Anneaux et modules artiniens - Les

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Anneaux et modules artiniens
Table des matières
1 Modules et anneaux artiniens
1
1.1
Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1
1.2
Exemples et contre-exemples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2
1.3
Propriétés basiques de conservation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2
2 Spectre d’un anneau artinien
3
2.1
Dimension de Krull et finitude du spectre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
2.2
Nilpotence du radical et conséquences sur la structure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
3 Caractérisation des anneaux et modules artiniens
4
3.1
Caractérisation des anneaux artiniens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
4
3.2
Caractérisation des modules artiniens sur un anneau artinien . . . . . . . . . . . . . . . .
5
1
Modules et anneaux artiniens
1.1
Définitions
Lemme Soit E un enemble ordonné. Les assertions suivantes sont équivalentes :
(1) Tout sous-ensemble non vide de E a un élément minimal.
(2) Toute partie totalement ordonnée non vide de E a un plus petit élément.
(3) Toute suite décroissante d’éléments de E est stationnaire.
Preuve On a facilement (1) ⇒ (2) ⇒ (3). Pour (3) ⇒ (1) on regarde la contraposée : l’existence d’un
sous-ensemble non vide de E dépourvu d’élément minimal permet de construire une suite strictement
décroissante.
Définition Soit A un anneau, M un A-module. On dit que M est artinien si l’ensemble des sousmodules de M ordonné par l’inclusion satisfait, ce qui est équivalent, les conditions (1), (2) ou (3).
On dit que l’anneau A est artinien si le A-module A est artinien.
Remarque Les sous-modules du A-module A sont exactement les idéaux de l’anneau A.
1
1.2
Exemples et contre-exemples
Exemples Le module (0) est toujours artinien.
Le Z-module Z/nZ est fini, donc artinien. C’est aussi le cas de l’anneau Z/nZ.
Soit k un corps. Un k-espace vectoriel est artinien si et seulement s’il est de dimension finie. k est
lui-même artinien.
Contre-exemples L’anneau Z n’est pas artinien : considérer Z ⊃ 2Z ⊃ 4Z ⊃ .... De même si k est
un corps, k[X] n’est pas un anneau artinien : en effet, (X) ⊃ (X 2 ) ⊃ ... ⊃ (X n ) ⊃ ....
Un sous-anneau d’un anneau artinien n’est donc pas nécessairement artinien : Z ⊂ Q, k[X] ⊂ k(X) (qui
sont des corps).
Une somme directe infinie de modules non nuls n’est pas un module artinien.
1.3
Propriétés basiques de conservation
f
g
Proposition Soit 0 −→ M 0 −→ M −→ M 00 −→ 0 une suite exacte de A-modules. Alors :
M est artinien ⇔ M 0 et M 00 sont artiniens.
Preuve ⇒ Une suite décroissante (Mn0 ) de sous-modules de M 0 a pour image par f une suite
décroissante (f (Mn0 )) de sous-modules de M , qui est alors stationnaire. Comme f est injective, la suite
(Mn0 ) = (f −1 (f (Mn0 ))) est aussi stationnaire.
Une suite décroissante (Mn00 ) de sous-modules de M 00 a pour image réciproque par g une suite décroissante
(g −1 (Mn00 )) de sous-modules de M , qui est alors stationnaire. Comme g est surjective, la suite (Mn0 ) =
(g(g −1 (Mn0 ))) est aussi stationnaire.
⇐ Soit (Mn ) une suite décroissante de sous-modules de M . On pose Mn0 = f −1 (Mn ) et Mn00 = g(Mn ).
et (Mn00 ) sont alors deux suites décroissantes, donc stationnaires, dans M 0 et M 00 . Choisissons n0
tel que Mn0 = Mn0 0 et Mn00 = Mn000 si n ≥ n0 . On va montrer que si n ≥ n0 , Mn = Mn0 .
Soit x ∈ Mn0 . Alors g(x) ∈ Mn000 = Mn00 donc il existe xn ∈ Mn tel que g(x) = g(xn ). D’où x − xn ∈
Ker(g) = Im(f ). Choisissons donc t ∈ M 0 tel que f (t) = x−xn . On sait que t ∈ f −1 (Mn0 ) = Mn0 0 = Mn0 .
