le handicap mental

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LE HANDICAP MENTAL
I - INTRODUCTION ET PRECISIONS TERMINOLOGIQUES
1 - Pour tenter d'appréhender le handicap mental et la personne en situation de handicap mental (pshm),
plusieurs approches seront utilisées, l'une, étymologique, sur les différents mots qui ont caractérisé
cette personne, l’autre se référant à la démarche médicale avec ses trois temps de la clinique, de l’étiologie
et de l’évolution après soins, une troisième considérant l'homme sain, comme l'homme malade ou
handicapé, comme un être bio-psycho-social, possédant à la fois un corps et un esprit et devant nouer des
relations avec d’autres êtres humains, ces trois aspects de l’homme se situant en perpétuelle interaction.
« J'ai l'idée de trois personnes en une entre les choses du corps, ma pensée et mes relations » dit un patient.
2 - Précisions terminologiques et étymologiques
A. Termes usuels désignant l'affection dont souffrent les personnes considérées
-Succession dans le temps des termes de:
*Infirmité, du latin infirmus, *faible d'esprit et pas ferme (firmus)de corps et d'esprit.
*Invalidité, invalide du latin in et validus (fort, bien portant et efficace), dérivé de valere (valoir) est à
comparer au terme espagnol de « minusvalidos » bien plus valorisant pour les personnes considérées.
Ce terme d'invalide est actuellement plutôt réservé au vocabulaire de la Sécurité Sociale et désigne une
personne qui, après avoir accompli normalement son travail professionnel, n'est plus, du fait d'une
pathologie mentale ou physique, en mesure totale ou partielle de le poursuivre. Mais, souvent, les
patients, et parfois avec eux leurs accompagnants, ne savent pas trop à quels registre, celui de
l'invalidité, du handicap ou du RSA, ils appartiennent, lequel doit être privilégié et si ces différentes
aides peuvent être associées
*Handicap: Le"hand in cap", la main dans le chapeau, était en Angleterre, au XVIIe siècle, un jeu
entre trois parties, deux troqueurs et un arbitre handicapeur. Il s'agissait d'un troc au cours duquel les
deux troqueurs mettait en jeu des objets personnels qu'ils souhaitaient échanger. Une fois les mises
initiales équivalentes des trois parties posées dans le chapeau, les deux troqueurs plaçaient leurs mains
dans le chapeau et l'arbitre annonçait son estimation de la différence de prix entre les deux objets à
échanger. Les deux parieurs ressortaient alors ensemble leurs mains du chapeau, pleines s'ils
acceptaient l'estimation de l'arbitre, vides s'ils ne l'acceptaient pas. Si les mains des deux troqueurs
étaient pleines, l'échange avait lieu et l'arbitre empochait les mises. Si les deux ressortaient la main
vide, l'échange n'avait pas lieu mais l'arbitre empochait également les mises. Enfin, si l'un des deux
seulement ressortait la main pleine, l'échange n'avait pas lieu mais c'est lui qui empochait les mises.
Par la suite ce jugement comparatif s'est appliqué à des chevaux en imposant aux meilleurs de porter
un poids plus lourd, de partir un peu plus tard ou de parcourir une distance plus grande dans un souci
d'égalisation des chances. Ce handicap appliqué aux meilleurs, dans les courses de chevaux ou le golf,
a persisté de nos jours, pouvant susciter un regard différent et positif sur cette notion de handicap. Puis
le handicap, par un glissement de sens, a désigné le désavantage social (cf la classification de Wood
abandonnée maintenant en déficiences, incapacités et désavantages) avant que de désigner
actuellement tout ce qui peut faire problème dans le champ social pour une personne atteinte d'une
affection chronique physique, sensorielle ou mentale. Dans cette acception, la loi du 11- 02- 05 pour
l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées semble
avoir reconnu la notion de « handicap psychique » ou « handicap par la maladie mentale », mais cette
notion reste très critiquée par bon nombre de psychiatres comme étant discriminatoire, introduisant un
clivage entre la déficience qui justifie un soutien social et la maladie qui nécessite un traitement
spécialisé, et comme étant aussi imprécise et donc peu appréhendable pour les collectivités locales qui
devraient éventuellement en supporter le coût en lieu et place de l'assurance maladie. Néanmoins, cette
loi, qui reconnaît pour chaque personne handicapée, à la suite de la loi de modernisation sociale du
17- 01- 02, le droit à la compensation de son handicap, propose aussi pour la première fois une
définition de ce handicap comme constitué par « toute limitation d'activité ou restriction de
participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une
altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles,
mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant ». . .
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-Autres termes :
*Déficit, *déficience (intellectuelle ou mentale) : C'est un constat actuel descriptif d'un manque.
*Arriération a été opposée historiquement à *démence (de/mens: privé d'esprit). Ainsi, l'aliéniste
Esquirol (1772-1840) pouvait-il dire : "l'homme en démence est privé des biens dont il jouissait
autrefois, c'est un riche devenu pauvre. L'idiot a toujours été dans l'infortune et la misère". Le terme
d'arriéré, qui semblait tombé en désuétude, peut-être du fait de son compagnonnage avec le concept
fâcheux de dégénérescence mentale, paraît connaître une nouvelle jeunesse. En témoigne son emploi
dans le titre d'un article paru en 2003 de l'Encyclopédie Médico-Chirurgicale : « Arriération mentale:
Le cap de l'adolescence ».
*Dégénérescence mentale: Être dé/généré, c'est avoir perdu les caractéristiques de ses ascendants,
les privant ainsi de leur « fantasme d'immortalité narcissique », soit l'illusion de pouvoir se continuer
soi-même indéfiniment à travers ses descendants. Ce terme, qui a caractérisé un temps les personnes
atteintes d'anomalies congénitales, a été trop lié à la doctrine eugéniste pour pouvoir être conservé.
*Oligophrénie (= petite pensée) est resté un terme médical peu usité
*Débilité mentale au sens restreint est le degré le plus léger du déficit mental ; au sens large, ce
terme représente toutes les insuffisances mentales.
*Insuffisance ou inadaptation mentale : elle est définie par rapport à un groupe donné de même
âge et de même culture.
*Retard mental : Ce vocable laisse espérer un développement positif et s'oppose aux mots
désespérants d'incurabilité, d'inadaptabilité ou d'inamendabilité qui ont souvent caractérisé la pshm.
B. Mots familiers, issus de divers domaines, et qui ont pu désigner, dans le temps et dans
différents lieux, une personne présentant une déficience mentale
§Mots liés à la profondeur du handicap mental
*Idiot : Du latin et du grec idiotes, désigne un ignorant et un isolé, trop singulier pour être accueilli
par la communauté des notables savants qui partagent, eux, des symboles communs. Dans certaines
civilisations, l'idiot, le *simple, considéré comme sans culture et même « ensauvagé », a même été
déporté dans des îles lointaines, quand il n'était pas purement et simplement éliminé parce que « sans
valeur ». Plus près de nous, l'inhumain programme T4 des Nazis a repris cette appréciation de « sans
valeur » pour éliminer les handicapés. L'idiot, en termes médicaux, a désigné longtemps une personne
atteinte d'une déficience mentale profonde (débile profond actuellement).
*Imbécile : Du latin imbecillus (in baculum, sans bâton), a désigné un faible d'esprit et parfois de
corps et, dans le langage médical, une personne atteinte d'une insuffisance mentale moyenne (débile
moyen actuellement). On pressent que, contrairement à l'idiot, qui a pu apparaître à certaines époques
trop singulier ou trop étranger pour être secouru, l'imbécile sans bâton sera considéré comme pouvant
progresser pour peu qu'on lui fournisse le soutien dont il aurait manqué originellement.
*Débile : Du latin debilus, faible, infirme, estropié, le mot débile a surtout pris son essor au début du
XXème siècle quand le critère pédagogique est devenu prédominant et que les élèves porteurs de
déficits mentaux moyens et légers sont devenus des débiles inadaptés au système scolaire en vigueur.
§Mots issus du domaine religieux
*Crétin : Il existait en Suisse romande à l'état endémique un syndrome d'hypothyroïdie, le crétinisme,
du fait de la carence en iode de certaines populations, d'où l'appellation de « Crétin des Alpes ». Crétin
est dérivé du latin christianus (chrétien) et fait allusion au caractère sacré des *innocents. L'in/nocens
du village, celui qui ne peut pas faire de mal, a pu parfois être opposé au « fou furieux » qu'il faudrait
enfermer. La formule biblique « Heureux les *pauvres d'esprit car le royaume de Dieu leur
appartient » témoigne aussi de cette sollicitude religieuse pour les *égarés, l'égaré étant, comme la
brebis égarée de la Bible, celui qu 'il faut aller chercher de toute urgence même s'il faut pour cela
délaisser pour un temps le reste du troupeau. Un *benêt (de béni) ou un *« mon Dieu, mon Dieu »
proviennent aussi de cette veine religieuse.
§Mots référents au manque de dynamisme de certaines phm
* Demeuré : resté en la demeure (des parents? de Dieu? du gène?)
* Bredin ou berdin, c'est à dire resté dans la « berdouille » (la boue). A St-Menoux (Allier) existe
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un sarcophage appelé « Tombeau de St-Menoux » percé sur le côté d'un trou rond où les « bredins »
peuvent introduire leur tête pour obtenir leur guérison. On raconte que ce « débrédinoire » avait été
inauguré par le serviteur un peu *simplet de St Menoux qui, désespéré par la mort de son maître, saint
guérisseur, avait glissé sa tête dans son tombeau et en était ressorti « débrédiné ».
*Niais ou *nigaud signifient « resté au nid »
*Ballot: Le ballot reste planté là comme un ballot de marchandises
*Stupide, du latin stupor = paralysie, réfère à une certaine paralysie intellectuelle
*Sot, sosot, sont à rapprocher de souche pour certains, du latin sopire (endormir) pour d'autres
*Abruti, resté à l'état de brute (du latin brutus: lourd, pesant) est accentué par l'expression souvent
méprisante de * « abruti de naissance »
§Mots signifiant le caractère « animal » et buté qui a pu être attribué à la pshm
*Bête, *bêta, *bêtassou
*Âne fait référence au caractère têtu de l'animal. *« Âne bâté »en renforce l'impression
d'irréductibilité pesante, et le « bonnet d'âne » a longtemps caractérisé sottement bien des élèves en
difficulté. A contrario, l'asinothérapie (la thérapie avec l'âne) paraît prometteuse pour certains
handicapés, mais elle est moins utilisée actuellement que la thérapie avec le cheval ou équithérapie.
*Zozo ou zoziau pourraient évoquer la naïveté de l'oiseau qui prétendrait rester au nid (cf niais)
*Buse ou *triple buse! feraient penser au masque figé de l'oiseau guettant sa proie.
§Mots se rapportant initialement à l'aspect de certaines phm
*Mongol (gogol) ne concerne pas seulement l'aspect de la personne atteinte de trisomie 21 mais est
souvent utilisé par les gamins des cours de récréation pour stigmatiser la différence ou par les
personnes handicapées elles-mêmes pour désigner toute personne qui peut leur sembler plus déficiente
qu'elles ne le sont elles-mêmes. Mongol fait référence à une population asiatique faussement supposée
primitive mais dotée d'une riche épopée guerrière. Gogol, en russe, signifierait canard sauvage (on
pense au vilain petit canard du conte, à l'enfant sauvage, ou au célèbre « faut pas prendre les enfants du
Bon Dieu pour des canards sauvages ») et c'est même l'écrivain russe Nicolas Gogol soi-même, auteur
aussi du « Journal d'un fou », qui signale cette homophonie avec son nom propre dans son roman
« Tarass Boulba ». Par ailleurs, Gogol d'Algol (Algol est une étoile de la constellation de Persée d'où
viennent les étoiles filantes, les perséides) est le nom choisi par le dessinateur Enki Bilal pour le chat
télépathe particulièrement intelligent (intellegere, choisir entre, comprendre par l'esprit et inter/legere,
savoir lire entre les lignes) de sa bande dessinée : « La foire aux immortels ». Ces digressions
homophoniques du mot gogol pourraient permettre à l'occasion de raconter une histoire sur ce mot ou
de penser autrement une personne dont l'aspect physique particulier pourrait faire évoquer uniquement
une déficience préjudiciable.
§Mots lisières entre pathologie mentale et handicap mental
*Fada : du latin fatuus, insensé puis fat, a désigné, en Provence, autant quelqu'un de singulier que
quelqu'un de sot, et, pour certains, quelqu'un en communication avec les farfadets ou les fées.
*Lou ravi, toujours en Provence, est autant celui dont l'esprit a été ravi par une puissance
surnaturelle que celui qui est resté, volontairement ou non, dans la félicité originelle, dans le « plus à
jouir » diraient même certains lacaniens.
*Nœud-noeud ou *Tête de nœud en appelle à la complexité, paradoxale pour un simple d'esprit,
d'une personne à la fois nouée dans ses expressions émotionnelles et trop compliquée pour pouvoir
être comprise. La tentation peut alors être grande de brandir le glaive d'Alexandre ( littéralement celui
qui ne reconnaît pas la loi de l'homme) pour trancher brutalement ce nœud gordien.
*Passoire est une image pour celui qui a perdu le filtre entre le dedans et le dehors, qui n'a plus de
« Moi-Peau » (Didier Anzieu) et qui, soumis au « conflit esthétique » (Donald Meltzer) entre plusieurs
sens, en est réduit au « démantèlement ou à l'isolement sensoriel » (D. Meltzer), soit n'utiliser qu'une
seule perception sensorielle à la fois pour ne pas éclater.
3 - Pour conclure cette introduction, nous remarquerons qu'il y a une hétérogénéité clinique des états
déficitaires depuis la personne déficiente profonde « en grande dépendance » jusqu'à la personne
adulte avec une déficience légère et presque autonome avec ou sans l'aide d'un Service d'Aide à la Vie
Sociale (SAVS). L'état déficitaire est le plus souvent chronique, ce qui ne veut pas dire non évolutif,
mais le handicap social engendré peut être très variable au fil du temps et des différentes rencontres.
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II - ETUDE CLINIQUE DU HANDICAP MENTAL.
