XAVIER DAYER CONTES DE LA LUNE VAGUE APRÈS LA PLUIE SAISON 14-15 Fiche pédagogique Opéra Xavier Dayer CONTES DE LA LUNE VAGUE APRÈS LA PLUIE Quelques mots entre vous et nous… Nous sommes très heureux de vous accueillir à l’Opéra de Rouen Haute-Normandie pour la création de l’opéra Contes de la lune vague après la pluie de Xavier Dayer. Cet opéra sera peut-être une première expérience pour certains de vos élèves, une expérience renouvelée pour d’autres, nous espérons qu’il sera en tout cas un moment de découverte, d’éveil et de ressenti partagé. Cette fiche pédagogique a pour vocation de vous donner les repères clefs pour préparer vos élèves à cette sortie. Vous y trouverez quelques pistes vous permettant d’approfondir le travail en classe ou d’échanger simplement avec vos élèves avant et / ou après votre venue au Théâtre des Arts. Parce qu’un spectacle se prépare, se vit et se prolonge ensemble, n’hésitez pas à nous faire part de vos remarques et à nous communiquer les réactions de vos élèves. Afin de rendre cette présentation plus ciblée, vous trouverez une première partie avec des informations qui vous sont destinées et une autre partie réservée à vos élèves et directement exploitable en classe. Opéra de chambre adapté du scénario du film de Kenji Mizoguchi (1953) Livret de Alain Perroux Direction musicale : Jean-Philippe Wurtz Mise en scène : Vincent Huguet assisté de Céline Gaudier Scénographie : Richard Peduzzi assisté de Clémence Bezat Costumes : Caroline de Vivaise Lumières : Bertrand Couderc Genjuro : Benjamin Mayenobe Miyagi : Majdouline Zerari Tobe : Carlos Natale Ohama : Judith Fa La Princesse Wakasa : Luanda Siqueira Orchestre de l’Opéra de Rouen Haute-Normandie Pour profiter au maximum du spectacle, voici des informations générales et quelques recommandations à destination de vos élèves : Informations générales • Pour les séances scolaires, le placement se fait en fonction du niveau de classe afin d’offrir à tous la meilleure visibilité. Nous vous remercions de respecter les places qui vous seront proposées par notre personnel d’accueil. • N’oubliez pas de nous prévenir en amont si vous avez besoin de places supplémentaires. • Les élèves sont sous la responsabilité des enseignants et des accompagnateurs. Nous vous remercions de rester près d’eux afin de veiller à la bonne écoute du spectacle et au respect de tous. Recommandations à destination des élèves • Le spectacle commence à l’heure indiquée. Nous vous remercions d’arriver 30 minutes avant le début du spectacle afin d’avoir le temps de vous installer en salle. • Les boissons et nourritures sont à consommer dans le foyer bar et non dans la salle. • Les photographies, ainsi que tous types d’enregistrements, sont interdits. • N’oubliez pas d’éteindre vos portables lors de la représentation. • N’hésitez pas à échanger vos avis et impressions pendant les entractes ou à la sortie mais pas pendant le spectacle. Nous vous souhaitons une bonne représentation ! Anne Marguerin Chargée des actions pédagogiques 7 rue du Docteur Rambert 76000 Rouen 02 35 98 50 98 [email protected] Production Opéra de Rouen Haute-Normandie en coproduction avec Fondation Royaumont, Opéra Comique. Avec l’aide à la production et à la diffusion d’Arcadi-Ile-de-France. KPMG est le mécène de l’Unité scénique de la Fondation Royaumont. La commande passée à Xavier Dayer est soutenue par la Fondation Arthur Honegger, sous égide de la Fondation de France. Avec le soutien de Pro Helvetia. Vendredi 20 mars, 20h / Samedi 21 mars, 20h Rouen, Théâtre des Arts Durée : 1h30 sans entracte / Livret en français, spectacle surtitré Coordination de la fiche pédagogique Florence De Meyer Rédaction de la fiche pédagogique Vinciane Laumonier Photo de couverture Fotolia -Jérôme Pellerin L’Opéra de Rouen Haute-Normandie est subventionné par la Région Haute-Normandie, la Ville de Rouen, le Ministère de la Culture et de la Communication DRAC HauteNormandie, le Département de l’Eure et Rouen Métropole Normandie. Président Nicolas Mayer-Rossignol Vice-président Yvon Robert Directeur artistique et général Frédéric Roels Chef principal Leo Hussain Fiche pédagogiquep. 