Donc x − xn = f (t) ∈ f (Mn0 ) = f (f −1 (Mn )) = Im(f ) ∩ Mn ⊂ Mn , et x ∈ Mn , donc Mn0 =Mn .
(Mn0 )
Corollaire Soient M un A-module artinien et P un sous-module de M . Alors P et M/P sont des
A-modules artiniens.
⊂
p
Preuve 0 −→ P −→ M −→ M/P −→ 0 est exacte.
Corrolaire Soient M1 , ..., Mn des A-modules. Alors ⊕ni=1 Mi est artinien ⇔ ∀i, Mi est artinien.
Preuve Par récurrence finie, en utilisant la suite exacte
p
i
0 −→ Mi −→ ⊕nj=1 Mj −→ ⊕nj=1,j6=i Mj −→ 0
Corollaire Soient M1 , ..., Mn des A-modules. Alors
Pn
Preuve i=1 Mi est un quotient de ⊕ni=1 Mi .
Pn
i=1
Mi est artinien ⇔ ∀i, Mi est artinien.
Remarque - Ces démonstrations sont aussi valables pour des modules noethériens, en remplaçant
les suites décroissantes par des suites croissantes.
Proposition Soit A un anneau, S ⊂ A une partie multiplicative. Si A est artinien, S −1 A l’anneau
des fractions de A en S est artinien.
iS
A
Preuve Soit (bn ) une suite décroissante d’idéaux de l’anneau S −1 A. Si A →
S −1 A, notons an =
−1
iSA (bn ). (an ) étant une suite décroissante d’idéaux de A, elle stationne. Il en est de même pour (bn ) =
(S −1 an ).
2
2
Spectre d’un anneau artinien
2.1
Dimension de Krull et finitude du spectre
Proposition Un idéal premier p d’un anneau artinien est maximal.
Preuve On sait que A/p est un anneau intègre et artinien, il suffit de montrer que c’est un corps.
Soit a ∈ A/p, a 6= 0. La suite décroissante des idéaux ((an ))n∈N est stationnaire, disons en r : on a
(ar ) = (ar+1 ). Donc ar = bar+1 , et comme a 6= 0 et A/p est intègre, ba = 1, et a est inversible ; p est
ainsi maximal.
Corollaire Le radical de Jacobson d’un anneau artinien est égal à son nilradical
Corollaire La dimension de Krull d’un anneau artinien est 0.
Remarque Les anneaux dans lesquels tous les idéaux premiers sont maximaux (de dimension de
Krull 0) ne sont pas nécessairement artiniens.
Soit k est un corps ; notons xi la classe de Xi dans l’anneau quotient A = k[Xn ]n∈N /(Xi Xj )i,j∈N . Le
seul idéal premier de A est l’idéal maximal (xn )n∈N .
La suite d’idéaux (xn )n∈N ⊃ (xn )n∈N−{0} ⊃ (xn )n∈N−{0,1} ⊃ ... est strictement décroissante. A n’est
donc pas artinien.
Proposition Le spectre d’un anneau artinien est fini.
Preuve Notons F l’ensemble des idéaux qui sont intersection d’un nombre fini
Tn d’idéaux premiers
dans l’anneau artinien A. F est non vide. Il possède donc un élément minimal a = i=1 pi , où les pi sont
premiers et distincts. On va démontrer que Spec(A) = {p1 , ..., pn }.
Soit p ∈ Spec(A).
TnOn observe que p ∩ a ∈ F . Comme p ∩ a ⊂ a, par minimalité de a, p ∩ a = a, ce qui se
traduit par a = i=1 pi ⊂ p, et qui entraı̂ne que pi ⊂ p pour un certain i, et donc pi = p puisque pi est
maximal.
Remarque La réciproque est fausse : Le spectre de A = k[Xn ]n∈N /(Xi Xj )i,j∈N est un singleton,
donc fini, bien que A ne soit pas artinien.
2.2
Nilpotence du radical et conséquences sur la structure
Proposition Le radical r = J(A) =
que rn = (0)).
p
(0) d’un anneau artinien A est nilpotent (il existe n ∈ N tel
Preuve (rn )n∈N est une suite décroissante d’idéaux ; elle stationne donc en n ∈ N. On va montrer
que rn = (0). Notons a = rn .