Cette étude clinique va dégager surtout les aspects qualitatifs du handicap mental avec l'évocation des
travaux classiques sur la déficience mentale, puis de quelques mots plus inhabituels pouvant porter à la
réflexion sur la déficience mentale dans son ensemble et sur ses parentés avec des affections
psychopathologiques. Enfin, après un détour par d’autres aspects de l’organisation mentale de la pshm,
nous parlerons de la distinction entre déficience mentale harmonique et déficience mentale
dysharmonique avec troubles de la personnalité et du comportement.
1 - Evolution, au cours de l’histoire, de l'appréhension du déficit intellectuel.
Jusqu’au XIX siècle, on ne connaissait du handicap mental que les déficits très profonds (les idiots)
ou profonds (les imbéciles). Au XXème siècle, avec l'obligation scolaire, le critère pédagogique
devient prédominant, et le Ministère de l'Instruction Publique va demander à Alfred Binet, en 1905, de
mettre au point un test pour détecter les déficits moyens et légers qui deviennent alors des débiles,
inadaptés au système scolaire en vigueur. Pour répondre à la commande, Binet va imaginer alors les
fameuses mesures du Quotient Intellectuel. Puis ses successeurs, plutôt que de s'attacher aux
constatations de manque, vont chercher à définir les mécanismes de pensée des personnes déficientes,
dans une perspective que l'on qualifierait maintenant de cognitiviste.
2 - Travaux classiques.
Kurt Lewin, en 1935, avait déjà constaté que le fonctionnement mental de la personne débile était-trop
rigide, et cette « rigidité idéique » de la pshm devrait actuellement inciter les institutions à introduire
plus de souplesse dans leur cohérence organisationnelle pour lui faire pièce et retrouver si possible la
« plasticité cohérente » qui caractériserait le vivant harmonieux selon les chercheurs biologistes EvoDévo (Evo, pour évolution de l'espèce, Dévo pour développement individuel).
Birgit Inhelder, suivant les travaux de Piaget sur les quatre stades successifs de l’intelligence (cf III.3),
parle, en 1943, de « viscosité génétique » des personnes débiles, pour évoquer les oscillations du
raisonnement de ces personnes dont un mode de raisonnement acquis pourrait être massivement
contaminé par un mode de raisonnement antérieur. Il semble bien cependant que ce soit le libre jeu des
différentes façons de penser repérées par Piaget qui soit caractéristique de l'intelligence habituelle et ce
sera ce libre jeu que les pshm n'arriveront généralement pas à utiliser tandis que certaines d'entre elles
resteront bloquées au stade de la pensée concrète (raisonnement possible seulement en présence des
choses ou des êtres à raisonner), n'arrivant pas ou mal à aborder le stade du raisonnement hypothéticodéductif de la pensée formelle et logique.
René Zazzo, en 1973, parle « d’hétérochronie du développement » pour évoquer des différences
importantes suivant les secteurs du développement considérés chez la même personne : motricité,
cognition, langage, capacités relationnelles, entretien de soi-même, soit les différentes modalités
« d’être au monde ». On peut rencontrer des pshm étonnantes dans leur capacités motrices, même en
motricité fine, qui n'ont pratiquement pas de langage ou dont la capacité relationnelle est des plus
réduites. D'autres, très communicantes au contraire, restent d'une maladresse physique préoccupante.
Alexander Luria, décrit, en 1974, « l’inertie des processus mentaux supérieurs ».Ainsi, des pshm
peuvent avoir des difficultés à apprendre mais il leur est encore plus difficile de désapprendre, quand il
y a des changements de références pratiques ou théoriques. Lâcher un savoir caduc pour un autre
encore à construire pourrait alors entraîner chez elles un « conflit cognitif » dommageable.
D'autres travaux
montrent l'atteinte fréquente des activités d'analyse catégorielle et de
conceptualisation verbale (d'une part, ce qui est commun dans la diversité du réel, soit un travail
mental de catégorisation, et, d'autre part, ce qui est essentiel au travers du contingent, soit un travail
mental de découpe et d'analyse de la totalité de l'objet perçu)
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3 - Des mots plus récents s'appliquent à la pathologie comme au handicap mental .
* alexithymie (Sifnéos, 1970) : absence de mots pour communiquer ses émotions, telle qu’on peut la
constater aussi chez des patients non déficients dits psychosomatiques, qui gèlent leurs expressions
émotionnelles dans le corps, et utilisent un mode de pensée essentiellement pratique, dit “pensée
opératoire”, coupé des sentiments. « Mon papa, il est mort, ma maman et mon beau-frère aussi, j'ai mal
au dos, qu'est-ce qu'on fait? », me dira un jour une résidente d'une voix égale. Dans un cadre médicoéducatif, il pourra appartenir à l’éducateur de « sensorialiser les émotions et émotionner la
sensorialité » pour tenter de construire, avec la personne handicapée mentale, un pont entre ses
émotions et ses connaissances et palier ainsi en partie ce que j'appellerai un « déficit associatif ».
J'avais utilisé cette formule de « sensorialiser les émotions » pour inciter l'éducateur à sélectionner
avec la pshm une situation dans ce qu'ils perçoivent tous deux qui puisse donner sens à l'émotion
exprimée dans le moment présent par la pshm, et celle « d'émotionner la sensorialité » pour associer,
avec la pshm, une émotion au réel éventuellement traumatisant perçu sur le moment. Je rapprocherai
cette proposition de ce que Michel Lemay avait décrit à Montréal sous le nom de « psychothérapie de
la quotidienneté », en remarquant qu'il s'agit surtout pour l'éducateur, de se donner le droit de raconter
et de faire raconter des histoires sur ce qui est perçu et vécu dans l'environnement commun à la pshm
et à lui-même, chaque fois que cela est possible.
* anhédonie : perte de la sensibilité au plaisir, telle qu'on peut l'observer aussi chez certaines
personnes dépressives non déficientes. Dans le cadre institutionnel, le plaisir obtenu par les loisirs
devra aussi faire l’objet d’une éducation, car il ne va pas de soi et il est arrivé fréquemment que des
pshm, par ailleurs très performantes et manifestement épanouies dans le cadre du travail, se retrouvent
très démunies quand vient pour elles le temps des loisirs.
* athymhormie : Cette absence de variations de l'humeur et ce manque d'élan vital s’observe aussi
chez certains dépressifs mais peut se rencontrer chez la pshm en dehors de toute dépression. « Tout est
plat, tout est plat » me dira un jour une autre résidente manifestement indemne de dépression.
* anhistoricité, achronognosie : le sujet déficient mental éprouve une difficulté toute particulière à se
situer dans son histoire personnelle et rejoint ainsi certaines personnes présentant une psychose de type
schizophrénique souffrant souvent elles aussi de ce « déficit de la mémoire autobiographique ». Une
« mise en histoire » de son parcours de vie, à l'aide ou non d'un support matériel, pourra aider à ce
repérage historique nécessaire à la constitution d’une identité suffisamment stable. Mais, au contraire
du sujet schizophrénique non déficient qui se repère généralement très bien dans le temps, il est
particulièrement difficile à la pshm de pouvoir prendre conscience de la succession du temps et à se
situer dans ce temps. Pour l'apprentissage éventuel de la notion de temps, je citerai Jacques
Montengéro, professeur de psychologie du développement intellectuel à Genève: « S'il existait une
pédagogie du temps, elle devrait favoriser ces incitations à reconstituer [l'histoire] ou à anticiper, et
pas seulement à transmettre des connaissances temporelles sous forme de mesures, séquences
apprises ou formules arithmétiques. ». Ce spécialiste du développement cognitif a ainsi pu observer
que le temps s'apprend par les histoires tandis que les psychothérapeutes d'inspiration psychanalytique
suggèrent, eux, que la connaissance et l'éprouvé émotionnel de l'histoire particulière de chacun
semblent constitutifs du sentiment d' identité personnelle, certains, à la suite de Paul Ricoeur, parlant
même d' « identité narrative ». On voit encore bien là toute l'importance de raconter et de faire raconter
une ou des histoires, dans des établissements médico-éducatifs, tant il semble patent que l'avènement
d' « homo narrans » est susceptible, en sus de l'appréhension du temps, d'alléger les contraintes
isolationnistes qui pèsent fréquemment sur la personne avec un handicap mental.
* analgognosie ou asymbolie à la douleur : Certaines pshm ne perçoivent pas ou mal la douleur
physique et psychique résultant d’une maladie, d’une blessure ou d’une brûlure. Cette absence de
perception de la douleur peut se retrouver chez certaines personnes cérébrolésées, ou lors d’une mise
sous hypnose ou encore lors d’un état de transe au cours de cérémonies traditionnelles. Elle implique
pour les accompagnants de la pshm une vigilance accrue, notamment sur les lieux de travail.
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4 - Autres aspects de l'organisation mentale de la personne handicapée mentale.
-Le déficit attentionnel et l’hyperactivité peuvent se retrouver chez des enfants non déficients dits
hyperactifs, à qui on propose parfois un traitement par la Ritaline, mais cette amphétamine est
déconseillée en cas de manifestations d’angoisse ou de troubles d’allure psychotiques, donc pour la
plupart des pshm dites dysharmoniques, et je n'ai personnellement aucune expérience de sa
prescription ni de connaissance qu'elle ait été prescrite au long cours dans un contexte médico-social.
- La pensée magique et la mythomanie peuvent se comprendre comme une défense contre la
blessure narcissique de la déficience. A l'extrême, ce sera un comportement de toute puissance auquel
il faudra bien se garder de répondre par un comportement similaire si on veut éviter « l'affrontement
des toutes puissances » anti-éducatif et anti-thérapeutique.
- La tendance interprétative, avec notamment le : « Il me regarde celui là! », si souvent entendu sur
le mode de l'interprétation anxieuse plus que sous celui de la simple interrogation connaissante. En
effet, fréquemment, la pshm se comporte comme un persécuté. Sans aller jusqu'au diagnostic de
paranoïa , on peut penser que la personne souffrant de déficience mentale ne disposant pas des outils
cognitifs pour envisager une situation dans son ensemble, n'en retient qu'une vision partielle,
favorisant l'interprétation pathologique qui est définie par Dromard comme « l'inférence d'un percept
exact à un concept erroné par l’intermédiaire d’une association affective ».
5 - Distinction entre déficience mentale "harmonique", sans troubles associés, et
déficience mentale "dysharmonique", associant à la déficience des troubles de la
personnalité et du comportement.
On parle alors aussi de “double pathologie” ou de “double diagnostic”. Cette distinction entre
déficience mentale harmonique et déficience mentale dysharmonique va nous faire détailler, dans la
suite de ce chapitre, ce qui peut constituer cette dysharmonie. Nous étudierons d'abord la sémiologie
des principaux troubles mentaux, en utilisant une classification ternaire en troubles cognitifs, troubles
affectifs et troubles de la cohésion et/ou de l'intégration du Moi. Nous étudierons ensuite les
principales maladies mentales avec une classification nosologique, elle aussi ternaire, en névroses,
psychoses et états limites.
A. Sémiologie des troubles mentaux (les signes de pathologie mentale) et particularités
de leurs expressions chez la personne avec un handicap mental
a) Troubles des processus cognitifs
Je peux connaître le monde environnant grâce aux différents outils mentaux que sont la perception,
la représentation et la mémoire, qui m'en donnent une représentation idéique, et grâce au langage parlé
ou écrit qui m'en donne une représentation verbale et qui permet un retour de communication
caractéristique de la fonction symbolique. Pour les sémiologues (Eco,1999), il existe trois composantes
à la constitution d'un « type cognitif » (TC) définissant une chose ou un état : iconique (descriptive),
propositionnelle (fonction), narrative (histoire). Chacun de ces aspects de la connaissance peut
éventuellement faire l'objet d'une atteinte spécifique ou d'un déficit chez une personne en difficulté
mentale.
Les personnes en situation de handicap mental (pshm) souffrent souvent d'un défaut d'accès évolutif à
tout ou partie des cognitions et à tout ou partie de la fonction symbolique (= partage de codes de
communications communs entre les différentes personnes d'un groupe humain). Si certaines de ces
personnes usent, comme certaines personnes cérébrolésées, de périphrases ou de gestes éloquents pour
indiquer à leur interlocuteurs les caractéristiques de la chose ou de l'état qu'elles veulent partager avec
lui, beaucoup préfèrent se réfugier derrière un « je ne sais pas », moins compromettant certes, mais
aussi souvent plus coûteux en termes narcissiques.
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-Pathologies de la perception-représentation :
hallucinations psychoaffectives ou « perceptions sans objet à percevoir » : elles peuvent toucher un ou
plusieurs des cinq sens, soit des hallucinations auditives, visuelles, gustatives, olfactives et tactiles,
mais aussi le mouvement, soit des hallucinations kinesthésiques pour soi-même ou son environnement,
ainsi que la perception de l'espace et du temps. La frontière entre hallucinations et fantaisies
imaginatives, voire poésie, n'est pas toujours aisée à déterminer et ce sera souvent le contexte,
l'inclusion dans un délire manifeste, et la distance affective prise par la personne à leur égard qui
pourra permettre de les distinguer.
Les pshm n'ont souvent pas le stock lexical, graphique ou gestuel pour indiquer à leurs accompagnants
toute la richesse des hallucinations dont elles peuvent être les victimes consentantes ou innocentes et
souvent des bizarreries imaginatives ou même de grandes hallucinations pourront n'être seulement que
entraperçues par l'interlocuteur. Parmi de possibles hallucinations, les hallucinations auditives,
repérées parfois par des « attitudes d'écoute », semblent être les plus fréquentes, qu'elles se produisent
comme interprétation pathologique d'un bruit ou d'une conversation existants , dans le silence ambiant,
ou dans un brouhaha où un bruit significatif pour elle peut faire écho aux pensées troublées d'une
pshm dysharmonique.
-Pathologies de la mémoire : psychoamnésies lacunaires, dysmnésies reconstruisant une néoréalité
dans le temps, et « souvenirite » ou irritation par le souvenir, remémoration permanente et étouffante
déclenchée par des perceptions anodines et non par un effort conscient de réflexion.
