AK1985_12_4_137-144

publicité
1
"
Ann. Kinésithér., 1985, t. 12,
© Masson, Paris, 1985
nO
MÉMOIRE
4, pp. 137-144
Influence de la position de la hanche
sur l'activité isocinétique
maximale des muscles polyarticulaires
sagittaux de la cuisse
Pierre PORTERO,
MG.MK
Membre
du Cercle d'Études
Kinésithérapiques,
E.F.O.M,
Ce travail a pour but de déterminer
l'influence de la position de la hanche et de
la vitesse du mouvement sur l'activité isocénique des extenseurs et des fléchisseurs du genou.
Nous al/ons donc nous intéresser plus particulièrement au droit antérieur et aux ischiojambiers biarticulaires.
Les mesures ont été réalisées sur trente sujets
jeunes, douze femmes et dix-huit hommes,
présentant tous un genou droit sain au
moment de l'expérimentation.
Les résultats concernent les couples de forces
maximaux et les angles correspondant à ces
couples que nous appelons: angles d'efficacité
maximum (a.e.m.). Ces résultats concernent
les deux groupes musculaires en position
hanche fléchie, en position hanche tendue et
Introduction
Les muscles polyarticulaires sagittaux de la
cuisse réalisent l'extension et la flexion du genou
mais leur action est conditionnée par la position
de la hanche. Certains auteurs (18, 19) pensent
que les extenseurs du genou sont plus forts
hanche tendue que hanche fléchie du f~it de la
Travail réalisé dans le service du médecin principal C. Y.
Guezennec, Médecin-chef de la Division de Physiologie Métabolique et Hormonale du Centre d'Études et de Recherches de
Médecine Aérospatiale, Paris.
Tirés à part:
P. PORTERa, à l'adresse
ci-dessus.
118 bis, rue de Javel, F75015 Paris
le tout à trois vitesses angulaires différentes
(900/, 600/, 300/).
Nous constatons qu'il n y a aucune différence entre les couples des extenseurs hanche
fléchie et hanche tendue. Pour les a.e.m. la
remarque est identique.
Pour les fléchisseurs, les couples sont plus
importants hanche fléchie dans un rapport de
1,61 avec des a.e.m. deux fois plus importants
dans cette position.
La relation force-vitesse se vérifie pour les
deux groupes musculaires, cependant lorsque
les ichio-jambiers sont en état d'insuffisance
active, ils paraissent moins sensibles à la
vitesse.
Ces résultats se rapportent à l'ensemble de
la population et confirment ceux obtenus pour
les deux sous-groupes.
mise en tension du droit antérieur. Le même
raisonnement peut-être tenu pour les ichiojambiers, plus forts hanche fléchie. Ces hypothèses se basent sur la relation tension-longueur
(11, 24) qui induit les notions d'insuffisance
active et de longueur de repos. Ceci souligne
l'importance des rapports entre les différentes
protéines du système contractile (14). Cette
notion de tension-longueur démontrée pour la
contraction isométrique peut s'appliquer à la
contraction dynamique, cette dernière étant une
succession d'instantanés isométriques.
La contraction dynamique à vitesse constante,
appelée isocinétique, lors de mouvements allers-
138
Ann. Kinésithér.,
1985, t. 12, nO 4
Age
Axe de rotation
;r--(1i
111
1
Ii,'
1
Iii
,'i
,;1
1
Bras de
r---
h--r-1
i :
_
~Illii
\
j
1
1
-1
~
1
,
1
Fig. 2. - Le dynamomètre.
Nombre de
Nombre de
sujets féminins
sujets masculins
Fig. 1. - Histogramme
'-Ti
-1
1
de la population.
retours sollicitent les éléments élastiques-séries
musculaires déjà étudiés aussi bien dans des
conditions analytiques (7) que fonctionnelles (5).
L'un des principaux problèmes posés est la
détermination de la position de la hanche. La
position assise est souvent choisie comme
représentative de la flexion coxo-fémorale (6, 10,
26) mais il persiste une imprécision quant à la
position réelle; certains auteurs parlent de
maintien sans précision (1). La position de fente
en latéro-cubitus a été utilisée (28) mais cette
position n'apparaît pas favorable à la réalisation
d'efforts maximaux.
