1 " Ann. Kinésithér., 1985, t. 12, © Masson, Paris, 1985 nO MÉMOIRE 4, pp. 137-144 Influence de la position de la hanche sur l'activité isocinétique maximale des muscles polyarticulaires sagittaux de la cuisse Pierre PORTERO, MG.MK Membre du Cercle d'Études Kinésithérapiques, E.F.O.M, Ce travail a pour but de déterminer l'influence de la position de la hanche et de la vitesse du mouvement sur l'activité isocénique des extenseurs et des fléchisseurs du genou. Nous al/ons donc nous intéresser plus particulièrement au droit antérieur et aux ischiojambiers biarticulaires. Les mesures ont été réalisées sur trente sujets jeunes, douze femmes et dix-huit hommes, présentant tous un genou droit sain au moment de l'expérimentation. Les résultats concernent les couples de forces maximaux et les angles correspondant à ces couples que nous appelons: angles d'efficacité maximum (a.e.m.). Ces résultats concernent les deux groupes musculaires en position hanche fléchie, en position hanche tendue et Introduction Les muscles polyarticulaires sagittaux de la cuisse réalisent l'extension et la flexion du genou mais leur action est conditionnée par la position de la hanche. Certains auteurs (18, 19) pensent que les extenseurs du genou sont plus forts hanche tendue que hanche fléchie du f~it de la Travail réalisé dans le service du médecin principal C. Y. Guezennec, Médecin-chef de la Division de Physiologie Métabolique et Hormonale du Centre d'Études et de Recherches de Médecine Aérospatiale, Paris. Tirés à part: P. PORTERa, à l'adresse ci-dessus. 118 bis, rue de Javel, F75015 Paris le tout à trois vitesses angulaires différentes (900/, 600/, 300/). Nous constatons qu'il n y a aucune différence entre les couples des extenseurs hanche fléchie et hanche tendue. Pour les a.e.m. la remarque est identique. Pour les fléchisseurs, les couples sont plus importants hanche fléchie dans un rapport de 1,61 avec des a.e.m. deux fois plus importants dans cette position. La relation force-vitesse se vérifie pour les deux groupes musculaires, cependant lorsque les ichio-jambiers sont en état d'insuffisance active, ils paraissent moins sensibles à la vitesse. Ces résultats se rapportent à l'ensemble de la population et confirment ceux obtenus pour les deux sous-groupes. mise en tension du droit antérieur. Le même raisonnement peut-être tenu pour les ichiojambiers, plus forts hanche fléchie. Ces hypothèses se basent sur la relation tension-longueur (11, 24) qui induit les notions d'insuffisance active et de longueur de repos. Ceci souligne l'importance des rapports entre les différentes protéines du système contractile (14). Cette notion de tension-longueur démontrée pour la contraction isométrique peut s'appliquer à la contraction dynamique, cette dernière étant une succession d'instantanés isométriques. La contraction dynamique à vitesse constante, appelée isocinétique, lors de mouvements allers- 138 Ann. Kinésithér., 1985, t. 12, nO 4 Age Axe de rotation ;r--(1i 111 1 Ii,' 1 Iii ,'i ,;1 1 Bras de r--- h--r-1 i : _ ~Illii \ j 1 1 -1 ~ 1 , 1 Fig. 2. - Le dynamomètre. Nombre de Nombre de sujets féminins sujets masculins Fig. 1. - Histogramme '-Ti -1 1 de la population. retours sollicitent les éléments élastiques-séries musculaires déjà étudiés aussi bien dans des conditions analytiques (7) que fonctionnelles (5). L'un des principaux problèmes posés est la détermination de la position de la hanche. La position assise est souvent choisie comme représentative de la flexion coxo-fémorale (6, 10, 26) mais il persiste une imprécision quant à la position réelle; certains auteurs parlent de maintien sans précision (1). La position de fente en latéro-cubitus a été utilisée (28) mais