On rappelle que le sujet déficient mental se repère souvent très mal dans sa « mémoire
autobiographique ». Une « mise en histoire » de son parcours de vie, à l'aide ou non d'un support
matériel, pourra aider à ce repérage historique que l'on sait nécessaire à la constitution d'une identité
suffisamment stable.
-Pathologie du langage : pour le langage oral, dans la forme, avec blésité, bégaiements et mutismes (à
distinguer des aphasies, atteintes cérébrales de la possibilité de parler) et dans le contenu avec
écholalies, stéréotypies langagières, et parfois abus de figures rhétoriques (métaphores, métonymies)
ou parler ordurier; pour le langage écrit, avec toutes les inhibitions psychologiques empêchant l'acte
d'écrire. Le langage, à savoir la faculté de parler, d'écrire ou de communiquer par signes, doit être
distingué de la langue, partie sociale du langage extérieure à l'individu, et de la prise de parole, acte
individuel de volonté et d'intelligence.
Les pshm présentent souvent des retards ou des déficits d'acquisition du langage et ce handicap les
empêchera bien souvent de prendre, voire d'acquérir, la parole. Mais leur inhibition fréquente à la prise
de parole peut aussi renvoyer à une cause affective ne résultant pas d'un retard d'acquisition du
langage et il faudra aussi parfois savoir appréhender une détresse affective devant une inhibition à la
parole ou à la communication. Parfois, au contraire, il peut s'agir d'une logorrhée plus ou moins
pertinente, masquant souvent elle aussi un trouble affectif.
-Pathologies de l'intelligence : déficiences intellectuelles, considérées comme pouvant parfois
s'originer d'une pathologie mentale antécédente au déficit intellectuel : on pense à ce que certains ont
appelé « la passion de l'ignorance », peut-être par crainte d'assumer des responsabilités (dérivé du latin
repons : répondre), mais aussi à des blocages psychologiques réactionnels qui empêcheraient
l'utilisation discursive d'une intelligence pourtant restée vive (ne sait plus se servir de son intelligence
pour la communication) telle qu'on peut l'observer chez certains schizophrènes. On note, en sus, que,
malheureusement, l'évolution des enfants porteurs de psychoses infantiles se fait souvent vers la
déficience intellectuelle.
Les aspects psychologiques des démences séniles, notamment l'entêtement ou la persévération du
même enchaînement d'idées, constituent un autre aspect de ces pathologies de l'intelligence. Les
premiers signes d'une démence de type Alzheimer ou d'une démence de type vasculaire pourront être
cependant assez difficiles à distinguer chez une personne avec un handicap mental et il faudra parfois
savoir tenir compte, derrière le masque habituel du handicap mental, d'un affaiblissement progressif ou
rapide des compétences acquises pour faire le diagnostic.
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b)Troubles de l'affectivité.
Je suis affecté par des besoins, des émotions et des humeurs
- Pathologies des besoins.
*Troubles des conduites alimentaires : anorexies mentales, boulimies, potomanies, pica ...
.Les anorexies mentales, qui conjuguent classiquement anorexie, amaigrissement et aménorrhée,
peuvent référer à plusieurs déterminismes qui se combinent souvent entre eux. J'en proposerai d'abord
trois : anorexie mentale comme refus d'accéder à la féminité et à ses formes évocatrices, anorexie
mentale comme tentative de fonctionner comme un dieu pouvant se passer avec hauteur des besoins
triviaux comme l'alimentation, anorexie mentale s'intégrant dans une problématique psychotique de
refus de tout ce qui peut venir de l'extérieur et modifier l'intégralité de l'individu, l'aliment étant alors
perçu comme un cheval de Troie des plus menaçant. Une quatrième forme d'anorexie mentale, peutêtre plus spécifique à la pshm, et proche de l'incurie, consiste en un désintérêt de la nourriture et des
besoins naturels, ainsi que de l'obligation à devoir se nourrir soi-même. On est alors plus proche de la
régression à un stade infantile du développement et les accompagnateurs pourront avoir à en tenir
compte en proposant pour un temps un nourrissage bienveillant à la pshm concernée.
Les anorexies mentales, comme les autres troubles du comportement alimentaire, non traités ici, sont
considérés actuellement comme des addictions au même titre que les prises de drogues ou l'alcoolisme.
*Troubles de la sexualité :
.impuissance et frigidité : Ces troubles de la sexualité relèvent souvent plus d'une étiologie psychique
névrotique que somatique. Les pshm n'en sont pas indemnes, mais leurs relations sexuelles, quand
elles existent, empruntent peu au registre névrotique qui fait le lit de ces troubles.
.perversions sexuelles quant à l'objet du désir ou paraphilies : pédophilie, zoophilie, nécrophilie ou
même handiphilie... Les pshm n'ont généralement pas les moyens mentaux nécessaires à la constitution
du scénario pervers et leurs agressions sexuelles éventuelles sur des personnes vulnérables seront
souvent plus le fait d'une proximité malencontreuse que d'une réelle paraphilie.
.perversions sexuelles quant au but : exhibitionnisme, voyeurisme, fétichisme sadomasochisme, ...Si
l'exhibitionnisme, le voyeurisme et le fétichisme sont assez fréquents comme troubles des conduites
parmi les pshm, ils relèvent plus, là encore, d'une méconnaissance des us sociaux qui encadrent la
sexualité et d'une crainte, entretenue par les nombreux interdits rencontrés, de l'accomplissement de
l'acte sexuel que d'une réelle disposition perverse. Le sadomasochisme comme perversion suppose lui
aussi un scénario pervers qui n'est pas forcément accessible à toutes les pshm.
.Pour les troubles engendrés par les éventuelles conséquences psychosociales de l'exercice de la
sexualité, notamment la venue au monde d'un enfant, si, dans l'évolution sociétale actuelle, sexualité,
conjugalité et parentalité sont maintenant des notions qui peuvent être pensées comme disjointes, il
serait peut-être temps que ces notions soient aussi pensées comme réelles mais disjointes pour et avec
des personnes avec un handicap mental, aux fins d'éviter les positions stérilisantes fréquemment prises
encore actuellement par les tenants d'un supposé salutaire conservatisme :
-contraception parfois obligatoire et non choisie pour les femmes, oubliant au passage la possibilité
d'une contraception masculine pourtant bien plus souhaitable en ces temps de recrudescence des
maladies sexuellement transmissibles et qui pourrait être également facilitatrice d'une démarche plus
active et plus actualisée dans l'établissement d'une « scène conceptionnelle » (Bayle,1999),
-conjugalité admise mais non réellement permise dans les faits et souvent mal accueillie,
- parentalité conçue comme un fait exceptionnel dont la survenue devrait dans la plupart des cas être
évitée, alors que la parentalité éventuelle des pshm adultes avec un handicap mental pourrait être au
moins envisagée pour certaines pshm ayant noué des relations amoureuses. Les accompagnants
auraient alors à penser l'existence éventuelle d'un enfant à venir comme celle d'un sujet issu d'un
désir commun de ses futurs parents et non comme celle d'un déchet anatomique utérin dont il faudrait
se débarrasser, ou comme une future charge sociale inassumable. Ces considérations positives, à
partager avec la pshm, pourrait permettre l'accès à la symbolisation dans ce domaine, et contribuer à la
prévention d'un « délire conceptionnel » (Gauthier,2012). Elles ne remettent néanmoins pas en cause le
fait que la venue éventuelle d'un enfant constituerait une réalité éprouvante pour les uns et les autres.
9
Ce n'est aussi qu'au prix de ces réflexions, à réentreprendre localement périodiquement avec la pshm
que les méthodes contraceptives pourraient retrouver tout leur sens pour ces personnes et que la
sexualité plaisir, étayée et non pas combattue par la possibilité de la sexualité conceptionnelle, pourrait
être appréhendée par elles comme une des fonctions relationnelles de l'humain.
*Troubles du sommeil : insomnies d'endormissement ou réveils nocturnes, dyssomnies
comme les cauchemars permanents ou le somnambulisme, de traitement surtout hygiénique et
psychothérapique, se rencontrent aussi chez les pshm. Hypersomnies et crises de léthargie aussi.
*Troubles de l'activité générale : asthénie, aboulie, hyperactivité...sont assez fréquents chez les pshm.
*Incurie ou négligence générale du soin à sa personne propre. Pour les pshm, il sera parfois difficile,
en cas d'incurie, de déterminer s'il s'agit d'un trouble psychique ou bien d'une non connaissance des
attentions habituelles nécessaires à l'entretien de soi-même.
- Pathologie des émotions :
*Rires et pleurs immotivés auxquels la recherche d'un sens permettra parfois de trouver une issue
*Colère, agressions répétées devant toute frustration, violences auto ou hétéro agressives, qui, pour
éviter l'affrontement des toutes puissances, amèneront souvent l'accompagnant à faire appel à un tiers,
autre personne, activité partagée ou recherche d'un ailleurs.
*Peurs excessives avec sidération, panique, ou rêveries terrifiantes devant une situation banale, et,
dans ce cas, on aura recours une fois de plus à la vertu apaisante de l'histoire partagée.
*Angoisse : « peur sans objet » relative à un conflit intérieur. Il existe deux théories
psychodynamiques de l'angoisse soit comme conséquence, soit comme cause du refoulement.
*Phobies diverses :agoraphobie, claustrophobie, phobie des transports, phobie sociale... pour
lesquelles une immersion (flooding) prudente, progressive et accompagnée (rôle d'objet contra
phobique) dans ce qui constitue l'objet de la phobie, sera parfois utile
*Conversions hystériques ou transposition d'un conflit psychique en un trouble somatique : eczéma,
arthralgies, myalgies et paralysies diverses, dysfonctionnements sensoriels tels que cécité sans lésion
oculaire, parosmies, dysgueusies, hyper ou hypoacousie... C’est alors un langage « par » le corps et
non enfoui « dans » le corps, et l'aspect du symptôme comme le lieu corporel du symptôme sont
significatifs. Une utilisation de l'expression théâtrale et une éducation sexuelle, associées à d'autres
approches soignantes psychodynamiques plus personnalisées seront parfois un soulagement utile pour
la pshm souffrant de conversions hystériques.L'observation hâtive des pshm ne relève pas aisément
chez elles des troubles hystéro-phobiques, mais une observation plus fine montre qu'elles présentent
assez fréquemment de tels troubles.
* Obsessions = pensées envahissantes et non souhaitées, et rituels obsessionnels. Les troubles
obsessionnels compulsifs ou TOCs se rencontrent dans deux contextes assez différents. Dans un cas, il
peut s'agir d'un contexte névrotique avec des interrogations liés aux vicissitudes du stade anal, dans
l'autre cas, il peut s'agir d'une défense contre une angoisse de morcellement liée à une problématique
psychotique et on rencontre ces troubles, qu'il faudra savoir respecter, à l'orée ou à la cicatrisation
d'une poussée psychotique. Il semble que les pshm avec troubles obsessionnels relèvent souvent plus
de la deuxième problématique.
*Symptômes psychosomatiques : asthme, ulcère, gastrite, migraine, tétanie... Le symptôme
psychosomatique, avec son langage piégé dans le corps, est dit « bête », car sans signification
symbolique quand à sa forme et à son lieu. Il touche volontiers les pshm.
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- Pathologie de l'humeur :
* Humeurs dépressives depuis la simple « déprime », avec tristesse et inhibition psychomotrice, assez
fréquente chez les pshm, et qui peuvent être en partie améliorées dans l'activité par le maniement des
horaires, la prise en compte par les histoires, et la valorisation de la pshm, jusqu'à la crise de
mélancolie (littéralement bile noire), véritable urgence psychiatrique tant l'auto-dépréciation et le
risque suicidaire sont importants qui, heureusement, semble plutôt épargner les pshm, mais qui ne
saurait en tous cas trouver d'amélioration dans l'exercice d'une activité.
* Euphorie ou exaltation morbides : Manie (le mot manie était auparavant synonyme de folie) et
hypomanie : le grand « festin maniaque », dévorateur de choses et de gens, avec sa tachypsychie, sa
négation des besoins de sommeil et d'alimentation, son hyperactivité et son illusion de résolution
illimitée de toutes les difficultés en suspens, entraîne une réaction vive de l'entourage et la personne
atteinte se voit fréquemment hospitalisée sous contrainte en milieu spécialisé. Par contre, le degré
inférieur de cette manie, l'hypomanie, beaucoup mieux supporté par l'entourage, fait connaître au sujet
enfin assuré de lui-même , un état de facilité factice de l'existence qui le rend peu enclin à s'en plaindre
et à consulter tant qu'il ne s'est pas aperçu de lui-même de la liaison existante entre cet accès
hypomaniaque et la possibilité de virage vers un accès maniaque franc. L'hypomanie, plus que la
manie, peut être une solution utilisée par la pshm contre l'envahissement dépressif et elle ne devra pas
nécessairement être bridée par des remarques intempestives dans les activités.
c) Troubles de la structuration, de l'intégration ou de la cohésion du Moi.
Je me suis construit comme une personne propre, consciente d'elle-même et de sa pensée, faisant
partie d'une espèce avec des codes de communication ritualisés, évoluant dans un monde préexistant
et élaborant son propre monde
- Pathologie globale de la conscience de soi et de soi au monde.
*Confusion mentale avec désorientation temporo-spatiale et onirisme (rêve à l'état de veille).
*Syndromes de dépersonnalisation (ne plus se reconnaître soi-même) et de déréalisation (ne plus
reconnaître son environnement). Ces syndromes ne se voient pas que dans les psychoses, mais
traversent tout le champ de la pathologie mentale. « C'est comme si le familier devenait l'étanger »
disait une patiente. Le « comme si » précède d'ailleurs le plus souvent le discours explicatif de ces
patients sur ce qu'ils ressentent. La pshm dépersonnalisée devra être accompagnée, le « comme si »
entendu et partagé, dans les activités, si on veut éviter qu'une angoisse de dépersonnalisation ne prenne
un tour plus franchement délirant.
*Troubles de l'identité personnelle ou de la personnalité : L'étude cognitive des psychoses montre que
le sentiment de l'identité personnelle est la résultante d'au moins trois sens complémentaires :
.le sens de l'agentivité : être l'agent de ses propres actions
.le sens d'être l'auteur de ses propres pensées, qu'on rapprochera de la « théorie de l'esprit » (Theorie of
Mind ou ToM) étudiée chez les personnes atteintes d' autisme
.le sens d'être le possesseur des parties de son corps et de ses états mentaux
Dans un but préventif des troubles identitaires, ces trois sens pourraient être largement repris et
commentés dans les activités.
