LES DEVOIRS DU MÉDECIN A L'ÉGARD DU PATIENT EN MATIERE DE RECHERCHE CLINIQUE: ASPECTS ÉTHIQUES ET JURIDIQUES Par Elisabeth Allard Université de Sherbrooke Maîtrise en droit de la santé Faculté de droit Décembre 1997 National Library Bibliothèque nationale du Canada Acquisitions and BibiiographiiServices 395 W e l l i Street OttawaON K 1 A M Acquisitions et services bibliographiques 395, rue Wellington Ottawa ON K1A ON4 Canada canada The author has grmted a nonexc1usive licence allowing the National Library of Canada to reproduce, loan, distniute or sell copies of this thesis in microform, paper or electronic formats. L'auteur a accordé une licence non exchive permettant à la Bibliothèque nationale du Canada de reproduire, prêter, distriiuer ou vendre des copies de cette thèse sous la forme de micfofiche/"nlm,de reproduction sur papier ou sur format électronique. The author retains o w n d p of the L'auteur conserve la propriété du droit d'auteur qui protège cette thèse. Ni la thèse ni des extraits substantiels de celle-ci ne doivent être imprimés ou autrement reproduits sans son autorisation. copyright in this thesis. Neither the thesis nor substantial extracts fiom it may be printed or otherwise reproduced without the author's permission. Canada LES DEVOIRS DU MÉDECIN A L'ÉGARDDU PATIENT EN MATIERE DE RECHERCHE CLINIQUE: ASPECTS ÉTHIQUES ET JURIDIQUES Par Élisabeth Allard 95 404 104 Essai soumis à la Faculte de droit en vue de l'obtention du grade de "Maître en droit" Université de Sherbrooke Maîtrise en droit de la santé Faculté de droit Décembre 1997 c Elisabeth Allard 1997 Les devoirs du médecin 9 I'dgard du patient en matière de recherche cfiniaue: aspects éthiques et iu~idiues Le médecin exerçant des activitds de recherche clinique doit agir avec la rigueur qu'exige la science dans le cadre du protocole de recherche, tout en observant, à l'égard de son patient, les régles prévues B son code de déontologie. Cet essai se veut une analyse de cette dualité de rôles et des obligations qui en ddcoulent, en les abordant dans une perspective comparée, opposant ainsi le contexte usuel des soins d celui de la recherche clinique. Certains éléments de réflexion et quelques pistes de solutions sont apportés afin d'encadrerles aldas inhérents 9 la recherche, dans une optique axée vers la qualité de la pratique medicale et la protection du patient. La reconnaissance juridique des comités d8&thiquede la recherche semble une voie à suivre en réponse à cette problématique. Physicians 'Dufiés tu Patients in a Clnical Research Setfincr.' Ethical and Legal Asnects The physician doing cîïnical research must abide by exacting scientifc standards within research pro tocol, yet as regards his patient, he must respect his code of pro fessional conduct. This essay is an analysis o f this role duality and of the obligations resulting therefrom, using a comparative approach between the usual context of treatment and that of clinical research. There is food for thought, and some outfine solutions are proposed in order tu delimit the hazards inherent to research, al1 this with an orientation to competent medicalpractice and pa t5mt protection. Legal recognizance or research ethics boards seems to be a solution to this problem. L 'auteure tient B remercier Me Pierre Deschamps, directeur de la recherche au Centre de recherche en droit prive et cornpar& de I'Universitt! McGilI, pour ses précieux conseils et pour son soutien. Toute sa gratitude revient &galement 9 son &poux et à ses parents pour leur encouragement et leur appui hconditionne/s. LES DEVOIRS DU MÉDECIN A L'ÉGARD DU PATIENT EN MATIERE DE RECHERCHE CLINIQUE: ASPECTS ÉTHIQUES ET JURIDIQUES INTRODUCTION ....................................... 7 I La relation médecin-patient dans un contexte de soins A) Le contexte des soins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 ................................... b) Le cadre juridique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . a) Le cadre clinique c ) Le cadre administratif 10 12 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 ................................... 16 ..................... 19 .......... b) L'obligation de soigner adéquatement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . c) L'obligation d'assurer le suivi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . d) L'obligation de respecter le secret professionnel . . . . . . . . . . . . . 20 d) Le cadre éthique B) Les obligations et les devoirs mutuels a) L'obligation d'informer et d'obtenir le consentement 23 26 29 II La relation médecin-patient dans un contexte de recherche clinique A) Le contexte de la recherche clinique a) Le cadre juridique b) Le cadre éthique c) Le cadre clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49 B) Le rôle du m6decin face aux questions touchant le respect des personnes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54 a) Le recrutement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54 ............... c) La sauvegarde de 18int6grit6et de la sécurit6 . . . . . . . . . . . . . . . . b) L'information et l'obtention du consentement 60 69 d) La préservation de la confidentialit6 et la protection de la vie privée 7 4 CONCLUSION BIBLIOGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78 ...................................... 