Nous faisons de vos spécialités Nous faisons de vos spécialités notrerespécspéc ialité not ialité É ditorial Le trouble psychosomatique : “quand le corps s’en mêle” Directeur de la publication : Claudie Damour-Terrasson La Lettre du Psychiatre Rédacteurs en chef : Pr C.S. Peretti (Paris) - Dr P. Nuss (Paris) Comité de rédaction Prs et Drs E. Bacon (Strasbourg) - F.J. Baylé (Paris) R. de Beaurepaire (Paris) - M. Benoit (Nice) - O. Blin (Marseille) P. Delbrouck (Saint-Nazaire) - M. Godfryd (Aulnay-sous-Bois) J.M. Havet (Reims) - C. Lançon (Marseille) - P.M. Llorca (ClermontFerrand) - P. Martin (Paris) - P.O. Mattei (Paris) - P. Robert (Nice) D. Servant (Lille) - F. Thibaut (Rouen) - B. Verrecchia (Brest) Comité scientifique Prs et Drs J.F. Allilaire, Paris (France) - C. Ballüs, Barcelone (Espagne) H. Beckmann, Wurzbürg (Allemagne) - G. Besançon, Nantes (France) D. Clark, Oxford (Grande-Bretagne) - G.B. Cassano, Pise (Italie) L. Colonna, Rouen (France) - J. Cottraux, Lyon (France) - J.M. 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Ferreri* e terme de “psycho-somatique” a été introduit en 1818 par Henroth et orthographié alors avec un tiret signifiant la dualité mais aussi l’interrelation de la psyché et du soma. Question posée de longue date, évoquée déjà par Hippocrate et l’École de Cos au Ve siècle avant J.-C. Question toujours d’actualité, évoluant avec les conceptions et les connaissances sur le fonctionnement mental et somatique, qui se situe à un moment particulier, dans un contexte culturel déterminé. Chacune des grandes théories classiques (psychanalytique, cognitivo-comportementale et bio-psycho-sociale) a élaboré des conceptions pour éclairer la survenue des troubles psychosomatiques. Les premières approches psychosomatiques issues de la psychanalyse se réfèrent implicitement à “l’angoisse de tension” dont on sait l’expression corporelle décrite par Freud. Elle apparaît “là et maintenant”, sans dimension symbolique ; elle est liée à un défaut de réalisation des pulsions sexuelles, à une incapacité de dégagement dans le fantasme ou la sublimation. L’angoisse de tension est à l’origine des névroses actuelles : névrose d’angoisse, névrose traumatique, hypochondrie névrotique, les deux dernières étant reconnues par certains auteurs comme des troubles psychosomatiques. L’angoisse de tension s’oppose à l’angoisse signal des névroses symboliques, hystérique, phobique et obsessionnelle, qui naît de la menace d’un danger et d’un châtiment symbolisé par la castration, à l’origine du refoulement. Cependant Groddeck, créateur du “ça”, se réfère au modèle de l’hystérie, chaque partie du corps a une intentionnalité expressive et sert de support à une symbolisation qui peut être comparée au rêve. Certes, il décrit une anatomie affective, imaginative, qui semble naïve, mais dont les prolongements se retrouvent dans certaines conceptions actuelles. Des approches ultérieures évoquent la spécificité du refoulement, l’impossibilité “du retour du refoulé”, un “enfouissement des conflits” lors d’un trouble psychosomatique. Le problème de la spécificité structurelle, organisationnelle, conflictuelle et dynamique des troubles psychosomatiques s’inscrit comme un des fondements de la médecine psychosomatique avec le statut du corps : fantasmatique et réel. * Service de psychiatrie, hôpital Saint-Antoine, Paris. La Lettre du Psychiatre - Vol. III - n° 5-6 - mai-juin 2007 79 Éditorial É ditorial 80 Une spécificité est recherchée dans l’organisation de la personnalité qui favoriserait l’apparition d’un trouble psychosomatique. Inaugurée par Dunbar, cette recherche est poursuivie par des études épidémiologiques et avec la mise en évidence de traits de personnalité prédisposant à certaines maladies, notamment cardiovasculaires, et la description par Fielman et Rosenman de la personnalité de type A, encore discutée dans sa relation à la vulnérabilité biologique. D’autres spécificités, conflictuelles selon le type de maladie cette fois, sont étudiées par Alexander qui décrit deux émotions antagonistes : l’une agressive, l’autre inhibée. Ces émotions surgiraient lors de conflits inconscients réactivés par leur correspondance avec des événements de vie. Le déficit de verbalisation et de fantasmatisation ne permet pas la décharge de cette agressivité et aboutit à une “excitation” du système nerveux autonome qui innerve les muscles lisses et les viscères