*Troubles d'allure autistique : on rappelle que l'autisme, avant d'être décrit chez l'enfant par Kanner, en
1943, fut décrit par Bleuler chez l'adulte, en 1911, comme un des éléments constitutifs de la
schizophrénie.
On renverra, pour la prise en soins de toutes les formes d'autismes, aux histoires, à la contenance
(nominations, inscription dans un processus de filiation, valeur contenante de l'objet créé, rendu adouci
11
à la personne de ses pensées abruptes et bizarres), et à la valorisation, mais, surtout, on portera une
attention toute particulière aux passages et aux articulations en considérant que l'autisme est peut-être
bien avant tout une maladie des articulations psychiques.
Il conviendrait donc, pour les accompagnants, d'être associatifs, en idées, en paroles et en actes, de se
comporter comme des «donneurs d'isthmes», d'une part en articulant, pour et en eux-mêmes, le
cognitif et l'affectif et en le faisant partager à la personne autiste, d'autre part, en portant une attention
toute particulière aux passages de relais entre les différents intervenants.
On notera que ces différentes interventions psycho-éducatives ne contre-indiquent en rien la prise en
soins des personnes avec autismes par des méthodes cognitivo-comportementales de remédiation,
même si certains accompagnants exaltés de ces personnes avec autisme ont tenté de le faire croire.
- Pensée pathologique.
*Troubles du déroulement habituel du cours de la pensée : stéréotypies verbales, barrages(suspension
brutale et temporaire de pensée et de parole) et bizarreries idéiques (coq à l'âne par exemple).
*Troubles des contenus de pensée :
- « Automatisme mental » = penser comme un automate : pensée forcée et dirigée par un individu réel
ou fantasmatique ou une force perçus comme extérieurs à soi. Là encore, l'éducateur ne devra pas
aborder de façon abruptement dénégatoire les croyances erronées de la personne avec automatisme
mental, mais devra s'efforcer de partir de sa propre expérience de non perception de ce qui est dit par
cette personne pour tenter de lui répondre.
-Dissociation du Moi isolant la sphère intellectuelle de la sphère affective et produisant une
discordance idéo-affective entre le contenu verbal et l'émotion avec parfois rires et pleurs dits
immotivés. Il sera là encore question de «sensorialiser les émotions et d'émotionner la sensorialité».
-Rationalisme morbide avec déni de la possibilité de hasards et perte de l'utilisation inconsciente des
automatismes acquis (ce qu'on fait de façon irréfléchie, non consciente). Un autre affrontement des
toutes puissances est alors encore à craindre entre un éducateur modulateur et une pshm sûre de ses
démonstrations. Il faudra parfois savoir redonner sans brusquerie sa chance au hasard.
-Délires ( de delirare = sortir du sillon) : ils apparaissent comme cohérents ou incohérents, leurs
thèmes sont variés et parfois unique comme dans le délire systématisé du paranoïaque, leurs
mécanismes sont hallucinatoires, interprétatifs, intuitifs ou imaginatifs et leurs évolutions peuvent être
aiguës ou chroniques.
La personne délirante devrait, dans un premier temps, dans un but d'apaisement de son angoisse face à
ce délire, être crue et entendue par son interlocuteur plutôt que rabrouée. Ce n'est que dans un second
temps qu'un retour en souplesse au réel pourra être envisagé.
Une forme particulière de délire, rencontrée peut-être plus fréquemment chez certaines pshm, pourrait
être représentée par ce que j'ai appelé le « délire conceptionnel », soit l'illusion de pouvoir produire en
tous lieux, avec ou sans partenaire, autant d'enfants qu'on en voudrait, et de leur demander parfois en
plus de prendre sur eux les troubles ou handicaps de leurs parents. Nous ferons l'hypothèse que ce
« délire conceptionnel » a été permis par l'existence, chez certaines personnes avec un handicap
mental, d'un « déficit générationnel », réel ou fantasmatique, en descendance ou en ascendance, et que
ce délire peut surgir à tout moment chez ces personnes si leur parentalité n'est pas élaborée avec elles
comme un possible structurant la vie psychique et autorisant la transmission de ses valeurs, de ses
connaissances mais aussi de ses difficultés personnelles à ses enfants ou à toute autre personne
pouvant en occuper la place symbolique.
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B. Nosologie des troubles mentaux : les maladies mentales
Toutes ces affections mentales se rencontrent chez les pshm, avec des formes qui tiennent plus à la
personnalité antécédente de chaque personne qu'à une coloration particulière due au handicap.
a) Névroses.
Terme introduit par le psychiatre anglais William Cullen, en 1777, pour désigner « les lésions du
sentiment et du mouvement, sans inflammation, ni lésion de structure » et constituant le degré le plus
léger de la pathologie mentale. Les symptômes généraux en sont les troubles des conduites sexuelles
ou alimentaires, les troubles et la variabilité des sentiments et des idées (envieuse, en voulant toujours
plus, jamais contente, coupable et victime à la fois, la personne névrosée est souvent un être difficile à
vivre). On peut y ajouter fréquemment l'asthénie, la dépression, l'hypocondrie, l'angoisse et l'inhibition
ou l'instabilité psychomotrices. La compréhension des névroses doit beaucoup à Sigmund Freud et la
définition psychanalytique pourrait en être : « Affection psychogène dont les symptômes sont
l'expression symbolique d'un conflit, trouvant ses racines dans l'histoire infantile du sujet, et
constituant un compromis entre le désir et la défense ». On distingue trois sortes de névroses :
- La névrose hystérique (du grec hustera : utérus), qui touche surtout les femmes, est caractérisée par
la tendance à se faire remarquer pour se faire accepter (théâtralisation du quotidien ou histrionnisme),
la dépendance affective, et les différentes conversions hystériques, c'est à dire des symptômes
physiques variés qui ne renvoient pas à priori à une lésion organique mais constituent en quelque sorte
un langage par le corps. La question sous-jacente aux différentes manifestations hystériques, qu'il
s'agisse d'un homme ou d'une femme, est souvent celle du pourquoi de la différence des sexes, et
l'angoisse correspondante est dite angoisse de castration (sexuelle), soit la crainte qu'il manque un
attribut physique ou psychique indispensable à la manifestation de sa virilité ou de sa féminité.
- La névrose phobique avec angoisse devant un objet, un animal ou une situation déterminée, comme
dans l'agoraphobie, la claustrophobie ou la phobie sociale (peur de s'exprimer en public ou même de
paraître en public). La question et l'angoisse sous-jacentes aux manifestations phobiques sont souvent
les mêmes que celles de la névrose hystérique et on a même pu parler d'hystéro-phobie.
- La névrose obsessionnelle (de obsidere : assiéger), actuellement confondue avec les TOC ou
« troubles obsessionnels compulsifs », où le sujet est assailli par des pensées souvent en désaccord
avec son éthique personnelle, et où des rituels conjuratoires (ranger sans cesse et indéfiniment les
objets à la même place, se laver constamment les mains ou vérifier plusieurs fois les fermetures de
portes...) sont opposés à la crainte de commettre un acte répréhensible, ridicule ou criminel. Les
questions sous-jacentes aux troubles obsessionnels sont souvent celles ayant trait à la vie, à la mort et à
l'inéluctable changement du vivant. Pour se protéger du vieillissement, ou pour lutter contre un
bouleversement réel, imaginaire, ou à venir de sa vie affective, la personne obsessionnelle se réservera,
inconsciemment de la cause le plus souvent, un lieu ou une disposition matérielle immuables.
b) Psychoses.
Terme introduit par le psychiatre allemand Ernst Von Feuchtersleben, en 1845, pour désigner les
pathologies mentales les plus graves. Les symptômes généraux en sont la perte de contact avec le réel,
l'altération du lien intersubjectif, les troubles de l'identité ou de la conscience de soi, l'inconscience ou
le déni des troubles. Une patiente en dira cependant: « Être psychotique, c'est faire partie d'un tout dont
on ne serait pas une des parties ». On distingue trois sortes de psychoses :
- La psychose schizophrénique, ou plutôt, les schizophrénies, dominées par le délire avec ou sans
« automatisme mental », et avec ou sans hallucinations psychosensorielles, la « discordance »
(ambivalence, bizarreries, impénétrabilité et détachement), ), et la « dissociation du Moi », dissociation
idéo-affective d'abord et dissociation entre, d'une part, une partie du Moi malade et aliénée, de l'autre
part, une partie saine acceptant la réalité communément partagée. La question sous-jacente aux
troubles schizophréniques est celle de la cohérence de soi et des différentes influences à combiner pour
produire un soi original et suffisamment cohérent ou du « comment rassembler les morceaux? ».
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L'angoisse qui en résulte est dite angoisse de morcellement, ce morcellement de soi pouvant se
retrouver aussi bien dans l'espace que dans le temps. Certains morceaux de soi peuvent se retrouver
projetés sur l'interlocuteur (identification projective), d'autres morceaux de soi se trouver empruntés à
l'interlocuteur (identification introjective), d'autres encore rester comme à la surface de la relation sans
possibilité d'approfondissement (identification adhésive). Dans le temps, les morceaux de soi sont
perçus, mais il ne font pas histoire personnelle, les liaisons entre ces différents fragments historiques
étant peu ou mal assurées (« déficit de la mémoire autobiographique » des chercheurs cognitivistes)
On distingue, avec le DSM IV, trois sous-types de la schizophrénie :
1) Le type paranoïde avec une préoccupation par une ou plusieurs idées délirantes ou par des
hallucinations auditives fréquentes, mais sans discours désorganisé, comportement désorganisé ou
catatonique, ou affect abrasé ou inapproprié.
2) Le type désorganisé avec discours désorganisé, comportement désorganisé, affect abrasé ou
inapproprié.
3) Le type catatonique ou moteur avec immobilité motrice se manifestant par une catalepsie (paralysie
avec ou non flexibilité cireuse) ou une stupeur catatonique, pouvant contraster avec une activité
motrice excessive, soudaine, apparemment stérile (pas de but dans le mouvement) et non influencée
par des stimulations extérieures, un négativisme extrême (résistance apparemment immotivée à tout
ordre ou maintien d'une position rigide s'opposant aux tentatives destinées à la modifier), un mutisme,
et des particularités des mouvements volontaires se manifestant par des positions catatoniques
(maintien volontaire d'une position inappropriée ou bizarre), des mouvements stéréotypés, des
maniérismes ou des grimaces manifestes, une écholalie ou une échopraxie.
-La psychose paranoïaque, dominée par la surestimation de soi qui masque en fait une profonde
détresse et par l'interprétation pathologique , ou délire interprétatif, mais « avec une conservation
parfaite de la clarté et de l'ordre dans la pensée, le vouloir et l'action. » (Kraepelin). La question
sous-jacente à la psychose paranoïaque est souvent celle de la relation à l'autre : « Que veut l'autre et
que suis-je pour lui? » Des moments paranoïaques, pas toujours assimilables à une psychose
constituée, peuvent être utilisés comme défense contre un envahissement dépressif, avec l'espérance
que si l'autre m'en veut autant, c'est que je dois vraiment être quelqu'un d'important!
- La psychose maniaco-dépressive avec, dans son expression la plus typique, alternance de phases
de mélancolie, c'est à dire d'une humeur très sombre avec culpabilité et auto-dépréciation intenses et
tendance importante au suicide et de phases d'excitation maniaque, c'est à dire grande exaltation,
hyperactivité et toute puissance euphorique (délire maniaque). Cette grande psychose maniacodépressive (PMD) semble en régression actuellement au profit de troubles cyclothymiques, dits
bipolaires (dépression + exaltation) ou unipolaires (dépression ou exaltation) plus discrets. La question
sous-jacente est alors souvent celle du temps et de la rythmicité mais surtout du passé avec inhibition
ou exaltation psychomotrices pour bloquer ou accélérer le temps.
c) Les « états limites ».
Vaste « fourre tout » entre névroses et psychoses, intégrant aussi bien le déséquilibre mental ou
personnalités psychopathique, sociopathique ou caractérielle (avec mépris et transgression des droits
d'autrui) que les personnalités limites ou borderlines ( avec instabilité des relations interpersonnelles
et des affects, et tendance marquée à l'impulsion ), les personnalités narcissiques (avec troubles de
l'estime de soi) ou les personnalités schizotypiques (proches de la schizophrénie). La caractéristique
essentielle de ces états limites, outre l'instabilité, l'agressivité et le fond dépressif, réside dans une
dépendance à l'autre d'autant plus agissante qu'elle semble plus déniée. La question sous-jacente
importante est alors souvent celle de la relativité et de l'entre-deux, avec un fonctionnement manichéen
caractéristique en noir et blanc. La relation à l'objet est dite anaclitique (nécessité de s''appuyer sur une
personne choisie illusoirement comme mère comblante) et l'angoisse sous-jacente, mais le plus
souvent déniée, celle de la peur de perdre cet objet comblant. Ces personnes induisent souvent chez
l'interlocuteur le désir éperdu de s'occuper d'elles, mais elles n'en rendent aucun remerciement, puis
elles cassent brutalement le relation, laissant l'interlocuteur amer et très mal disposé à leur égard.
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III - ETUDE PSYCHOMETRIQUE DE L’INSUFFISANCE MENTALE
1 - Mesure de l'intelligence à l'aide du Q.I : (Age mental / Age réel x100)
- Évalue l'importance du déficit, mais aussi sa nature (épreuve verbale, de performances, perceptivomotrices, etc...) ; on distingue le QI verbal, le QI performance et le QI total.
- Classification ancienne de Terman.
* 0-20 : déficit très profond : "idiots".
* 20-50 : déficit profond : "imbéciles".
* 50-70 : déficit moyen et léger : "débiles".
* 70 : frontière de la normalité.
* 70-80 : zone marginale d'insuffisance mentale.
* 80-90 : lenteur d'esprit rarement assimilable à la débilité.
- Cotation OMS.
* < 20 : "retard mental" profond.