La grande disparité des méthodes et parfois
leur manque de rigueur ne permettent pas
toujours de comparer les résultats. Aussi à partir
de récents travaux sur les amplitudes de
flexion-extension de la coxo-fémorale (21), nous
avons essayé de réaliser un protocole aisé~ent
reproductible.
Matériel et méthode
POPULA nON
Elle se compose de trente sujets non sédentaires, âgés
de dix-huit à vingt-huit ans, présentant tous un genou
droit sain au moment de l'expérimentation. Nous pouvons
distinguer deux sous groupes (fig. 1) :
- Douze femmes étudiantes en kinésithérapie.
- Dix-huit hommes, étudiants en kinésithérapie.
~i6ne de
base
0 Nm
105°
66°
45°
Ligne
~Et8e:
Fig. 3. - Extrait d'enregistrement.
MATÉRIEL
Les mesures sont réalisées à l'aide d'un dynamomètre .
isocinétique Cybex II.
Ce système permet de mesurer les couples de forces
développés par les muscles au niveau d'une articulation
lors de mouvement à vitesse constante. Le sujet ne peut
réaliser que la vitesse préréglée sur la machine, d'autre
part celle-ci s'adapte à la variation de la force lors du
mouvement. Le système est composé du dynamomètre
proprement dit, du sélecteur de vitesse et de l'enregistreur.
Le dynamomètre comporte un axe de rotation à partir
duquel part un bras de levier mobile (fig. 2). L'axe de
rotation du dynamomètre exerce sur ce dernier un couple
de forces qui est enregistré tout au long du mouvement.
Le sélecteur de vitesse permet de programmer une
Ann. Kinésithér., 1985, t. 12, n° 4
Fig.4
Fig. 5
Fig. 4. - Position hanche droite fléchie. a - Bassin antéversé.
Fig. 5. - Position hanche droite tendue. a - Bassin rétroversé.
vitesse angulaire constante comprise entre 0°/", 300°/".
L'enregistreur possède un double canal qui permet
d'avoir en parallèle l'évolution du couple de forces et de
la course angulaire (fig. 3). Le couple de forces est
exprimée en Newtom.mètre (N.m) et la vitesse angulaire
en degré par seconde o/".
MÉTHODE
Pour la réalisation du protocole, nous tenons compte
de différents facteurs : d'une part la position de la hanche
et d'autre part la vitesse d'exécution de l'exercice.
La situation hanche fléchie est obtenue en position
assise, le bassin antéversé (fig. 4). Il est demandé au sujet
de maintenir cette antéversion durant toute la durée de
l'exercice. Il est à noter que ce maintien n'est pas constant,
ceci est particulièrement observé lors de l'extension et
d'autant plus que la vitesse angulaire est faible. Néanmoins on peut constater que le degré de la flexion de
hanche sans être maximum se trouve dans un secteur
proche de ce maximum. Sans contrôle, le bassin se place
en rétroversion et entraîne la hanche vers l'extension, ce
qui fausse l'intervention des muscles polyarticulaires.
La situation hanche tendue est obtenue à partir du
décubitus, le membre inférieur gauche maintenu en triple
flexion par le sujet (fig. 5). Le bassin, de cette façon, est
amené en rétroversion, la hanche droite est donc
pratiquement en extension maximum. Il est à noter que
l'on observe très peu de variations de la position de départ
et ceci aussi bien lors de l'extension que lors de la flexion
du genou.
En position hanche fléchie, le segment crural est
maintenu sur la table par deux sangles : une distale et
une proximale (fig. 4).
En position hanche tendue, le segment crural est
maintenu seulement par une sangle distale, la stabilité
proximale étant assurée par le contrôle du bassin par
l'intermédiaire du membre inférieur gauche (fig. 5).
Le secteur articulaire exploré est de 0° - 105°.
Lors de l'exécution des mouvements il est demandé au
sujet d'aller au maximum de l'amplitude permise.
,
_
139
L'extension est visualisée par un repère et la flexion par
le contact du talon en arrière avec la table.
Cependant lors de l'extension du genou en position
hanche fléchie, on demande au sujet de ne pas chercher
à aller en extension maximum du genou. En effet, en fin
d'amplitude du fait de la tension passive des ichiojambiers, si le sujet veut atteindre l'extension maximum
du genou, il est obligé de relâcher le maintien de
l'antéversion du bassin. Ceci entraîne donc une diminution
de l'angle de flexion de la hanche.