2 Opéra de Rouen Haute-Normandie XAVIER DAYER CONTES DE LA LUNE VAGUE APRÈS LA PLUIE SAISON 14-15 Côté enseignants Fiche pédagogiquep. 3 Opéra de Rouen Haute-Normandie UN CONTE JAPONAIS EN OPÉRA DE CHAMBRE CONTES DE LA LUNE VAGUE APRÈS LA PLUIE Soixante ans après sa sortie, Xavier Dayer et Alain Perroux adaptent le film du maître du cinéma japonais Kenji Mizogushi en opéra de chambre. Les Contes de la lune vague après la pluie est un film onirique de 1953 inspiré de deux contes d’Ueda Akinari et qui servit de passeport européen au cinéma d’auteur japonais en obtenant le Lion d’Argent à Venise en 1953. Il y est question de couples, de rêves impossibles, de sacrifice, d’obstination, de trahison et de lâcheté. Le tout dans un contexte guerrier qui voit fleurir la sauvagerie et son moteur réel : la cupidité, celle qui conduit à la conquête illusoire du pouvoir. Le défi de cette création : transformer l’image en musique, le scénario du film en intrigue lyrique. Son adaptation propose de retrouver l’épure de la poésie japonaise, mêlant séquences musicales « live » et beauté des images cinématographiques. Une belle manière de rafraîchir la mémoire de certains et d’intriguer les plus jeunes. L’argument Dans le Japon du Moyen Âge, Genjuro et son beau frère Tobe sont des paysans vivant au bord du lac Biwa. L’approche de la guerre va révéler chez eux des désirs de pouvoir et de richesse irrépressibles qui vont les pousser à sacrifier leur famille et leur travail pour chercher en vain un bonheur impossible. Prologue Afin de s’enrichir, le potier Genjuro décide de profiter des temps de guerre en allant vendre ses poteries à la ville. Il fait ses adieux à sa femme Miyagi et à leur enfant. Son beau-frère, le paysan Tobe, décide de l’accompagner car il rêve de devenir samouraï. Il prend donc pareillement congé de son épouse Ohama. Première partie Genjuro est de retour, chargé de cadeaux pour les siens ; cependant il rêve de retourner en ville pour faire un chiffre d’affaire encore plus grand. Tobe est avec lui, tout penaud : il n’a pas pu devenir samouraï, faute de lance – et une lance coûte cher ! Genjuro et sa femme travaillent d’arrache-pied à faire des poteries quand le village est attaqué. Genjuro doit aller se cacher avec les siens, mais ne pense qu’à ses poteries et craint qu’elles ne soient détruites par les soldats. Il réussit à les sauver et se résout à aller à la ville en bateau. Sa femme, son fils, Tobe et Omaha décident de venir avec lui. Lors de la traversée du lac, ils croisent une barque fantômatique dont l’unique occupant les met en garde : des pirates rôdent sur l’eau et s’attaquent aux femmes. Genjuro décide de ramener Miyagi et leur enfant sur le rivage pour qu’ils retournent dans leur village pendant que lui-même, Tobe et Omaha iront en ville. Au marché, Genjuro vend ses poteries. Une femme voilée, Wasaka et sa Nourrice lui passent une commande importante et lui demandent de la livrer dans un palais aux abords de la ville. De son côté, Ohama s’inquiète : Tobe s’est enfui à la poursuite d’un samouraï, emportant tout l’argent qu’ils ont péniblement gagné. Tobe s’achète une armure et une lance avec l’argent et devient samouraï. Ohama, partie à la poursuite de son mari, se fait agresser par un homme qui lui jette de l’argent après avoir abusé d’elle. Perdue, seule et désespérée, elle finit par se prostituer pour survivre. Genjuro arrive dans le palais de la princesse Wakasa pour livrer ses poteries. La Nourrice l’accueille et l’introduit auprès de la jeune femme qui s’extasie devant les poteries de l’artisan. Ensuite, Wakasa danse pour son visiteur. Sous le charme, Genjuro tombe amoureux de Wasaka et oublie Miyagi. Fiche pédagogiquep. 