dont les perturbations réalisent “la névrose d’organe”, délaissée actuellement. Le déficit de mentalisation fonde le concept de pensée opératoire, élaboré par Fain, Marty, M’uzan et David qui retiennent une modalité singulière du fonctionnement de la pensée. Elle est caractérisée par un discours factuel, laissant peu de place aux émotions et aux fantasmes, donnant à la relation une dimension impersonnelle : le symptôme psychosomatique, dans cette approche, n’a pas de sens symbolique. La théorie a été remaniée en tenant compte des possibilités dynamiques du sujet, du contexte environnemental et des vulnérabilités biologiques. L’alexithymie est une notion clinique voisine, décrite par Sifneos. Évaluée par des études épidémiologiques, elle n’est pas spécifique des troubles psycho-somatiques, bien qu’elle y soit fréquente, et apparaît comme une conception transnosographique. La spécificité dynamique insiste avec l’école kleinienne sur les fixations libidinales et leur corrélation lors des mouvements de régression en particulier orale et anale (fantasme sadique dans la recto-colique hémorragique). L’apport des théories cognitivo-comportementales, dominées par la notion de défaut d’apprentissage, se situe essentiellement dans la gestion corporelle de l’angoisse par la relaxation, la désensibilisation et la restructuration cognitive pour modifier les schèmes de pensées délétères. Sur le registre conceptuel, la théorie fait appel au comportement opérant de Skinner, au personnal construct de Kely où l’individu se construit par des expériences individuelles successives mais aussi sociales “d’imitation”, comme le précise Bandura. Ces différentes expériences aboutissent à une empreinte cognitive des schémas de pensée et des postulats silencieux dont la perturbation est source de stress, de conflits dans certaines situations (Beck). L’importance de l’environnement, souvent négligée, s’affiche dans l’abord bio-psycho-social en insistant sur les capacités d’adaptation du sujet au contexte environnemental. La survenue et l’évolution d’un trouble psychosomatique sont liées en partie au dysfonctionnement de la relation du patient avec autrui dans l’univers professionnel ou le milieu familial. Il s’agit dès lors d’apprécier la place et la fonction du patient et de chacun des membres de l’entourage et de lire la dynamique des interrelations. L’étiologie des troubles psychosomatiques est complexe, comme le soulignent implicitement les différentes théories. Elle implique de multiples facteurs et comporte de nombreuses inconnues : une certaine prudence s’impose pour cerner la relation qui existe entre psyché et soma. L’abord pathogénique, mettant en jeu différents mécanismes et conceptions, paraît davantage heuristique qu’une hypothèse étiologique univoque qui tendrait à réduire la réflexion. Cette perspective oblige à caractériser le trouble psychosomatique en insistant sur la singularité clinique du trouble somatique dont la dimension psychologique est prévalente dans sa survenue et son évolution. Il s’oppose ainsi aux autres troubles somatiques dont la dimension psychologique est toujours présente, mais contingente. La formation du “psychosomaticien” est ainsi posée. Elle concerne surtout les médecins généralistes ou les somaticiens d’autres spécialités, qui suivent la majorité des patients. La formation par les groupes Balint, pratiquée et conceptualisée notamment par Sapir et Alby, est reconnue pour la qualité de son expérience relationnelle. L’intérêt de la formation à la pratique cognitivo-comportementale, à la relaxation est une aide thérapeutique en fonction des troubles et de la personnalité des patients. Si le trouble psychosomatique interroge le clinicien sur son approche conceptuelle et son possible dogmatisme, il interroge aussi le patient sur les registres relationnel, existentiel et une éventuelle vulnérabilité biologique qui tissent sa propre histoire, comme l’évoquent des articles de La Lettre du Psychiatre sur le thème “Quand le corps s’en mêle”. Cette connaissance complexe oriente le clinicien pour proposer l’approche thérapeutique la plus adaptée à la problématique et aux disponibilités du patient. Ces différentes approches ne s’excluent pas mutuellement et peuvent être complémentaires dans le temps en fonction de l’évolution du patient et de la représentation de ses troubles. ■ La Lettre du Psychiatre - Vol. III - n° 5-6 - mai-juin 2007