* 20-35 : "retard mental" sévère.
* 35-49 : "retard mental" modéré.
* 50-70 : "retard mental" léger.
* > 70 : restriction sociogène d'efficience intellectuelle.
- En France, distinction ancienne entre débiles moyens 50-65 et débiles légers 65-80.
2- Les limites du Quotient Intellectuel.
A. Que mesure le QI ?
2 mesures : * celle d'un quotient d'âge.
* celle d'un indice de capacité (comparaison avec d'autres enfants du même âge : WISC).
Le résultat du test n'est significatif que de l'efficience d'un sujet dans les conditions particulières de la
passation du test (problème du transfert et du contre transfert).
L'efficience calculée est le produit de l'histoire du sujet et non un potentiel intellectuel originel.
B. Le QI est-il constant ?
Il peut varier de façon très nette dans un sens comme de l'autre en quelques années. C'est le produit
de l'histoire du sujet, même si, évidemment, il est conditionné par l'équipement de départ.
3 - Autres épreuves standardisées analysant les mécanismes de fonctionnement de la pensée et
d'adaptation du sujet à des tâches précises.
Pour Piaget, l’intelligence est un moyen d’adaptation, résultat d’un équilibre permanent entre
« assimilation » (intégration du milieu au mode de pensée préexistant du sujet) et « accommodation »
(modification de la pensée préexistante du sujet en fonction du contexte).
Il conçoit l’E.P.L. de Piaget (Échelle de développement de la Pensée Logique).
- Pensée sensorimotrice (0 à 2 ans) (la perception produit une réaction motrice « instinctive »).
- Pensée intuitive ou pré-opératoire (2 à 7 ans) ( avec symbolisation par le langage).
- Pensée concrète (7 à 12 ans) (raisonnement seulement en présence des objets à raisonner).
- Pensée formelle et logique (> 12 ans) (raisonnement hypothético-déductif). ,
La présence d’un déficit intellectuel affectera la capacité du sujet à franchir toutes les étapes du
développement cognitif, notamment la capacité à accéder à l’abstraction de la pensée hypothéticodéductive, mais aussi la capacité à pouvoir passer d'une forme d'intelligence à une autre en fonction
des besoins.
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IV – APERCUS LEGISLATIFS SUR LE HANDICAP MENTAL
La classification internationale de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) de 1980 de Wood en
« déficiences, incapacités et désavantages » a été remplacée, en 2003, par la CIH-2 : « Classification
Internationale de Fonctionnement (CIF), du Handicap et de la santé », qui se réfère aux « Règles
pour l’égalisation des chances des handicapés » et s’appuie, pour les handicaps associés aux états de
santé, sur la CIM-10 (10ème Classification Internationale des Maladies) qui considère les déficiences
comme des éléments constitutifs d’une « maladie ».
L’expression « fonctionnement » dans la CIF se rapporte aux activités de la personne et à sa
« participation » au sein de la société. On retrouve cette notion de participation dans la loi française
du 2 janvier 02 « rénovant l’action sociale et médico-sociale », qui avait remplacé le terme
« d’usager » (des actions et institutions médico-sociales), de connotation fâcheusement consumériste,
par celui de « participant », terme qui n'a malheureusement pas rencontré d'échos chez les
professionnels et les accueillis de ces dispositifs. Cette loi de 2002 prône aussi la lisibilité, le respect
de l’attente du participant, la lutte contre la maltraitance institutionnelle et l’évaluation constante des
actions professionnelles.
Dans ses dernières déclarations de mars 2011, le député de la Loire Jean- François Chossy, rapporteur
de la loi du 11- 02- 05 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des
personnes handicapées, soulignait que, ce qui comptait, ce n'était ni l'intégration, ni l'inclusion, mais
de permettre à la personne handicapée de s'impliquer dans son environnement social, scolarité, vie
quotidienne, vie professionnelle, et vie culturelle .
La Convention des Nations Unies de 2006 relative aux droits des personnes handicapées parle, elle,
d' « aménagement raisonnable », d'inclusion comme la reconnaissance du « droit de vivre dans la
société avec la même liberté de choix que les autres personnes » et elle définit dans son préambule
que « le handicap résulte de l'interaction entre les personnes présentant des incapacités et des barrières
comportementales et environnementales qui font obstacle à leur pleine et effective participation à la
société sur la base de l'égalité avec les autres ». Elle estime aussi, dans son préambule, que les
personnes handicapées devraient avoir la possibilité de participer activement aux prises de décisions
concernant les politiques et programmes, en particulier ceux qui les concernent directement.
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V- LES FACTEURS ETIOLOGIQUES DE LA DEFICIENCE MENTALE
Ils peuvent être biologiques, psychologiques ou sociaux et sont souvent intriqués
1 - Les facteurs organiques (biologiques).
A. Atteintes biologiques prénatales géniques, chromosomiques, anomalies intra-utérines acquises
Le généticien dispose de trois outils complémentaires pour identifier l'éventuelle origine génique ou
chromosomique d'une déficience mentale : le caryotype qui peut mettre en évidence des anomalies en
nombre ou en structure des chromosomes, la cytogénétique moléculaire, avec comme outils la
fluorescence in situ hybridization (FISH), rendant possible la détection de remaniements structuraux
de plusieurs chromosomes, et la comparative genomic hybridization-array (CGH), comparaison des
ADN d'un patient et d'un sujet contrôle pour détecter une délétion (perte de matériel génétique) chez le
patient si sur-représentation du fluorochrome de l'ADN du sujet contrôle ou une duplication (segment
de chromosome surnuméraire) si sur-représentation du fluorochrome de l'ADN du patient, enfin la
génétique moléculaire avec le séquençage permettant l'identification de mutations dans un gène donné.
a) Atteintes de type génique :
- maladies métaboliques congénitales ou enzymopathies (déficits enzymatiques) :
Certaines de ces maladies métaboliques sont traitables avec efficacité si le diagnostic en est précoce
*Phénylcétonurie : le gène, situé sur le chromosome 12, permettant de fabriquer l'enzyme qui
transforme la phénylalanine en tyrosine, autre acide aminé, est défectueux. La détection systématique
se fait par le test de Guthrie (prélèvement de sang) ou la spectrographie et la correction précoce par un
régime pauvre en phénylalanine est possible. L'excès de phénylalanine est converti en phénylcétones
(acide phénylpyruvique) qui seront excrétées dans l'urine, d'où le nom de phénylcétonurie.
*Galactosémie congénitale: (intolérance au galactose et au lactose par déficit de l'enzyme assurant leur
dégradation) Le régime adapté dans les premiers jours de la vie, s'il évite les complications vitales,
n'évite pas toujours l'évolution vers la déficience mentale.
*Neurolipoïdoses comme la maladie de Nieman-Pick par déficit de sphyngomyélinase ou la maladie
de Tay-Sachs (idiotie amaurotique) par déficit d'hexosaminidase A.
- neuro ectodermoses congénitales ou phacomatoses (du grec : lentilles sur la peau), dont la sclérose
tubéreuse de Bourneville associant comitialité, troubles mentaux et adénomes sébacés.
- anomalie cranio-métaboliques : micro ou macrocéphalies.
- hypothyroïdie (myxœdème) congénital, avec aspect bouffi et retard mental souvent sévère
- syndrome de Rett (dû à une mutation du gène MECP2 localisé en Xq28), qui ne touche que les filles,
avec constitution d’un autisme sévère et évolution vers la déficience mentale et la tétraplégie
spastique.
b) Atteintes de type aberrations chromosomiques :
-d'un des 22 chromosomes non sexuels dits autosomes :
*trisomie 21 (syndrome de Dawn, mongolisme), avec, dans 95% des cas, un chromosome 21
surnuméraire,
*trisomies 13 (syndrome de Patau), 18 (syndrome d'Edward), 22 (syndrome des yeux de chat)
*délétion du bras court du chromosome 5 (maladie du cri du chat)...
*syndromes micro-délétionnels de Smith-Magentis(17p11.2) ou de Williams-Burren (7q11.23)
-des 2 chromosomes sexuels, X ou Y, dits gonosomes :
*syndrome de Turner (X0), syndrome de Klinnefelter (XXY), ou syndromes XXX ou XYY avec un
chromosome Y surnuméraire, dit anciennement et par erreur « chromosome du crime ».
*syndrome de l'X fragile (anomalie du long bras du chromosome X) avec un retard mental variable,
dysharmonique de versant psychotique et autistique, 2ème cause de retard mental après la trisomie 21.
c) Atteintes prénatales par anomalies acquises intra-utérines
* Embryopathies (1er trimestre de grossesse) : suite à rubéole, radiothérapie, médicaments...
* Foetopathies : suite à listériose, irradiations, carences nutritionnelles de la mère...
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B. Atteintes biologiques néo-natales ou périnatales :
a) Prématurité : ce facteur est en régression avec la prise en soins précoce des prématurés
b) Accidents obstétricaux avec souffrance néonatale et anoxie (circulaire du cordon notamment).
c) Ictère nucléaire par incompatibilité rhésus ( Père Rh+, mère Rh-).
C. Atteintes biologiques post-natales précoces :
a) Infectieuses (méningite, encéphalites).
b) Traumatiques (hématomes).
c) Métaboliques (hypoglycémie, déshydratation sévère avec convulsions).
d) Encéphalopathies convulsivantes : *Syndrome de West avec « spasmes en flexion » et tracé EEG
d'hypsarythymie (grandes ondes anarchiques). *Syndrome de Lennox-Gastant avec crises akinétiques.
e) Atteinte cérébrale évolutive : leuco encéphalite, leuco dystrophies.
2 - Les facteurs affectifs ou psychologiques.
A. Les carences affectives précoces (Spitz, Bowlby) peuvent entraîner un retard important du
développement.
B.Les troubles affectifs et relationnels précoces et sévères, psychotiques ou non, sont susceptibles
d'une évolution déficitaire, comme le montrent de nombreuses études longitudinales.
C. Les enfants maltraités (coups, sévices sexuels) peuvent aussi présenter des troubles de la série
déficitaire.
3- Les facteurs sociaux ou socio-culturels.
De nombreux travaux sociologiques statistiques montraient une très forte concordance entre la
« débilité mentale sans cause organique » et les conditions socio-culturelles défavorables, voire le
paupérisme, particulièrement pour les déficits moyens et légers.
4 - Les déficits intellectuels sans cause apparente.
A. Dans une perspective "organiciste", il s'agirait d'atteintes cérébrales indécelables
B. La thèse psychodynamique met l'accent sur un conflit latent avec l'entourage (rejet inconscient de
la mère, père absent ou non présent dans l’imaginaire de la mère ou envahissant et rigide)
C. Thèse de l'insuffisance intellectuelle variante extrême de la normale par le jeu de la transmission
héréditaire polygénique, dans une perspective statisticienne. (Zazzo,1973)
5- Remarques sur les facteurs étiologiques
A. Il faut éviter la dichotomie entre déficiences profondes et très profondes d'origine organique,
déficiences moyennes et légères d'origine socio-culturelles et affectives. La réalité est beaucoup plus
complexe et certaines déficiences profondes apparaissent bien comme le résultat d'un processus
psychologique mutilant gravement et précocement la vie cognitive.
B. La mise en évidence d'un facteur étiologique précis ne doit pas faire méconnaître l'association de
plusieurs facteurs. Il faut aussi garder à l'esprit la notion "d'écart organo-clinique" à savoir qu'une
même lésion organique peut aboutir à des tableaux cliniques très différents. Il existe souvent une
complémentarité évidente entre l'équipement biologique, les soins de type maternel et la plus ou moins
grande implication du père dans le processus du développement.
C. On peut distinguer des situations faites d'un déficit inscrit dans l'équipement initial du sujet,
relativement fixées au début mais pouvant évoluer, et celles où on assiste à une « débilisation »
progressive, liée à une pathologie cérébrale, psychique ou développementale. A l'inverse, on peut
observer une «psychotisation» ou une «autistisation» d’une déficience mentale jusque là harmonique.
D. Les positions actuelles tendent à éviter les réductionnismes organogénétiques, psychogénétiques ou
sociogénétiques au profit d'une déficience mentale résultant de l'action conjuguée des facteurs
biologiques, psychologiques et sociologiques, en constante interaction. Cette notion "d'homme bio
psycho social" amène à envisager plusieurs entrées compréhensives à la fois, aussi bien pour l'enfant et
l'homme sain que pour l'enfant et l'homme déficient mental, et à proposer des prises en soins
diversifiées pour ces derniers.
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VI– LES SOINS AUX PERSONNES HANDICAPEES MENTALES DYSHARMONIQUES.
1 – Les soins médicaux et médico-psychologiques.
A- Les médicaments psychotropes.
-Description :
a) Les anxiolytiques, ou calmants, représentés essentiellement par la classe des Benzodiazépines
(BZD) : Lexomil, Lysanxia, Séresta, Témesta, Urbanyl, Valium, Xanax...
b) Les antidépresseurs, avec la distinction entre « anciens antidépresseurs » (classe des tricycliques,
essentiellement) et « nouveaux » antidépresseurs (classe des Inhibiteurs Sélectifs de la Recapture de la
Sérotonine = ISRS essentiellement)
- Tricycliques : Anafranil, Défanyl, Laroxyl, Ludiomil, Surmontil, Tofranil,...
- ISRS : Floxyfral, Prozac, Déroxat, Zoloft, Séropram et Séroplex
- Non tricycliques, non ISRS : IRSNA (classe des Inhibiteurs de la Recapture de la Sérotonine et de la
NorAdrénaline) : Ixel, Effexor, Cymbalta, et autres antidépresseurs à mécanisme d'action complexe :
Valdoxan, Norset, Stablon
c) Les neuroleptiques et les antipsychotiques. Les neuroleptiques : Haldol, Nozinan, Largactil,
Neuleptil, Orap, Piportil, Tercian... sont, peu à peu, remplacés par les antipsychotiques dits atypiques :
Solian, Risperdal, Zyprexa, Leponex, Abilify.
d) En sus de ces trois grandes classes de médicaments psychotropes, on peut citer d'autres classes de
psychotropes comme les somnifères ou hypnotiques : Imovane, Havlane, Stilnox, Mogadon, ... et les
normothymiques ou régulateurs de l'humeur : Lithium et Tégrétol, Dépamide, Dépakote, Lamictal
(également antiépileptiques), Zyprexa et Abilify (également antipsychotiques) .