Supposons a 6= (0) ; on observe que a2 = a. L’ensemble F des idéaux b de A tels que ba 6= (0) est donc
non vide ; soit c son plus petit élément.
Si pour tout x ∈ c, on avait xa = (0), alors on aurait ca = (0). Donc il existe x ∈ c tel que xa 6= (0).
Mais alors (x) ∈ F , donc c = (x).
Aussi, (xa)a = xa2 = xa 6= 0, donc (xa) ∈ F et (xa) ⊂ (x), d’où (xa) = (x) et ainsi on obtient l’existence
d’un z ∈ a, tel que xz = x. Par récurrence, pour tout n ∈ N, on a alors xz n = x. Mais comme z ∈ a ⊂ r,
on trouve x = 0. On a donc a = rn = (0).
Corollaire Un anneau artinien est un produit fini d’anneaux locaux.
p s
Preuve Soit Spec(A) = {m1 , ..., mn }, et soit s ∈ N tel que (0) = (0). Alors :
p
s
(0) = (
n
\
k=1
mk )s = (
n
Y
mk )s =
k=1
n
Y
(msk ) =
k=1
Tn
s
k=1 (mk ).
n
\
(msk ) = (0)
k=1
Par le théorème chinois, A est donc aussi
A, isomorpheQà A/(0) est donc isomorphe à A/
n
isomorphe à k=1 A/(msk )
L’anneau A/(msk ) est par quotient artinien, et a un seul idéal premier mk /(msk ) (regarder la projection
pk
A → A/(msk )). Il est local, et A est un produit d’anneaux locaux.
3
3
Caractérisation des anneaux et modules artiniens
3.1
Caractérisation des anneaux artiniens
Théorème Soit A un anneau. Les assertions suivantes sont équivalentes :
(1) A est noethérien et tout idéal premier de A est maximal.
(2) A est artinien.
(3) Le A-module A est de longueur finie.
Preuve Observons que l’idéal (0) d’un
Tn anneau artinien A est un produit d’idéaux maximaux : on
vient de voir qu’il existe s ∈ N tel que k=1 (msk ) = (0), avec Spec(A) = {m1 , ..., mn }. On va d’abord
démontrer le lemme suivant :
Lemme Soit A un anneau dans lequel (0) est produit d’idéaux maximaux. Les assertions suivantes
sont équivalentes :
(1) A est noethérien.
(2) A est artinien.
(3) Le A-module A est de longueur finie.
Preuve du lemme On a toujours (3) ⇒ (1) ou (2). Prouvons simultanément que (1) ⇒ (3) et
(2) ⇒ (3).
Qn
Ecrivons (0) = i=1 mi avec n minimal. De ce fait, m1 ⊃ m1 m2 ⊃ ... ⊃ m1 ...mn est une suite de
composition strictement décroissante de A-modules.
De plus Ann(m1 ...mi /m1 ...mi+1 ) ⊃ mi+1 , et par maximalité de mi+1 , on a le fait que Ann(m1 ...mi /m1 ...mi+1 ) =
mi+1 , et donc que m1 ...mi /m1 ...mi+1 puisse être muni d’une structure de A/mi+1 -espace vectoriel.
Cet espace est de dimension finie : l’existence d’une famille libre (uk )k∈N infinie dans m1 ...mi /m1 ...mi+1
permettrait de construire des suites de A-modules (u1 ) ⊂ (u1 , u2 ) ⊂ ... et (uk )k∈N ⊃ (uk )k∈N−{0} ⊃ ...
qui contrediraient respectivement le fait m1 ...mi /m1 ...mi+1 soit respectivement noethérien ou artinien,
donc respectivement (1) et (2).
En relevant dans A une suite de Jordan-Hölder de chacun de ces espaces vectoriels (i de 1 à n − 1), on
raffine m1 ⊃ m1 m2 ⊃ ... ⊃ m1 ...mn en une suite de Jordan-Hölder, de longueur finie (par additivité des
longueurs). C’est (3).
Il reste à recoller les bouts avec le lemme 2 :
Lemme 2 Soit A un anneau noethérien. (0) est un produit d’idéaux premiers.