cette position n'apparaît pas favorable à la réalisation d'efforts maximaux. La grande disparité des méthodes et parfois leur manque de rigueur ne permettent pas toujours de comparer les résultats. Aussi à partir de récents travaux sur les amplitudes de flexion-extension de la coxo-fémorale (21), nous avons essayé de réaliser un protocole aisé~ent reproductible. Matériel et méthode POPULA nON Elle se compose de trente sujets non sédentaires, âgés de dix-huit à vingt-huit ans, présentant tous un genou droit sain au moment de l'expérimentation. Nous pouvons distinguer deux sous groupes (fig. 1) : - Douze femmes étudiantes en kinésithérapie. - Dix-huit hommes, étudiants en kinésithérapie. ~i6ne de base 0 Nm 105° 66° 45° Ligne ~Et8e: Fig. 3. - Extrait d'enregistrement. MATÉRIEL Les mesures sont réalisées à l'aide d'un dynamomètre . isocinétique Cybex II. Ce système permet de mesurer les couples de forces développés par les muscles au niveau d'une articulation lors de mouvement à vitesse constante. Le sujet ne peut réaliser que la vitesse préréglée sur la machine, d'autre part celle-ci s'adapte à la variation de la force lors du mouvement. Le système est composé du dynamomètre proprement dit, du sélecteur de vitesse et de l'enregistreur. Le dynamomètre comporte un axe de rotation à partir duquel part un bras de levier mobile (fig. 2). L'axe de rotation du dynamomètre exerce sur ce dernier un couple de forces qui est enregistré tout au long du mouvement. Le sélecteur de vitesse permet de programmer une Ann. Kinésithér., 1985, t. 12, n° 4 Fig.4 Fig. 5 Fig. 4. - Position hanche droite fléchie. a - Bassin antéversé. Fig. 5. - Position hanche droite tendue. a - Bassin rétroversé. vitesse angulaire constante comprise entre 0°/", 300°/". L'enregistreur possède un double canal qui permet d'avoir en parallèle l'évolution du couple de forces et de la course angulaire (fig. 3). Le couple de forces est exprimée en Newtom.mètre (N.m) et la vitesse angulaire en degré par seconde o/". MÉTHODE Pour la réalisation du protocole, nous tenons compte de différents facteurs : d'une part la position de la hanche et d'autre part la vitesse d'exécution de l'exercice. La situation hanche fléchie est obtenue en position assise, le bassin antéversé (fig. 4). Il est demandé au sujet de maintenir cette antéversion durant toute la durée de l'exercice. Il est à noter que ce maintien n'est pas constant, ceci est particulièrement observé lors de l'extension et d'autant plus que la vitesse angulaire est faible. Néanmoins on peut constater que le degré de la flexion de hanche sans être maximum se trouve dans un secteur proche de ce maximum. Sans contrôle, le bassin se place en rétroversion et entraîne la hanche vers l'extension, ce qui fausse l'intervention des muscles polyarticulaires. La situation hanche tendue est obtenue à partir du décubitus, le membre inférieur gauche maintenu en triple flexion par le sujet (fig. 5). Le bassin, de cette façon, est amené en rétroversion, la hanche droite est donc pratiquement en extension maximum. Il est à noter que l'on observe très peu de variations de la position de départ et ceci aussi bien lors de l'extension que lors de la flexion du genou. En position hanche fléchie, le segment crural est maintenu sur la table par deux sangles : une distale et une proximale (fig. 4). En position hanche tendue, le segment crural est maintenu seulement par une sangle distale, la stabilité proximale étant assurée par le contrôle du bassin par l'intermédiaire du membre inférieur gauche (fig. 5). Le secteur articulaire exploré est de 0° - 105°. Lors de l'exécution des mouvements il est demandé au sujet d'aller au maximum de l'amplitude permise. , _ 139 