82 INTRODUCTION De par sa profession, le m6decin est l'interlocuteur privil6gié de la personne malade. Le patient doit donc pouvoir compter sur l'aide et les services d'un professionnel compétent et désint6ress8, avec lequel il pourra établir ce qu'on appeile l'alliance thérapeutique. Dans un contexte de soins, il se crée une certaine relation de confiance entre le médecin et son patient, chacun se devant d'observer une série de devoirs et d'obligations. Mais quelle forme cette alliance thdrapeutique prend-elle lorsqu'elle est vécue dans un contexte de recherche clinique? La part d'incertitude inhérente à tout projet de recherche modifie-t-elle cette attente légitime du patient que son médecin agisse toujours dans son meilleur intérêt? De plus, lorsque le m6decin agit à titre de chercheur, des responsabilités accrues s'imposent à lui à l'égard de plusieurs personnes: envers les personnes qui se prêtent aux exp6rimentations1à titre de sujets de recherche, envers son "employeur", que ce soit l'État ou l'entreprise privée, et envers la 'II est B noter que le mot "expérimentation", tel qu'on le retrouve dans le Code civil du Québec, se substitue en doctrine et dans la litterature par l'emploi des mots recherche, projet, essai, étude, expérience, etc. On doit noter que chacun de ces termes a une signification et une portée différentes, notamment quant à la notion d'inconnu comporté par chacun. société en général. Le médecin est ainsi placé devant une certaine dualité: d'une part, il est dans I'obligation de respecter fidélement toutes les rnodalit6s du protocole de recherche et. d'autre part, il doit observer à I'égard de son patient toutes les règles prévues par son code de d60ntologie2. Le médecin est-il obligé de se plier a toutes les exigences d'une recherche valable au risque de porter atteinte à la loyauté qu'il doit à ses patients? Dans le cadre de cet essai, nous porterons notre analyse sur les obligations et les devoirs que le médecin a envers son patient3 dans un contexte de recherche clinique. Nous apporterons également quelques éléments de réflexion et certaines pistes de solutions à I'égard du double statut du médecin-chercheur. Pour ce faire, nous analyserons d'abord, la relation médecin-patient dans le contexte usuel des soins, sous quatre axes différents: l'information et l'obtention du consentement, I'obligation de soigner adéquatement, d'assurer le suivi approprie et, enfin, de conserver le secret professionnel. 2~ode de dt2ontologie des médecins, R. R .Q. 1 98 1 , c. M-9, r.4. 3 ~ e t t eBtuda abordera uniquement le cas du majeur apte. 9 Nous dégagerons ensuite, dans une perspective comparée, les caractéristiques propres ZI la relation médecin-patient dans le domaine de la recherche clinique. Nous situerons d'abord, la recherche dans son cadre clinique, juridique e t éthique pour examiner ensuite, le rôle du mhdecin face aux questions concrétes touchant la protection des personnes, telles que le recrutement, le consentement, la sauvegarde de l'intégrité physique, la préservation de la confidentialité e t la protection de la vie privée. Aussi, afin de bien cerner la relation médecin-patient dans ce secteur particulier, nous effectuerons cette analyse parall&lement avec les quatre grands axes décrits en première partie. I La relation m6decin-patient dans un contexte de soins A) Le contexte des soins a) Le cadre clinique Dans cette première partie. nous situerons brièvement la relation médecin-patient dans le contexte traditionnel de la dispensation des soins, c'est-à-dire dans une perspective "soignant-soigne". La pratique médicale s'inscrit dans un cadre personnel, professionnel, légal et éthique de plus en plus complexe. Au-delà de la prestation de soins à proprement parler, le rôle du médecin évolue avec l'avancement de la science, le recours à la technologie e t le contexte socio-politique en perpétuels changements. De plus. le virage ambulatoire. vécu actuellement par plusieurs patients. change le cours traditionnel de la dispensation des soins. Dans un contexte usuel de soins, le médecin a le devoir d'agir de manière conforme aux données actuellement reconnues par la science et ce, avec diligence et habileté. II n'est toutefois pas garant de la guérison du patient. II n'est tenu qu'8 une obligation de moyens4: "Le m6decin doit ses soins; il ne doit pas la gu6rison. En d'autres termes, le contrat médical lui impose d'accomplir les meilleures diligences. de fournir les meilleurs moyens, mais non pas de réaliser une guérison dont ses diligences ne promettent que l'espérance dont elle consolide les chances. "' Aussi, le médecin doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour tenter d'obtenir le résultat souhaité. O n ne pourra lui reprocher de ne pas y parvenir s'il se conduit avec prudence, en utilisant les méthodes reconnues dans les circonstances propres à chaque patient. Ainsi, au plan clinique. le médecin devra se conformer aux standards généralement admis dans le champ de pratique qui est le sien. Actuellement, le visage de la médecine change. Les énormes progrès scientifiques des dernières années et les nouvelles technologies ont conduit à l'apparition de spécialisations de plus en plus pointues, ce qui a certes une influence sur la pratique médicale. 4 ~ . - ~Crépeau, . L 'intensité de f'obfigation juridique, o u des obligations de diligence, de résultat e t de garantie, Centre de recherche en droit privé et comparé du Québec, Cowansviiie, Yvon Blais, 1989, aux p. 9 2 à 94. 'G. Merneteau, La responsabilité c M e mddicale en droit francais e t quPbdcois, Montreal, Centre de recherche en droit privé et cornpar6 du QuBbec, 1990, au no 38. Voir, également, du même auteur, TmitP de responsa&iIit& m&dicale, Bordeaux, Les études hospitaliéres, 1996, 3 16 P. 12 La pratique clinique du médecin, incluant la multitude de gestes et de décisions qu'il prend à 1'6gard de son patient, est soumise aux diverses règles juridiques et déontologiques regissant la pratique médicale. Nous ies présenterons dans la prochaine section. b) Le cadre juridique A u plan juridique, le médecin doit d'abord adapter sa pratique en fonction des règles gén6rales qui gouvernent la protection de la personne humaine. A u Québec, la Charte des droits et liberrés de /a personne6 a élev6 au rang des droits fondamentaux les droits de la personnalité: droit à la vie, à la sûreté, a l'intégrité et à la liberté de sa personne7, droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa r6putation8, droit au respect de sa vie privées. - - 6 ~ . ~ C. . ~ C-1. S. 7 ~ d -aTt. , 1. 