C'est la raison pour laquelle, seule une autorité qui tire sa légitimité de la constitution et
de la loi peut procéder à de telles atteintes : l'autorité judiciaire, parfaitement définie
dans le commentaire de l'ordonnance du 28.12.1958 écrit en 1959 par Jean CHAZAL
Président de Chambre à la Cour d'Appel de Paris et ancien Juge des Enfants.
"Parce que judiciaire, elle confère aux familles et aux mineurs l'ensemble des garanties
que tout justiciable est en droit d'attendre de la justice de son pays :
- Garantie d'indépendance d'abord, le juge dans sa fonction juridictionnelle ne
recevant de directives ni du pouvoir exécutif ni des autorités administratives ;
- Garantie résultant du caractère "légal" de l'intervention, ainsi que nous
l'avons déjà signalé ;
- Garantie dans l'exigence de la preuve des faits qui motivent l'intervention
(conduite asociale ou d'opposition d'un mineur, sévices ou privation de soins,
circonstances psychologiques, familiales, économiques ou sociales qui font que l'enfant
est livré à lui-même ou en état de carence...) ;
- Garantie enfin dans le fait que le débat devant le juge doit avoir un caractère
contradictoire, l'ordonnance du 23 décembre 1958 disposant que "le mineur, ses
parents ou gardiens peuvent faire choix d'un conseil ou demander au juge des enfants
qu'il leur en soit désigné un ".
Mais affirmer le caractère judiciaire de l'intervention, c'est aussi savoir lui donner ses
limites.
L'indépendance des Juges est sans doute un sujet récurrent, mais n'est pas l'objet de ce
groupe de travail sauf à préciser que l'indépendance est d'autant plus forte qu'elle est
nourrie de formation initiale et continue et de garanties statutaires qui mériteraient d'être
examinées notamment en ce qui concerne le déroulement des carrières : le juge des
enfants par ses fonctions spécialisées et territorialisées est appelé à mettre en place des
politiques publiques. Cette fonction doit être prise en compte par les services judiciaires
comme préparant naturellement ce magistrat à d’autres fonctions de responsabilité tant
au siège qu’au parquet.
Le caractère légal de l'intervention de ces mêmes juges ne nécessiterait pas d'étude
particulière de ce groupe si les faiblesses de l'organisation judiciaire et des moyens mis
en oeuvre, mais aussi certains vides juridiques, n’entraînaient les juges vers des
pratiques qui s’éloignent des principes généraux du droit civil, portant gravement
atteinte aux droits des familles sans que cela puisse faire l'objet de la censure naturelle
de l'appel dans des conditions satisfaisantes.
En revanche la garantie du caractère contradictoire de la procédure d'assistance
éducative est au centre du travail du groupe. Car si cette garantie fut une affirmation de
principe de la loi (art. 16 et art. 1187 du nouveau code de procédure civile) elle était
déjà une revendication des travailleurs sociaux au début des années 70 et se présente
aujourd'hui comme une revendication des familles que l'association ATD Quart Monde
soutient dans une "note en vue d'un travail d'évaluation sur le placement des enfants" en