4 Opéra de Rouen Haute-Normandie UNE FABLE SUBLIME ET VIOLENTE SUR LES PASSIONS HUMAINES CONTES DE LA LUNE VAGUE APRÈS LA PLUIE De retour de chez le marchand d’étoffes, Genjuro croise un prêtre qui lui explique qu’il a été ensorcelé : la femme qu’il aime est en fait un fantôme et son âme est manipulée par des esprits malfaisants. Il lui propose de l’exorciser. Genjuro retrouve Wakasa et sa nourrice. Il avoue qu’il a une femme et un enfant et veut s’en aller. Lorsque Wakasa tente de le retenir, elle fait tomber son kimono et aperçoit les tatouages de l’exorciste sur son torse. Seconde partie Devenu Samouraï, Tobe rapporte à son commandant la tête d’un général de l’armée ennemie qu’il prétend avoir tranchée lui-même. Genjuro, de retour en ville, choisit des tissus chez le marchand d’étoffes et lui demande de livrer ses achats au château de Wakasa. Le marchand est épouvanté mais Genjuro ne comprend pas son effroi. Très fier de lui, Tobe fanfaronne auprès d’une racoleuse, qui l’invite dans une maison de plaisir. Dans la maison close, Tobe retrouve Ohama, devenue prostituée. Bouleversé, il avoue n’avoir pas tué lui-même le général : quelqu’un d’autre l’avait décapité, il n’a fait que voler la tête et a ainsi conquis la gloire par un mensonge. Tobe et Ohama décident de rentrer chez eux. Epouvantée, elle disparaît tandis que la nourrice raconte son histoire à Genjuro. Celui-ci s’évanouit et reprend connaissance dans des ruines, Wasaka et le château ont disparu et il s’est fait détrousser par un voleur. Il ne possède plus rien et rentre au village retrouver sa famille. Genjuro est de retour chez lui en pleine nuit. Il croit voir Miyagi, avec laquelle il échange quelques mots avant de s’endormir. Au réveil, aucune trace de son épouse. Genjuro retrouve Tobe et Ohama, qui lui apprennent que sa femme est morte depuis plusieurs mois déjà, tuée alors qu’elle tentait de revenir au village après avoir débarqué sur la rive. Ohama et Tobe ont pris soin de leur enfant. Genjuro s’effondre mais la voix de Miyagi se fait entendre, qui l’engage à reprendre son travail. Épilogue Genjuro fait de la poterie silencieusement, le fantôme de Miyagi lui parle avec douceur. Fiche pédagogiquep. 5 Opéra de Rouen Haute-Normandie Le film de Kenji Mizoguchi (1898-1956) LES CONTES DE LA LUNE VAGUE APRÈS LA PLUIE Le cinéma japonais en Occident C’est avec Les Contes de la lune vague après la pluie que Kenji Mizoguchi contribue au développement du cinéma d’auteur japonais en Occident. Il est de ces réalisateurs de la même trempe que Kurosawa ou Ozu, mais n’aura cependant pas eu la gloire de ceux-là. Ses films, empreints tout à la fois de violence et de sérénité, provoquent un éblouissement général chez les cinéastes occidentaux qui ne vont pas cesser de lui rendre hommage. Son obsession d’artisan pour le détail et son esthétique qui combine l’œil du peintre avec l’âme du poète font de Mizoguchi un des cinéastes les plus admirés de l’histoire du cinéma. D.R. Une filmographie traversée par la figure féminine Enfant, Mizoguchi est le témoin de la violence de son père envers sa mère et sa sœur qu’il vendra comme geisha à quatorze ans. Cet épisode a une grande influence sur l’orientation de son œuvre qui se compose principalement de drames fondés sur la situation de la femme, femme de haut rang brimée par la société, geisha, servante ou prostituée. Conte des chrysanthèmes tardifs en 1939 étudie par exemple de façon prononcée le rôle déprécié des femmes dans la société japonaise. Les premiers films À l’âge de 20 ans, après avoir vécu une jeunesse difficile, il décide de quitter Tokyo pour s’installer à Kobe où il devient assistant-réalisateur. En 1922, il réalise son premier film, Le Jour où l’amour