'Id.. art. 4. '/d., art. art. 5, et droit au respect du secret professionnel, art. 9. 13 Le Code civil du Qut?bec consacre aussi formellement le droit à l'inviolabilité et à l'intégrité de la personne l'article 10: "Toute personne est inviolable et a droit à son intégrité. Sauf dans les cas pr6vus par la loi, nul ne peut lui porter atteinte sans son consentement libre et éclairé. " C'est dans cette même logique que le consentement de la personne est obligatoire en matière de soins de santé:'' "Nul ne peut être soumis sans son consentement à des soins, quelle qu'en soit la nature, qu'il s'agisse d'examens, de pr6l6vementsf de traitements ou de toute autre intervention. Si l'intéressé est inapte donner ou à refuser son consentement à des soins. une personne autorisée par la loi ou par mandat donné en prévision de son inaptitude peut le remplacer. " II est important de noter que la notion de soins est définie de manière très englobante" afin de couvrir toutes espèces prélèvements, de traitements ou d'interventions, d'examens, de de nature médicale, psychologique ou sociale, requis ou non par l'état de santé, physique ou mentale. 1 0 ~ . c . ~ a. n . . 1 1 . Voir kgalement la Loi sur /esservices de santé et les services sociaux (ciaprés citée L.S.S.S.S.), L.R.U.. c. S-4.1, art. 9. ouve verne ment du Quebec, Commentaires duministre de laJustice, Tome 1. 1993, p. 12. 14 De même, un nombre imposant de dispositions législatives régissent la pratique quotidienne de la dispensation des soins: sans pour autant en aborder tous les aspects, nous en présentons ici les principales: la Loisur les services de santé et les services sociauxr2, la Loi sur l'accès aux documents des ' organismes publics e t sur la protection des renseignements personnels1 , la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé1 et la Loi sur le curateur public15. A ces lois s'ajoutent celles qui régissent la profession médicale a proprement parler: la Loi m&dicale16, le Code des professions", ainsi que la réglementation qui s'y rattache1*. 12supra,note 1O . l6L.R.~. c. M-9. Le Coll&ga des medacins a Bgalement, A titre d'ordre professionnel, certains pouvoirs relativement à la qualité des actes professionnels, notamment par ses inspections professionnelles et par son pouvoir drenqu&e. "L.R.o.c. C-26. '*voir plus particulierement B cet Bgard le Code de déontologie des mt?decins, supra note 2. C) Le cadre administratif Le médecin a une certaine liberté professionnelle vis-à-vis son patient. Par ailleurs, la loi et la jurisprudence ont défini et précisé le type d'encadrement de la pratique medicale en établissement de santé. Aussi, Ifautonomie du médecin doit s'examiner à la lumière de la Loisur les services de santé et les services sociaux: celle-ci régit son statut et sa pratique lorsqu'il oeuvre en milieu hospitalier. De même, il est important de mentionner que la pratique médicale en établissement de santé est régie par l'octroi de privilhges de pratique. Ceux-ci déterminent la nature et le champ des activités que le médecin peut exercer dans un département clinique. A cet égard, la loi prévoit que: "Lorsqu'un conseil des médecins, dentistes et pharmaciens est institué pour Ifétablissement, le directeur g6n6ral doit, avant de saisir le conseil d'administration de la demande, obtenir du conseil des médecins, dentistes et pharmaciens une recommandation portant sur les qualifications et la compétence du médecin ou du dentiste, le statut et les privilèges qui devraient lui être octroyés en vertu de sa nomination et sur les obligations qui peuvent être rattachées à la jouissance des privilèges octroyés par le conseil d'administration. " l g 1 9 ~ . ~ . ~ .supra ~ . ~ note . . 10. art. 237. 16 De même, le conseil des m6decins. dentistes et pharmaciens est chargé par la loi de contrôler et d'apprécier la qualité des actes des professionnels qui en sont membres2'. La loi offre un régime particulier de contrôle des activités des médecins au sein des établissements avec un droit d'appel auprès de la Commission des affaires sociales21. De même, la loi prévoit certains mécanismes internes au plan du contrôle disciplinaire de la pratique médicale en établissement. Ces divers textes législatifs fixent les paramètres de base en fonction desquels interviendra le jugement éthique du médecin. d) Le cadre éthique Le cadre éthique dans lequel évoluera le médecin dans un contexte de soins est principalement défini par le Code de déontologie des médecinsz2. Ce code traite principalement des conditions essentielles à la bonne pratique médicale, c'est-à-dire les devoirs envers le patient, les relations avec les "ld.. art 213 A 218. 211d.. art. 237 3 259. 2 2 ~ " p r anote 2. 17 confrères e t le Collège des médecins, ainsi que les devoirs sociaux d u médecin. Quelques dispositions de ce code demontrent que le médecin bénéficie d'une certaine marge de manoeuvre dans I'accomplissement de son travail e t qu'il doit porter un jugement Bthique sur diverses situations qu'il pourra rencontrer dans l'exercice de sa profession. Citons, par exemple: Article 2.01.O1 "Le médecin a le devoir primordial, à l'occasion de l'exercice de ses fonctions médicales, de protéger la santé et le bien-être des individus qu'il dessert tant sur le plan individuel que collectif. " Article 2.03.09 "Le médecin doit chercher a établir une relation de confiance mutuelle entre lui-même et son patient et s'abstenir d'exercer sa profession d'une façon impersonnelle." Article 2.03.23 "Le médecin doit refuser sa collaboration ou sa participation à tout acte médical qui irait à l'encontre de l'intérêt du patient." Mentionnons