LA PRESSE MONTRÉALLUNDI 30 JANVIER 2006ARTS &SPECTACLES 7
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THÉÂTRE
EN BREF
La Chambre d’amis
Stars d’unsoir!ÈVE DUMAS
Supplémentaires
Montréalconnaîtjusqu’àmainte-
nantunhiverthéâtralexceptionnel.
Àpreuve,presquetous lesspecta-
clesprésentementàl’affiche béné-
ficierontde supplémentaires.Al-
lons-ydansl’ordre. La Compagnie
JeanDuceppe offreune matinée de
PetitDéjeunercomprisle dimanche 5
février,à14 h30,etune dernière
représentationensoirée,le vendre-
di 10févrierà20 h. Leremarqua-
ble Tout comme elle ajouteàson ca-
lendrierdeux représentationsle
samedi 4février(15 het20h) et
tientl’affiche cinq soirs de plus,du
7au11 février.Sachezaussiqu’il y
ade trèsforteschancesquecespec-
tacle mettanten scène50femmes
soitprésentéàQuébec, auprin-
temps,dansle cadreduCarrefour
internationaldethéâtre. AuTNM,
on annoncesixsupplémentairesdu
triomphalMalade imaginaire ,du14
au18 février(deux représentations
le samedi18,à15 hetà20 h). Bri-
tannicus,quiaprisl’affiche du
ThéâtreDenise-Pelletierlasemaine
dernièreseulement,prolonge déjà
de deux soirs,le mardi 21février,à
19 h,etle vendredi 24février,à
20 h. Finalement,L’EspaceGopro-
grammeune semainedesupplé-
mentairesde La Promessedel’aube ,
dontlesreprésentationsrégulières
seterminentle 4février.Maisil
faudraattendrele23 juin avantde
revoircetteadaptationduromande
Romain Gary.
Activités auCEAD
Pasmoinsde 20 acteurs,dontAn-
nickBergeron,Emmanuel Bilo-
deau,RéalBossé,HenriChassé,
BenoîtGirard,Julie LeBreton,Hé-
lène Loiselle,GillesPelletieret
MoniqueSpaziani,s’adonnerontà
une lecturepublique,auThéâtreLa
Licorne,cesoir,19 h. Celle-cifait
suiteàlarésidencedetraduction
tenueparle Centredesauteurs
dramatiques(CEAD)enseptembre
dernier.L’auteur,acteur etmetteur
en scène québécoisMichel Monty
atraduitune piècedel’auteur et
metteur en scène irlandaisOwen
McCafferty.ScenesFrom The Big Pic-
turetraceleportraitd’une journée à
Belfast,àtravers lesviesde 21per-
sonnages.Entrée libre. Renseigne-
ments etréservations:514
288-3384,poste221.
LeCEAD aaussidévoilésesle-
vers de rideaudumoisde février.
Ilyen auracinq,dontune seule à
Montréal. Philippe Soldevilalira
unextraitd’Émilie ne seraplus jamais
cueillie parl’anémone,de Michel
Garneau,avantlareprésentation de
BhopalàEspaceLibre,le mercredi 8
février.Lesautreslecturesauront
lieuàSherbrooke,Québec, Ottawa
etVancouver.Rappelonsquele
projetde levers de rideaumarque
le 40 eanniversaireduCEAD.Au
Québecetdansplusieursvillesca-
nadiennes,jusqu’enseptembre
2006,40extraits tirésde 40textes
serontlus par40directeursartisti-
quesde 40compagniesthéâtrales.
Jules Verne et
lamondialisation
Une jeune compagnie,LeVieux
Coffre,s’inspireduromandeJules
Verne,LeTour dumonde en 80jours,
pour créerune piècedethéâtredes-
tinée àunpublicâgé de 12anset
plus.L’auteur visionnaireduXIXe
siècle,téléportéen2006,sedeman-
de combiendetempsPhileasFogg
mettrait,aujourd’hui,àparcourirle
monde. La réponsedeValérie
BeaulieuetDavid Pelletier,adapta-
teurs de l’oeuvre? Quatrejours!