Preuve du lemme 2 Soit F l’ensemble des idéaux de A ne contenant pas un produit d’ideaux
premiers.
Si F est non vide il possède un élément maximal a, qui n’est donc pas premier. Si bien qu’il existe
x, y ∈
/ A tels que xy ∈ A. a + Ax et a + Ay contiennent strictement a, donc ils contiennent des produits
d’idéaux premiers, P et Q respectivement.
Mais alors le produit d’idéaux premiers P Q ⊂ (a + Ax)(a + Ay) ⊂ a + Axy = a. Donc F est vide, et (0)
est alors un produit d’idéaux premiers.
Corollaire Soit A un anneau nothérien, m1 , ..., mn des idéaux maximaux de A, r = m1 ...mn , q un
idéal de A tel que pour un certain s ∈ N ∗ , rs ⊂ q ⊂ r. Alors A/q est artinien.
Preuve D’après un des théorèmes d’isomorphisme, A/q est isomorphe à (A/rs )/(q/rs ), qui est un
quotient de A/rs . Il suffit donc de vérifier que ce dernier est artinien.
p
Déterminons Spec(A/rs ). Considérons A → A/rs . Soit w ∈ Spec(A/rs ). v = p−1 (w) ∈ Spec(A), et de
plus w ⊃ rs = ms1 ...msn , donc v ⊃ mi pour un certain i. D’où w = mi /rs . Réciproquement les idéaux
mi /rs sont tous dans Spec(A/rs ), et sont maximaux car les mi le sont. A/rs est donc noethérien de
dimension de Krull nulle, il est donc artinien, et A/q l’est aussi.
4
3.2
(1)
(2)
(3)
(4)
Caractérisation des modules artiniens sur un anneau artinien
Proposition Soit M un A-module, avec A un anneau artinien. Les assertions suivantes sont équivalentes :
M est de type fini.
M est artinien.
M est noethérien.
M est de longueur finie.
Preuve On va utiliser le lemme 1 pour prouver (1) ⇔ (3) (un anneau artinien est noethérien) et le
lemme 2 pour (1) ⇔ (2). (4) ⇒ (2) et (4) ⇒ (3) sont évidentes (considérer la contraposée). Le lemme 3
concluera avec ((2)et(3)) ⇒ (4)
Lemme 1 Soit M un A-module. On a :
Le A-module M est noethérien ⇔ Le A-module M est de type fini et l’anneau A/Ann(M ) est noethérien.
Preuve du lemme 1 Remarquons que les sous-modules d’un B-module P et les sous-modules de P
vus comme B/Ann(P )-modules sont les mêmes.
Pn
Prenons un système de générateurs du A-module M , (x1 , ..., xn ). On a ainsi M = i=1 Axi . Or Axi est
isomorphe au A-module A/Ann(xi ).
⇐ A/Ann(xi ) est isomorphe à (A/Ann(M ))/(Ann(xi )/Ann(M )), donc est noethérien par quotient.
M par somme est alors noethérien.
⇒ Axi étant un sous-module de M , il est noethérien. A/Ann(xi ) l’est donc aussi. Considérons le
morphisme A → ⊕ni=1 A/Ann(xi ). Son noyau est Ann(M ), donc A/Ann(M ) s’identifie à un sous-module
d’un module noethérien (par somme), et est donc noethérien.
Lemme 2 Soit M un A-module. On a :
Le A-module M est artinien ⇔ Le A-module M est de type fini et l’anneau A/Ann(M ) est artinien.
Même démonstration que le lemme 1, en remplaçant le mot noethérien par artinien.
Lemme 3 Soit M un A-module noethérien et artinien. Il est de longueur finie.
Preuve Ceci marche pour M = {0}. Si M n’est pas nul, l’ensemble des sous-modules de M stricts
est non vide. Comme M est noethérien il admet un élément maximal M1 , noethérien aussi. Si M1 = {0},
M est de longueur nulle. Sinon, M1 admet un sous-module maximal M2 ... Ce procédé nous permet de
construire une suite strictement décroissante M = M0 ⊃ M1 ⊃ M2 ⊃ ... qui est finie puisque M est
artinien. On vient de construire une suite de Jordan-Hölder finie pour M .
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