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LA GUERRE DE 1914-1918
Avant Pendant et Après
Par Dominique Quinta,
professeur dhistoire-géographie à lEREA de Perpignan.
Guerre de 1870
Napoléon III, au nom du principe du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, n’est pas
opposé à l’unification allemande. Bismarck révèle les pourparlers secrets (annexion par la
France du Grand-duché du Luxembourg en échange d’une attitude conciliante vis-à-vis de la
Prusse ): réaction explosive de l'opinion publique dans les États allemands et en Belgique :
La France renonce à ses prétentions sur le Luxembourg.
En 1868, l'Espagne se cherche un roi. Bismarck pousse à la candidature le cousin du roi
Guillaume Ier de Prusse. La France se retrouverait dans une situation d'encerclement
similaire à celle que le pays avait vécu à l'époque de Charles Quint. La France exige un
engagement écrit de renonciation définitive et une garantie de bonne conduite de la part
de Guillaume Ier. Guillaume Ier reçoit deux fois l'ambassadeur de France et lui confirme la
renonciation de son cousin sans se soumettre à l'exigence française
Pour Bismarck, une guerre contre la France est le meilleur moyen de parachever
l'unification allemande.
La version dédaigneuse qu'il fait transcrire dans la dépêche d'Ems de la réponse polie
qu'avait faite Guillaume de Prusse confine au soufflet diplomatique pour la France.
Tandis que la passion anti-française embrase l'Allemagne, la presse et la foule parisiennes
réclament la guerre. Napoléon III n'ose pas contrarier l'opinion majoritairement belliciste,
exprimée au sein du gouvernement et au parlement, y compris chez les républicains
Six mois plus tard…….
La France dut céder à l'Allemagne, l'Alsace, française depuis 1648, Strasbourg (1681), ainsi
que Metz, française depuis 1552, soit tout ou partie de cinq départements de l'Alsace et de
la Lorraine :
Le Haut-Rhin sauf le Territoire de Belfort ;
le Bas-Rhin ;
une très grande partie du département de la Moselle ;
une grande partie du département de la Meurthe ;
une toute petite partie du département des Vosges
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L’humiliation de la galerie des Glaces
Vainqueur de la guerre, Otto Von Bismarck célèbre la victoire dans la galerie des Glaces du
palais de Versailles en proclamant le second Reich.
La France imposera les mêmes lieux pour la signature du traité de Versailles, lavant l’affront
de 1871.
Une volonté de revanche ?
Le sentiment d'une revanche à prendre fut le terreau d'un nationalisme qui perdura une
vingtaine d'années. Toutefois, ce sentiment perdit progressivement de sa force et se
réduisit ensuite à une nostalgie des « provinces perdues » jusqu'à la fin du XIXe siècle.
En France, si la presse nationaliste ou la Ligue des patriotes entretiennent le discours de la
revanche, il disparaît des discours officiels et de la presse populaire. Les associations
d’anciens combattants réclament depuis des années la création d’une « médaille de 1870-
1871 », sans succès. Il n'y a pas eu de ligne politique officiellement « revancharde » à
proprement parler de la part des gouvernements français successifs et l'ensemble de la
classe politique dirigeante ne va pas au-delà de l'expression fameuse que Gambetta avait
prononcée en 1872 à propos de l'Alsace-Lorraine : « Y penser toujours, n'en parler jamais. »
Toutefois, l’opinion française est imprégnée de cet esprit de revanche, organisé par les
autorités publiques puisque l’esprit revanchard faisait partie des programmes
pédagogiques (création d'une Commission d'éducation militaire en 1881): le récit national
de l’historiographie française était orienté sur la prise de conscience que la perte de
l’Alsace-Lorraine constituait une atteinte à l’intégrité territoriale de la patrie. Enseignement
de la marche militaire, apprentissage du maniement des armes ou encore exercices de tir
sont au programme du quotidien des jeunes écoliers et lycéens, même si l'idée d'une
revanche n'est pas exprimée clairement. Seule plane l'idée d'un possible conflit armé
proche d'où vient la nécessité de rester prêt à répondre à l'appel de la République pour
défendre la patrie.