L'extension est visualisée par un repère et la flexion par le contact du talon en arrière avec la table. Cependant lors de l'extension du genou en position hanche fléchie, on demande au sujet de ne pas chercher à aller en extension maximum du genou. En effet, en fin d'amplitude du fait de la tension passive des ichiojambiers, si le sujet veut atteindre l'extension maximum du genou, il est obligé de relâcher le maintien de l'antéversion du bassin. Ceci entraîne donc une diminution de l'angle de flexion de la hanche. Lors de la flexion du genou en position hanche tendue, la tension passive du droit antérieur ne gêne par la flexion car cette dernière ne dépasse pas 105°. Les vitesses d'exécution des mouvements sont successivement de 90°/", 60°/" et 30°/". Avant de réaliser les mesures le sujet réalise une ou deux contractions submaximales à la vitesse des mouvements qui suivront. Puis il est demandé au sujet de réaliser des contractions maximales. Les mesures se font sur trois ou quatre allers-retours. C'est le meilleur résultat qui est pris en compte. Entre chaque série, le sujet se repose environ une minute, temps nécessaire à la vérification du tracé précédent et à la modification de la vitesse sur le sélecteur. Pour éviter les erreurs à la lecture du graphe, il est indispensable d'étalonner l'appareil enregistreur. D'une part, il faut placer le stylet inscripteur du couple de forces sur la ligne de base et d'autre part amener le genou droit en extension maximale et placer le stylet inscripteur de la course angulaire sur la ligne de base correspondante. Il est à noter que le constructeur de l'appareil donne une erreur de + ou - 5° pour les mesures d'amplitudes du genou (8). Résultats Nous présentons dans ce chapitre les résultats sur l'ensemble de la population. Ceux concernant les deux sous-groupes masculin et féminin sont confirmés par l'étude générale. Les calculs ont été réalisés à l'aide d'un micro-ordinateur Hewlett-Packard 85. Les couples de forces sont exprimés en pourcentage de la valeur maximale obtenue par les extenseurs du genou en position hanche tendue à la vitesse de 30°/", cette valeur est donc le 100 %. Ce choix a été arbitraire. Les valeurs angulaires sont exprimées en valeurs absolues. Nous donnons les moyennes et les écarts standards à la moyenne (e.s.m.). Les tests de significativité ont été réalisés à partir d'analyses de variances et nous présentons le test de T de Student pour un seuil tel que p < 0,05. .......oiiIIoii 140 Ann. Kinésith ér., 1985, t. 12, n° 4 1. - Couples de forces des extenseurs et des fléchisseurs fléchie - H.T. : hanche tendue. TABLEAU hanche 100 99,1 ± Flech. Ext.2,15 36 29,4 27,6 24,3 91,5 78,4 2,43 1,72 1,55 1,89 1,94 1,09 1,4 45,1 87,5 50,1 74,3 1,23 en fonction de la position de la hanche et de la vitesse. H.F. : 900/" 600/" Couples (%) II. - Angles d'efficacité maximale des extenseurs et des fléchisseurs en fonction de la position de la hanche et de la vitesse. Les valeurs représentent les moyennes calculées sur la totalité des sujets les écarts-standards à la moyenne (e.s.m.). TABLEAU ± 62,37 Flech. 65,93 Ext.0,92 1,24 24,33 48,57 30,03 55,83 36,3 1,88 1,28 1,27 1,99 1,63 1,08 59,13 51,37 51,6 59,6 64,9 1,54 Couple 90 600/" 01" Angles (Degrés) % 100 T l degrés 90 Bo Ext. 70 _--1----l-- T"-_- 80 1': 50 60 40 30 Fig. 7. - Diagramme angle/vitesse. 60 r 1 3D 50 40 o Vitesse -- ---- 1 70l I__ ___ 90 °/1160 ;Fléch. .... -_I; -- .•• Ext. --_ T .-_-.l. -- ~ ~ , T 1 Fléch. -.r..