ART ET SPORT
goût pour le cyclisme se rapprochent de
façon évidente du parcours de Ramón
Casas, faisait son apparition à Paris. A cette
époque, l’impressionnisme savourait son
indiscutable triomphe, en même temps
que se produisait la première réaction con-
tre celui-ci, à travers l’œuvre de Van Gogh
et de Gauguin.
Le penchant de Casas pour le cyclisme
est probablement né durant ce premier
séjour à Paris. Grâce à l’application de la
transmission par chaîne, le vélocipède à
grandes roues avait cédé le pas à la vraie
bicyclette, laquelle jouissait d’une grande
popularité dans la capitale française. Nous
savons qu’en revenant à Barcelone, alors
qu’il commençait tout juste à se faire
connaître comme peintre, il était célèbre
pour sa bicyclette, l’une des premières à
rouler dans les rues de Barcelone. A cette
époque, vers 1888, les lourdes jantes
métalliques avaient été remplacées par les
pneumatiques que Dunlop venait d’inven-
ter. Son ami, le peintre et écrivain Santiago
Rusinol, véritable père du modernisme
catalan, décrivit dans le journal « La Van-
guardia » une excursion cycliste mouve-
mentée qu’ils effectuèrent ensemble ; la
chronique illustrée par Casas nous présente
cet homme impeccablement vêtu en
cycliste, dans un costume rappelant celui
qu’il aborde dans un portrait à I’huile réa-
lisé par son compagnon d’aventure.
Lors de son second séjour à Paris en
1890 et 1894 où il cohabita au Moulin de la
Galette avec Rusinol et Utrillo, il poursuivit
son activité cycliste avec le même intérêt,
soutenu par Utrillo et par un peintre italien
du nom de Zandomenegui avec lesquels il
entreprenait de longues excursions dans les
alentours de la ville. C’est à cette période
qu’appartiennent les toiles « Bal du Moulin
de la Galette » (1883, Cau Ferrat de Sitges)
et « Plein Air » (1891, Musée d’art moderne
de Barcelone), œuvres maîtresses qui font
de Casas le peintre de Montmartre, avec
peut-être davantage de mérite que Tou-
louse-Lautrec. Sa peinture représente le
lien entre le réalisme du XVII e siècle et
l’impressionnisme, avec la puissance syn-
thétique du coup de pinceau dans les
scènes de foule et la douceur des tons vifs
enveloppés d’une atmosphère grisâtre.
De nouveau à Barcelone, il se conver-
tit en témoin de son temps, en saisissant
les mouvements d’agitation sociale — « La
carga » (1902, Musée d’Olot) et « Garrote
vil » (1894, Musée d’art moderne de
Madrid), sont deux des pièces les plus
caractéristiques de cet aspect de son
œuvre — ainsi que la vie populaire de
l’époque — avec « Ball de tarda » (1896,
Circula del Liceo de Barcelona) et « Pro-
cesso de Santa Maria del Mar » (1896,
Muséee d’art moderne de Barcelone),
comme toiles représentatives. II com- « La reparación », un dessin
mente également à cette époque la réali- prodigieux dans l’interprétation
du geste.
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