Toutefois, comme le souligne M.Voisin, la BCE et la FED (banque centrale
américaine) adoptent des stratégies "plus ou moins réactives", en témoigne la
rapidité de la banque américaine à opter pour une politique contracyclique ces
dernières années, à la différence de la banque de la zone euro. Selon lui, il existe une
« faiblesse européenne » car la BCE ne dispose que d'un petit budget par rapport à
la FED, de plus son indépendance lui donne peu de marge de manœuvre vis-à-vis du
patchwork des pays de la zone euro.
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Quels sont les canaux de transmission de la politique monétaire ? Malgré une
politique monétaire européenne, il existe de fortes divergences dans chaque pays
(inflation, investissement, production, prix...). Michel Voisin montre ici l'effet de la
politique monétaire sur tous les plans de l'économie : par exemple, les prix et la
production sont inversement proportionnels au taux d'intérêt ; ou encore, les
entrepreneurs capitalistes le prennent en compte pour « conduire leurs activités ».
De plus, la politique monétaire touche les actifs financiers : si le taux d'intérêt croît,
leur valeur chute, et s'il baisse, il se crée un « effet de richesse ». Dans cette logique,
il est une variable de spéculation immobilière.
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Enfin, M.Voisin insiste sur le fait que l'internationalisation de l'économie peut
influencer la politique monétaire de chacun, comme ce fut le cas dans les années
1960 aux États-Unis, avec l'arrivée des Eurodollars, alors que les Américains ne se
souciaient pas de l'extérieur. Je vous invite à consulter le compte-rendu du livre de
Denis Rétaillé, Les lieux de la mondialisation en suivant ce lien
(http://lectures.revues.org/8499) pour mieux saisir ce concept et les autres enjeux
économiques de la mondialisation.
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De même, la politique monétaire joue sur les taux de change (en attirant les
capitaux étrangers), la compétitivité des entreprises (pour leurs exportations) et
même les épargnes collectives (retraite dans les pays anglo-saxons par exemple).
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Comment les crises monétaires ou bancaires peuvent-elles être surmontées ?
Aujourd'hui, avec le développement de nouveaux produits financiers, la
mondialisation des échanges, les dettes dites « souveraines », les institutions
bancaires sont d'autant plus fragiles. Pour M.Voisin, tout d'abord, une crise est
avant tout une crise de confiance : un simple doute dans la valeur monétaire, et c'est
une panique généralisée, en témoignent les faillites de John Law (1720) ou des
assignats français (1796). De plus, dans le mécanisme du crédit, prêteur et
emprunteur se trouvent dans la même situation dite d' « asymétrie d'information » :
aucun ne sait s'il peut faire confiance à l'autre. En cas de crise, la Banque Centrale
est sommée d'assumer son rôle de "prêteur en dernier ressort", malgré de faibles
capacités d'action, en particulier dans la zone euro actuellement. Alors si des
établissements financiers sont confrontés à des difficultés, les États sont mis à
contribution, comme ce fut le cas pour le Crédit Lyonnais en France, afin de contrer
un climat d'insécurité générale. Progressivement se sont mises en place des
politiques d'assouplissement du secteur bancaire, ainsi qu'un contrôle
« prudentiel » pour éviter des possibles dérives financières. Suite aux crises
économiques d'échelle mondiale, des institutions, telles la BCE ou le FMI, aident à
coordonner les politiques budgétaires et financières des États. Mais l'accent est
davantage mis, pour Michel Voisin, sur l'action de chaque État au niveau national.
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L'inflation est-elle un mal absolu contre lequel les autorités monétaires doivent
combattre sans merci ? Combattre l'inflation est une mission primordiale pour tous,
mais les causes et les solutions divergent. Pour les défenseurs de la théorie
quantitative, la monnaie n'est qu'un « voile », une marchandise comme une autre :
pour eux, les banques jouent un rôle crucial dans l'approvisionnement de monnaie,
influençant dès lors le niveau des prix. Les monétaristes, menés par Friedman, ont
reformulé cette théorie : ils évoquent un mécanisme plus complexe, et rendent les
pouvoirs publics responsables de l'inflation. Pour y échapper, il faudrait soit trouver
un nouvel étalon monétaire, soit mettre en place une banque centrale indépendante,
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Michel Voisin, Comprendre la monnaie et les politiques monétaires
http://lectures.revues.org/8754
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