Le DMP et la responsabilité médicale - Alsace e

Octobre 2012 • ASIP Santé • DMP – Repères juridiques
Avertissement
La  question  de  la  responsabilité  des 
professionnels de santé dans le DMP 
est  une  interrogation  souvent 
exprimée  de  façon  fort  légitime  par  les 
professionnels  de  santé  et  les  médecins  en 
particulier.
Nouvel outil de partage des informations de 
santé  sur  leurs  patients,  ils  souhaitent  être 
informés des intentions d’une non utilisation 
du  DMP  par  exemple  ou  du  défaut  de 
consultation de celui-ci dans un cas où celle-
ci aurait été utile pour le patient.
LASIP Santé a donc essayé de présenter dans 
une  note  particulière  les  quelques  cas  qu’il 
est  possible  d’identier  aujourd’hui  de  res-
ponsabilité  des  professionnels  de  santé.  Il 
s’agit  d’une  première  approche  qui  montre 
que le fonctionnement du DMP ne remet pas 
en  cause  a  priori  les  fondements  de  la  res-
ponsabilité médicale.
Dès  lors  que  le  DMP  sera  devenu  un  outil 
usuel pour les professionnels de santé et qu’il 
sera  largement  développé  en  France,  il 
deviendra  un  des  éléments  parmi  d’autres 
susceptible de fonder la décision médicale ou 
l’orientation des soins.
En tout état de cause, il sera toujours néces-
saire, sous le contrôle du juge, de déterminer 
un  lien  de  cause  à  eet  entre  un  éventuel 
préjudice subi et l’utilisation (ou la non utili-
sation)  du  DMP  associée  à  d’autres 
éléments ayant conduit à la prise de décision.
Le DMP est au service de la coordination des 
soins et ore aux professionnels de santé la 
possibilité d’accéder à une information beau-
coup  plus  complète  sur  leurs  patients.  Son 
utilisation est donc de nature à sécuriser et à 
renforcer davantage la prise de décision mé-
dicale ou l’orientation des soins.
L'ESSENTIEL
Le dossier médical personnel (DMP) est le dossier du
patient qui en contrôle les accès. Il est donc diérent
du dossier médical tenu par le professionnel de
santé.
Le DMP est facultatif pour le patient.
Le DMP ne se substitue pas au dossier « métier » du
professionnel de santé que celui-ci doit tenir, dès lors
qu’il administre des soins.
Le DMP n’est pas exhaustif. Il est destiné à rassembler
les éléments de prévention, diagnostiques et thérapeu-
tiques nécessaires à la coordination des soins.
Toute action eectuée sur le DMP est tracée.
Le médecin est tenu au respect du secret profes-
sionnel pour toute information portée à sa
connaissance dans l’exercice de sa profession.
La relation entre le médecin et le patient est fondée
sur la notion de contrat.
La responsabilité médicale est une responsabilité pour
faute : un lien de causalité doit être établi entre le pré-
judice subi et la faute du professionnel de santé.
Le DMP et
la responsabilité médicale
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Les règles relatives au
fonctionnement du DMP
modifient-elles le régime
de la responsabilité
médicale?
1) Lors de la création du DMP
Les obligations du professionnel de santé sont
posées par la loi (articles L1111-8 et L1111-15
du code de la santé publique) et s’inscrivent
dans le respect des règles désormais classiques d’in-
formation préalable et de recueil du consentement du
patient.
Le DMP ne peut être créé sans en informer préalable-
ment le patient et recueillir son consentement. Cette
information est matérialisée par la mise à disposition
de la brochure d’information préalable diusée par
l’ASIP Santé dans le respect des recommandations de
la CNIL. Le recueil du consentement est indiqué dans
le DMP lui-même lors de sa création (case à cocher).
La brochure d’information peut porter mention
des coordonnées du professionnel de santé ou de
l’établissement au sein duquel a été créé le DMP.
En l’état du droit, c’est au patient qui se prévaudrait
d’un manquement à l’obligation d’information préa-
lable et de recueil du consentement nécessaire à
la création de son DMP, d’en rapporter la preuve.
Le professionnel de santé pourra à son tour rapporter
la preuve de ce qu’il a rempli ses obligations.
A cet égard, plusieurs indices pourront concourir
utilement à la démonstration de la preuve tant pour le
patient que pour le professionnel de santé : le fait que
la création du DMP nécessite que le patient cone au
professionnel de santé sa carte vitale, que les dates du
consentement à la création et les autorisations sont
stockées dans le SI-DMP et que la brochure d’informa-
tion du patient comporte au dos la mention des nom
et coordonnées du professionnel de santé ainsi que la
référence à la délivrance du consentement à
la création du DMP portée sur le document remis au
patient lors de la création de son DMP.
La traçabilité des actions dans le DMP est évidemment
de nature à faciliter l’administration de la preuve.
2) À l’occasion
de l’alimentation du DMP
Conformément à l’article L1111-15 du code de la
santé publique, les professionnels de santé
doivent reporter dans le DMP, à l’occasion de
chaque acte ou consultation,
les éléments diagnostiques et thérapeutiques qu’ils
estiment nécessaires à la coordination des soins de
la personne prise en charge. Lorsque le patient est
hospitalisé, les professionnels des établissements de
santé habilités doivent reporter dans le DMP les
principaux éléments résumés relatifs à ce séjour.