Cependant, à partir de la crise boulangiste, un nationalisme revanchard se développa, dans
une partie de la presse et l'opinion française, renforcé par l'Affaire Dreyfus et se diffusa
pendant la Belle Époque et le début du XXe siècle.
A partir de 1895, est cultivée l’amertume de la défaite et « l’honneur au courage
malheureux » par la peinture militaire (Édouard Detaille), la manifestation annuelle de la
Ligue des patriotes devant la statue de Strasbourg place de la Concorde, l’érection de
monuments (Lion de Belfort, La Défense de Paris au rond-point de Courbevoie qui
donnera son nom au quartier de la Défense), les discours « revanchards » de Paul
Déroulède……………et…………Maurice…………….Barrès.
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Mais à partir du « coup de Tanger », en 1905 (Guillaume II, par un voyage impromptu au
Maroc, marque l’intérêt de Berlin pour un pays que Paris considère comme sa chasse
gardée), le ton change à nouveau. La crise d’Agadir (où Berlin envoie un navire de guerre)
en 1911 et l’affaire de Saverne (où des incidents opposent la population alsacienne à des
militaires allemands) en 1913 aggravent la radicalisation
La « médaille commémorative de 1870 » est finalement créée par le gouvernement
français… en 1911.
Ce n’est qu’au cours de la guerre, et surtout dans l’historiographie et les récits d’après-
guerre, que le thème de « la revanche » et de la reconquête des provinces perdues
s’installera durablement dans la culture collective française, jusqu’à figurer, encore
récemment, dans les manuels scolaires comme l’une des raisons du conflit et l’un des buts
de guerre de la France.
Les représentations de la guerre avant 1914
Quelles étaient les représentations de la guerre avant 1914 ? Dans quel univers visuel
s’inscrivaient-elles ? La peinture se côtoient œuvres académiques (Édouard Detaille,
Alphonse de Neuville) et avant-gardistes, la photographie, les arts appliqués, la presse
illustrée évoquent abondamment le sujet de la guerre.
De nombreuses images sont conservées de la guerre des Boers, de la guerre russo-
japonaise ou des guerres balkaniques.
Les sociétés ont ainsi construit un imaginaire autour de la guerre : l’héroïsme et le
patriotisme militaire sont glorifiés, notamment à travers des grands moments de rencontre
entre la nation et l’armée, comme les manœuvres.
Circulent aussi des représentations réalistes qui évoquent la mort et les souffrances des
combattants et des civils
Le cinéma :
Les Dernières Cartouches, œuvre la plus célèbre d’ Alphonse de Neuville a été adaptée au
cinématographe en 1897 par Georges Méliès (court-métrage muet en noir et blanc nommé
Bombardement d'une maison), puis par les Frères Lumière entre autres, ce qui en fait le
sujet d'un des premiers films de guerre de l'Histoire.
La propagande :
Dès le mois d’août 1914 on assiste en France à un déferlement de propagande alimenté par
des fausses nouvelles colportées par la presse et aussitôt mises en images par les
illustrateurs. Toutes sortes d’atrocités prétendument commises par l’ennemi, forcement
barbare, y sont montrées : crimes de guerre, exécutions de curés et de notables, atrocités
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contre les enfants ou les femmes. Les Allemands achèvent les blessés, dépouillent les
morts, tirent après avoir hissé le drapeau blanc, fusillent un enfant de 7 ans qui les avait mis
en joue avec un fusil en bois, coupent des mains, décapitent une femme enterrée et
boivent beaucoup d’alcool. Seul crime de guerre non évoqué : le viol
22 août 1914 le jour « noir » de l’armée Française
Avec 27.000 soldats français tués, le 22 août 1914 fut la journée la plus sanglante de
l'histoire de France. On dénombrera près de 100 000 morts au mois d'août, qui, avec
septembre 1914, sera le mois le plus meurtrier de la première guerre mondiale. En outre,
un nombre élevé de blessés succombent à leurs blessures, dans les hôpitaux militaires
français et allemands. Le 22 août, la proportion dans les pertes du côté français s'établit à 1
mort pour 2 blessés, soit au moins deux fois plus que pendant toute la première guerre
mondiale
Le 22 août fut à ce point sanglant qu'avec une dizaine de milliers de morts côté allemand,
l'état-major du Kaiser se demanda en fin de journée s'il était bien vainqueur, tant les pertes
paraissaient incroyables.
