattention et l’impulsivité prédominent. La classification DSM IV estime que pour qu’un TDAH soit avéré, l’enfant doit présenter au moins six symptômes d’hyperactivité/impulsivité et six symptômes d’inattention, persistant pendant une durée d’au moins six mois, se manifestant au moins dans deux types d’environnements différents (école, maison) ; certains symptômes ayant provoqué une gêne fonctionnelle étant présents avant l’âge de 7 ans. Le déficit de l’attention se manifeste en milieu scolaire ou social et serait en rapport avec l’absence d’inhibition des stimuli non pertinents : l’enfant ne semble pas écouter ce qui est dit, est incapable de fixer son attention car il se laisse facilement distraire par le moindre stimulus externe, il ne termine jamais rien, d’autant qu’il perd souvent les objets nécessaires à son travail. L’agitation se traduit par une hyperactivité motrice désordonnée (même si ce symptôme fluctue en fonction des situations) : l’enfant est incapable de rester assis, remue sans arrêt, touche à tout, fait trop de bruit. Du fait de son impulsivité, l’enfant a une difficulté à attendre son tour, il a une tendance à interrompre les autres ou à imposer sa présence, il répond trop vite aux sollicitations sans réflexion ni inhibition si bien qu’il se met en danger sans s’en apercevoir ; son incapacité à respecter les consignes et les contraintes de la classe ainsi qu’une mauvaise estime de lui-même entraînent l’échec scolaire et le rejet par les autres enfants. À la maison, l’agitation incessante de l’enfant finit par épuiser les parents, lesquels risquent de devenir agressifs et/ou dépressifs. Bref, des enfants marginalisés car mal intégrés au groupe et des familles perturbées, telles sont les graves conséquences du TDAH qui s’inscrit dans la majorité des cas dans le cadre d’une maladie chronique. Environ 20 à 30 % des formes de l’enfance s’atténuent nettement voire disparaissent à l’adolescence, toutefois les difficultés de l’enfance peuvent laisser des séquelles. Les origines Le TDAH apparaît comme résultant d’un terrain prédisposant et d’un environnement défavorable. Etant donné que l’imagerie cérébrale a montré chez les sujets atteints de TDAH une baisse du métabolisme du glucose dans le cortex préfrontal et une diminution du débit sanguin des aires frontales, l’état des connaissances actuelles suggère la participation d’un dysfonctionnement de certains circuits cérébraux et notamment un déficit en dopamine et en noradrénaline au niveau préfrontal. Certes, on peut poser le diagnostic tôt, dès l’âge de la maternelle. Toutefois, il importe de souligner que la distinction entre fonctionnement normal et l’extrémité pathologique de nombreux comportements observés chez tous les enfants est parfois difficile à faire chez l’enfant très jeune. Comme le rappelle le Dr O. Revol (Lyon), « on ne doit pas se hâter de porter le diagnostic et se pencher de façon rigoureuse sur le diagnostic différentiel qui paraît fondamental pour crédibiliser l’action thérapeutique. Ainsi, il faut éliminer la turbulence normale d’un enfant vif, la dépression (dont les premières manifestations chez l’enfant sont l’hyperactivité et l’irritabilité), l’environnement défavorable (carences affectives, incohérences éducatives), des troubles de l’apprentissage sévères, la précocité intellectuelle, l’hypomanie, sans oublier les effets iatrogènes de certains médicaments comme les antiépileptiques ou les corticoïdes. » Il faut aussi savoir que la comorbidité complique le processus diagnostique. Les études épidémiologiques internationales ont montré que plus de la moitié des enfants présentent des comorbidités associées, tels que les difficultés d’apprentissage (dyslexie/dysorthographie), les conduites anarchiques, le trouble oppositionnel, les troubles de l’humeur, les troubles anxieux ou les tics. Stratégie de soins La prise en charge du TDAH doit être multidisciplinaire, la stratégie spécifique étant adapté à chaque enfant. Diverses approches sont utilisées : interventions éducatives et pédagogiques, psychothérapies (psychothérapie de soutien, thérapies comportementales, thérapies familiales), relaxation, rééducation psychomotrice et traitement médicamenteux symptomatique lorsque le trouble est sévère. Autrement dit, l’enfant >> Professions Santé Infirmier Infirmière N° 58 • octobre 2004 43 44 Soins Libéraux >> doit être encadré et aidé à la fois par le corps médical, les parents et les enseignants afin qu’il puisse apprendre à contrôler son comportement et gérer à son attention. Le traitement médicamenteux Focus ... Un diagnostic difficile L’hyperactivité fait l’objet de nombreuses controverses… Pourtant, ce trouble du comportement existe bel et bien ; il est plus fréquent qu’on ne le pense, mais il est difficile à diagnostiquer. En effet, 3 à 5 % des enfants seraient concernés, soit un million en France ! En outre, l’hyperactivité est extrêmement difficile à gérer pour les parents, qui souvent ne savent plus comment aider l’enfant à retrouver son calme. On en distingue trois formes : – la pseudo-hyperactivité d’origine psychoéducative ; – la