également que le médecin oeuvrant en établissement de santé doit respecter le code d'éthique de I'btablissement. Ce code indique "les droits des usagers et les pratiques e t conduites attendues des employés, des stagiaires, y compris des résidents en médecine. e t des personnes qui exercent leur profession dans un centre exploit6 par Ir6tablissernent à l'endroit des usagers23". Dans plusieurs établissements existe également un comité d'gthique qui offre au médecin certaines balises éthiques pouvant orienter sa pratique professionnelle. Bien qu'aucune loi n'exige la mise sur pied d'un tel comité, celui-ci peut s'avérer d'une aide précieuse pour formuler des directives générales d'orientation, ou pour conseiller le médecin lors de décisions difficiles au plan de la bioéthique. Les obligations et les devoirs mutuels caractérisant la relation médecinpatient peuvent être examines selon quatre perspectives que nous présenterons maintenant. 2 3 ~ . ~ . ~ . supra ~ . ~ .note . 10, art. 233. 2%oir notamment il ce sujet M.-H. Parireau. Hdpitaux et ethigus. RRoles et defis des comités d'éthique clinique, Ste-Foy, Presses de 18Universit4Laval, 1995. B) Les obligations et les devoirs mutuels Afin que la relation médecin-patient soit source de confiance mutuelle, le médecin, tout comme son patient, doivent observer. de part et d'autre, une série d'obligations et de devoirs. Cet échange est une relation humaine authentique dont Charles ~ r i e da~ ~ identifi6 les quatre principales composantes: l'humanité, l'autonomie, la transparence et la fidélité. Ces caractéristiques sont les qualités essentielles qui doivent guider les agissements et les attitudes des medecins et des patients, les uns envers les autres. Dans cette section, nous étudierons particuliérernent les quatre principaux axes créateurs d'obligations inhérentes à la dispensation de soins de santé: l'information et l'obtention du consentement, l'obligation de soigner adéquatement. d'assurer le suivi approprie ainsi que de respecter le secret professionnel. Ces obligations sont reconnues, tant par la jurisprudence que par la doctrine québécoises. et font partie integrante du contrat de soins intervenant entre le patient et son m6decin. 2 5 ~ Fried, . Medical Experimentaiion. Personal lntegrity and Social Policy, Amsterdam, Oxford, North Holland Publishing Company, 1974. a) L'obligation d'informer et d'obtenir le consentement La transmission de l'information au patient est fondamentale afin que celui-ci soit en mesure de donner son consentement de façon libre et éclairée2% C'est ainsi que le médecin doit donner à son patient toute I'information nécessaire afin que ce dernier connaisse son diagnostic, les aspects principaux du traitement (dont les risques), les alternatives2', les conséquences prévisibles d'un refus de traitement, de même que toutes les informations susceptibles d'influencer sa décision. La Cour Suprême du Canada a d6terminé la nature des informations que le médecin doit donner au patient relativement au traitement médical dans les arrêts Hopp c. fepp2* et Reibl c. ffughes2'. Ces informations correspondent, selon la Cour, à ce que toute personne voudrait connaître dans les mêmes circonstances, soit la nature du traitement, sa gravité, ainsi que les risques importants ou inhabituels. -- - - - - - - --- 2 6 ~ . ~ . art. ~ . ,IO. 2,art. 2.03.29 et L.S.S.S.S.. supra note 10, an. 8. 28[1 9801 2 R.C.S. 192. 29tl 9801 2 R.C.S. 880. 2 7 ~ u p r anote 21 Ces décisions, provenant de provinces canadiennes de common law, ont été appliqu8es diff6remment en droit québécois: selon la Cour, non seulement le médecin doit-il donner toutes les informations pertinentes, mais il doit de plus les adapter en prenant en considération la personnalité et les caractéristiques individuelles du patienSO. En pratique, le médecin a donc intérêt à dévoiler les risques3': -probables et pr6visibles; -rares, si graves e t particuliers au patient; -connus de tous, si particuliers au patient; -importants, si graves et déterminants dans la décision; -accrus, lorsqu'un choix est possible; -tout risque connu, dans le cas de la recherche ou d'un protocole expérimental. Une fois les informations validement transmises, le médecin devra s'assurer d'obtenir le consentement libre et éclairé du patient. Comme nous 3 0 ~ o iAr cet 6gard LaferriBe c. Lawson, [199 11 1 R.C.S. 541, Chouinard c. Landry, 119871 R.J.Q. 1954 (C.A.), Schien c. Dodds, [1981] C.S. 589, confirmé par la Cour d'Appel, [1986] R.J.Q. 2623, Pelletier c, Roberge, (1991) R.R.A. 726 (C.A.). 3 1 ~ .Lesage-Jarjoura. J. Lessard, S. Philips-Nootens, &?ments de responsabilité civile médicale, CowansviHe, Yvon Mais, 1995, à la p. 121. Voir également, F. Tôth, "l'obligation de renseignement du médecin en droit civil québécois", dans Responsabilït# médicale et hospitalière: aspects juridiques et éthiques, The Canadian Institute, octobre 1990, chap. 3. l'avons vu, le Code civil du Quebec en fait une obligation sine qua nonJ2.Le Code de déontologie des médecins precise, de plus, à cet égard que: "Sauf urgence, le médecin doit, avant d'entreprendre une investigation, un traitement o u une recherche, obtenir du patient ou de son représentant ou des personnes d o n t le consentement peut être requis par la loi, une autorisation libre et éclairée. " Dans la pratique courante, on peut légitimement s'interroger sur la réelle portée du consentement éclair6 dans un monde de soins de plus en plus spécialisé e t morcelé. En effet, les spécialités de la médecine ne sont pas, pour la plupart, orientées vers la personne dans son ensemble: elles sont plutôt définies en fonction de pathologies liées un organe spécifique ou à un aspect de la maladie. Dans certains cas et en certaines circonstances, le privilège thérapeutique, l'urgence, la renonciation du patient à recevoir l'information pourraient dispenser le médecin d'exécuter son devoir d'information. Ce sera, toutefois, au médecin qu'il incombera éventuellement de justifier le défaut ou l'insuffisance de la d i v u ~ g a t i o n ~ ~ . 