lentilles correctrices auraient à ce jour
reçu le traitement de correction au laser,
il est donc clair que le marché est sous-
pénétré. Au Québec, les 273 ophtalmol-
ogistes sont regroupés au sein de
l’Association des médecins ophtalmolo-
gistes du Québec. Ils réalisent au-delà
de 30 000 chirurgies au laser chaque
année.
La demande pour la correction de la vue
au laser apparaît comme inépuisable
puisqu’elle se renouvelle de génération
en génération. Pour cette raison, l’indus-
trie reste dans une phase de croissance,
sans jamais atteindre la maturité du
cycle. L’avènement de nouvelles tech-
nologies peut toujours relancer son
momentum, en rendant plus attrayante
la chirurgie auprès des jeunes, comme
chez les plus âgés pour qui l’ancienne
technologie représentait trop de risques.
Qu’en pensent les clients?
Pour plusieurs raisons, une part grandis-
sante de la population s’intéresse à la
possibilité de se tourner vers une correc-
tion de la vue au laser. Parmi ces
dernières figurent la diminution des prix
des chirurgies, une meilleure éducation
des patients, la diminution des
risques liés à des complications
postopératoires et l’amélioration
des technologies disponibles. Les
différents joueurs sur l’échiquier
québécois des corrections au laser
semblent bien comprendre ces
motivations et misent sur celles-ci
pour attirer de nouveaux clients.
Les gains potentiels en volume d’af-
faires poussent donc l’industrie à
réinvestir une bonne part de ses
profits dans l’éducation de ses
clients futurs.
La stratégie de LASIK MD consiste
d’ailleurs à éduquer les clients
potentiels afin de diminuer leurs
craintes. Pour se faire, elle a mis
sur pied le plus grand centre d’appel de
l’industrie au Canada avec 22 agents
téléphoniques. Ces employés reçoivent
jusqu’à deux semaines de formation afin
de renseigner adéquatement les clients
potentiels. Beaucoup d’informations sont
divulguées au téléphone et on envoie
ensuite au client un document d’infor-
mation vulgarisée de 30 pages. Le client
peut ensuite recevoir une consultation
gratuite en personne. À tout moment, il
peut aussi se rendre sur le site Web
canadien de la compagnie (www.lasik-
md.ca) pour également obtenir de l’in-
formation détaillée sur les procédures
chirurgicales. Chez Laservue, on note
que le marché connaît une transforma-
tion. « Avant, les gens arrivaient craintifs
à la clinique. Maintenant, tout le monde
connaît quelqu’un qui a fait corriger sa
vue au laser. Les gens sont très infor-
més. Ils connaissent même les dif-
férentes sortes de laser », explique le
directeur du marketing, Sami Azouly.
Dans les questionnaires préopératoires,
60 % des clients répondent qu’ils ont été
incités par « le bouche à oreille ». C’est
le processus décisionnel du client qui est
le plus long, soit six mois en moyenne
après la consultation d’information. Ces
derniers font beaucoup de recherches et
s’informent dans le but d’être rassuré
plus d’une fois (par plusieurs médecins
différents). Une fois la décision prise,
l’intervention est généralement rapide.
Entre-temps, le marketing fait son
œuvre. Le matraquage de publicités
dans les médias intègre la correction de
la vue au laser à une réalité ancrée dans
la société. La publicité présente la tech-
nologie, la clinique et les docteurs, afin
de se faire rassurante. Les ophtalmo-
logues sont très impliqués dans le mar-
keting : ils rédigent les documents pro-
motionnels d’information et supervisent
le contenu du site Web, qui vise à édu-
quer le patient le mieux possible.
Budgets publicitaires importants
Au niveau de l’industrie québécoise, les
directeurs marketing des différentes
compagnies de correction au laser
assurent que les sommes investies en
publicité sont loin de mettre leur entre-
prise à perte. Bien qu’ils restent muets,
pour des raisons stratégiques, sur l’am-
pleur de leur budget annuel, certains
conviennent qu’il serait raisonnable de
penser qu’environ 10 % des profits sont
réinvestis en publicité. Tous s’accordent
aussi sur la constance de leur budget
marketing année après année. « Si on
voit que nos compétiteurs sont plus
agressifs, on fera des petits ajustements,
mais pour une courte période seule-
ment », explique M. Jon Budge,
directeur marketing chez LASIK MD.
« Tous les joueurs sont aussi agressifs les
uns que les autres en publicité. Nous
n’en faisons pas davantage car le
bouche à oreille fonctionne très bien et
c’est beaucoup moins cher », ajoute t-il.
À titre comparatif, la compagnie améri-
caine TLC Laser Eye Centers
dévoile dans ses états financiers
que son budget marketing annuel
en 2003 a été de 14,1 millions de
dollars américains, soit environ
17,7 millions de dollars canadiens.
Ces dépenses ont représenté 7 %
des revenus de la compagnie, com-
parativement à 9 % en 2002. TLC
a réalisé l’an passé 176 000 chirur-
gies à travers ses 346 cliniques aux
États-Unis et au Canada; c’est donc
dire qu’il en coûte environ 100 $ en
efforts publicitaires à une telle com-
pagnie pour attirer un client.