revit, imprégné de ses convictions socialistes. Il a réalisé au total plus de quatrevingts films, dont la moitié environ aurait disparu. Beaucoup de ses films muets sont des adaptations de romans, comme Le Pont de Nihon (Nihonbashi, 1929) ou La Marche de Tokyo (Tokyo koshin kyoku, 1929). Face à la censure En 1936, il réalise deux des plus grands films de l’époque : L’Élégie d’Osaka et Les Sœurs de Gion, dans lesquels il aborde le sort des femmes particulièrement opprimées sous le régime militaire. Très bien accueillis par le public et la presse, ces deux films sont condamnés par le régime. Il arrive en partie à échapper aux pressions politiques destinées à lui faire tourner des films à contenu nationaliste. Cependant il est contraint de réaliser pour Shochiku, la plus grande maison de production cinématographique japonaise Le Chant de la caserne et l’Épée de Bijomaru qui lui permet d’éviter la prison. Quelques pistes à explorer dans Les Contes de la lune vague après la pluie La guerre : elle agit comme un catalyseur et semble offrir des occasions (de gloire et de richesse) mais en réalité elle n’apporte qu’exactions, famine et destruction. Le film fustige ainsi autant la guerre que la cupidité. Les tourments des hommes : d’habitude, dans ses films, Mizoguchi se concentre sur les femmes et leur condition. Ici, même si la femme est la raison d’être des rêves des grandeurs de l’homme et si elle est la première à en subir les funestes conséquences, c’est l’homme que nous suivons et qui est montré comme une victime de ses propres ambitions. Le fantastique : une grande partie du charme des Contes de la lune vague après la pluie vient de la réunion de deux mondes, le réel et le surnaturel, qui s’entremêlent subtilement par l’apparition de fantômes, l’esthétique de la mise en scène (notamment ses fameux travelings latéraux) et par la beauté de certaines scènes (le lac, le temple, etc.). Tous ces éléments contribuent à nous envelopper d’une atmosphère entre songe et réalité. Fiche pédagogiquep. 6 Opéra de Rouen Haute-Normandie Du scénario du film au livret de l’opéra L’ÉCRITURE D’ALAIN PERROUX D.R. Un mélange des genres Le couple Ohama-Tobe a une composante souriante par opposition au couple tragique formé par Genjuro et Miyagi. On renoue ainsi avec une tradition du théâtre européen, celle de la juxtaposition d’un couple « d’en-haut » et d’un couple « d’en bas » plus populaire. Configuration que l’on retrouve dans La Flûte enchantée de Mozart, dans La Femme sans ombre de Strauss, dans beaucoup d’opérettes de Lehar ou de musicals de Rodgers et Hammerstein. Au sein de ce quatuor, la princesse Wakasa apparaît comme une intruse qui vient bouleverser le cours des événements. Elle est d’autant plus étrangère qu’elle n’est pas humaine. Le répertoire d’opéra ne donne que peu d’exemples d’adaptions d’un film, contrairement à celui de la comédie musicale. Alain Perroux a écrit un livret qui vise à préserver la richesse et le souffle poétique du scénario et des dialogues de Mizoguchi. Des scènes courtes et nombreuses Alain Perroux a renoncé à une division en grandes entités, généralement d’usage à l’opéra, où l’on aime rassembler l’action dans deux ou trois longs actes. Les scènes sont ici nombreuses, certaines extrêmement rapides, alors que d’autres, comme la scène 5, sont développées. Cette conception irrégulière et imprévisible du temps rend compte de la pression des conditions extérieures de ce Moyen Âge japonais. Guerres, violences et inquiétudes sont le contexte extérieur de l’évolution intérieure des personnages. Une forme cyclique L’intrigue s’appuie sur les départs et retours des protagonistes. Ces mouvements répétés font naturellement penser à l’« éternel retour » de Nietzsche auquel tout homme est condamné, comme Genjuro en fait l’amère expérience. Cette idée est reflétée dans la métaphore