3 2 ~ . ~ . ~ art. . 8 10. Cet article est toutefois module par l'article 13 C.C.Q. gui prkvoit, au premier paragraphe, qu'"en cas d'urgence, le consentement aux soins médicaux n'est pas nécessaire lorsque la vie de la personne est en danger ou son intégrité menacée et que son consentement ne peut être obtenu en temps utile." 3 3 ~ .Mdnard -f. et D. Martin, Responsabilité médicale pour fa faute d'autrui, Cowansville, Yvon Blais, 1992, à la p. 17. 23 Sauf exceptions", le consentement n'a pas à être constaté par écrit. II est, toutefois, u n processus continu3', c'est-&dire qu'il peut être retiré en tout temps par le patient, celui-ci devant être informe de toute nouvelle information pouvant affecter sa d6cision initiale. Lorsque le médecin a bien informé le patient et que ce dernier a consenti aux soins en toute connaissance de cause, il doit procéder à la prestation des soins convenus: c'est l'obligation de soigner. b) L'obligation de soigner adéquatement. Comme nous le mentionnions plus tôt, le médecin a, à l'égard de son patient, une obiigation de moyens: la survenance d'une complication ou d'un préjudice n e le rendra pas automatiquement responsable; au contraire. c'est plutôt au patient de démontrer que le médecin a commis une faute? Ainsi, le médecin ne doit pas faire preuve de maladresse, d'imprudence. 3 4 ~ consentement e &rit est requis dans les situations où l'atteinte I'intbgrité corporelle est importante. De meme, en vertu du Réglernent sur l'organisation et l'adminktration des établissements, 0. 1320-84, (1984) 116 G.O. 11, 2745, art. 52.1, une attestation écrite est &gaiement requise pour les traitements comportant une anesthésie ou une chirurgie ou pour certaines situations definies à caractére plus invasif telles la bronchoscopie, l'angiographie et la myélographie. C'est également le cas pour les dons d'organes ou l'expérimentation en vertu de l'article 24 du Code civil du Québec. 3S~iarlarie/loc. Schacter, [1993] 2 R.C.S. 1 19, 136. 36~. C. MeIlen, (195 7 ) B. R .389; Hdpital GtWraI de la rggion de I'Amiante, 11989) C.A. 56 7. 24 d'inattention, de négligence ni d'un manque de diligence3' dans les soins qu'il dispense. C'est d'ailleurs dans cet esprit que le Code de déontologie des mddecins prévoit, à l'article 2.03.1 3, que: "Le médecin doit s'abstenir de garantir, directement ou indirectement, express6ment ou implicitement, la guérison d'une maladie." Le médecin doit donc faire preuve de vigilance dans tous les actes professionnels qu'il pose, tant au niveau de l'établissement du diagnostic, qu'au niveau du traitement proprement dit. Le médecin doit également agir conformément aux données actuelles de la science et maintenir ses connaissances j o ~ ? ~Avec . 1'6volution rapide de la technologie, il n'est pas rare qu'il dispose de plusieurs options thérapeutiques pour un même problème. Ces options seront toutes jugées adéquates en autant qu'elles soient admises par au moins une partie de la communauté médicale39. 3 7 ~ Bernardof . et P. Kouri, La responsabili4 civile mt?dica/e, Sherbrooke, Revue de droit de I'Universitd de Sherbrooke, 1980, à la p. 195. 38~upn, note 2, an. 2.03.14 et 2.03.1 5. Voir Bgalernent l'article 5 L.S.S.S.S.. supra nota 10, art. 5 qui prévoit que "Toute personne a le droit de recevoir des services de sant4 et des services sociaux adéquats sur les plans B la fois scientifique, humain et social, avec continuité et de façon personnalis6e." 3 9 ~ u p nnote , 3 1 . b la p. 207. En effet, la m6decin conserve tout de même sa liberté professionnelle: "Mais si elle est encadrée de devoir, la liberté de traitement n'en est pas moins, chez le médecin, un principe de notre droit. Elle s'exerce par un choix, lie ZI des risques, qui, tout ZJ la fois grandissent la responsabilité morale du médecin et limitent sa responsabilité de fait. Sans le choix entre ces risques, aucune médecine libre ne serait possible. "" Compte tenu de l'ensemble des possibilités qui s'offrent, tant au patient qu'au professionnel, la loi prévoit que le patient "a le droit de participer à toute décision affectant son état de santé ou de bien-être4'". Une fois le traitement en cours, plusieurs actions se succèdent dans le temps à l'intention du patient. Le médecin a alors l'obligation d'assurer le suivi approprié. 4 0 ~ Savatier. . JuriscIasse~r,Responsabili4 civile, Paris, Editions techniques, tome 4, nos 29- 30, à la p. 4. cet article, que l'usager a le 4 ' ~ . ~ . ~supra . ~ . note ~ . ,10. art. 10. Cette Loi prevoit &me, droit de participer à l'élaboration de son plan d'intervention ou de son plan de services individualisés ou à toute modification de ces plans. Mentionnons également l'article 4, al. 4, qui prévoit que "l'usager doit, autant que possible, participer aux soins et services le concernant." c ) L'obligation d'assurer le suivi appropri6 Tant que le médecin sera consid6r6 comme le médecin traitant42, il aura, afin de mener sa tâche à bien, l'obligation de suivre son patient, c'eat-àdire d'exercer le contrôle nécessaire sur l'évolution de son état de santé43. Dans la majorité des cas, la relation patient-médecin est intuitu personae, puisqu'elle repose souvent sur un lien de confiance de la part du patient envers les qualites professionnelles e t humaines de son médecin. Même si, dans la pratique courante, le mddecin ne pose pas tous et chacun des actes envers le patient, il doit en assurer la supervision, qu'on pense aux actes medicaux délégués, aux actes infirmiers ou encore aux gestes de la pratique médicale posés par les stagiaires e t les résidents en médecine. A cet égard, les professeurs Bernardot et Kouri proposent de renseigner leurs patients: 42~ergstrornc. G., [1967] C.S. 51 3. 