-Remarques sur les médicaments psychotropes :
a) La façon dont ces médicaments sont donnés, prescription, préparation et distribution est très
importante car ce qu'on appelle « l'effet placebo » vient s'ajouter, pour eux, à leur efficience propre.
b) Les médicaments ne doivent être ni diabolisés ni fétichisés. Ils ont leur utilité dans une entreprise de
réduction de la souffrance mentale au même titre que d'autres modes d'action, en proportion variable
suivant l'intensité de la la souffrance considérée, et l'urgence à la réduire.
c) La pshm doit être associée à la mise au point et à la révision périodique de son traitement
médicamenteux psychotrope et conserve dans tous les cas, s'il s'agit d'un adulte, le droit de le refuser.
B - Les techniques à médiation corporelle prescrites.
Outre la relaxation, on peut citer la masso-kinésithérapie, l'hydrothérapie (bain, douche, pack,
pataugeoire, piscine), les activités psychomotrices gymniques et les activités sportives.
C- Les soins corporels.
Il s'agit des soins dispensés par médecins, infirmières et kinésithérapeutes, quand un
dysfonctionnement somatique le requiert, mais aussi de l'aide apportée à la satisfaction des besoins
corporels (manger et dormir) et à la propreté du corps (assistance à la toilette, par exemple).
D- Les psychothérapies des psychiatres et des psychologues
Une de leurs définitions pourrait être : "Action d'un esprit sur un autre esprit, et réciproquement,
dans un but thérapeutique". Les thérapeutes (Thérapie = prendre soin de l’être) traitent alors l’esprit et
le corps par l’esprit en se servant de l'écoute et de la parole. Parmi les multiples classifications de ces
psychothérapies, on pourrait retenir la suivante qui se subdivise en trois grandes catégories :
a) Les psychothérapies élaboratives.
Outre la psychanalyse, elles comprennent toutes les psychothérapies d'inspiration analytique. Il s'agit,
pour le sujet souffrant, d'élaborer verbalement, en présence d'un tiers certifié thérapeute, et
classiquement neutre et bienveillant, l'histoire de sa souffrance. Les effets de transfert et de contretransfert sont recherchés, mais pas toujours analysés.
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b) Les psychothérapies résolutives.
Ce sont surtout les psychothérapies familiales ou systémiques, qui entendent résoudre, dans l'ici et
maintenant, des tensions à l'intérieur de la famille ou du couple, qui mettent en péril le bien être d'un
individu de ce groupe restreint, désigné comme « le malade symptôme » (du dysfonctionnement du
groupe). Parmi ces psychothérapies à visée résolutive, on peut aussi citer l'hypnothérapie (hypnose) et
toutes les thérapies fondées sur la catharsis (remémoration libératrice d'un événement traumatisant).
c) Les psychothérapies suppressives.
Ces psychothérapies, surtout représentées par les thérapies comportementales et cognitives (TCC),
cherchent à supprimer un symptôme gênant la vie de l'individu comme une phobie ou des TOC, sans
vouloir à priori, modifier la personnalité de cet individu. Elles peuvent être décrites comme des
thérapies à visée éducative.
2 – Les soins éducatifs
A- Les Incidences Psychothérapeutiques des Activités Pédagogiques et Educatives (IPAPES)
Cet essai de clarification de possibles incidences thérapeutiques des activités éducatives entreprises
au bénéfice de pshm dysharmoniques fait suite à des interviews que j'avais réalisés en 1999 auprès des
responsables pédagogiques et éducatifs et des maîtres de stages en services généraux d'un IME de la Loire.
Les notes prises lors de ces interviews ont fait l'objet d'une analyse de contenu avec constitution d'un
« corpus » excluant la référence à l'un quelconque des responsables d'activité, puis après décomposition de
ce corpus en items, et regroupement de ces items en catégories, un écrit a pu être réalisé dont certaines
réflexions apparaîtront ci-dessous.
a) Incidences sur le développement de l'imaginaire, de la représentation, de la mémorisation
Il persiste une ambiguïté quant à l'utilisation du mot imaginaire. Tantôt, il se réfère à la conceptualisation
ou représentation cérébrale imagée de la réalité, tantôt il se réfère à la fantasmatisation, ou représentation
psychique de fantaisies imaginatives.
Sur le plan de la conceptualisation, l'activité peut permettre le passage de la « pensée intuitive » à la
« pensée conceptuelle » qui intègre et mémorise l'origine, l'image et la finalité de l'objet fini dans le plan
de travail s'il s'agit d'une activité créatrice d'objets. On ne répétera jamais assez combien la traçabilité de
l'objet fabriqué, par exposition verbale ou imagée et par déplacement sur le parcours de cet objet, est
importante pour la constitution d'une pensée biographique de soi-même qui fait souvent défaut à la pshm.
La finalité, les buts et les règles d'une activité non créatrice d'objets, comme l'acquisition de
connaissances théoriques, ou ceux d'une activité de loisirs devront de même être explicités soigneusement
à la pshm. Dans le même souci de développement conceptuel, des activités faisant appel à la technologie
(= discours sur la technique), en alliant l'explication théorique et la pratique, pourraient aider certaines
pshm à atteindre le stade de la pensée hypothético-déductive.
Sur le plan du fantasme, c'est plus une affaire individuelle et il paraît difficile même dans le cadre d'un
« projet personnalisé », de préconiser d'emblée une activité plutôt qu'une autre pour une pshm souffrant
d'un défaut de fantasmatisation. Néanmoins, là encore, la narration systématique de ce qui vient de se
passer dans l'activité par l'encadrant ou par les personnes accueillies devrait permettre d'ajouter du
fantasme là où son absence pourrait être préjudiciable. Quant aux pshm présentant au contraire une
imagination débordante ou des fantaisies imaginatives envahissantes proches du délire, elles pourraient
être aussi accompagnées dans leur production imaginative par la parole de l'éducateur, en cours ou après
l'activité, l'introduction d'un tiers dans cet imaginaire fantasmatique permettant une canalisation en
douceur bien plus efficace qu'un affrontement dénégatoire propice à l'éclatement défensif, et cet
accompagnement compréhensif n'empêchant nullement l'encadrant de rester quand même « ambassadeur
de la réalité ».
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b) Incidences sur le renforcement du sentiment identitaire
L'identité est à la fois biologique (avoir un corps qui se reconnaît comme distinct des autres corps:
apparence générale, systèmes sanguins et tissulaires, systèmes immunitaires, empreintes digitales...),
psychologique (reconnaissance du Soi et du Non Soi) et sociale (professionnelle, de loisirs et civique avec
notamment les « papiers d'identité »). Il faut y ajouter l'identité de genre (le « gender » des Anglo-saxons),
à savoir la reconnaissance par soi-même et par les autres de son être sexué en fille ou garçon, homme ou
femme. Les activités éducatives, notamment physiques, vont avoir quelques effets sur l'apparence générale
de l'individu spécialement si elles s'adressent à un être en voie de développement comme un enfant ou un
adolescent. Elles vont surtout avoir un effet très important sur la reconnaissance psychologique du Soi et
du Non-Soi, comme sur la reconnaissance de son corps propre, qui peut apparaître progressivement
comme bien distinct de l'objet créé au cours d'une activité productive ou de l'objet échangé lors d'une
activité ludique ou commerciale. Quant à l'identité de genre, les activités proposées peuvent la renforcer,
l'atténuer ou la moduler suivant qu'elles sont traditionnellement plutôt réservées aux femmes (le
conditionnement par exemple) ou aux hommes (les ateliers bois, fer ou ciment par exemple).Cependant,
l'identité se soutient aussi de s'inscrire dans une chaîne générationnelle avec ascendants et descendants. Si
les ascendants sont le plus souvent présents, encore que fragilisés par une maladie mentale ou physique
plus fréquemment semble-t-il que dans la population générale, et sans qu'on puisse dire s'il s'agit d'une
cause (partage de facteurs de vulnérabilité communs avec la pshm) ou d''une conséquence (usure due au
souci que peut représenter la pshm), les descendants n'existent généralement pas, créant ce que j'appelle un
« déficit générationnel » qui vient se surajouter aux autres déficits. Pour combler en partie ce déficit
générationnel, il paraît souhaitable que la pshm, à défaut de transmettre à ses enfants, puisse transmettre
son savoir être et son savoir faire à d'autres personnes et un parrainage des nouveaux arrivants par les
anciens serait à envisager.
c) Incidences sur le renforcement de l'estime de soi, de la confiance en soi, de l'équilibre
La pshm doit constamment ajuster ses attentes narcissiques légitimes avec la réalité du handicap. Dans ces
conditions, certaines activités de production d'objets domestiques ou industriels dont la pshm puisse être
fière pourraient être conseillées comme baume aux blessures narcissiques inévitables dont la pshm
pourrait souffrir. Dans certains IMPros, il y a une progressivité dans la destination des objets créés: L'objet
(une lampe par exemple) est d'abord fabriqué pour l'usage propre de la pshm, ensuite pour l'usage de
l'institution ou de la famille proche, ensuite seulement envisagé comme pouvant être commercialisé. Cette
progressivité dans l'éloignement de l'objet créé par rapport à soi apparaît nécessaire à la préservation d'un
narcissisme fragile et à l'intégration toujours problématique d'un sentiment de perte.
d) Projection de tout ou partie de soi-même dans l'activité et dans l'objet créé
La nature de l'activité, de l'objet à créer, du matériau utilisé n'est jamais neutre et viendra faire écho avec
l'histoire de la pshm, et aussi avec celle de ses différents accompagnants. Ainsi, telle activité, au su ou à
l'insu de l'éducateur, pourra constituer une « repérisation » (présence symbolique du père là où il pourrait
être absent) ou une « rematérisation » (idem côté mère) si elle est proche de celle exercée par les parents et
pourra éventuellement par ce biais favoriser le processus de filiation. Telle autre activité ( création d'urnes
funéraires par exemple) viendra agiter des questions existentielles comme celle de la mort, alors que
d'autres activités, comme l'entretien des locaux ou des vêtements ou de son propre corps avec la toilette,
les soins esthétiques ou la coiffure, permettront, indirectement ou directement, cette réparation de soimême dont certaines pshm semblent avoir tant besoin.
e) Repérage Soi-non Soi, dedans-dehors, contenu-contenant
Des activités utilisant des objets contenants peuvent être utiles à des pshm ayant une barrière corporelle
fragile. Le lieu plus ou moins fermé, le coin dont dispose chacun, les bornes repères d'une activité
d'extérieur, exercent aussi une fonction contenante. Mais le contenant est encore plus souvent le
responsable d'activité par sa présence rassurante, et, aussi, par ce qu'il peut accueillir, digérer et restituer
des pensées de la pshm (cf le psychiatre anglais Wilfred Bion qui parle de la mère qui avec sa « capacité
de rêverie » va digérer les éléments bruts de l'environnement perçus par l'enfant, éléments appelés béta par
Bion, pour les détoxiquer et les transformer en éléments alpha utilisables par la pensée de l'enfant).
21
f) Incidences sur la possibilité d'associations sensorielles et sur l'acquisition de la profondeur de
champ: de 2D en 4D
Certaines pshm dysharmoniques n'utilisent qu'un seul sens à la fois pour s'ouvrir au monde. La vue sera
privilégiée par beaucoup d'autistes, d'où l'utilisation, entre autres, de cartes de communication illustrées
dans le cadre de l'éducation structurée du programme TEACCH. L'ouïe sera plutôt choisie par d'autres, qui
négligent le champ visuel, et le responsable d'activité devra prendre en compte cette particularité. La
gustation et l'olfaction, sens bien oubliés dans nos modernes sociétés occidentales, sont encore bien
utilisées par certaines personnes souffrant de troubles psychotiques, ce qui pourrait justifier de s'assurer le
concours de certains nez ou de certains goûteurs professionnels dans les institutions médico-éducatives
aux fins d'une entrée en relation plus opérante. Enfin, le toucher et l' exploration kinesthésique seront pour
certains leur approche favorite.
Cette exploration kinesthésique du monde et l'orientation spatiale qui en résulte ouvrent à l'expérience de
la profondeur de champ, dont certaines pshm semblent dépourvues. Ainsi Meltzer, déjà cité, a t-il pu
parler de « relation d'objet bidimensionnelle » pour certains autistes, la troisième dimension de l'espace,
celle de la profondeur, n'étant souvent pas acquise. Des activités de création d'espaces, d'éloignement et de
rapprochement pourraient alors avoir un effet bénéfique et, pour le dire autrement, une pensée en 3D de
l'action médico-éducative serait souhaitable.
Il existerait, dans le lobe temporal médian, une aire multimodale reliée aux aires de réception sensorielle,
et à celles de l'émotion et de la mémoire, qui unirait les différentes modalités sensorielles en un tout
cohérent. Cette aire dysfonctionnerait-elle chez certaines personnes autistes et/ou psychotiques et certaines
pshm? Une activité éducative serait-elle à même de rétablir cette capacité transmodale? Autant de
questions à mettre en débats.
Sans oublier l'achronognosie fréquente des pshm qui justifierait de penser les interventions éducatives non
seulement en 3D, mais aussi, autant que faire se peut, en 4D, c'est à dire en y intégrant la dimension
temporelle par les repérages chronologiques et les histoires autour de l'activité.
g) Activités aggravant certaines pathologies mentales déjà existantes
L'aggravation de cette pathologie mentale pourrait être le fait :
-du matériau utilisé pour l'activité (et il faudra se méfier des matériaux ou des formes pouvant apparaître
comme potentiellement agressifs)
-de la façon dont se déroule cette activité,
-de l'environnement dans lequel elle se trouve,
-du nombre de personnes y participant,
-de la plus ou moins grande implication de l'encadrant, contenant ou évanescent (il faudra parfois faire
preuve d'une « existence massive » mais non agressive en face de certaines personnes psychotiques pour
ne pas être traversé imaginairement par elles),
-de l'intérêt que l'ensemble de l'institution accorde à cette activité (certaines activités sont plus
emblématiques que d'autres)
-de la résonance de l'activité dans l'histoire personnelle du sujet
h) Incidences thérapeutiques des activités orientées vers la socialisation
Il s'agit là avant tout du « vivre ensemble », de la question de l'inclusion et du fonctionnement de la pshm
dans la société et des outils permettant cette inclusion, de l'échange nécessaire entre les membres du
groupe pour assurer la survie du groupe, et de la question de la loi. Il s'agit aussi de l'acceptation par le
groupe de toutes les différences, conçues comme des éléments de richesse plutôt que comme un
appauvrissement, mais aussi de la nécessaire protection de l'individu face aux pressions groupales tendant
à niveler les comportements. Dans le secteur sanitaire, cette activité thérapeutique, autrefois considérée
comme une des activité de liaison de l'équipe de secteur psychiatrique dans son ensemble, prenant acte de
la nécessaire complémentarité des soins individualisés et des soins de la personne prise dans son contexte
social, est maintenant plutôt dévolue à ce qu'on appelle la « réhabilitation psychosociale » et confiée
souvent à des soignants spécialisés.