poétique du tour du potier. Le librettiste a cherché à la traduire en donnant une forme cyclique à l’opéra, d’où la présence d’un épilogue qui répond au prologue et nous montre justement Genjuro recommençant à travailler à son tour de potier. Cet « éternel retour » n’est toutefois pas un retour à la normale : Genjuro a tout risqué par cupidité, mais il se retrouve à la case départ, après avoir perdu sa femme dont il a indirectement causé la mort. Des haïkus Pour ménager des plages de lyrisme au sein de certaines scènes et de manière à laisser place à l’expression des affects des personnages, quelques haïkus (petits poèmes japonais de 17 syllabes) sont utilisés au sein de certaines répliques. Ils ont été choisis parce qu’ils entrent en résonance avec l’émotion de certaines scènes. Ils apportent une couleur et une délicatesse poétique. Fiche pédagogiquep. 7 Opéra de Rouen Haute-Normandie La musique, des images aux notes XAVIER DAYER À travers l’écriture musicale, Xavier Dayer raconte les évolutions des personnages. Entre le début et la fin de l’opéra, il est question d’un désir puissant de reconnaissance sociale de deux hommes qui les mène à une désillusion. Pourtant, ce cheminement permettra à Genjuro et Tobe de prendre conscience de l’importance de l’existence. Rien ne sera plus exactement comme avant et l’opéra s’achève sur une résonance tragique. L’écriture instrumentale L’orchestre exprime les conflits intérieurs des personnages. Avec 9 musiciens, le compositeur cherche à produire deux extrêmes : > L’intimité d’une musique de chambre avec des duos, trios et quatuor qui reflètent le lien entre les personnages. Il s’agit de leur véritable environnement, quand ils n’ont pas encore franchi le pas vers un monde irréel. > L’impression d’une véritable masse orchestrale qui reflète l’arrivée dans l’illusion et offre l’image sonore d’un dépassement qui est dangereux, si l’on se place dans la perspective morale du conte, mais qui est la seule voie possible pour échapper à un quotidien dépourvu d‘espérance. Ainsi, lors de la scène centrale, Genjuro oublie sa vie antérieure, c’est le moment paroxystique, d’illusion, vers lequel tend la musique : l’orchestre semble plus grand qu’il ne l’est en réalité. L’écriture vocale, explorée sur trois niveaux > Le parlé : il est presque toujours lié à une rupture brusque dans le lien entre réalité et désir. > Le chanté syllabique : c’est la technique vocale la plus fréquente dans l’œuvre. (Chaque syllabe est portée par une note différente.) > Le chant mélismatique : il représente l’accomplissement de l’irréalité provoqué par le désir des personnages. Une sorte de force dionysiaque. (Un chant ornementé, par opposition au chant syllabique, dans lequel une syllabe peut être chantée sur plusieurs notes.) Masculin / Féminin Les personnages masculins sont ici esclaves de leurs désirs, tandis que les personnages féminins ont une conscience plus large et sont capables de prévoir les conséquences des actes des hommes. Ceci est reflété dans les typologies vocales employées . Les notes répétées sont plus fréquentes dans le chant des hommes, comme s’il était plus difficile pour eux de décoller de leurs pulsions, alors que le chant féminin est plus mobile, il contient plus fréquemment des intervalles disjoints. La mise en scène, de l’écran aux planches VINCENT HUGUET Pour Vincent Huguet, il n’est pas question de transposer ou d’adapter le film à la scène lyrique mais plutôt d’en proposer une variante. D.R. Des personnages proches de nous Il envisage l’évolution des deux paysans comme une quête de graal personnel dont l’histoire, alors qu’elle se déroule dans le Japon mythique des samouraïs, est proche de nous. Les dilemmes qui se posent à ces personnages, comme les choix qu’ils doivent faire, sont aussi les nôtres : partir ou rester ? Croire qu’une autre vie est possible ou