43~apointec. HBpital Le Gardeur,[19921 1 R.C.S. 351; Lswson c. Lefeniére, [1991] 1 R.C.S. 541. "(...)afin de leur permettre d'accepter ou de refuser de se faire soigner par des personnes autres que leur médecin traitant. La sincérité des relations entre le médecin et son patient est la pierre angulaire du contrat de soins et à ce titre doit être soigneusement sauvegardée. "" Aussi, le médecin doit demeurer disponible son patient. D'ailleurs, son Code de déontologie prévoit qu'il doit "faire preuve à l'égard de son patient d'une disponibilité et d'une diligence raisonnable^?^ Pour le médecin, Irintensit6 de l'obligation de suivi varie d'un type de pratique à l'autre. En effet, cette obligation s8Bvaluediffdremment selon que le médecin exerce en milieu hospitalier ou en cabinet privé ou. par exemple, selon le type de spécialité qu'il pratique. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que le patient a non seulement des droits mais aussi des obligations. II a le devoir de collaborer a son traitement, c'est-à-dire de fournir au medecin tous les renseignements lui permettant de le traiter adéquatement et de se soumettre aux soins indiqués une fois son accord donné. 4 4 ~ Bernardot, . R. Kouri, La responsabilité civile médicde, supra note 37, B la p. 169. 4 5 ~ u p nnote , 2, art. 2.03.46. 28 L'obligation de suivre a également un terme. Celui-ci peut être temporaire. dans le cas d'un remplacement. par exemple. ou permanent lorqu'il y a transfert a un confrére ou que le patient obtient son congé. Les seules raisons qui peuvent mettre fin à cette obligation personnelle du médecin sont les suivantes: "a) la décision du patient; b) le retrait du médecin à l'égard du patient lorsque le patient ne collabore plus, lorsque l'obligation de suivre est terminée pour les fins du traitement ou lorsque le patient demande des soins inutiles, contraires à l'ordre public ou un traitement aldatoire. Si le médecin résilie unilatéralement le contrat. il ne peut cependant le faire qu'à un moment non préjudiciable pour le patient en s'assurant qu'un autre médecin peut assurer le suivi; c) le transfert du patient, avec son accord, à un spécialiste ou un autre médecin4=." A ce moment. l'obligation de suivre prend fin, en même temps que le contrat médical d'ailleurs. "J.P. Menard et D. Martin, Responsabi/ïtd médicele pour la faute d'autrui, supra note 33. d) L'obligation de respecter le secret professionnel Le respect du secret professionnel est une obligation autant légale que déontologique pour le madecin. En effet, la Charte des droits et libertth de la personne4' du Québec érige en droit fondamental le respect du secret professionnel. Aussi, I'article 9 se lit ainsi: "Chacun a droit au respect du secret professionnel. Toute personne tenue par la loi au secret professionnel et tout prêtre ou ministre du culte ne peuvent, même en justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont ét6 révélés en raison de leur état ou de leur profession, à moins qu'ils n'y soient autorisés par celui qui leur a fait ces confidences ou par une disposition expresse de la loi.(. ..) " De même, l'article 42 de la Loimt?dica/eédicte que le médecin "ne peut être contraint de déclarer ce qu'il lui a été révélé à raison de son caractère professionnel. " Ceci est complét6 par le Code de d6ontologie des médecins4' qui prévoit que: 4 7 ~ u pnote a 6. Voir Bgalernent l'article 60.4 du Code des professions qui prevoit dgalernant l'obligation au secret professionnel. "supra nota 2, art. 3.01. "Le médecin doit garder secret ce qui est venu à sa connaissance dans ['exercice de sa profession; il doit notamment s'abstenir de tenir des conversations indiscrètes au sujet de ses patients ou des services qui leur sont rendus ou de rév6ler qu'une personne a fait appel ses services, à moins que la nature du cas ne l'exige." De même, "Le medecin doit prendre les moyens raisonnables à l'égard de ses employés et du personnel qui l'entoure pour que soit préservé le secret professionnel. "49 L'étendue du secret professionnel a fait Ifobjet de plusieurs discussions dans la jurisprudence et dans la doctrines0. Toutefois, ['état actuel du droit est à l'effet que le secret professionnel s'&end de façon large à tout ce qui vient à la connaissance du médecin dans le cours de la relation th6rapeutique' soit par les révélations et faits qui lui sont rapport&, soit par les constatations qu'il peut faire lui-même lors de l'examen physique. de l'investigation ou des examens de Iab~ratoire.~' 49/d., art. 3.02. 5 0 ~ o iBr cet effet, Cordeau c. Cordeau, [l984] R.D.J. 201 (C.A.), Godbout c. Lehouil/ier, J.E. 82-605 (C.S.), Descarreaux c. Jacques, [19691 B.R. 1 109. Au plan de la doctrine, voir également: L. Ducharme, "Le secret mddical et l'article 9 de la Chaae des droits et libertés de /a personne", (1984) 44 R. du B. 955, notamment au sujet de la controverse entre les faits "révélés" et "constatés". 51J.-L. Baudouin, "Le secret professionnel du mddecin, son contenu, ses limites", (1963) 41 Can. Bar. Rev. 505-506; N. Vallières, "Le secret professionnel inscrit dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec" (1985) 26 C. de D. 1019; Y.M. Morissette et D.Q. Schuman, "Le secret professionnel au Québec: une hydre h trente-neuf têtes rôde dans le droit de la preuve", (1984) 25 C. de D. 50. II va également de soi que le médecin est tenu au respect des règles usuelles regissant la confidentialité du dossier de son patient.52 D'ailleurs, I'article 19 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux prévoit que le dossier d'un usager est confidentiel e t que nul ne peut y avoir accès "sans autorisation" .53 Il est important de mentionner que le secret professionnel est un privilège excIusivement dévolu au patient e t non au médecin: c'est donc le patient ou son représentant qui peut delier le médecin de son secret.54 5 2 ~ a n sdisserter sur leur contenu, mentionnons que les lois et rhglements suivants s'appliquent au respect et aux règles de tenue et de conservation du dossier de l'usager: Loisur les services de santé et les services sociaux, supra note 1 0 , Loi sur I'accés aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, supra note 1 3, Loi sur les archives, L. R .Q., c. A-2 1-1 ; Réglement sur I'org8nr;îation et l'administration des Btablissements, supra note 34, Réglement concernant /a tenue des dossiers d'un médecin, R.R.Q., 1981, c. M-9, r. 19. 