SOC7532 THÈMES EN SOCIOLOGIE OU ANTHROPOLOGIE CONTEMPORAINES III Prof. : André Tremblay Bureau : mercredi 13h00 à 14h30 ou sur rendez-vous Tél : 562-5800 poste 1269 Hiver 2008 DMS8166 [email protected] Transformations du système éducatif L’éducation a été vue depuis l’apparition de la sociologie comme un des fondements de la vie en société. C’est là, dans le système éducatif, où la socialisation prend place ne cédant plus que la prime enfance à la famille, et encore. C’est en même temps une épreuve qui forge l’individu et un de ses plus sûrs facteurs de classement social. On mesure le succès des individus et des sociétés à l’aune de leur scolarité. Dans le mouvement actuel de mondialisation fondé qu’il est sur l’information et la connaissance, l’éducation n’en devient que plus cruciale. Les pays en difficulté sont souvent ceux où le niveau d’éducation est le plus bas, surtout chez les femmes. Le caractère central de l’éducation dans la société contemporaine ne transforme pas que la société, que l’individu. Depuis plus d’une décennie, au Québec comme en Ontario –mais ce ne sont que des exemples parmi d’autres, on s’est engagé dans un processus rapide de transformation de l’école, du primaire jusqu’à l’université. Depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale, ce n’est certes pas la seule mutation enregistrée. Au Québec, un ouvrage permet de dater ce premier revirement, le Rapport Parent. Rapport qui est fondateur de la Révolution tranquille. L’accès à l’éducation pour tous en était un des axes majeurs. Différents dynamismes animent la transformation actuelle. Un des plus importants est la recherche d’une efficacité accrue, plus de diplômés et des diplômés mieux formés. On pense l’atteindre de différentes manières. En Ontario, la Commission Royale d’Enquête de 1994 mise en œuvre par l’administration Harris a proposé des initiatives majeures pour améliorer la qualité de l’éducation au primaire et au secondaire. Une réforme du curriculum laissant la place à l’apprentissage de compétences et à l’acquisition des connaissances. Le développement de tests et rapports standardisés sur le rendement des élèves. L’élimination d’une année du secondaire, ce qui a valu aux universités une double cohorte. La restructuration des conseils scolaires, y compris la fusion de nombreux conseils scolaires de langue anglaise et la création de conseils de langue française. L’introduction de l’enseignement en tant que profession autoréglementée, régie par l’Ordre des enseignantes et des enseignants ; la conception de politiques sur le rôle des conseils d’école ; la rédaction d’une loi visant à définir le nouveau rôle des directrices et directeurs d’école ; le développement de liens entre le secondaire et le postsecondaire, les collèges plus particulièrement, et entre ces derniers et l’université. Enfin le dégel des frais de scolarité à l’université, comme partout ailleurs sauf au Québec, entraîne toute une série d’ajustements dont il serait trop long de faire la liste. Au Québec, c’est la tenue des États généraux sur l’éducation de 1995-1996 qui enclenche les réformes. Le Ministère de l’éducation s’est engagé dans une réforme fondamentale du système scolaire. « Sept grandes lignes d'action sont définies : 1. intervenir dès la petite enfance ; 2. enseigner les matières essentielles ; 3. donner plus d'autonomie à l’école ; 4. soutenir l'école montréalaise ; 5. intensifier la réforme de la formation professionnelle et technique ; 6. consolider et rationaliser l'enseignement supérieur ; 7. donner un meilleur accès à la formation continue. » (Painchaud et Lessard 1998) Malgré la différence de vocabulaire, sous bien des aspects on va dans la même direction au Québec qu’en Ontario. La restructuration des conseils scolaires (Ontario), par exemple, trouve son pendant dans celle des commissions scolaires (Québec), on en coupe le nombre par deux. Deux différences de taille. En Ontario on accorde une importance primordiale à la formation des cadres et du personnel enseignant qu’on force dans un processus de certification et de formation permanente par la création d’un ordre professionnel. Au Québec, la transformation profonde du régime pédagogique a retenu le plus l’attention. Contrairement à l’Ontario, on a abandonné le découpage traditionnel en matières pour identifier cinq grands domaines de connaissances (les langues, la technologie, l'univers social, les arts et le développement personnel) traversée de compétences transversales. C’est ce passage à la pédagogie par compétence qui