Lors de la flexion du genou en position hanche tendue,
la tension passive du droit antérieur ne gêne par la flexion
car cette dernière ne dépasse pas 105°.
Les vitesses d'exécution des mouvements sont successivement de 90°/", 60°/" et 30°/".
Avant de réaliser les mesures le sujet réalise une ou
deux contractions submaximales à la vitesse des mouvements qui suivront. Puis il est demandé au sujet de réaliser
des contractions maximales. Les mesures se font sur trois
ou quatre allers-retours. C'est le meilleur résultat qui est
pris en compte.
Entre chaque série, le sujet se repose environ une
minute, temps nécessaire à la vérification du tracé
précédent et à la modification de la vitesse sur le sélecteur.
Pour éviter les erreurs à la lecture du graphe, il est
indispensable d'étalonner l'appareil enregistreur. D'une
part, il faut placer le stylet inscripteur du couple de forces
sur la ligne de base et d'autre part amener le genou droit
en extension maximale et placer le stylet inscripteur de
la course angulaire sur la ligne de base correspondante.
Il est à noter que le constructeur de l'appareil donne
une erreur de + ou - 5° pour les mesures d'amplitudes
du genou (8).
Résultats
Nous présentons dans ce chapitre les résultats
sur l'ensemble de la population. Ceux concernant les deux sous-groupes masculin et féminin
sont confirmés par l'étude générale.
Les calculs ont été réalisés à l'aide d'un
micro-ordinateur Hewlett-Packard 85.
Les couples de forces sont exprimés en
pourcentage de la valeur maximale obtenue par
les extenseurs du genou en position hanche
tendue à la vitesse de 30°/", cette valeur est donc
le 100 %. Ce choix a été arbitraire. Les valeurs
angulaires sont exprimées en valeurs absolues.
Nous donnons les moyennes et les écarts
standards à la moyenne (e.s.m.). Les tests de
significativité ont été réalisés à partir d'analyses
de variances et nous présentons le test de T de
Student pour un seuil tel que p < 0,05.
.......oiiIIoii
140 Ann. Kinésith ér., 1985, t. 12, n° 4
1. - Couples de forces des extenseurs et des fléchisseurs
fléchie - H.T. : hanche tendue.
TABLEAU
hanche
100
99,1
±
Flech.
Ext.2,15
36
29,4
27,6
24,3
91,5
78,4
2,43
1,72
1,55
1,89
1,94
1,09
1,4
45,1
87,5
50,1
74,3
1,23
en fonction
de la position de la hanche et de la vitesse. H.F. :
900/"
600/"
Couples (%)
II. - Angles d'efficacité maximale des extenseurs et des fléchisseurs en fonction de la position de la hanche et de la vitesse.
Les valeurs représentent les moyennes calculées sur la totalité des sujets les écarts-standards
à la moyenne (e.s.m.).
TABLEAU
±
62,37 Flech.
65,93
Ext.0,92
1,24
24,33
48,57
30,03
55,83
36,3
1,88
1,28
1,27
1,99
1,63
1,08
59,13
51,37
51,6
59,6
64,9
1,54
Couple
90
600/"
01"
Angles (Degrés)
%
100
T
l
degrés
90
Bo
Ext.
70
_--1----l--
T"-_- 80
1':
50
60
40
30
Fig. 7. - Diagramme
angle/vitesse.
60 r
1
3D
50
40
o
Vitesse
--
----
1
70l
I__
___
90
°/1160
;Fléch.
....
-_I;
--
.••
Ext.
--_
T
.-_-.l.
--
~
~
,
T
1
Fléch.
-.r..---
.30
Vi
30
Fig. 6. - Diagramme
------- hanche tendue
--
60
90
tasse
,/"
couple/vitesse.
moyenne
± e.s.m.
hanche fléchie
l
Le tableau
et la figure 6 expriment les
valeurs des couples de forces des extenseurs et
fléchisseurs du genou en fonction de la position
de la hanche et de la vitesse du mouvement.
t
,*-
------- hanche tendue
--
moyenne
± e.s. m.
hanche fléchie
Le tableau II et la figure 7 expriment les
valeurs des angles d'efficacité maximum (a.e.m.),
que nous définissons comme étant les angles
correspondant aux couples de "forces maximum
Ann. Kinésithér.,
TABLEAU III. - Signijicativité des différences entre couples des
extenseurs, en fonction de la position et de la vitesse.