y renoncer ? Jusqu’où sommes-nous prêts à oublier et même nier ceux qu’on aime pour se réaliser soi-même ? « Tu as pu accomplir tes rêves ! Moi, pendant que tu faisais carrière, j’ai fait un autre rêve, qui est devenu cauchemar. » dit Ohama à son mari Tobe. Des décors de papier Avec le scénographe Richard Peduzzi, Vincent Peduzzi imagine un décor de papier, comme ceux que vendait au XVIIIe siècle le père adoptif de Mizoguchi. Aussi beau et complexe qu’un origami, le papier fait apparaitre et disparaitre des formes en un clin d’œil, comme dans les rêves ou les cauchemars, où une cabane peut devenir château avant de s’évanouir dans un lac, comme si rien n’avait existé. Le blanc du papier, les reflets de l’eau, les couleurs de l’encre dessinent un décor traversé de courants d’air et peuplé d’ombres. Car ce sont aussi nos sens que cette œuvre met à l’épreuve sous la pâle lueur de la lune après la pluie, à laquelle tout semble possible. maquette décors : Richard Peduzzi Fiche pédagogiquep. 8 Opéra de Rouen Haute-Normandie Contes de la lune vague après la pluie UN OPÉRA, COMMENT ÇA FONCTIONNE ? Entre l’idée de monter un opéra et la première représentation, il peut se dérouler une période de 3 à 4 ans. Aujourd’hui, on peut jouer des opéras anciens en les restituant de manière historique (l’ensemble Le Poème Harmonique joue des opéras baroques éclairés à la bougie, comme à l’époque) ou bien en les modernisant. De nouveaux opéras sont aussi crées sur des thématiques contemporaines (ex : Lolo, un opéra sur Lolo Ferrari créé à l’Opéra de Rouenen mars 2013). Le compositeur : il compose la musique à partir d’un livret qui renferme l’histoire, l’intrigue du futur opéra. Offenbach, Mozart, Bizet et aujourd’hui Xavier Dayer par exemple sont des compositeurs d’opéra. Le librettiste : il écrit le livret, c’est-à-dire les dialogues que chanteront les chanteurs. Il peut s’inspirer d’une histoire déjà écrite et l’adapter pour l’opéra. C’est le cas ici : le librettiste Alain Perroux s’est inspiré du film japonais de Mizoguchi. Les chanteurs : > Les solistes assurent seuls les parties chantées. Ils interprètent les personnages de l’opéra et sont classés par catégorie de voix. Luciano Pavarotti était par exemple un ténor italien très connu et Maria Callas, une célèbre soprano grecque. > Le chœur est un ensemble de chanteurs qui commente l’action sur scène, entre en discussion avec les solistes et fait souvent progresser la situation. Le metteur en scène : comme au théâtre, c’est lui qui dirige les chanteurs sur la scène. Il donne la ligne conductrice générale de l’opéra. Il aide les chanteurs à trouver le caractère de leur personnage, dirige leurs déplacements et modèle les comportements qu’il veut faire exprimer. Le scénographe : il imagine le décor de l’opéra. Le créateur lumière : il cherche les jeux de lumières les plus adaptés. Le créateur costumes : il dessine les costumes pour tous les personnages de l’opéra. Le chef d’orchestre : il dirige l’orchestre et les chanteurs sur scène. Le chef de chœur : il dirige le chœur. Le régisseur de scène : il suit les répétitions et donne les « top départ » durant la représentation pour les entrées et sorties des chanteurs et pour les changements de décors. Les techniciens, maquilleurs, régisseurs, accessoiristes, machinistes etc. travaillent aussi dans les coulisses. Contes de la lune vague après la pluie THIS IS THE VOICE ! Même si aujourd’hui le physique d’un chanteur d’opéra compte, le casting se fait avant tout par rapport à sa voix et à sa tessiture. La tessiture est l’étendue dans laquelle une voix peut chanter sans peine. On distingue 6 tessitures, du plus grave au plus aigu. D’autres critères entrent en compte dans l’appréciation d’une voix : le timbre (la couleur de la voix), la puissance (sa capacité à passer au dessus de petits ou de grands orchestres. Mais