
Le but de la Journée était de réunir et de faire dialoguer des chercheurs spécialistes
de diverses langues autour de la représentation linguistique des phénomènes liés à la
perception, notamment la perception auditive (Georges Kleiber, Irina Kor-Chahine, Stéphane
Viellard), olfactive (Pierre Frath, Irina Thomières) et tactile (Tatiana Bottineau). En outre,
divers cadres théoriques ont été utilisés, rendant ainsi possible une réflexion d’une grande
richesse, ce qui est un atout considérable de la Journée.
Georges Kleiber se penche sur la position de bruit et de silence ‘absence de bruit’ vis-
à-vis de l’opposition « massif – comptable ». Le chercheur dégage ainsi un certain nombre de
propriétés, inattendues pour certaines d'entre-elles, du nom silence et du nom bruit. Il
explique par là même certains paradoxes auxquels silence et bruit donnent lieu.
L’article d’Irina Kor Chahine porte également sur le domaine des bruits. L’auteur se
consacre aux verbes qui, dans leurs emplois premiers, désignent les cris et les bruits émis
par les représentants du monde animal au sens large, et qui, dans leurs emplois secondaires,
s’appliquent également aux humains ou encore aux objets et aux éléments de la nature.
En examinant la phraséologie du mot odeur telle qu'elle apparaît dans un corpus de
textes littéraires contemporains de l'époque où Marcel Proust rédigeait À la recherche du
temps perdu, ou encore antérieurs, Pierre Frath arrive à la conclusion suivante. Parler et
écrire de manière créative, c'est utiliser la langue en-dehors des phraséologies habituelles,
mais en en tenant compte, pour partager une expérience neuve et originale.
Tatiana Bottineau propose un essai de classification des adjectifs russes en –ist- en
recourant à des critères à la fois sémantiques et pragmatiques, formels et énonciatifs. Elle
cherche, notamment, à préciser le rôle et le statut de l’instance locutive en charge de la
perception sensorielle du monde et de sa représentation langagière.
Martine Dalmas se fixe pour objectif de donner une description syntaxico-sémantique
des verbes de perception en allemand contemporain et de montrer qu'au-delà de leur
diversité, on constate des liens entre les domaines perceptifs s'appuyant sur les spécificités
constructionnelles des verbes concernés.
En analysant le verbe en russe, Stéphane Viellard constate que ce verbe renvoie
à une perception indifférenciée, globale, qui caractérise l’être vivant par opposition aux
inanimés. La perception se spécialise avec les arguments du verbe. Cela permet à l’auteur
d’émettre l’hypothèse selon laquelle serait un verbe support ne conservant que le
sème [perception], pour référer aux sens en fonction de l’objet de la perception. L'auteur
compare également le verbe ’ et le verbe breton klevout, klevet, qui partagent la même
étymologie. Il fait ainsi un constat important. Si klevout, klevet signifie « entendre »
(percevoir par l'ouïe), ce verbe peut, lui aussi, avoir le sens de « sentir, percevoir par
l'odorat ».
Enfin, Irina Thomières analyse les noms d’odeurs simples et composés en russe. Elle
essaie de dégager les critères pragmatiques qui président au choix du locuteur entre un nom
simple ou un nom composé. L'auteur propose également une classification des noms
d’odeurs composés (nom d’odeur + substantif au génitif dit « spécifieur ») en fonction de la
nature sémantique du spécifieur, qui correspond à la raison d’être de la sensation olfactive
exprimée par tel ou tel nom d’odeur
.
Nous remercions Elena Simonato pour la relecture attentive qu’elle a voulu faire des textes
contenus dans ce recueil.