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« LES » BATAILLES DU VERCORS (juin-juillet 1944)
Indique que le personnage figure dans « l’appendice 2 » en fin du digest
PRÉAMBULE
C’est le plan « Montagnards », grande idée stratégique, qui a été retenu pour le Vercors. Des camps dispersés dans tout
le massif et qui, en harmonie avec le débarquement allié en Provence renforcé de troupes aéroportées, prendraient à
revers les troupes ennemies stationnant ou remontant dans la vallée du Rhône. En d’autres termes, une forte dispersion
sur un vaste territoire boisé et accidenté de groupes très mobiles bien formés, bien armés, ne se concentrant et agissant
avec les unités aéroportées, qu’au jour « J » du débarquement Sud.
Ce projet va être esquissé, fin 1942, par Pierre Dalloz , montagnard expérimenté, résidant près de Sassenage et
connaissant bien la géographie du Vercors. Il va être assisté pour cela de quelques amis,
montagnards comme lui, dont Jean Prévost, le futur capitaine « Goderville ». Cette
ébauche de plan est présentée, à Lyon, à Yves Farge « Bessonneau » ou « Grégoire » ,
futur commissaire de la République pour la région Rhône Alpes. Ce dernier en parle alors
avec Jean Moulin « Max » puis, le 31 janvier 1943, revient à Grenoble confirmer l’intérêt
pris par l’envoyé du général de Gaulle.
Le 10 février, à l’issue d’un entretien, le général Delestraint « Vidal » (ci-contre), délégué
militaire national, adhère au projet et emporte ce dernier à Londres où il le présente au
général de Gaulle et à ses services.
Le 25 février 1943, il fait savoir à Dalloz que le projet est retenu et qu’une étude détaillée
doit immédiatement être lancée. Dalloz étend alors son groupe. Un état des ressources du
Vercors est établi par le commandant Pourchier, ancien directeur de l’Ecole de Haute
Montagne de Chamonix. Le plan d’utilisation militaire échoit au capitaine Alain Le Ray
« Bastide »1 qui s’adjoint trois officiers, dont le lieutenant Roland Costa de Beauregard « Durieux »2. De leur
côté, Pierre Dalloz et Yves Farge situent les terrains pour les opérations de parachutage et d’atterrissage dont l’étendue
plate et dégagée de Vassieux, propre à un terrain d’aviation.
Le projet Dalloz est devenu le plan « Montagnards » et, les 5 et 6 avril 1943, « Vidal » se le fait présenter sur place. Le
général fait simplement remarquer, en fin de visite, qu’il accepte le plan mais que si les blindés ne peuvent pas être à
l’aise dans le Vercors, il faudra, surtout pour la partie Nord, la pourvoir d’artillerie où, à la rigueur, de mortiers.
Hélas, le 9 juin, peu après cette rencontre, le général Delestraint3 est arrêté, par la Gestapo, à Paris. Et le 21 du même
mois, à Caluire, c’est Jean Moulin, qui a organisé une réunion pour pallier à la disparition de « Vidal » qui est capturé,
avec bien d’autres responsables de la Résistance, par Klaus Barbie3.
Avec ces deux grands responsables, très proches du général de Gaulle, l’un son frère d’armes ayant comme lui combattu
pour que l’armée se dote d’unités blindées, l’autre son envoyé personnel, porteur de grands pouvoirs, les fils reliant le
plan « Montagnards » au « sommet de la Résistance » sont dénoués et vont être difficiles à renouer. Dalloz
immédiatement parti pour Londres, puis pour Alger, va, selon l’expression de Le Ray, être « le pèlerin infatigable
plaidant pour le Vercors ».
Cependant cela ne suffira pas, car en réalité, si le plan « Montagnards » est connu de l’État-major allié, ne serait-ce que
par l’intermédiaire de leur délégué en France auprès de toute la Résistance du Sud-Est, le très courageux et très efficace
commandant Francis Cammaerts dit « Major Roger »4, il n’est plus, pour cet État-Major, lié au jour « J » du futur
débarquement en Provence.
La raison de ce décrochage est probablement liée au fait que les stratèges ne croient pas à une avancée rapide des troupes
débarquées. Et, lorsqu’ils auront vécu l’expérience de la lente progression du débarquement normand, ils ne changeront
pas de position5. Mais du fait du strict cloisonnement entourant chacune des futures opérations alliées (le secret étant
indispensable à la surprise !) il est probable que les services du général de Gaulle en charge du plan « Montagnards »
aient été tenus dans l’ignorance de ces évolutions de stratégie.
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1 Alain Le Ray deviendra, jusqu’à fin 1943, le 1er chef militaire du Vercors et, ensuite, le commandant des FFI de l’Isère
2 Costa de Beauregard, sous les ordres du colonel Huet chef militaire, assurera, pendant la bataille du Vercors, le
commandement du secteur Nord. Le secteur Sud étant confié au commandant Geyer « Thivollet »
3 « Vidal » mourra à Dachau, le 18 avril 1945, fusillé comme « NN » et Jean Moulin, reconnu comme le célèbre « Max » subira
le calvaire que l’on connaît et mourra le 8 juillet 1943 (voir « L’agonie de Jean Moulin » page 207)
4 Il restera au Vercors, près d’Huet, jusqu’à la dispersion, le 23 juillet.
5 Bien à tort, car il s’avèrera que le Vercors et les autres maquis du Dauphiné et de la Savoie ont été, bien avant la Libération,
les seuls maîtres du massif alpin. Au point que le plan allié au moment du débarquement de Provence qui prévoyait 3 mois pour
arriver à Grenoble puis Lyon n’a, en fait, requis que … 8 et 17 jours ! (voir page 240)