pseudo-hyperactivité secondaire ou réactionnelle ; – l’hyperactivité d’origine organique. Le traitement médicamenteux de première intention est le méthylphénidate, un stimulant du système nerveux central qui est utilisé dans cette indication depuis plus de 45 ans. Ses effets ont été mis en évidence au niveau moteur (l’enfant est moins agité et son graphisme s’améliore), au niveau social (l’enfant devient plus habile dans ses relations, ses attitudes d’opposition et défi sont réduites) et au niveau cognitif (l’enfant soutient mieux son attention et son impulsivité régresse). Le méthylphénidate à libération prolongée et administré en une seule dose journalière a été récemment mis à disposition dans le traitement des enfants de plus de six ans et des adolescents. Il s’agit d’une avancée thérapeutique puisque cela permet d’éviter la multitude de prises de méthylphénidate dans la journée, responsable de fluctuations des concentrations plasmatiques du principe actif et d’une stigmatisation de l’enfant à l’école. En effet, la galénique (système OROS) assure une efficacité pendant 12 heures et autorise donc une administration en une seule prise le matin, avant le départ à l’école. Dans les trois études contrôlées, l’efficacité et la tolérance du médicament délivré sous cette forme ont été équivalentes à celles des trois prises par jour de méthylphénidate à libération immédiate. Concernant les effets secondaires les plus fréquemment observés, chez la majorité des enfants l’appétit est resté identique (77 %) et la qualité du sommeil a été évaluée comme bonne par 73,6 % des parents. Les autres effets secondaires, plus rares, – syndrome dépressif, mouvements anormaux, retentissement sur le développement staturo-pondéral –, sont généralement proportionnels à la Professions Santé Infirmier Infirmière N° 58 • octobre 2004 dose et régressifs à la diminution ou à l’arrêt du traitement. Quant à la durée de la prescription, elle est variable et l’interruption du traitement lors des week-ends et durant les vacances scolaires est discuté en fonction de chaque enfant et de chaque famille. Ludmila Couturier Quand le TDAH persiste Les études de prévalence évaluent la fréquence du TDAH à environ 6 % chez l’enfant. Dans 70 à 80 % des cas, le TDAH persiste à l’adolescence et, dans la moitié de cas, à l’âge adulte. Néanmoins, la symptomatologie de ce syndrome se modifie avec l’âge : on constate moins d’activité motrice exagérée, mais plus de sensation intérieure d’agitation et d’impatience, et une persistance, voire une aggravation, des troubles de l’attention. Les spécialistes du TDAH décrivent le tableau clinique dominé par l’inattention, l’absence de repos, les sautes d’humeur, l’irritabilité avec des accès de colère, la recherche de sensations fortes, qu’elles soient physiques ou affectives. Par ailleurs, les trois quarts des patients souffrent de pathologies associées (notamment des troubles du sommeil, anxiété et dépression), lesquelles pourraient être la conséquence de TDAH. Il en résulte d’importants troubles relationnels et professionnels et donc des handicaps sociaux, des conduites toxicomaniaques, des accidents de la voie publique, voire la délinquance. C’est dire l’importance d’un diagnostic et d’une prise en charge précoces de ce syndrome. Or, celui-ci reste particulièrement sous-évalué et méconnu chez l’adulte. Le traitement du TDAH chez le sujet adulte repose sur un psychostimulant, associé selon les cas, à des anxiolytiques et/ou à des stabilisateurs de l’humeur, et si possible à une psychothérapie. Brèves ... Accord cadre FNCLCC/FNC/CHRU C’est une nouvelle alliance pour regrouper les forces et les expertises et s’unir pour mieux guérir le cancer. L’accord cadre national définit les fondements des nouvelles collaborations entre CRLCC et CHRU que le Plan cancer recommande. Les CRLCC et CHRU vont créer 17 groupements de coopération sanitaire de cancérologie dans 15 régions. En Ile-de-France, un schéma spécifique est mis en place pour coordonner les 3 centres de lutte contre le cancer et l’Assistance publique-hôpitaux de Paris. Dans les 7 territoires de santé où il existe un CHRU mais pas de CRLCC, le CHRU constitue de fait le pôle régional de référence. SOS Hépatites sur internet Lors de la première journée européenne de sensibilisation à l’hépatite C, les associations se sont donné pour objectifs de sensibiliser à sa prévention, au dépistage et à informer sur l’efficacité des traitements. SOS Hépatites lance un site internet européen : www.Hep-links.com Initiative au centre René Huguenin Le centre René Huguenin (St-Cloud-92), est l’un des 20 centres de lutte contre le cancer en France. Il ouvre, en 2005, un lieu convivial : “La maison des patients”. Cet espace est destiné à offrir aux personnes concernées l’acquisition de savoirs utiles avant ou après les soins, tant sur le plan scientifique que sur les plans psychologique, comportemental ou social. Par ailleurs, le centre organise des conférences débats bimensuelles ouvertes aux patients, à leurs proches, aux membres du personnel ou d’une association. Infos (tél.) : 01 47 11 15 03.