--- .30 Vi 30 Fig. 6. - Diagramme ------- hanche tendue -- 60 90 tasse ,/" couple/vitesse. moyenne ± e.s.m. hanche fléchie l Le tableau et la figure 6 expriment les valeurs des couples de forces des extenseurs et fléchisseurs du genou en fonction de la position de la hanche et de la vitesse du mouvement. t ,*- ------- hanche tendue -- moyenne ± e.s. m. hanche fléchie Le tableau II et la figure 7 expriment les valeurs des angles d'efficacité maximum (a.e.m.), que nous définissons comme étant les angles correspondant aux couples de "forces maximum Ann. Kinésithér., TABLEAU III. - Signijicativité des différences entre couples des extenseurs, en fonction de la position et de la vitesse. H.F H.F p p <S Svp N.S. Sp pN.S. P 60 90 < 0.01 H.F H.T 30 H.F 90 < 0.01 pS0.01 < 0.01 0.05 30 Ext. 60 H.F H.T H.T 90 60 H.T A. 90 H.F H.T TABLEAU IV. - Signijicativité des différences entre couples des fléchisseurs, en fonction de la position et de la vitesse. TABLEAU VI. - Signijicativité des différences entre a.e.m. des fléchisseurs, en fonction de la position et de la vitesse. Svp p <H.F S p <PS0.05 P 60 <900.01 p < 0.01p <S0.01 90 30 H.T H.F S0.01 0.01 vN.S. vN.S Spv p H.F P <90 0.01p <S 30 60 H.F H.T 90 S0.01 0.01 <H.T C. 90 H.T 0.01 p <S0.05 30 Flech.60 H.F H:T 141 TABLEAU V. - Signijicativité des différences entre a.e.m. des extenseurs, en fonction de la position et de la vitesse. Sv N.S. Sp pN.S. P p60 0.01 60 30 90 H.F H.T 90 H.F <pS0.01 pH.T << 0.01 < 0.01p pN.S. <S0.01 p C. 90 1985, t. 12, nO 4 60 90 H.T A. 90 H.F N.S. : Différence non significative. S : Différence significative. H.T p v: : Fonction de la position. Fonction de la vitesse. (fig. 3), en fonction des mêmes paramètres que précédemment. Les tableaux IlL IV, Vet VI traitent de la significativité des différences entre couples (tableau 1) et a.e.m. (tableau II) dans les différentes situations. significatives pour les extenseurs de genou (tableau III) et ceci quelle que soit la vitesse. Par contre les fléchisseurs sont significativement plus forts hanche fléchie que hanche tendue (tableau IV) et ceci quelle que soit la vitesse dans un rapport moyen de 1,61, soit environ 60 % de plus. ÉTUDE Les angles d'efficacité maximum EN FONCTION DE LA POSITION DE LA HANCHE Les couples de forces Les différences entre les couples obtenus hanche tendue et hanche fléchie ne sont pas L'étude des a.e.m. montre pas de différences significatives pour les extenseurs sauf à 30°/" (tableau VI)," les valeurs sont globalement deux fois plus importantes hanche fléchie que hanche tendue. 142 Ann. Kinésithér., 1985, t. 12, n° 4 classique de le dire. Ceci peut se concevoir du fait même de sa fonction lors de la marche Les couples de forces durant laquelle il n'intervient que très peu. Il Ils croissent de façon inverse à la vitesse du est plutôt considéré comme une sangle et joue son hysterésis naturel (3, 23). mouvement (tableau L fig. 6). Nous avons considéré comme négligeable le Pour les extenseurs, les différences sont. significatives quelle que soit la position de la léger mouvement de rétroversion du bassin observé lors de l'extension du genou en position hanche (tableau III). hanche fléchie. Pour les fléchisseurs, les différences sont L'étude angulaire nous montre que les extensignificatives sauf dans deux cas : entre 30°/" seurs trouvent leur efficacité maximale dans un et 60°/" d'une part et 60°/" et 90°/" d'autre secteur angulaire variant entre 50 et 60 degrés, part (tableau IV). en fonction de la vitesse. Nous retrouvons les résultats de travaux précédents (18,28). Les Les angles d'efficacité maximum variations des valeurs en fonction de la vitesse Ils varient en fonction de la vitesse et ceci ont été observées sans que l'on puisse apporter quelle que soit la position de la hanche. une explication valable (1). Cependant, cette variance ne se fait pas dans le Dans l'ensemble nous pouvons dire que le même sens pour les extenseurs