INTRODUCTION 5
d’une question de concurrence – la survie du plus apte, du plus fort, du plus
agressif et du plus puissant.
L’avis d’un sceptique
Par Michael Shermer
Le 2 juillet 1866, Alfred Russel Wallace, co-découvreur de la sélection naturelle,
écrivit à Charles Darwin : « Frappé à maintes reprises par la totale incapacité d’un
grand nombre de personnes, pourtant intelligentes, à percevoir clairement ou
même un tant soit peu les effets autonomes et nécessaires de la sélection natu-
relle, j’en arrive à la conclusion que le terme lui-même et la manière dont vous
l’illustrez, avec tant de clarté et d’élégance pour beaucoup d’entre nous, ne sont
toutefois pas les plus adaptés pour pénétrer l’esprit du grand public naturaliste. »
L’origine de cette incompréhension, poursuivait Wallace, résidait dans le nom
même de « sélection naturelle », en ce sens qu’il laissait supposer « la vigilance
constante d’un “sélectionneur” intelligent, comme dans la sélection humaine à
laquelle vous la comparez si souvent », et qu’il donnait à penser que « réflexion
et dessein étaient essentiels à son action. » Wallace proposa d’abandonner ce
terme et d’adopter à la place l’expression d’Herbert Spencer : « la survie du plus
apte. »
C’est hélas ce qui se produisit, entraînant l’éclosion de deux mythes qui perdurent
aujourd’hui encore : l’idée d’une orientation presciente de l’évolution et le fait que
la survie dépende entièrement d’une compétitivité impitoyable.
À l’encontre du premier, la sélection naturelle ne décrit pas l’action d’une « force »
mais le déroulement d’un processus.
Le darwinisme, lorsqu’il est bien compris, donne à voir une disposition duelle entre
égoïsme et altruisme, entre compétition et coopération.
Source : Scientific American, 19 janvier 2009
(http://www.scientificamerican.com/article/darwin-misunderstood).
Darwin a démontré que la collaboration entre espèces différentes – grandes
et petites, fortes et faibles – pouvait constituer un avantage décisif en termes
de survie. Partant de là, il faut donc que les entreprises repensent leurs inte-
ractions avec les consommateurs, mais aussi avec leurs partenaires et leurs
concurrents. Aujourd’hui, la vision darwinienne de la collaboration incite à
tirer parti de certaines opportunités commerciales telles que la co-création,
l’innovation ouverte et le financement participatif. De même, les nouvelles
technologies et le développement de l’Internet des objets permettent de ren-
forcer l’interaction entre les clients et l’entreprise, de contextualiser l’expé-
rience et de stimuler encore davantage la collaboration.
© 2014 Pearson France – Repenser la relation client : s'adapter pour survivre – Erik Campanini, Kyle Hutchins