Une équipe de cinqcomédiens
nous en ferontladémonstration
parunmariage de jeuludique,de
théâtred’objets etde théâtrede
marionnettes.Aveccespectacle,les
jeunescréateurs duVieux Coffre
souhaitentsensibiliserle public
aux réalitésd’aujourd’huiquesont
le chocdescultures,latolérance,la
disparitiondesbarrièresgéogra-
phiques,l’accélération de l’infor-
mation,etc.LeTour dumonde en
quatrejours est àl’affiche de laSalle
Fred-Barrydu31janvierau18 fé-
vrier.Réservations:514253-8974.
EVE DUMAS
RarementlapetiteSalle Jean-
Claude Germain duThéâtre
d’Aujourd’huiaura-t-elle vu défi-
lerautantde vedettes.PierreCur-
zi,GillesRenaud,René Richard
Cyr,Martin Drainville,MarcLa-
brèche,PatriceRobitaille etbien
d’autresserontreçus tour àtour
dansLa Chambred’amisde Vin-
centChampoux etd’ÉdithPa-
quet.Danscettepièceconcept
quiaconnuungrand succèsà
Québec, le rôle principalchange
tous lessoirs ets’improviseaufil
de lareprésentation.
Ilfallaitavoirducranpour se
présenterdevantquelqu’undela
trempe de —prenonsunexemple
auhasard— Robert Lepage (!),
quiétaitundes«amis»àQué-
bec, aumoisd’août,etluidire:
«J’aimeraisquevous participiez
àmon projet.J’aiécritune pièce
de théâtre,maisje ne peux vous
en fournirle texte. Ilfaut que
vous me fassiezconfianceetque
vous vous abandonniez.»C’est à
peuprèsainsiqueVincent
Champoux,auteur de La Chambre
d’amisetinterprètedelapièce
avecÉdithPaquet,alancésesin-
vitations.Croyez-le ounon,il a
presquetoujours étéreçufavora-
blement.
Lesoirde sareprésentation,
donc, l’acteur invitédoitarriver
authéâtresansaucune forme de
préparation autrequ’une bonne
séancedeméditation zen pour
calmerson trac.Onluidonne son
uniquerépliqueune demi-heure
avantle début duspectacle et
c’est parti.
«Letrac quenous vivons,les
hôtes,est àmi-chemin entrecelui
qu’on peut avoiravantde jouer
dansune piècedethéâtreplus
conventionnelle etceluiqu’on a
lorsqu’on reçoitàsouper,expli-
quaitVincentChampoux lase-
maine dernière,en entrevuetélé-
phoniquedepuisQuébec.Àla
limite,l’erreur est possible ou,
mieux encore,il n’yapasd’er-
reur dansunspectacle comme ça,
cequinous enlèvebeaucoupde
stress.
«Quantàl’invité,il vitunpeu
le cauchemarde l’acteur,quiest
d’arriverauthéâtreunsoiretde
serendrecomptequ’on tientle
premierrôle sansen avoirété
averti. Maisc’est aussiunfantas-
me d’acteur,puisquelapiècese
construitautour de l’invité.
Lorsqu’il réaliseson pouvoir,il
s’en donne àcoeur joie etnous,
nous devonsnous adapteràson
improvisation. Même sil’invité
n’aqu’une répliqueàdire,son
attitude vatout influencer.»
Lechorégraphe Harold Rhéau-
me,parexemple,aentraîné Vin-
centetÉdithdansunjeupresque
surréaliste. Ilamême décidé
d’étranglerson hôteàlafin de la
représentation. Robert Lepage,
pour sapart,n’avaitpasàfairede
grandespirouettes,puisquela
qualitédesaprésenceetde saré-
putation luiassuraitune atten-
tion presquereligieusedelapart
desspectateurs,quisurveillaient
sesmoindresfaits etgestes.«On
aredécouvert l’improvisateur
qu’il étaitàl’époqueoùon le
voyaitdanslaLNI »,raconteVin-
centChampoux.
Lecomédien,auteur,metteur en
scène etgraphisteàsesheuresa
écritLa Chambred’amisdeux ans
aprèssasortie duConservatoire
d’art dramatiquedeQuébec.Plu-
tôtqued’attendrelespro-
positionsde rôlesdansl’oi-
siveté,il adécidé de se
créerde l’emploi.