et les fléchisseurs. droit antérieur s'adapte parfaitement aux variaLa valeur angulaire diminue quand la vitesse tions de sa course et que la position de la hanche augmente pour les extenseurs alors qu'elle n'influe pas sur le développement de la force. augmente pour les fléchisseurs (tableau II et fig. 7). Toutes les différences sont significatives Les fléchisseurs (tableau V et VI). Pour ces muscles ischio-jambiers, la position de la hanche a un rôle prépondérant. Ces muscles sont presque tous polyarticulaires et réalisent Discussion pour la plupart une extension de hanche et une flexion de genou. Les notions d'insuffisance EN FONCTION DE LA POSITION DE LA HANCHE active et de longueur de repos trouvent ici toute leur signification. Ils sont donc en état d'insuffiLes extenseurs sance active en position hanche tendue et du fait Les résultats statistiques nous permettent de de leur structure très fibreuse (9, 19, 29), ils ont constater que la position de la hanche n'influe une faible capacité à s'adapter à cette faible pas sur le développement de la force maximum. course et ne peuvent donc pas développer une Ceci va à l'encontre de ce qui est couramment force maximum. A l'inverse en position hanche admis (16, 17). Ces résultats peuvent s'expliquer fléchie ces muscles se trouvent en situation très favorable. Ces observations faites en situation de différentes façons : - la constitution histochimique du droit anté- dynamique sont tout à fait en accord avec celles rieur, 50 à 70 % de fibres Ii, c'est-à-dire de fibres faites en isométrique (11, 24, 30). L'étude angulaire confirme les remarques à contraction rapide et à force importante (15, précédentes. L'a.e.m. varie de façon importante 25), met en évidence ses propriétés phasiques. et ceci montre bien la mauvaise adaptation de Il interviendrait donc de façon identique lors du mouvement d'extension du genou indépendam- ce groupe musculaire en situation d'insuffisance ment de la position de la hanche. De plus, de active. Le facteur tension-longueur est plus part sa constitution morphologique, il peut important que la longueur du bras de levier au adapter sa course par une grande facilité à genou dè ces muscles. Les valeurs angulaires que nous obtenons en l'allongement et au raccourcissement; - la force que peut développer le droit antérieur position hanche tendue correspondent à celles ne serait pas aussi importante qu'il n'est obtenues par d'autres auteurs en position assise, ÉTUDE EN FONCTION DE LA VITESSE Ann. Kin ésithér., 1985, t. 12, nO 4 en isométrique comme en dynamique (1, 26,30). Ces différences sont certainement dues à la position différente de la hanche. Nous ne pensons pas que cette différence soit due au fait que notre expérimentation se soit déroulée en dynamique, une grande corrélation existant entre les résultats isométriques et dynamiques. EN FONCTION DE LA VITESSE DU MOUVEMENT Les couples de forces La relation force-vitesse ayant déjà été l'objet de très nombreuses études (18, 22, 27), nous ne ferons que quelques remarques : - pour les extenseurs la relation est évidente mais étant donné le petit nombre de vitesses explorées et les conditions expérimentales, il est .tout à fait logique que nous ne retrouvons pas exactement forme de la courbe de Hill (13) ; - pour les fléchisseurs, l'existence d'une relation force-vitesse n'est pas aussi évidente en position hanche tendue, c'est-à-dire en état d'insuffisance active. Ceci tendrait à montrer une moins bonne adaptation de ces muscles à la vitesse dans cette situation. Cette observation mériterait une étude plus approfondie sur un échantillonnage de vitesses plus élevées. Les angles d'efficacité maximum Les variations des