5 3 y~ a~toutefois, certaines exceptions a ce principe. Voir notamment l'article 3 de la Loisur I'accés aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, supra note 13, l'article 19 de la Loi sur les services de ssntt4 et les services sociaux, supra note 10, e t l'article 60 du Réglement sur l'organisation et l'administration des étabîissements, supra note 34. 5 4 ~ . - ~Menard . et D. Martin, La responsabiIit4 medicale pourla faute d'autmi, supra note 33, à la p. 17. La loi prévoit cependant certaines exceptions justifiant la divulgation d'informations couvertes par le secret professionnel sans qu'une faute ne puisse être reprochée au médecin. Voir, par exemple, le Code de déontologie des médecins, supra note 2, art. 3.04, Loi sur la protection de la santé publique, L.R.Q. c. P-35, Loi sur ta protection du malade mental, L.R.O. c. P-4 1 , Loi sur la protection de la jeunesse, L. R. Q. c. P-34.1. II La relation m6decin-patient dans un contexte de recherche clinique Nous venons de voir les principaux aspects Bthiques et juridiques de la relation médecin-patient dans un contexte de relation soignant-soigné. Par la dispensation des soins de santé, il y a lieu de penser que le médecin et son patient auront une occasion privilégibe de forger, de part et d'autre, une certaine relation de c0nfiance.5~ Or, il existe certains cas où le médecin est appelé à revêtir un double statut à l'égard de son patient. C'est justement le cas, dans le contexte de la recherche clinique, alors qu'en plus d'être un soignant, le médecin est également un chercheur, lié à toutes les régles qu'exige la rigueur scientifique, de même que par diverses contraintes économiques, politiques et sociales. Qu'en est-il de cette relation privilégiée entre le médecin et son patient en matière de recherche clinique? Au-delà de l'avancement de la science, le médecin ne demeure-t-il pas le conseiller privilégié capable d'appliquer la connaissance médicale dans le meilleur intérêt de la personne malade? 5 5 ~ e cn'est. i toutefois, pas toujours le cas dans le contexte actuel de la pratique de la médecine. Plusieurs personnes n'ont pas de "médecin de famille" qu'elles consultent de façon régulière. De plus, I'dmergence de cliniques sans rendez-vous et du virage ambulatoire atteignent de façon certaine le caractère traditionnellement intuitu personae de la relation médecin-patient. 33 N'oublions pas que le milieu de la recherche est particulier en ce qu'il amène, par la nature même de ses activités, une certaine part d'inconnu, autant pour le chercheur que pour le patient. Le médecin-chercheur est ainsi placé devant une certaine dualité: d'une part, il est directement responsable de la rigueur scientifique du projet de recherche et, d'autre part, il se doit de respecter toutes e t chacune des règles de bonne pratique professionnelle prévues notamment par son Code de déont ~ l o g i e ~ ~ . Cette importante dualité, jusqu'ici peu analysée au Québec, devient essentielle à examiner, d'autant plus qu'un nombre sans cesse croissant de soins sont actuellement dispensbs dans le cadre de protocoles de recherche. C'est pourquoi nous porterons l'analyse de cette seconde partie sur la relation patient-m6decin dans un contexte de recherche clinique. Nous ferons cette étude dans une perspective comparée en examinant d'abord le contexte dans lequel la recherche se déroule, particuliérernent sous ses aspects juridique, éthique et clinique. En second lieu, nous étudierons le rôle du médecin face aux questions qui touchent le respect des personnes en matière de recherche clinique. Cette analyse sera faite en parallèle avec les quatre 5 6 ~ u p r note a 2. grands axes présentés en première partie. A) Le contexte de la recherche clinique a) Le cadre juridique La recherche clinique qui se déroule actuellement au sein des établissements de santé québ6cois s'effectue dans un contexte de ressources limitées e t de haute compétition. Cette concurrence existe non seulement entre les chercheurs, mais également entre les promoteurs des projets de recherche e t les établissements de santé qui supportent ces activités. Ce climat de haute compétition peut ainsi engendrer certains écarts de conduite. La nécessité de développer u n produit rentable, d'obtenir une certaine notoriété ou de contrer un rival, par exemple, peut amener certains comportements non adéquats dans la tenue d'une activité de recherche. En outre, au Canada, la recherche clinique est encadrée par des lois d'ordre général. Par ailleurs, chacune des provinces a la compétence, en vertu de la L o i constitutionnelle de 7867, d'édicter des lois particulières en matière de santé sur son t e r r i t ~ i r e . ~ ' II faut, par ailleurs, mentionner que certaines lois fedhrales encadrent des 5 7 ~ ocon~titutionnelle i de 7867, 30 & 31 Victoria, ch. 3 (R.-U.), art. 92(71. 