«Lorsquej’aicommencéà
écrire,je ne savaispasdu
tout oùça s’en allait.Jesa-
vaisseulementquel’argu-
mentde baseseraitlavisite
guidée d’une maison etque
ça setermineraitdanslachambre
d’amis.Jen’avaispasdutout la
prétentiondeparlerdestravers
ducouple,maistranquillement,
j’aidécouvert quelecouple sur
lequel j’écrivaisn’allaitpasbien
dutout.»
En1998,il acommencéàincar-
nercecouple,aveclacomédien-
ne ÉdithPaquetetsous ladirec-
tion dujeune metteur en scène
StéphanAllard. Ilcréaitdoncsa
pièceet,parlamême occasion,le
Théâtredechambre. La Chambre
d’amisétaitrepriseàQuébecl’été
dernieretelle est pour l’instant
laseule production de lacompa-
gnie. Onpensetoutefoisàune
suiteauconcept.
«Unprojetcomme La Chambre
d’amismetbien en lumièrelaparti-
cularitéduthéâtreparrapport aux
autresarts,comme le cinémapar
exemple. Onditqu’authéâtre,ce
n’est jamaistout àfaitpareil d’un
soiràl’autre. Aveccespectacle,la
représentation changecarrément
tous lessoirs.Lepublicnous voit
déstabiliserl’invitéetvoitl’invité
nous déstabiliser.C’est de l’ordre
de l’immédiat.»
Àproposd’immédiat,lescurieux
quiseraientintéressésàassisterà
cetteexpériencethéâtrale hors du
communnedevraientpastrop tar-
deràchoisirleur starouleur soir,
puisquelaSalle Jean-Claude Ger-
main ne compteque75places.Des
forfaits sontdisponiblesaux spec-
tateurs quiseraienttentésd’assister
àplusieurs représentations.
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LA CHAMBRE D’AMIS estàl’affiche
delaSalle Jean-ClaudeGermain du2
au25février.
PHOTOSTÉPHANE ALLARD,GRACIEUSETÉ DE LA PRODUCTION
VincentChampoux etÉdithPaquetaccueillentchaquesoir uncomédien différentdans leurChambre d’amis.Et
c’estcetinvitéquidoitimproviser le rôle principaldelapièce.
«Même si l’invitén’a
qu’une répliqueàdire,
son attitudevatout
influencer. »
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Britannicus
ÈVE DUMAS
CRITIQUE
Iln’yapasplus difficile àjauger
qu’unpublicd’adolescents.Ap-
plaudissent-ilsparcequ’ilsontap-
précié lapièceoutout simplement
parcequ’ilssontheureux qu’elle
soitenfin terminée ?Allezsavoir.
Ceux etcellesquiontassistéàla
matinée scolairedeBritannicus,jeu-
di dernier,semblaientpour laplu-
part adhéreràlaproposition du
metteur en scène Martin Faucher.
Lesadultesaussi.
Cetteproduction vientclorele
«cycle classique» de Martin Fau-
cher.L’ontprécédée LeMenteur de
Corneille etLesFemmessavantesde
Molière,deux comédies.AvecBri-
tannicus,le metteur en scène plonge
danslatragédie,etpasn’importe
laquelle :latragédie racinienne
danssaplus pureexpression,sans
lumière,sansunsoupçon d’espoir
pour diluerlacharge. Lemal
triomphe haut lamain etc’est tant
pispour lesgentils.
Cemal,on le voitnaîtrechezle
jeune Néron,quesamèreAgrip-
pine etsesconseillers manipulent
comme une marionnette. Pour
s’affranchirde l’influencemater-
nelle etaffirmerson pouvoir,
l’empereur jusque-làvertueux fait
enleverJunie,fiancée de son frère
Britannicus.Ilneluifaut qu’un
seulregardpour tomberéperdu-
mentamoureux de laprincesse.
Maislorsquecelle-ciluirésiste,et
qu’il comprend quesamèretente
en plus de faireallianceavecBri-
tannicus pour resteraupouvoir,
Néron assassine son rival,àquiil
avaitdéjàusurpé le trône.