22
Dans le secteur médico-social, on peut considérer que toutes les activités pédagogiques et éducatives
tendent vers ce but de socialisation, par l'apprentissage d'un savoir faire et d'un savoir être conformes aux
attentes du groupe social. Néanmoins, les visites à domicile seront plutôt le fait des assistantes sociales
accompagnées ou non d'un éducateur qui s'occupe de l'hébergement, tandis que les démarches concernant
le travail seront confiées à des éducateurs techniques ou à des moniteurs d'ateliers. Cette dichotomie
soignante travail-hébergement, si elle peut être bénéfique pour des pshm harmoniques, n'est peut-être pas
toujours adaptée pour des pshm dysharmoniques sur le versant psychotique, qui auront souvent besoin de
liaisons accrues entre leurs différents accompagnants et d'une aide pour les passages d'un lieu et d'un
intervenant à un autre.
* Activités permettant de distinguer le particulier du général et concourant à la socialisation
La prévalence de l'intérêt général sur l'intérêt particulier ne va pas de soi et suppose un processus de
conscientisation mettant en jeu aussi bien l'expérimentation individuelle que l'éducation, et permettant, in
fine, de comprendre que le bien-être du groupe est nécessaire au bien-être individuel. Cette considération
rejoint les notions freudiennes de « principe de plaisir et de « principe de réalité », l'observance du
principe de réalité, qui suppose l'acceptation d'un minimum de frustrations et le respect des autres,
permettant d'espérer un plaisir individuel de nature supérieure à celui qui aurait pu être obtenu par la
satisfaction immédiate. Encore faudrait-il pour cela que la fonction de représentation mentale soit
suffisamment assurée et que l'inscription dans le temps et la capacité anticipatrice soit suffisamment
développées, ce qui n'est malheureusement pas souvent le cas chez la pshm.
* Symbolisation, partage de cadres communs et partage de la loi
La symbolisation est une notion polysémique qui réfère aussi bien à la constitution de figures ou d'images
individuelles (elle est alors confondue avec l'imagination ou avec la représentation) qu'au partage de codes
communs, de symboles, et c'est dans ce sens là qu'il faudrait entendre la catégorie du Symbolique chère à
Jacques Lacan, ou bien une notion comme « l'Institution symbolique » que certains philosophes
phénomènologistes opposent à la capacité de création individuelle (l'activité poïétique) ou encore à la
poésie.
Cette symbolisation, partage de codes et de cadres communs est aussi un partage de la loi entendue aussi
bien comme celle qui fait l'objet des différents codes de procédure avec le célèbre : « Nul n'est censé
ignorer la loi », que comme la Loi avec un grand L, Loi transcendantale, Loi fondatrice, transmise de
génération en génération (cf Moïse et les tables de la Loi) et portée généralement par la figure du Père.
Ces deux aspects de la loi, loi commune et Loi fondatrice, en interaction constante, devraient être transmis
et explicités lors du travail éducatif, mais leur utilisation a aussi une incidence thérapeutique, qu'il s'agisse
de la référence aux « porteurs de la loi » (équipe directionnelle notamment) lors des débordements
caractériels, ou de l'évocation de la Loi à des pshm souffrant de troubles identitaires et présentant,
justement, des difficultés d'accès au Symbolique partagé.
Je citerai ici une de mes patientes psychotique, qui me disait, en parlant du viol de conscience, qu'une
personne éduquée ne pouvait être ni violeuse ni violable et que là était précisément l'utilité du symbolique.
* Activités utilisant la médiation
-La médiation est une notion à la mode qui renvoie à la notion de tiers en psychopathologie, c'est à dire à
la nécessité de trouver un objet externe, homme, chose, animal ou texte de référence, pour atténuer les
effets délétères d'une relation trop fusionnelle avec une autre personne, pour réaliser au mieux une
éducation, ou pour favoriser la transmission d'un savoir.
-En droit, la médiation est une entremise destinée à amener un accord entre deux parties en litige, mais
sans le leur imposer, contrairement à l'arbitrage, et elle peut être associée à la proposition d'une réparation.
Si cette pratique judiciaire se développait, on pourrait alors assister au glissement d'une justice dure axée
sur la punition vers une justice non violente axée sur la réparation. Les institutions médico-sociales
pourraient parfois s'inspirer de cette médiation-réparation pour éviter elles aussi la tentation de certaines
punitions préjudiciables sur le plan psychopathologique, notamment pour des personnes handicapées par
une maladie psychotique.
23
-La médiation s'entend aussi comme médiation institutionnelle et elle a pu être théorisée et pratiquée, dans
le milieu du soin psychiatrique, par le mouvement dit de « psychothérapie institutionnelle ». Ces principes
de la psychothérapie institutionnelle, qui pourraient être repris dans les institutions médico-sociales,
préconisaient d'utiliser ensemble trois fonctions repérables de l'institution : fonction « phorique » = porter
l'individu handicapé, l'accueillir et subvenir à ses besoins, fonction « sémaphorique » = donner du sens à
son action éducative et thérapeutique, fonction « métaphorique » = porter l'individu handicapé en dehors
de son milieu institutionnel présent, aussi bien dans le temps que dans l'espace.
-La médiation réparatrice peut aussi être conçue comme soutien individuel quand il y a angoisse
d 'effraction du corps propre, blessure auto mutilatrice ou besoin de réunification personnelle. L'objet
médiateur pourrait alors être constitué, dans l'activité éducatrice, par un objet contenant permettant de
rassembler imaginairement les morceaux épars de soi-même, par un puzzle, notamment un puzzle
représentant la pshm qu'on veut reconstituer, ou par un vêtement déchiré qu'on proposerait de recoudre.
Sans oublier que, dans tous les cas, la médiation est représentée autant par l'objet médiateur proposé que
par la personne accompagnatrice qui propose cette médiation.
-L'objet médiateur peut aussi être un animal. Ainsi des animaux domestiques, utilisés soit comme
animaux de compagnie, soit pour les services qu'ils peuvent rendre comme animaux de trait ou de monte,
soit comme animaux d'élevage pour la chaîne alimentaire, vont-ils être l'occasion d'échanges fructueux
entre la pshm, ses accompagnants habituels et d'autres personnes proches de ces animaux.
-Dans d'autres cas, les objets médiateurs seront les objets fabriqués par l'institution, et on utilisera alors
comme médiation les trois aspects bio-psycho-sociaux de cette aide par le travail, celui de la technique
corporelle nécessaire à la fabrication de ces objets, celui psychologique de la constatation que quelque
chose qui n'est pas soi peut exister en dehors de soi, et celui de la commercialisation de ces objets, cette
action de « faire commerce » pouvant s'entendre aussi bien comme un échange économique que comme
l'action relationnelle nécessaire à cet échange économique.
* Activités permettant l'apprentissage des loisirs
Il n'y a pas si longtemps, on nous promettait une civilisation des loisirs. Le loisir semble maintenant
presque un impensé des discours réflexifs actuels, ce malgré la Réduction du Temps de Travail (RTT), en
France, pensée beaucoup plus comme un mécanisme de régulation économique que comme une ouverture
possible aux loisirs. De même, la Formation Permanente, négociée initialement comme une formation
possible à des loisirs variés, espérant ainsi l'avènement d'un « honnête homme » équilibré et donc plus
productif, se voit cantonnée actuellement à une formation servant directement, et non plus indirectement,
les intérêts du travail en cours. Pourtant, il apparaît bien que le loisir, comme le travail, est constitutif du
sentiment d'identité personnelle et un travail éducatif de la gestion des loisirs doit être entrepris auprès de
la pshm afin de favoriser son meilleur épanouissement. On s'est aperçu aussi qu'une pshm n'ayant pas
intégré les rudiments de cette gestion des loisirs était, beaucoup plus qu'une autre, soumise à l'échec dans
sa vie professionnelle ou ses activités de jour, et aux troubles mentaux pouvant éventuellement en résulter.
L'aide par le loisir, alternative et complément de l'aide par le travail, peut se décliner aussi dans les trois
domaines du biologique, du psychologique et du social :
-biologique, si elle consiste à s'intéresser au développement, à la maîtrise ou à la quiétude du corps
propre, comme la pratique d'un sport individuel ou de la relaxation,
-psychologique, s'il s'agit de loisirs comme la lecture, le cinéma ou la télévision surtout assortis de
commentaires des accompagnants autour de l’œuvre ou du divertissement, de la pratique d'un art pictural
ou vivant, ou de l'ouverture à l' esthétique (l'esthétique pourrait se définir comme le sens du beau et du
bon, le désir esthétique étant entendu comme relatif au plaisir que donne la contemplation de la beauté
dans les choses artificielles ou naturelles). L'art, sous ses multiples formes, musique, danse, sculpture,
architecture, peinture, littérature, cinéma, gastronomie, soins esthétiques..., n'est cependant pas qu'un
simple moyen de plaisir mais contribue d'une manière fondamentale à la quête de la connaissance,
recherchée dans une entreprise médico-pédagogique
-Sociale s'il s'agit d'échanger avec d'autres, avec ou sans médiateur, lors de jeux de société, de sports
collectifs ou d'activités associatives. Il conviendrait de déterminer, pour chaque pshm, sur quel domaine
prioritaire cette aide par le loisir devrait s'exercer pour réaliser au mieux une mission éducative
personnalisée, mais aussi pour prévenir ou traiter certains troubles mentaux.
24
* Activités permettant de montrer ses compétences aux autres et de « s'exposer »
On pense là à la « valeur emblématique » du travail, à savoir que l'objet produit ou entretenu par le travail,
dans la mesure où il peut représenter une partie de l'individu (« Ça, c'est moi! ») peut être source d'une
certaine fierté favorisant la socialisation. De plus, cette « valeur emblématique » porte aussi sur la
compétence supposée ou réelle que peut entraîner l'apprentissage puis la pratique d'une activité laborieuse
ou de loisirs. Cette reconnaissance de compétence est habituellement sanctionnée par un diplôme. Il serait
sans doute valorisant qu'un diplôme vienne authentifier le parcours scolaire, professionnel ou d'activité de
loisir accompli par la pshm, comme cela commence à se faire avec des remises de portefeuilles de
reconnaissance de savoirs-faire professionnels à des ouvriers d'ESAT par l'Association pour la Formation
Professionnelle des Adultes (AFPA).
Par ailleurs, certaines productions industrielles ou artistiques peuvent être exposées en vitrine ou en
affichage, ou être regardées ou entendues par d'autres dans leur utilisation quotidienne, et cette exposition
indirecte de l'objet créé, représentant d'une partie de la pshm, permet de mieux supporter une approche de
l'autre vers soi que certaines pshm dysharmoniques ressentent souvent comme exagérément intrusive. (cf
le « pourquoi il me regarde celui là!? », si souvent entendu sur le mode de l'interprétation anxieuse plus
que sur celui de la simple interrogation).
* Activités favorisant l'apprentissage du maniement de l'argent
L'argent peut être considéré comme un puissant médiateur social, favorisant le commerce relationnel dont
on a parlé plus haut, le troc n'étant plus guère usité dans nos sociétés actuelles. Ainsi, la pshm qui n'en
connaîtrait pas le maniement se verrait-elle sur-handicapée dans son commerce relationnel, même si
d'autres systèmes d'échanges commerciaux étaient alors mis en place.
Mais l'argent, outre sa valeur dans les échanges relationnels, a aussi une puissante valeur imaginaire qui
réfère, selon Sigmund Freud, au stade dit anal de la psychogénèse, celui de l'ambivalence où le petit enfant
ne sait pas s'il doit retenir ou donner ses matières fécales à l'endroit et au moment où ses parents le lui
demandent. Cette ambivalence, ce doute, peuvent se retrouver dans certaines organisations pathologiques
de la personnalité, et l'apprentissage du maniement de l'argent dans les activités éducatives peut être tout
aussi bien l'occasion d'atténuer ces symptômes perturbateurs que de les aggraver.
* Activités permettant d'apprendre les codes de politesse
Les code de politesse sociaux font partie des règles, et non pas des lois, la distinction est importante, qui
organisent la vie en société. Si en effet, on peut et on doit être puni quand on transgresse une loi, il n'en va
pas de même avec les règles, et notamment les règles de politesse. Néanmoins, l'observance de ces règles
favorise l'intégration, et constitue un rempart contre un éventuel rejet de la pshm, source de sur-handicap
et éventuellement de troubles mentaux, en particulier dépressifs, par manque d'appuis narcissiques sur le
jugement favorable des autres. De la simple poignée de main censée montrer originellement qu'on n'avait
pas d'arme cachée dans sa main, accompagnée du souhait du bon/jour, en passant par l'espoir contenu dans
le au/revoir, ou par toutes les autres manifestations de politesse, les occasions ne manquent pas de se
conforter, grâce à la politesse, dans l'espoir d'un mieux « vivre ensemble » qui serait bénéfique à la
personne qui userait de ces règles.