a.e.m. en fonction de la vitesse déjà observées par ailleurs ne peuvent être expliquées de façon satisfaisante. OBSERVATIONS GÉNÉRALES Nous avons souvent observé en fin de mouvement un freinage engendrant une diminution de l'amplitude. Ce phénomène de freinage des muscles antagonistes suit la contraction maximale du groupe musculaire agoniste. Il est la conséquence de deux facteurs: l'étirement des éléments élastiques-séries et la force contractile. Le travail musculaire avec ce type de dynamomètre se réalise suivant des cycles de raccourcissement et d'allongement. La phase d'allongement correspond toujours à un travail freinateur des antagonistes en fin de mouvement. Lors de 143 cette phase, les éléments élastiques-séries sont mis en tension et stockent de l'énergie qu'ils restitueront en partie lors de la phase concentrique. Il y a donc sommation d'une partie de l'énergie élastique et de l'énergie chimique propre à la contraction. Les antagonistes sont en situation de force explosive (12) lors du retour et le couple de forces développé peut atteindre des valeurs proches de celles obtenues en isométrique. Ces différents phénomènes ont été déjà observés et décrits lors d'activités tels la marche et la course (5), le saut (2) mais également lors de mouvements allers-retours (7). Ces observations lors de notre expérimentation ont été faites surtout à 90°/" mais le phénomène est beaucoup plus évident à des vitesses de 180 à 240°/" (4) car l'énergie stockée n'a pas le temps de se dissiper sous forme d'énergie . INCIDENCES KINÉSITHÉRAPIQUES Les résultats de cette étude peuvent amener un certain nombre de réflexions sur la kinésithérapie de l'ajustement musculaire du genou; en particulier : - Il est inutile de faire travailler le quadriceps une fois en position hanche fléchie et une fois hanche tendue. Pour le droit antérieur, il s'agit du même exercice. Le confort du patient est le critère de choix. - L'angle d'efficacité maximum des extenseurs (compris entre 50 et 65 degrés) impose la direction de la résistance perpendiculairement à cet angle, exemples : a) charge indirecte, le sujet assis, la première poulie organise le fil perpendiculairement à environ 60° de flexion du genou; b) charge directe, le sujet couché, l'inclinaison de la cuisse doit être de 60° par rapport à l'horizontale; c) une résistance manuelle doit également tenir compte de cette orientation. - L'angle d'efficacité maximum des fléchisseurs est déterminé par la position de la hanche. Le travail de ces muscles doit se faire à environ 30° de flexion du genou lorsque le sujet est en décubitus dorsal. S'il est assis bassin r 144 Ann. Kinésithér., 1985, t. 12, n° 4 maintenu activement ou non, l'angle de choix est d'environ 60° de flexion du genou. Pour automatiser un contrôle de protection motrice, du fait de l'utilisation du freinage dans la fonction de ces muscles, le kinésithérapeute doit éduquer la vitesse du mouvement entre deux repères donnés. Conclusion A la suite de cette étude, nous constatons que la position de la hanche n'influe pas sur le travail isocinétique des extenseurs du genou. Le droit antérieur semble donc participer de façon égale quelle que soit la position de la hanche. Au contraire les ischio-jambiers sont très sensibles à la position de la hanche. L'explication de ces phénomènes passe par la structure musculaire et les concepts classiques de biomécanique mais également par la typologie des fibres de ces différents muscles. Ce travail devrait amener le thérapeute vers une meilleure compréhension de la rééducation du genou, tant du point de vue analytique que de la reprogrammation motrice. Bibliographie 1. 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