attention, plus une voix est puissante, moins elle est souple ! ), l’endurance (certains rôles demandent de rester longtemps sur scène). On distingue grosso modo trois grands caractères de voix : • Les voix légères qui peuvent s’envoler facilement vers les aigus et vocaliser c’est-à-dire faire des acrobaties vocales périlleuses. Elles sont cependant peu puissantes. • Les voix lyriques, un peu plus puissantes mais moins agiles, elles ont une chaleur de timbre et peuvent faire de beaux chants liés, le legato. • Les voix dramatiques qui sont très puissantes et peuvent passer à travers un orchestre colossal. Par contre, elles ne peuvent pas faire de vocalises rapides. Les tessitures des femmes : Contralto - Mezzo-soprano - Soprano Les tessitures des hommes : Basse - Baryton - Ténor Dans Contes de la lune vague après la pluie, il y a 6 voix : > un quatuor de voix différenciées pour les deux couples centraux > une soprano pour la princesse > un haute contre qui incarne toutes les silhouettes que les protagonistes rencontrent sur leur chemin. Ce dernier doit être capable de jouer des rôles de toutes sortes, masculins ou féminins (clin d’œil au théâtre japonais). Le haute contre, dans la tradition française baroque, chantait tour à tour les rôles de héros, de quasifigurants ou de vielles femmes. Fiche pédagogiquep. 9 Opéra de Rouen Haute-Normandie XAVIER DAYER CONTES DE LA LUNE VAGUE APRÈS LA PLUIE SAISON 14-15 Côté élèves Fiche pédagogique Opéra de Rouen Haute-Normandie Avant le spectacle CONTES DE LA LUNE VAGUE APRÈS LA PLUIE Texte à trous : Genjuro le potier Je m’appelle Genjuro, je suis un potier j.......................................…. Près de mon village, la g...........................................…. éclate et je vais essayer d’en profiter pour vendre le plus de poteries possible et m’enrichir. Cette soif d’argent va causer ma p…................................ Dans mes démarches, je rencontre la princesse fortunée W......................................................... à qui je vends de nombreuses poteries. Fasciné, je tombe amoureux d’elle et j’o............................ ma pauvre femme M.......................................................… qui se tue à confectionner des poteries à la maison. Mais je veux toujours gagner p…................ ! Dans ma course effrénée, je réalise en fait que W…............................................... est un f............................…. qui m’a manipulé. Soudain, son palais et tout le luxe qui l’entourait disparaissent. Je me retrouve sans un sou, sans f........................................…. et sans honneur. De retour chez moi, j’apprends que ma femme est m..................................... depuis plusieurs mois. J’aperçois son fantôme et suis bouleversé. Je comprends que ma c…..............................a causé sa perte. Je réalise à quel point ma soif de pouvoir a fait du mal autour de moi. Mais maintenant, il est trop tard et il ne me reste plus qu’à retourner, seul et malheureux, à mes poteries. Remue-méninges - Haïkus Dans cet opéra, les solistes vont chanter quelques haïkus. Les haïkus sont des courts poèmes de la poésie classique japonaise. Ils sont composés de 17 syllabes réparties en trois vers, respectivement de 5, 7 et 5 syllabes. Ils évoquent en général un paysage ou un état d’âme et font travailler l’imagination du lecteur. À titre d’exemple, voici deux des plus célèbres haïkus japonais, écrits par le maître classique, Bashō : Dans la vieille mare, une grenouille saute, le bruit de l’eau. Le jour sur les fleurs décline et sombre déjà l’ombre des cèdres Imagine quatre Haïkus qui évoquent chacun : la guerre, la cupidité, la lune et le Japon, qui sont quatre thèmes de cet opéra. Photos Films sans frontières Opéra de Rouen Haute-Normandie Les infos à retenir sur le spectacle que tu vas voir PHOTOC’OPÉRA… une