Charleroi, Rossignol, Morhange : trois défaites cuisantes dont la France n'a jamais voulu se
souvenir. Dans la mémoire collective, le succès de la bataille de la Marne (5 - 12 septembre
1914) a progressivement gommé l'échec de celle des frontières, qui est venue à être
considérée comme un simple engagement préliminaire à la victoire française la plus
emblématique de toutes les guerres. Le 22 août 1914, sous un soleil de plomb, des dizaines
de milliers de soldats tout justes mobilisés, épuisés par des jours de marche forcée dans
leur pantalon rouge garance, vont brutalement connaître leur baptême du feu.
« On attaquera l'ennemi partout où on le rencontrera» : c'est avec cette formule aussi
vague qu'inefficace que le général Joffre, commandant en chef des armées françaises,
ordonne l'offensive le 14 août. C'est oublier que les progrès technologiques considérables
dans le domaine de l'armement ont multiplié la capacité de destruction des armées,
favorisant la défense contre l'attaque.
Les soldats français qui chargent à la baïonnette le 22 août au matin sont décimés par les
mitrailleurs allemands en position défensive. Et les officiers sommés d'affronter l'ennemi
"corps redressé", sans chercher à s'abriter, pour donner l'exemple, sont les plus touchés.
- Pourquoi tant de morts ?
Pour Joffre, "il faut passer, quel que soit le prix".
Jamais dans l'histoire autant de soldats français - entre 400.000 et 600.000 - ne furent
exposés en même temps au feu ennemi que ce 22 août.
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L'armée française subit en août 1914 de lourdes pertes parce qu'elle ne cherche pas
particulièrement à les minimiser. L'état-major croit en effet à une guerre rapide et violente,
et ne se préoccupe guère d'épargner les vies.
Pour expliquer le désastre, l'historien britannique Anthony Clayton pointe également "les
faiblesses de l'organisation française", avec des généraux âgés, souvent incompétents, et
des renseignements insuffisants qui ne permettent pas de repérer les positions ennemies.
Les instructions d'offensive à outrance reçues du haut état-major avant le combat feront
aussi qu'aucun officier n'osera organiser une retraite face à l'hécatombe qui désorganise les
lignes françaises, ce qui était pourtant la seule solution pour limiter les dégâts.
A quelles forces les soldats français se heurtent ils ?
Les troupes françaises sont en réalité victimes d'une accumulation d'éléments contraires.
En premier lieu : la présence inattendue de régiments allemands censés ne pas arriver
avant le lendemain. Tapis dans la forêt, l'ennemi attend de cueillir l'armée française. Les
mitrailleuses et l'artillerie allemande sont bien positionnées.
En face, les Français ne connaissent pas ce terrain forestier difficile : certains officiers ne
disposent même pas de carte des environs. D'autre part, leurs pantalons rouges percent un
épais brouillard et en font des cibles parfaites. Enfin, les soldats français payèrent surtout le
tribut de l'intransigeance de leur hiérarchie, partisane d'attaques à découvert
déraisonnables. Engagés dans des charges désespérées, la plupart d'entre eux tombèrent
sous les rafales de mitrailleuses allemandes.
L'artillerie allemande se révèle supérieure et plus mobile que celle des Français, et chaque
armée allemande dispose d'un corps de cavalerie équipé en mitrailleuses et en hommes à
pied, capable de se projeter en avant et de tenir une position.
La doctrine de l'offensive à outrance : l’hécatombe programmée et
acceptée
L’offensive à outrance est une expression souvent utilisée pour décrire la doctrine de
l'armée française de 1911 à 1914. Le principe au niveau stratégique est d'attaquer partout
où on le peut, tandis qu'au niveau tactique il s'agit de foncer sur l'adversaire en recherchant
le corps-à-corps.
Doctrine théorique
Cette doctrine est enseignée très tôt à l'École de Guerre, notamment par le général Foch,
qui en est directeur de 1907 à 1911. Il écrit dans Des principes de la guerre : « Pas de
victoire sans bataille : la victoire est le prix du sang [...] La guerre n'est que sauvagerie et
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