LA MISE EN SCÈNE
Sur  scène,  ce  sont  d’abord  des  silhouettes,  anonymes  et  floues,  assises  de  dos, 
alignées, sorte de ligne de démarcation entre la vie et l’œuvre, entre la vie et la mort.
Seule,  la pensée  de  Boris  leur  donne  chair  pour  quelques  secondes  ou  quelques 
minutes. Il les convoque dans cet espace indéfinissable où l’on ne saurait déceler la 
part du rêve.
L’ambiguïté  entre  réalité  et  fiction,  souvenirs  et  temps  présent,  s’impose  comme  
unité  de  temps  et  d’espace.  Elle  rassemble  la  vie  et  la création  dans  une  même 
œuvre, toutes deux issues d’une même pensée, d’une même  urgence à questionner 
le monde.
4 comédiens et un musicien interprètent une  vingtaine de personnages. Le passage 
de  l’ombre  à la lumière  fait  partie  du jeu,  les  silhouettes  fantomatiques  s’animent, 
deviennent  Major  ou  Gréco,  puis  retournent  à  l’obscurité  comme  dans  un  fondu 
enchaîné. 
Le rythme et la précision sont essentiels pour éviter l’écueil d’une «!succession de 
tableaux!». On ne rentre pas dans un musée, on ne vient pas visiter des tranches de 
vie. C’est au contraire la vitalité, la fantaisie, l’humour et la poésie qui prennent vie et 
défient avec  malice,  la  mort  imminente.  La mise  en scène  ne  fait qu’orchestrer  ce 
déferlement, un peu d’ordre dans le désordre pour ne pas brouiller les pistes (tout le 
monde ne connaît pas en détail la vie et l’œuvre de BV).
Les  personnages  quant  à  eux,  ont  une  lourde  responsabilité!:  ils  sont  là  mais 
viennent d’ailleurs, de  l’au-delà peut-être,  d’un livre ou d’un souvenir. Réel ou fictif, 
chacun  restitue à sa manière une facette de Vian. Endossant tour à tour le rôle de la 
mort,  de  la  mère,  d’une  voiture  ou  du  projectionniste,  ils  recréent  l’urgence  et  le 
foisonnement.  Dans ce  méli-mélo d’individus  disparates,  de  solos,  duos, trios,…ils 
construisent un ballet fluide, grave et drôle.
Le  trompettiste  fait  contrepoids,  silhouette  du  personnage  central,  il  est  sa  voix 
intérieure sensuelle et mélancolique, mais dit aussi son exubérance, sa passion pour 
le jazz et le swing.
Cette présence musicale était indissociable d’une évocation de Vian, elle parle de lui 
avec autant de force que les autres personnages, voire plus, car elle est toujours là, 
discrète et brillante, elle est aussi sa part d’élégance et de virtuosité. 
Gérard AUDAX
Je voudrais pas crever avant d’avoir connu ….
EN SCÈNE