H.F
H.F
p p <S
Svp N.S.
Sp pN.S.
P
60
90
< 0.01
H.F
H.T
30
H.F
90
<
0.01
pS0.01
< 0.01
0.05
30 Ext. 60
H.F
H.T
H.T
90
60
H.T
A.
90
H.F
H.T
TABLEAU IV. - Signijicativité des différences entre couples des
fléchisseurs, en fonction de la position et de la vitesse.
TABLEAU VI. - Signijicativité des différences entre a.e.m. des
fléchisseurs, en fonction de la position et de la vitesse.
Svp p <H.F
S p <PS0.05
P
60
<900.01
p
< 0.01p <S0.01
90
30
H.T
H.F
S0.01
0.01
vN.S.
vN.S
Spv p H.F
P
<90
0.01p <S
30
60
H.F
H.T
90
S0.01
0.01
<H.T
C.
90
H.T
0.01
p <S0.05
30 Flech.60
H.F
H:T
141
TABLEAU V. - Signijicativité des différences entre a.e.m. des
extenseurs, en fonction de la position et de la vitesse.
Sv N.S.
Sp pN.S.
P
p60
0.01
60
30
90
H.F
H.T
90
H.F
<pS0.01
pH.T
<< 0.01
< 0.01p pN.S.
<S0.01 p
C.
90
1985, t. 12, nO 4
60
90
H.T
A.
90
H.F
N.S. : Différence non significative.
S
: Différence significative.
H.T
p
v:
: Fonction de la position.
Fonction de la vitesse.
(fig. 3), en fonction des mêmes paramètres que
précédemment.
Les tableaux IlL IV, Vet VI traitent de la
significativité des différences entre couples (tableau 1) et a.e.m. (tableau II) dans les différentes
situations.
significatives pour les extenseurs de genou (tableau III) et ceci quelle que soit la vitesse. Par
contre les fléchisseurs sont significativement plus
forts hanche fléchie que hanche tendue (tableau IV) et ceci quelle que soit la vitesse dans un
rapport moyen de 1,61, soit environ 60 % de plus.
ÉTUDE
Les angles d'efficacité maximum
EN FONCTION
DE LA POSITION
DE LA HANCHE
Les couples de forces
Les différences entre les couples obtenus
hanche tendue et hanche fléchie ne sont pas
L'étude des a.e.m. montre pas de différences
significatives pour les extenseurs sauf à 30°/"
(tableau VI)," les valeurs sont globalement deux
fois plus importantes hanche fléchie que hanche
tendue.
142 Ann. Kinésithér., 1985, t. 12, n° 4
classique de le dire. Ceci peut se concevoir du
fait même de sa fonction lors de la marche
Les couples de forces
durant laquelle il n'intervient que très peu. Il
Ils croissent de façon inverse à la vitesse du est plutôt considéré comme une sangle et joue
son hysterésis naturel (3, 23).
mouvement (tableau L fig. 6).
Nous avons considéré comme négligeable le
Pour les extenseurs, les différences sont.
significatives quelle que soit la position de la léger mouvement de rétroversion du bassin
observé lors de l'extension du genou en position
hanche (tableau III).
hanche
fléchie.
Pour les fléchisseurs, les différences sont
L'étude
angulaire nous montre que les extensignificatives sauf dans deux cas : entre 30°/"
seurs trouvent leur efficacité maximale dans un
et 60°/" d'une part et 60°/" et 90°/" d'autre
secteur angulaire variant entre 50 et 60 degrés,
part (tableau IV).
en fonction de la vitesse. Nous retrouvons les
résultats de travaux précédents (18,28). Les
Les angles d'efficacité maximum
variations des valeurs en fonction de la vitesse
Ils varient en fonction de la vitesse et ceci
ont été observées sans que l'on puisse apporter
quelle que soit la position de la hanche. une explication valable (1).
Cependant, cette variance ne se fait pas dans le
Dans l'ensemble nous pouvons dire que le
même sens pour les extenseurs et les fléchisseurs. droit antérieur s'adapte parfaitement aux variaLa valeur angulaire diminue quand la vitesse tions de sa course et que la position de la hanche
augmente pour les extenseurs alors qu'elle n'influe pas sur le développement de la force.
augmente pour les fléchisseurs (tableau II et
fig. 7). Toutes les différences sont significatives
Les fléchisseurs
(tableau V et VI).