Lorsqu’il lui est imputable, le défaut d’alimentation
d’un DMP par un professionnel de santé peut fonder
une action en responsabilité. En eet, en l’absence
d’éléments essentiels pour le diagnostic ou le traite-
ment, un autre professionnel de santé intervenant
ultérieurement à l’omission, pourrait voir sa propre
responsabilité engagée du fait de l’établissement
d’un diagnostic erroné ou du choix d’un traitement
inadapté, préjudiciables au patient.
Ce professionnel comme le patient pourraient sou-
haiter mettre en cause l’auteur de l’omission et tenter
de démontrer que le manquement de ce dernier est à
l’origine, en tout ou partie, du préjudice subi. Un -
faut d’alimentation du DMP par un professionnel de
santé peut être imputable à un tiers par exemple s’il
n’est pas en capacité technique d’utiliser le DMP
(système d’information d’un hôpital non adapté au
DMP).
Le DMP et la responsabilité médicale
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Le DMP ne change donc pas le régime juridique de la
responsabilité du professionnel de santé. En eet, le
patient devra établir la preuve du défaut de report
dans le DMP d’un document porteur d’une information
importante ou du non respect de son droit de mas-
quage, de suppression ou de destruction des données
contenues dans le DMP et, de façon cumulative, que
cette faute est à l’origine d’un préjudice prouvé.
3) La consultation du DMP
Celle-ci n’est possible que dans les conditions
d’autorisation d’accès délivrées par le patient ou
dans des cas particuliers prévus par la loi.
Sans qu’il soit nécessaire de démontrer l’existence
d’un préjudice subi par le patient, la consultation réali-
sée sans autorisation et en dehors du cadre légal
constitue un délit d’accès frauduleux dans tout ou par-
tie d’un système automatisé de données sanctionné
par une peine d’amende et/ou d’emprisonnement
conformément à l’article 323-1 du code pénal.
4) Lorsque la consultation
est autorisée
Elle est obligatoire de sorte que les juges pour-
raient être amenés à sanctionner le compor-
tement du professionnel de santé en cas de
défaut de consultation dont il serait démontré qu’il est,
en tout ou partie, à l’origine d’un acte médical (dia-
gnostic erroné ou traitement inadapté) qui se révéle-
rait préjudiciable au patient.
Pour apprécier le comportement du professionnel de
santé négligent, les juges appliqueront les méthodes
en usage c'est-à-dire, le plus souvent, par comparai-
son avec le comportement d’un professionnel de
santé normalement diligent placé dans les mêmes
conditions d’exercice.
En l’état du droit, ce manquement n’est donc pas par
lui-même constitutif d’une faute de nature à engager
la responsabilité médicale du professionnel de santé.
La traçabilité des actions de consultation permet
d’établir avec certitude le comportement diligent du
professionnel et de faire échec à toute recherche
infondée de responsabilité de la part de patients ou de
confrères.
En outre et d’une façon générale, il est légitime
d’armer qu’un manquement d’un professionnel de
santé à l’usage du DMP tant pour sa consultation que
pour son alimentation, ne pourrait être retenu contre
lui que sous réserve d’un déploiement signicatif du
DMP.
La responsabilité d’un
professionnel de santé
pourrait-elle être engagée
pour faute alors qu’il
n’a pas eu accès à une
information masquée par
le patient ?
Il convient tout d’abord de noter que le patient
peut toujours taire à son professionnel de santé
des informations alors qu’elles sont peut-être
utiles à l’établissement d’un diagnostic ou à la déter-
mination du meilleur traitement.
Le DMP ne fait donc que concrétiser pour certains
professionnels de santé cette liberté qu’a toujours eue
le patient vis-à-vis de son professionnel et qui carac-
térise aussi cette relation singulière. Il appartiendra
aussi au patient de comprendre les enjeux qui s’at-
tachent à donner une information complète au
professionnel de santé et à la perte de chance qu’il
peut subir en cas de rétention d’information. Cette
compréhension sera d’autant plus acquise que le
professionnel de santé aura appelé l’attention du
patient sur les risques encourus.
Le régime de la responsabilité s’appliquera de la même
façon qu’aujourd’hui : le professionnel de santé reste
tenu à une obligation de moyens. En cas de conten-
Le DMP et la responsabilité médicale
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Dossier Médical Personnel
Stratégie de sécurité
tieux, le juge appréciera si le professionnel de santé a
mis en œuvre tous les moyens nécessaires, en l’état de
l’art, pour apporter au patient les soins nécessaires. Il
ne pourrait lui être reproché de n’avoir pas eu connais-
sance d’une information cachée volontairement par le
patient. L’accès aux traces du DMP permettra d’objec-
tiver le masquage et apparaît ainsi plus protecteur des
droits du professionnel de santé.
Le juge devra apprécier, comme il le fait aujourd’hui,
l’ensemble des éléments lui permettant de se forger
une conviction au regard de la hauteur du préjudice
subit.
Les règles de fonctionnement du DMP ne modi-
fient pas les principes qui fondent le régime de
la responsabilité médicale. Les conditions parti-
culières d’application de ces règles au DMP, en
cas de survenance d’un conflit entre le patient
et les professionnels de santé, ne peuvent tou-
tefois être connues à l’avance. C’est la jurispru-
dence développée sous l’autorité du juge qui
permettra de dessiner une éventuelle particula-
rité du DMP au regard des règles de responsabi-
lité médicale.
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