Éditorial
IKAROS (IKZF1)
trouve sa leucémie humaine
IKAROS (IKZF1) alterations and human leukemias
François Sigaux
(Rédacteur en chef)
La famille Ikaros comprend cinq membres dont trois sont exprimés dans
les cellules hématopoïétiques. Parmi eux, IKAROS (IKZF1) a été le plus
étudié dès les années 1990. A cette période, le groupe de Georgopo-
ulos ainsi que d’autres groupes de recherche ont montré son rôle
majeur dans l’hématopoïèse murine par des expériences de génétique
chez la souris. Ces résultats ont été largement étendus par la suite (pour une revue :
Gerogopoulos, Nat Rev Immunol 2002 : 162-74). Le gène IKAROS est un régula-
teur transcriptionnel qui peut agir comme un répresseur, et dans certains cas comme
un activateur. La protéine ikaros complète comporte un motif qui lie une séquence
d’ADN incluant fréquemment des nucléotides communs avec les sites de liaisons des
produits des gènes ETS,EBF ou encore de CSL (voie Notch). La protéine ikaros
comporte ses propres domaines de régulation de la transcription et un domaine C
terminal d’homo- ou d’hétérodimérisation. Elle peut former des complexes avec des
protéines de remodelage de la chromatine. Elle s’accumule dans les régions
d’héterochromatine péricentromérique où elle colocalise avec des gènes dont la
transcription est éteinte. De nombreuses isoformes sont obtenues par épissage
alternatif ; certaines, qui ne comportent pas le domaine de liaison à l’ADN, ont un
effet dominant négatif. L’apparition de lymphomes/leucémies T chez la souris
porteuse d’une délétion hémizygote aboutissant à l’expression d’un dominant
négatif d’IKAROS (Winandy et Georgopoulos, Cell 1995 ; 83 : 289-99) a suscité
de nombreux travaux cherchant un lien entre l’inactivation d’IKAROS et la leucé-
mogenèse depuis les années 1990. S’il est fermement établi que le défaut
d’expression d’IKAROS est leucémogène chez la souris (par exemple, Dumortier et
al. Mol Cell Biol 2006 ; 26 : 209-20), il restait à trouver une forme de leucémie
humaine dans laquelle une altération génétique touchant ce gène pourrait
représenter une altération majeure. C’est actuellement chose faite avec le travail du
groupe de Downing (St Jude Children’s Research Hospital, Menphis) publié
récemment (Mullighan et al. Nature doi :10.1038/nature06886). Dans cet article
les auteurs rapportent une analyse de profilage chromosomique à haut débit
(technologie Affymetrix, 500K) de 304 cas de leucémies aiguës, dont 36 expriment
le gène de fusion BCR-ABL1. Une altération génétique d’IKAROS a été retrouvée
dans 84 % des cas et est fréquemment associée à une inactivation de CDKN2A
(p16INK4a/p14ARF). Il s’agit le plus souvent d’une délétion hémizygote, médiée
par une erreur de la recombinase lymphoïde. L’anomalie chromosomique aboutit
souvent à l’expression d’un transcrit et d’une protéine dépourvue de son domaine
de liaison à l’ADN et dont on sait qu’elle agit comme un dominant négatif (isoforme
ik6). La production d’ik6 n’est pas due à un épissage alternatif comme cela avait été
suggéré (par
exemple, Klein et al. Oncogene 2006 ; 25 : 1118-24). Aucune
mutation ou méthylation anormale du promoteur d’IKAROS n’a été retrouvée dans les
cas où elles ont été recherchées. Une altération d’IKAROS n’est pas retrouvée dans les
cas de LMC en phase chronique mais survient fréquemment dans les transformations
Hématologie 2008 ; 14 (2) : 99-100
Hématologie, vol. 14, n° 2, mars-avril 2008
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doi: 10.1684/hma.2008.0256
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