*Activités liées aux passages et aux rites de passage, à la liminalité, aux seuils
-L'arrivée et le départ d'une institution médicosociale :
Pour bien se situer dans son histoire personnelle, il faut que les événements qui jalonnent cette histoire,
notamment les changements de lieu de vie ou/et d'activité soient suffisamment marquants, et ils le seront
d'autant plus qu'ils auront été marqués par l'institution accueillante ou/et l'institution de départ. Les pots
d'arrivée ou de départ ne devront jamais être oubliés. Ils servent de présentation du nouvel arrivant à
l'ensemble de l'institution et favorisent sa meilleure intégration. Ils servent de vade-mecum au partant et
favorisent son estime de soi-même par la constatation du vide et de la peine que suscitera son départ.
L'évocation de ce qui s'est passé avant et de ce qui se passera après permettra à certaines pshm
dysharmoniques de rassembler en partie leurs morceaux, parfois encore plus éparpillés qu'habituellement
par cette épreuve du passage.
25
-Les passages d'un accompagnant et d'un lieu à un autre
Le passage peut être soit initiatique et transitionnel quand on va d'un intervenant ou d'un lieu connu à un
intervenant ou à un lieu inconnu, soit « cohésif » quand on va d'un intervenant ou d'un lieu connu à un
intervenant ou un lieu déjà connus. Dans tous les cas ces passages devraient être accompagnés, pensés et
explicités à l'avance, pour toutes les pshm, mais spécialement pour celles souffrant de troubles
dysharmoniques sur le versant psychotique. Il faudrait aussi montrer concrètement par gestes, tout en
l'exprimant verbalement, à la pshm surtout dysharmonique, que l'on passe le relais à un autre
accompagnant, sans craindre d'être trop expressif, cette démonstration pouvant parfois suffire à éviter le
surgissement d'une angoisse de morcellement évidemment préjudiciable.
-Le passage de l'adolescence, l'accession à l'adultité
L'adolescence entraîne aussi chez la pshm, et quel que soit la nature ou la lourdeur de son handicap, des
bouleversements bio-psycho-sociaux :
Bouleversements biologiques avec le corps, matière énergie en constante transformation, imposant une
redistribution continue de son positionnement dans l'espace, et un remodelage de l'identité corporelle
pouvant entraîner des crises de dépersonnalisation si l'image interne du corps (la représentation du corps
dans la psyché) ne suit pas la transformation effective.
Bouleversements psychologiques avec le remaniement de l'équilibre pulsions-défenses et la reprise de
toute la psychogénèse mise en place au cours de la petite enfance, notamment le positionnement œdipien,
auxquels s'ajoutent l'interrogation induite par l'apparition des caractères sexuels secondaires, la recherche
d'un partenaire pour des échanges à caractère sexuel, et la toute nouvelle capacité à pouvoir se reproduire.
Bouleversements sociologiques avec la reconnaissance sociale, à 18 ans, de la majorité légale, qui
implique des droits et des devoirs nouveaux qui devraient être explicités à la pshm plutôt que d'être passés,
comme souvent, sous silence. L'entrée officielle dans le monde des adultes pourrait aussi faire l'objet d'une
intronisation-célébration signifiante.
B- Le Programme Éducatif Personnalisé d'Urgence (PEPU)
Ce PEPU, différent d'une psychothérapie brève, ne cherche pas à donner du sens, ni à replacer une
problématique actuelle d'une personne dans son histoire personnelle. Ce n'est pas une écoute mais un
apport et un partage de savoir de l'éducateur vers une personne handicapée dont la vie serait
momentanément encombrée par un problème ou un mot sources d'angoisse.
Il s'agit tout à la fois de diminuer cette angoisse et de replacer la personne dans le « concert symbolique »
(partage de codes communs) dont le problème en cours l'aurait exclue. Pour ce faire, on aura recours à la
définition lexicale d'un mot ou d'un problème, telle qu'elle peut apparaître dans un dictionnaire ou sur un
écran d'ordinateur. Ainsi, si on a pu ressentir qu'une transmission de biens ou de valeurs morales peut faire
actuellement problème, on ira chercher, avec la personne handicapée, les différentes acceptions des mots
transmission, héritage, ou filiation dans les différents lexiques. De même, en cas de grande souffrance
suite à l'absence ou la disparition d'un ou des deux parents, on accompagnera la pshm dans la recherche
de la définition des mots disparition, père, mère, fratrie, parents, voire filiation, dans les différents registres
lexicaux. Ou encore, si une maladie vient perturber l'existence de cette même personne en situation de
handicap, on ira se renseigner avec elle sur les formes, les causes et les évolutions de cette maladie...
Ce PEPU n'est pas exclusif d'une psychothérapie ou d'un traitement psychotrope, s'ils s'avèrent
nécessaires, mais leur utilisation conjointe pourrait permettre un soulagement plus complet de la
souffrance ressentie par une personne handicapée en difficulté.
26
3- Les soins institutionnels.
A- La psychothérapie institutionnelle
Certaines dispositions institutionnelles tant architecturales qu'humaines (motivations et accords des
différents personnels) favorisent un meilleur soutien psychologique de la personne avec un handicap
mental. Dans l’idéal, et suivant les préconisations du mouvement soignant dit de psychothérapie
institutionnelle, l’institution devrait assumer trois fonctions complémentaires : phorique (prendre soin
de la phm), sémaphorique (donner du sens à l’action institutionnelle) et métaphorique (porter la phm
en dehors de l’institution dans le temps et dans l'espace). L'adage « les penser pour les panser »,et on
devrait ajouter aussi « penser l'institution », reste très opérant pour le soin aux pshm dysharmoniques.
B- Les réunions institutionnelles et le projet personnalisé : Ces réunions sont l'occasion pour les
professionnels, en présence ou non de la pshm et éventuellement de sa famille, de confronter leurs
différentes approches pour une meilleure prise en soins de la pshm. Le projet personnalisé qui en
résulte devrait non seulement être régulièrement réactualisé, mais surtout faire l'objet de discussions
éventuellement contradictoires avec la pshm.
C- Les ruptures
-Repos, isolement, et séjour de rupture dans une autre institution
-Vacances et arrêt de travail
D- La participation de la pshm à la vie et aux décisions à prendre pour l'évolution de l'institution
(élection de délégués aux différents conseils institutionnels par exemple) est toujours souhaitable, dans
une optique de sensibilisation à l'exercice de la citoyenneté, mais aussi dans une optique soignante.
4- Le travail avec les familles
A. Professionnels, familles, et enfants en situation de handicap mental
Dans le cadre des IME et des ITEP, la prise en compte des attentes de la famille est rendue obligatoire
par les annexes XXIV (annexes aux lois qui régissent leur fonctionnement). Ce travail n'est pas et ne
doit pas être, dans la plupart des cas, une thérapie familiale, mais doit permettre à l'enfant d'acquérir
une meilleure qualité de vie, par l’appréhension concrète et réfléchie qu'il existe des relations entre
son milieu familial et ses accompagnants professionnels actuels et en évitant autant que faire se peut
de le soumettre à un « conflit de loyauté » entre ses différents soutiens. Les réunions avec la famille
pour l'élaboration de son projet personnalisé, les visites par la famille des différents lieux de soins et
d'activités, la participation éventuelle des parents à l'animation de ces activités devraient y pourvoir.
Les parents et les éducateurs sont souvent d'accord pour privilégier les apprentissages scolaires puis
pré professionnels de l'enfant handicapé dans le but d'une autonomie future souhaitée la plus
importante possible. Les psys, s'ils ne peuvent qu'être d'accord avec cette orientation, seront souvent
plus sensibles à des manifestations de souffrance psychique immédiate de l'enfant, et aux moyens d'y
remédier parfois contradictoires avec les orientations éducatives actuelles, d'où résulte parfois une
certaine incompréhension entre les uns et les autres. Tous cherchent évidemment le bien-être présent et
à venir de l'enfant mais peuvent néanmoins diverger sur les moyens pour y parvenir.
Pour les SESSAD (Service d’Éducation et de Soins Spécialisés A Domicile), il s'agit d'accompagner
l'enfant ou l'adolescent dans tous les lieux, en particulier scolaires spécialisés (CLIS et ULIS), où il
pourrait en avoir besoin, en essayant de « huiler là où çà grince ». Cet accompagnement hors
institution, notamment aussi dans le milieu familial s'il en est besoin et bien entendu avec l'accord des
intéressés (ce n'est ni une mesure administrative ni une mesure judiciaire d'intervention à domicile),
n'est pas sans rappeler ce qui a été théorisé et appliqué par la politique de santé mentale dite « de
secteur » qui préconisait de soigner les personnes en souffrance psychique au plus près de leurs lieux
d'activités habituelles plutôt qu'au sein d'institutions soignantes.
27
B. Professionnels, familles et adultes en situation de handicap mental
a) -Les protagonistes de cet ensemble humain se sont trouvés confrontés à des exigences souvent
contradictoires. Du côté des pshm, une revendication fréquente d'autonomie à l'égard de leur milieu
familial tout en ne perdant ni l'affection des siens ni leur protection quand celles-ci leur étaient auparavant
acquises. Du côté des familles, une volonté souvent revendiquée de continuer à protéger les siens
handicapés plus que les autres enfants du groupe familial devenus adultes, tout en devant se protéger du
souci constant et souvent de l'épuisement que représente une pshm adulte non autonome. Du côté des
professionnels, le souci de l'autonomie de la pshm adulte, de son inclusion dans le groupe social et du
respect de sa citoyenneté, rappelés par les lois de 2002 et de 2005, incitera le professionnel à aider la
pshm adulte à se distancier de son groupe familial. Cependant, la constatation fréquente du besoin de la
pshm à rester au plus près de ce groupe familial pour continuer à exister affectivement va contrebalancer
fréquemment cet élan initial.
b)-Pour les médecins, le secret professionnel est opposable en droit aux familles et aux amis de pshm
adultes, mais, dans la pratique, il est souhaitable de rechercher leur collaboration, dans l'intérêt bien
compris du patient, et bien entendu avec son autorisation s'il s'agit d'un adulte ou même d'un adolescent ou
en l'informant de ce qui s'est dit hors de sa présence s'il s'agit d'un enfant. Dans tous les cas, le secret
médical n'est pas opposable à la pshm adulte, mais une maladie défavorable à son meilleur développement
physique ou psychique ou portant atteinte à son intégrité ne devra lui être révélée qu'avec circonspection,
tenant compte autant de son degré de compréhension que des conséquences affectives éventuelles de cette
révélation. Néanmoins, pour les pshm comme pour les autres patients, une personne informée est mieux à
même de lutter contre une maladie physique ou mentale qu'une personne ignorante de cette même
maladie.
c)-La protection juridique des majeurs, réformée par la récente loi du 5 mars 2007, avec ses trois principes
de nécessité (le bénéfice d'un régime de protection doit être réservé aux seuls cas où l'altération des
facultés mentales ou corporelles de nature à empêcher l'expression de la volonté est médicalement
constatée et un simple besoin d'accompagnement social ne doit pas conduire à la mise en œuvre d'une
mesure de protection juridique s'il n'y a rien à protéger), de subsidiarité (l'altération des facultés mentales
n'est pas suffisante à elle seule pour justifier la mise en place d'une mesure de protection si un autre
dispositif plus léger et moins restrictif des droits peut-être mis en œuvre et notamment si une solution
familiale peut être trouvée) et de proportionnalité (une tutelle n'est prononcée que si une curatelle est
insuffisante et une curatelle ne l'est que si une sauvegarde de justice est insuffisante) est fréquemment un
terrain de friction entre le majeur protégé et sa famille, les éducateurs de la pshm, les soignants éventuels
de la pshm et les associations tutélaires dont un membre est curateur ou tuteur de la pshm. On rappelle
qu'il n'y a pas officiellement de « tutelle à la personne » mais qu'il s'agit bien de protéger une personne
vulnérable qui pourrait être lésée dans une transaction commerciale ou bien qui, étant dans l'incapacité à
pourvoir seule à ses besoins, du fait de son intempérance financière ou d'une méconnaissance de
l'utilisation de l'argent, devrait être accompagnée (curatelle) ou représentée (tutelle) dans les actes de la vie
commerciale. Cependant, l'exercice des droits civiques est, sauf avis contraire du Juge des tutelles,
préservé dans la nouvelle loi, même en cas de tutelle. On conçoit qu'une personne hébergée et nourrie dans
un foyer d'accueil pour pshm n'ait pas trop de soucis à se faire pour assurer ses besoins élémentaires et
qu'en conséquence une mesure de protection juridique est le plus souvent superflue, si ce n'est pour
rassurer imaginairement ses accompagnants habituels, ou, hélas parfois, pour protéger la pshm de la
voracité de ses proches concernant l'utilisation des différentes aides publiques qui lui sont apportées.
28
VII- REMARQUES CONCLUSIVES
1- La chronicité est souvent là avec le handicap mental et les maladies mentales, mais elle ne signifie
absolument pas absence d'évolution et l'encadrant devrait s'astreindre à la supporter ou bien à passer
la main quand il sent le poison de l'impuissance le submerger.
2- L'affrontement des toutes puissances, celle de l'encadrant et celle de la personne avec un handicap
mental et/ou psychologiquement malade, n'est souhaitable ni pour l'un ni pour l'autre. Une solution
dans la recherche d'une tercéisation, par une autre personne, une activité partagée ou le rappel d'un
ailleurs, sera dans tous les cas préférable.
3- L'illusion tenace de pouvoir faire évoluer les gens et les choses, gage d'une possible re/présentation
moins perturbante, est un don que l'encadrant doit à la personne avec un handicap mental.
4- Deux maîtres mots apparaissent et se renforcent : évolution et co-transformation. Évolution, tout au
long de sa vie, de la personne avec un handicap mental dans son corps, son esprit et sa façon d’être au
monde. Co-transformation, car cette évolution va de pair et est cause de transformations de son milieu
environnant : matériaux, institutions, corps social et surtout personnes accompagnantes.
5- La difficulté persistante avec les personnes atteintes d'un handicap mental dysharmonique ou bien
avec celles atteintes d'une maladie mentale chronique et qui sont hébergées ou qui travaillent dans les
institutions socio-éducatives ou médico-sociales reste de faire coïncider ou bien d'obtenir une
complémentarité de l'action sanitaire et de l'action médico-sociale.
Docteur Jean-Marc GAUTHIER
Psychiatre
Délégué France de l'Airhm
Texte élaboré en partie en 2001
Dernière version, février 2014
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