Les cliniques appuient leurs efforts
publicitaires par des position-
nements stratégiques clairs. LASIK
MD mise sur une stratégie de prix selon
laquelle les prix des services sont
appelés à diminuer pour rejoindre une
portion énorme de la population, ciblant
la masse. Ses efforts publicitaires sont
donc orientés vers des médias comme
Le Journal de Montréal. M. Jon Budge,
SANTÉ INC NOVEMBRE 2004
32
Cliniques de l’oeil
directeur marketing chez LASIK MD
explique : « On veut par exemple rejoin-
dre les cols bleus qui portent des
lunettes (policiers, pompiers et autres). »
LASIK MD mise aussi beaucoup sur la
reconnaissance de sa marque à l’échelle
nationale : depuis le mois de janvier
2004, elle a ouvert 6 succursales au
Canada. Pour sa part, Laservue n’a
qu’une seule clinique, et le développe-
ment envisagé par ses dirigeants reste
local : elle veut avoir plus de lasers, de
clients et de médecins avant de penser à
croître géographiquement ou par acqui-
sitions. Selon son directeur marketing,
Sami Azouly, les prix sont un peu plus
chers que ceux de LASIK MD, mais il
s’agit de forfaits « tout inclus » garantis à
vie. Les chirurgiens sont de grande
renommée et ont beaucoup d’expertise
et on mise beaucoup sur ce point.
Laservue compte 30 employés.
Ainsi, LASIK MD s’est donné comme
mission de rendre l’opération la plus
accessible possible, de façon à rejoindre
une plus grande part de la population,
notamment ceux qui n’ont pas le soutien
financier de leur assurance. Les inter-
ventions sont annoncées à partir de
390 $ par œil, selon la nature du prob-
lème de la vue. « On voit LASIK MD qui
annonce énormément à des prix peu
chers, et c’est le seul qui annonce autant
depuis environ deux ans. Par contre, les
clients ressortent de la clinique après
l’opération, et ça leur a coûté beaucoup
plus cher que le prix annoncé »,
explique sous le couvert de l’anonymat
une personne de l’industrie. Au prix de
base, il faut ajouter plusieurs supplé-
ments tels que des procédures addition-
nelles et une assurance vie notamment.
Parlons profits
Chez LASIK MD, le nombre de patients
augmente d’environ 20 à 25 % par
année. Même si cette croissance s’ex-
plique en majorité par l’expansion géo-
graphique amorcée par le groupe (ouver-
ture de nouvelles cliniques), il est évident
que les choses vont bien. Cependant,
malgré la hausse du nombre de clients,
les frais d’exploitation autres que la pub-
licité d’une clinique sont très élevés :
équipement spécialisé, main d’œuvre de
soutien, loyer, sans oublier la R&D. Le
prix d’achat de l’équipement par exem-
ple peut facilement monter jusqu’à
800 000 $, constituant une barrière à
l’entrée importante pour des nouveaux
joueurs potentiels. Les principaux four-
nisseurs sont Bosch and Lomb, Alcon,
Nidek et Wave Light. Cependant, l’indus-
trie tend à vouloir passer d’un prix fixe à
un prix d’utilisation par intervention.
Bref, les cliniques sont rentables et l’ar-
gent est au rendez-vous… Les revenus
bruts des cliniques sont continuellement
en hausse en raison de la forte
demande. Les coûts d’administration
sont très élevés, mais les nouvelles tech-
nologies permettent des économies sub-
stantielles et il en coûte de moins en
moins cher de corriger la vue d’un
patient. Les interventions sont plus abor-
dables pour le consommateur et cette
augmentation du volume d’affaires per-
met de soutenir les frais d’exploitation.
Le Canada est aussi reconnu comme un
leader nord-américain en ce qui a trait à
l’abondance des nouvelles technologies
et des faibles coûts des chirurgies. À un
point tel que des clients européens ou
américains viennent régulièrement au
Canada pour se faire traiter. À titre d’ex-
emple, le Custom Lasik est disponible au
Canada depuis l’an 2000, tandis que la
Food and Drug Administration (FDA) aux
États-Unis a approuvé son utilisation à
l’été 2003.
Ainsi, la demande potentielle est énorme
pour les cliniques médicales de l’œil et
chaque joueur établit son plan de match
selon les résultats de son exercice précé-
dent et en fonction des objectifs qu’il
souhaite atteindre à long terme. Plus la
population sera éduquée et sera proac-
tive à l’idée de recevoir ce type de traite-
ment, plus la compétition parmi les clin-
iques de correction de la vue au laser
sera forte, puisque les patients poseront
leur choix sur des facteurs autres que le
prix. Les entreprises devront alors
exceller au plan de la qualité du service,
et des compétences et de la réputation
des chirurgiens, ce que font déjà
plusieurs cliniques de l’œil, en plus
d’être audacieuses et imaginatives au
niveau de la publicité. F
NOVEMBRE 2004 SANTÉ INC
33
Cliniques de l’oeil
Dans l’édition de
janvier 2005:
Argent et
Politique
Commentaires et suggestions:
(514) 271-2339
1,45
million de clients
potentiels au Québec