causa un grand remue-ménage de réformes. Notons comme exemple de ces compétences transversales « les compétences intellectuelles, méthodologiques, celles liées aux attitudes et aux comportements et les compétences linguistiques, c'est-à-dire la langue d'enseignement (français ou anglais) dans toutes les disciplines ou matières. » (Painchaud et Lessard 1998) Comme vous le savez sans doute, le bulletin scolaire fut un des enjeux de la dernière élection provinciale, le Ministère de l’éducation avait enlevé les évaluations chiffrées et personne ne comprenait le vocabulaire des compétences. Pour l’éducation postsecondaire et plus particulièrement l’université, les transformations ont été beaucoup plus radicales en Ontario qu’au Québec. Elles s’inscrivent dans un mouvement qui a aussi largement dépassé les frontières nationales. En Europe plus de trente pays ont adhérer au protocole de Bologne qui vise l’uniformisation des grandes structures scolaires postsecondaires et la mobilité des étudiants. En fait, ces réformes ont presque partout la même conséquence : la création et l’augmentation des frais de scolarité. L’éducation supérieure coûte cher et rapporte gros. Elle est devenue quasi indispensable à l’atteinte du statut de classe moyenne. On la considère donc de plus en plus comme un investissement que les individus/producteurs doivent faire et de moins en moins comme un droit appartenant au citoyen. Un investissement, elle l’est aussi pour l’État qui y voit le plus sur moyen de participer à la course à l’innovation technique à laquelle la mondialisation force les pays développés. Il n’y a jamais eu tant d’argent dans le système universitaire. Mais l’argent n’est pas là pour former les étudiants, pas ceux du premier cycle en tout cas. C’est la recherche et plus particulièrement la recherche dans les domaines de la santé, des sciences et des technologies de pointe, qui emporte la plus grande part du gâteau. Ce séminaire nous fournira donc l’occasion de réfléchir non seulement en sociologie de l’éducation tant dans le champ est large. Nous irons de la sociologie générale à la sociologie politique, celle des organisations ou de la connaissance, et la sociologie du développement tout aussi bien. Nous discuterons des rapports entre compétences et connaissances, de la place de la pédagogie en éducation, de développement économique et de perversion de l’université. Nous aborderons des auteurs comme Émile Durkheim, Danilo Martucelli, François Dubet, Raymond Boudon, Pierre Bourdieu, David Noble, Michel Freitag, Gilles Gagné ou Richard Florida, pour n’en nommer que quelques uns. Programme de travail Brève socio-histoire de l’éducation formelle • Institutionnalisation/désinstitutionnalisation/réintistutionnalisation • L’Église, passeuse puis ennemie de la Lumière… • Développement du capitalisme industriel et exigences d’éducation Les systèmes de justification, la critique vient de toute part (Boltanski et Thévenot, De la justification) L’éducation pour faire société, la socialisation et l’intégration sociale, l’éducation comme épreuve (Durkheim, Martucelli) L’éducation et l’industrialisation capitaliste de la connaissance (Gibbons, Etzkowitz, Freitag, Noble, Kerr, Krip, Mirowski) L’éducation et les classes sociales (Boudon, Bourdieu, Florida) L’éducation et le développement (PNUD) Calendrier révisé Un rapide survol du développement des systèmes d’éducation occidentaux (romain, grecs, gaulois, américains). Durée : 2 semaines. Lectures et présentation : 1 présentation d’un auteur (15 points) et 3 résumés de lecture (5 points chacun). Durée : 3 semaines Théorie de la critique : De la justification (Boltanski et Thévenot) Éducation et socialisation (Durkheim) Éducation et construction de soi, Forgé par l’épreuve (Martucelli) The New Production of Knowledge, (Gibbons et al) L’université aujourd’hui. Durée : 2 semaines Deuxième tournée de lectures. 1 présentation d’un auteur (10 points) et 1 résumé de lecture (5 points). Durée : 3 semaines Auteurs à déterminer selon les orientations des participants, dans le champ de l’éducation supérieure : Freitag, Gagné, Florida, Altbach, Une thématique au choix des participants, celles-ci seront choisies au début du module sur l’université, éducation des femmes, développement et éducation, rectitude politique et liberté d’expression, etc. 1 résumé de lecture (5 points) Durée : 2 semaines Présentation de votre travail final (10 points) : littérature –au moins 3 articles, principales hypothèses, plan de travail. (1 semaine) Travail final (40 points)