EnregardantceBritannicus,le
film Moulin rouge m’est venuàl’es-
prit.L’esthétiquebaroquedeBaz
Luhrmann n’aévidemmentrien à
voiraveclamiseenscène limpide
etdépouillée de Martin Faucher.
MaisdansMoulin rouge,il est éga-
lementquestion d’unhomme de
pouvoir(leduc)quitentepartous
lesmoyensde sefaireaimerde la
belle courtisane,dontle coeur ap-
partientpourtantaupauvrepoète.
Leparallèle setrouvedanslahai-
ne quel’on peut éprouverà
l’égarddeceluiqui,parjalousie et
parpossessivité,tented’écraserun
couple d’innocents etde sevenger
d’undésirrefusé.
Ils’arrêtelà, bien entendu,puis-
queleNéron de BenoîtMcGinnis,
bien qu’il soitdétestable,parvient
tout de même àsusciterne serait-
cequ’une étincelle de sympathie,
sansdouteattribuable aujeune
âge dupersonnage etàlaconnais-
sancequenous avonsde savertu
antérieure.
Évoluantdansundécorquires-
semble davantage àunfond de
ruelle qu’àunpalaisromain,le
monstrenaissantale look etlesma-
nièresd’unpetitleadercocaïnoma-
ne quitented’imposerle respect
parlaterreur.S’il n’étaitinvesti
d’unpouvoirsouverain,son entou-
rage seraitpeut-êtretentédeluidi-
red’allerserhabiller.Son rivalBri-
tannicus,sous lestraits angéliques
de Maxime Denommée,attireau
contraireune honnêtesympathie.
Quantàlabelle Junie,elle est
d’une intégritéetd’unaltruisme
quinesedémententjamais,sibien
qu’elle alimentelahaine qu’on aà
l’égarddeceluiquitentedelapos-
sédercontreson gré. Voilàpour le
triangle.
DominiqueQuesnel incarne une
Agrippine implacable,complète-
mentdénuée d’amour maternel
pour celuiqu’elle apourtantfait
montersur le trône,en assassinant
son propremari. L’actricelajoueà
lafoismasculine etsexy,comme
pour justifierson inextinguible soif
de pouvoir,assezrarementassociée
autempéramentféminin.
Danslacatégorie destruands,
Sébastien Dodge interprèteun
Narcissedémoniaqueàsouhait.
Sesmotivationsdemeurantsecrè-
tes,l’hypocriteconseillerde Né-
ron etde Britannicus apparaît
comme laplus purepersonnifica-
tion dumal.
Pour le rapprocherde cettebelle
galerie de personnages,Martin
Faucherinvitelepublicsur lascè-
ne duThéâtreDenise-Pelletier.On
yainstallédesgradins.Lescomé-
diensjouentcontrelemur dufond,
quireçoitleurs ombresplus gran-
desquenaturegrâceaux efficaces
éclairagesd’Étienne Boucher.L’in-
timitéest réussie etpermetune ex-
cellenteréceptiondutexte.
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BRITANNICUS, deJeanRacine. Mi-
se en scène :Martin Faucher. Avec:
Maxime Denommée,BenoîtMcGin-
nis,DominiqueQuesnel,Geneviève
Alarie,Philippe Cousineau,Sébastien
Dodge,ChantalDumoulin etDenis
Gravereaux.Décor :JonasVeroff
Bouchard.Costumes :Denis Lavoie.
Éclairages :Étienne Boucher. Ambian-
cesonore :Pednô. AuThéâtre Deni-
se-Pelletier jusqu’au24février.
Letriomphe dumal
PHOTO ROBERT ETCHEVERRY,GRACIEUSETÉ DE LA PRODUCTION
Maxime Denommée prêteses traitsangéliques àBritannicustandis quela
belle Junie estpersonnifiée parGenevièveAlarie.
ENTRÉE EN SCÈNE
>Bhopal,EspaceLibre,31janvier
au18 février
>LeTourdumondeenquatre
jours,Salle Fred-Barry,
31janvier au18 février
>Hellfire Pass,Théâtre Centaur,
31janvier au26février
>La Chambre d’amis,Salle
Jean-ClaudeGermain,2au
25février
>ADoll House,Centre Saidye-
Bronfman,5au25février
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