Pour ces muscles ischio-jambiers, la position
de la hanche a un rôle prépondérant. Ces muscles
sont presque tous polyarticulaires et réalisent
Discussion
pour la plupart une extension de hanche et une
flexion de genou. Les notions d'insuffisance
EN FONCTION DE LA POSITION DE LA HANCHE
active et de longueur de repos trouvent ici toute
leur
signification. Ils sont donc en état d'insuffiLes extenseurs
sance active en position hanche tendue et du fait
Les résultats statistiques nous permettent de de leur structure très fibreuse (9, 19, 29), ils ont
constater que la position de la hanche n'influe une faible capacité à s'adapter à cette faible
pas sur le développement de la force maximum. course et ne peuvent donc pas développer une
Ceci va à l'encontre de ce qui est couramment force maximum. A l'inverse en position hanche
admis (16, 17). Ces résultats peuvent s'expliquer fléchie ces muscles se trouvent en situation très
favorable. Ces observations faites en situation
de différentes façons :
- la constitution histochimique du droit anté- dynamique sont tout à fait en accord avec celles
rieur, 50 à 70 % de fibres Ii, c'est-à-dire de fibres faites en isométrique (11, 24, 30).
L'étude angulaire confirme les remarques
à contraction rapide et à force importante (15,
précédentes.
L'a.e.m. varie de façon importante
25), met en évidence ses propriétés phasiques.
et
ceci
montre
bien la mauvaise adaptation de
Il interviendrait donc de façon identique lors du
mouvement d'extension du genou indépendam- ce groupe musculaire en situation d'insuffisance
ment de la position de la hanche. De plus, de active. Le facteur tension-longueur est plus
part sa constitution morphologique, il peut important que la longueur du bras de levier au
adapter sa course par une grande facilité à genou dè ces muscles.
Les valeurs angulaires que nous obtenons en
l'allongement et au raccourcissement;
- la force que peut développer le droit antérieur position hanche tendue correspondent à celles
ne serait pas aussi importante qu'il n'est obtenues par d'autres auteurs en position assise,
ÉTUDE EN FONCTION DE LA VITESSE
Ann. Kin ésithér., 1985, t. 12, nO 4
en isométrique comme en dynamique (1, 26,30).
Ces différences sont certainement dues à la
position différente de la hanche. Nous ne
pensons pas que cette différence soit due au fait
que notre expérimentation se soit déroulée en
dynamique, une grande corrélation existant
entre les résultats isométriques et dynamiques.
EN FONCTION DE LA VITESSE DU MOUVEMENT
Les couples de forces
La relation force-vitesse ayant déjà été l'objet
de très nombreuses études (18, 22, 27), nous ne
ferons que quelques remarques :
- pour les extenseurs la relation est évidente
mais étant donné le petit nombre de vitesses
explorées et les conditions expérimentales, il est
.tout à fait logique que nous ne retrouvons pas
exactement forme de la courbe de Hill (13) ;
- pour les fléchisseurs, l'existence d'une relation
force-vitesse n'est pas aussi évidente en position
hanche tendue, c'est-à-dire en état d'insuffisance
active. Ceci tendrait à montrer une moins bonne
adaptation de ces muscles à la vitesse dans cette
situation. Cette observation mériterait une étude
plus approfondie sur un échantillonnage de
vitesses plus élevées.
Les angles d'efficacité maximum
Les variations des a.e.m. en fonction de la
vitesse déjà observées par ailleurs ne peuvent être
expliquées de façon satisfaisante.
OBSERVATIONS GÉNÉRALES
Nous avons souvent observé en fin de mouvement un freinage engendrant une diminution de
l'amplitude. Ce phénomène de freinage des
muscles antagonistes suit la contraction maximale du groupe musculaire agoniste. Il est la
conséquence de deux facteurs: l'étirement des
éléments élastiques-séries et la force contractile.
Le travail musculaire avec ce type de dynamomètre se réalise suivant des cycles de raccourcissement et d'allongement. La phase d'allongement correspond toujours à un travail freinateur
des antagonistes en fin de mouvement. Lors de
143
cette phase, les éléments élastiques-séries sont
mis en tension et stockent de l'énergie qu'ils
restitueront
en partie lors de la phase
concentrique.