photocopie dans la poche ! > Cet opéra est composé par le compositeur contemporain Xavier Dayer et s’inspire d’un film japonais en noir et blanc de Kenji Mizoguchi réalisé en 1953. > Mizoguchi était un grand cinéaste qui a permis au cinéma japonais de se développer en Europe. > L’opéra raconte l’histoire de deux paysans japonais, Genjuro et Tobe, qui vont chercher à profiter de la guerre pour s’enrichir. Leur ambition va les pousser à sacrifier leur famille et leur travail pour chercher en vain un bonheur impossible. Opéra de chambre adapté du scénario du film de Kenji Mizoguchi (1953) Livret de Alain Perroux Direction musicale : Jean-Philippe Wurtz Mise en scène Vincent : Huguet assisté de Céline Gaudier Scénographie : Richard Peduzzi assisté de Clémence Bezat Costumes : Caroline de Vivaise Lumières : Bertrand Couderc Genjuro : Benjamin Mayenobe Miyagi : Majdouline Zerari Tobe : Carlos Natale Ohama : Judith Fa La Princesse Wakasa : Luanda Siqueira Orchestre de l’Opéra de Rouen Haute-Normandie > Les thèmes de l’opéra sont la guerre, la cupidité, la trahison et la recherche illusoire du pouvoir. > L’opéra utilise la poésie des images du film et explore le registre du fantastique, nous entrainant dans un monde entre songe et réalité. > L’inspiration japonaise se retrouve dans les haïkus, petits poèmes très courts que les solistes vont chanter à certains moments, et dans le décor fait de papier rappelant les origamis. > Il s’agit d’un opéra de chambre car il n’y a que 9 musiciens et 6 chanteurs. Production Opéra de Rouen Haute-Normandie en coproduction avec Fondation Royaumont, Opéra Comique. Avec l’aide à la production et à la diffusion d’Arcadi-Ile-de-France. KPMG est le mécène de l’Unité scénique de la Fondation Royaumont. La commande passée à Xavier Dayer est soutenue par la Fondation Arthur Honegger, sous égide de la Fondation de France. Avec le soutien de Pro Helvetia. Vendredi 20 mars, 20h / Samedi 21 mars, 20h Rouen, Théâtre des Arts Durée : 1h30 sans entracte / Livret en français, spectacle surtitré Opéra de Rouen Haute-Normandie Après le spectacle CONTES DE LA LUNE VAGUE APRÈS LA PLUIE Quels sont ton avis et tes impressions sur l’opéra auquel tu as assisté ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………………............................. As-tu été surpris par quelque chose en particulier ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………………............................. Qu’as-tu pensé de la mise en scène ? T’a-t-elle semblé moderne, étrange, austère, poétique ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………………............................. Que retiens-tu de l’histoire de ces deux couples de paysans japonais ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………………............................. Qu’y avait-il de fantastique, selon toi, dans cet opéra ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………………............................. En quoi cet opéra évoquait-il le Japon ? En quoi s’en détachait-il ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………………............................. L’histoire de ces deux paysans qui cherchent à s’enrichir en sacrifiant leur vie simple et leur famille te semble-t-elle moderne ? Peut-elle s’appliquer aujourd’hui ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………………............................. As-tu été sensible à la voix d’un chanteur en particulier ? Au jeu d’un chanteur ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………………............................. Quels sont les éléments du décor que tu as trouvé intéressants ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………………............................. Avec quelle sensation es-tu sorti de ce spectacle ? De la tristesse, de la révolte, de la douceur ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………………............................. Opéra de Rouen Haute-Normandie