Il y a donc sommation d'une partie de
l'énergie élastique et de l'énergie chimique
propre à la contraction. Les antagonistes sont
en situation de force explosive (12) lors du retour
et le couple de forces développé peut atteindre
des valeurs proches de celles obtenues en
isométrique. Ces différents phénomènes ont été
déjà observés et décrits lors d'activités tels la
marche et la course (5), le saut (2) mais également lors de mouvements allers-retours (7). Ces
observations lors de notre expérimentation ont
été faites surtout à 90°/" mais le phénomène est
beaucoup plus évident à des vitesses de 180 à
240°/" (4) car l'énergie stockée n'a pas le temps
de se dissiper sous forme d'énergie .
INCIDENCES KINÉSITHÉRAPIQUES
Les résultats de cette étude peuvent amener
un certain nombre de réflexions sur la kinésithérapie de l'ajustement musculaire du genou; en
particulier :
- Il est inutile de faire travailler le quadriceps
une fois en position hanche fléchie et une fois
hanche tendue. Pour le droit antérieur, il s'agit
du même exercice. Le confort du patient est le
critère de choix.
- L'angle d'efficacité maximum des extenseurs
(compris entre 50 et 65 degrés) impose la
direction de la résistance perpendiculairement
à cet angle, exemples :
a) charge indirecte, le sujet assis, la première
poulie organise le fil perpendiculairement à
environ 60° de flexion du genou;
b) charge directe, le sujet couché, l'inclinaison
de la cuisse doit être de 60° par rapport à
l'horizontale;
c) une résistance manuelle doit également tenir
compte de cette orientation.
- L'angle d'efficacité maximum des fléchisseurs
est déterminé par la position de la hanche.
Le travail de ces muscles doit se faire à
environ 30° de flexion du genou lorsque le sujet
est en décubitus dorsal. S'il est assis bassin
r
144
Ann. Kinésithér.,
1985, t. 12, n° 4
maintenu activement ou non, l'angle de choix
est d'environ 60° de flexion du genou.
Pour automatiser un contrôle de protection
motrice, du fait de l'utilisation du freinage dans
la fonction de ces muscles, le kinésithérapeute
doit éduquer la vitesse du mouvement entre deux
repères donnés.
Conclusion
A la suite de cette étude, nous constatons que
la position de la hanche n'influe pas sur le travail
isocinétique des extenseurs du genou. Le droit
antérieur semble donc participer de façon égale
quelle que soit la position de la hanche. Au
contraire les ischio-jambiers sont très sensibles
à la position de la hanche.
L'explication de ces phénomènes passe par la
structure musculaire et les concepts classiques
de biomécanique mais également par la typologie des fibres de ces différents muscles.
Ce travail devrait amener le thérapeute vers
une meilleure compréhension de la rééducation
du genou, tant du point de vue analytique que
de la reprogrammation motrice.
Bibliographie
1. ARvIDssoN L, ERIKSSON E., HAGGMARK T., JOHNSON R.J.
- Isokinetic thigh muscle strength after ligament reconstruction in the knee joint : Results from a 5-10 years follow
up after reconstruction
of the Anterior cruciate ligament
in the knee joint. J. Sport Med., 1981, 1, 8-10.
2. ASMussEN E., BONDE PETERSEN F. - Storage of e1astic
energy in skeletal muscles in man. Acta Physiol Scand., 1874,
91, 385-392.
3. BASMAJIAN J.V. - Muscles a1ive, The Williams and Wilkins
Compagny, Baltimore, 4 th. ed., 1978, 244-261, 295-311.
4. Bosco C., MOGNONI P., LUHTANEN P. - Relationship
between isokinetic performance
and ballistic movement.
Eur. J. Appli. Physiol., 1983, 51, 357-364.
5. CAVAGNA G.A., KANEKO M. - Mechanical work and
efficiency in level walking and running. J. Physiol (London),
1977,268, 467-481.
6. CHATRENET y. - Récupération de la force musculaire des
fléchisseurs du genou par sollicitations dynamiques excentriques. Ann. Kinésithér., 1982, 8, 319-329.
7. CNOCKAERT J.c., GOUBEL F. - Rôle de l'énergie potentielle
élastique dans le travail musculaire. Eur. J. Appl. Physiol.,
1975,34, 131-140.
8. Cybex isolated joints testing and exercice, A handbook for
using Cybex II and V.B'x.T., 2100 Smithtown Avenue
Ronkonkoma
N.Y. 11799, 1981.
9. DROMZEE C. - Morphologie des muscles ischio-jambiers
internes: concentration de structures tendineuses et conjonctives intramusculaires. Mémoire E.C.K. Bois Larris, 1980.
10. DUVAL A. - Electromyographie
cinésiologique des muscles
superficiels de la loge antérieure de cuisse. D.E.R. en biol.
hum. U.E.R. Méd., Poitiers, 1979, 40-56.
11. ELFTMAN H. - Biomechanics of muscles. J. Bone J.T.
Surgery, 1966, 48 A/2, 363-369.
12. GOUBEL F., VAN HOECKEJ. - Biomécanique et geste sportif,
Incidences des propriétés mécaniques du muscle sur la
réalisation de la performance. Cinésiologie, 1982,21, 41-51.
13. HILL A.V. - The heat of shortening and the dynamic
constants of muscle. Proc. R. Soc. Lond. Biol., 1938, 126,
136-193.
14. HUXLEY A.F. - Muscular contraction. J. Physiol., 1974,
1, 243.
15. JOHNSON M.A., POLGAR J., WEIGHTAMN D. ApPLETON
D. - Data on the distribution of fibre. types in thirty-six
human muscle. An autopsy study. J. Neurol. Sci., 1873,18,
111-129.
16. KAPANDJI I.A. - Physiologie articulaire, Fascicule II,
Maloine, Paris, 4e éd., 1974, 128.
17. KENDALL H.O., KENDALL F.P., W ADWORTH G.E. - Les
muscles, Maloine, Paris, 2e éd., 1979, 173.
18. MOFFROID M., WHIPPLE R., HOFKOSH J.M., LOWMAN
E.V., THISTLE H.G. - A study ofisokinetic exercise. J. Am.
Phys. Ther. Ass., 1969, 49, 735-746.
19. MORINEAUX B. - Les muscles ischio-jambiers.
Études
anatomique, biomécanique et fonctionnelle. Th. Fac. Méd.,
Nancy l, 1983.
20. OTIS J.c., WARREN R., DELAND J. - Relasionship between
isometric and isokinetic torques. Med. Sci. Sports. Exercise,
1981, 2, 128.
21. PENINOU G., DUFOUR M., SAMUEL J. - Mesures des
amplitudes
en flexion-extension
de l'articulation
coxofémorale du sujet jeune. Ann. Kinesith ér., 1984, 1-2, 15-18.
22. PERTUZON E., BOUISSET S., SCHERRER J. - Précis de
physiologie du travail, Masson, Paris, 2e édition, 1981, 11.
23. PLAS F., VIEL E., BLANC Y. - La marche humaine,
kinésiologie dynamique et pathomécanique,
Masson, Paris,
2e édition, 1979.
24. RUCH T.C., FLUTON J.F., ASTRAND P.O., RODAHL K.,
- Précis de physiologie de l'exercice musculaire, Masson,
Paris, 2e éd., 1980, 77-78.
25. SALTIN B., HENRIKSSON J., NYGAARD E., ANDERSEN P.
- Répartition des différents types de fibres et potentiel
métabolique du muscle squelettique, chez le sédentaire et le
coureur d'endurance.
Comptes rendus de Colloque de
Saint-Étienne,
15-16 juillet 1977 (Lacour J.R.).
26. SAUVAGNATM.F. - Étude de la force isométrique maximale
des fléchisseurs du genou. Ann. Kinésithér., 1979, 6, 302-310.
27. THORSTENSSON A., GRIMBY G., KARLSSON J. - Forcevelocity relations and fibercomposition
in human knee
extensor muscles. J. Appl. Physiol, 1976, 40, 12-16.
28. TIHANYI J., ApoR P., FEKETE G.Y. - Force-Velocity-Power
characteristics
and fiber composition
in human' knee
extensor muscles. Eur. J. Appl. Physiol., 1982,48, 331-343.
29. WARWICK R., WILLIAMS P.L. - Gray's Anatomy Longman,
Edimbourg, 35e éd., 1973, 570-571.
30. WILLIAMS M., STUTZMAN L. - Strength variation through
the range of joint motion. Phys. Ther. Rev., 1959, 145-153.
_.~
Téléchargement