36 situations spécifiques. Par exemple, d8s qu'un projet de recherche met en cause un médicament en phase expérimentale, le chercheur est assujetti à la Loi sur les aliments e t drogues5*, de même qu'à la réglementation qui la complète. II faut également souligner l'existence des lignes directrices5' des trois Conseils, de même que de la réglementation de Santé canadaso au sujet de la tenue d'essais cliniques. Ces normes, bien que n'ayant pas valeur de loi, sont très importantes dans le domaine de la recherche clinique canadienne. De même, lorsqu'un projet est financé par un organisme américain, les chercheurs sont tenus de respecter la réglementation bdictée en vertu d u Public Service Act contenu dans le Code o f Federal ~egulations. Au Québec, la Charte des droits et libertés de la personnes2 prévoit une série de droits fondamentaux qui devront être respectés.63 5 9 ~ o n s e ide l recherche médicales d u Canada. Conseil de recherches en sciences humaines d u Canada, Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie d u Canada. (ci-aprés Les troh Conseils), Code d'éthique de la recherche avec des sujets humains, préparé par le Groupe de travail des trois Conseils. juillet 1997. 6 0 ~ o i rnotamment, Sant6 Canada, Gestion des donnees cliniques sur /'innocuit& des médicaments, Ottawa, Approvisionnement e t services, 1996. " ~ i t l e 45. Part 46. Protection of Human Subjects. 6 2 ~ u p r anote 6. 6 3 ~ o inotamment r les articles 1 e t 4 de la Chane B cet effet, supn, notes 7 e t 8. 37 Le Code civil du Québec prévoit quelques regles specifiques au domaine de la recherche clinique à ses articles 20 26. Bien entendu, ces articles se lisent en conjonction avec les articles 10 et 11 C.c.0. que nous avons analysés en première partie. L'article 20 du Code civil du Québec prévoit ainsi que: "Une personne majeure, apte à consentir peut se soumettre à une expérimentation pourvu que le risque couru ne soit pas hors de proportion avec le bienfait qu'on peut raisonnablement en espérer."64 Ces nouvelles balises kgales du Code civil du Québec, entrées en vigueur le 1er janvier 1994, illustrent bien la prdoccupation du ldgislateur à l'égard de l'expérimentation. II convient également de mentionner que le conseil d'administration d'un établissement de santé québécois doit adopter un règlement sur l'organisation de l'enseignement et de la recherche au sein de son é t a b l i s ~ e m e n t . ~ ~ La Loi sur les services de santé et les services sociaux prévoit, 6411 est permis de penser que le pronom indefini "on", dans l'expression "qu'on peut raisonnablement en espérer", ne référe pas de façon précise à la personne sur laquelle la recherche se réalise, mais plutôt à la sociétd en gdnérai. Nous inférons cette interprétation de l'article 21 alinéa 2 C.C.Q. qui prdvoit précisément, dans le cas du mineur et du majeur inapte, qu'il doit y avoir un bénéfice pour la sant6 de la personne qui est soumise à l'expérimentation. 6 5 ~ ~ g l e m esur n t l'organisation et I'adminktration des dtabfissernents, supra note 3 4 , art. 6 al. 9. 38 d'ailleurs, une certaine procédure afin que le chercheur puisse utiliser, pour des fins d'expérimentation, des médicaments qui ne figurent pas sur la liste dressée dans ce but par le ministre. II en est de même pour ce qui concerne l'avis de conformité émis par le gouvernement fédbral en application de la Loi sur les aliments et drogues.66 Le Code civil du Quebec établit des distinctions entre certains groupes de sujets. II permet ainsi l'expérimentation sur les personnes inaptes et les mineurs mais impose certaines conditions supplémentaires6'. Le Code aborde Bgalement différemment l'expérimentation selon qu'elle est effectuée sur un groupe et sur un individue8. De plus. un statut particulier est accordé aux "soins innovateurs". Le dernier alinéa de l'article 21 C.C.Q. prévoit que: "Ne constituent pas une expérimentation les soins que le comité d'éthique du centre hospitalier concerné considère comme des soins innovateurs qui sont requis par l'état de santé de la personne qui s'y soumet." 6 6 ~ . ~ . ~ supra . ~ . ~note . 8 10, an. 1 16 et 1 17. Voir dgalement le paragraphe 4 de l'article 505 qui autorise le gouvernement à d6terminer les cas, conditions et circonstances suivant lesquels le centre hospitalier universitaire ou l'institut de recherche reconnu par le Fonds de la recherche en sant6 du Québec peuvent fournir un médicament. 6 7 ~ r t .21 C.C.O. "ld. 39 Qu'est-ce qu'un soin innovateur? On pourrait assimiler ce concept à celui qui a 6t6 adopte par la Commission nationale sur la protection des sujets humains (aux États-unis) sous l'expression "thérapie innovatrice" (innovative t h e r a ~ y ) ~Le ~ . concept de "thérapie innovatrice" est une méthode comportant encore une bonne part d'incertitude quant 3 son efficacité e t son innocuité, non suffisamment expérimenthe sur le plan scientifique e t visant à traiter ou soulager un patient. II se distingue ainsi de la "recherche" qui vise avant tout à accroître les connaissances. Cette distinction entre l'expérimentation et le soin innovateur n'est pas toujours évidente dans la pratique courante. En cons6quencer le l6gislateur québécois a, pour la première fois en 1994, reconnu une certaine autorité aux cornit& d'6thique70 des centres hospitaliers, leur donnant ainsi la possibilité de distinguer les soins innovateurs de l'expérimentation. II demeure toutefois que le médecin devra entourer les soins innovateurs de toutes les précautions nécessaires, notamment au plan de la divulgation 6 9 ~ Gagnon, . Les comités d8&hique. La recherche rnddicafe 9 /%preuve, 1996, Ste-Foy, Les Presses de l'université Laval, p. 28. " ~ e ldgislateur ne precise pas s'il s'agit 18 du cornite d'ethique clinique ou s'il s'agit du comité d'éthique de la recherche. Nous sommes d'avis qu'il s'agit de la deuxiéme possibilité, étant donné que le cornit6 d'éthique de la recherche est un prérequis à la tenue de telles activités en vertu de la Ddcfaration d'Helsinki dont le Canada est signataire. des risques7'. A notre avis, le médelcin oeuv rant dans le domaine de la recherche es tenu au moins aux mêmes obligations que tout autre médecin n'oeuvrant pas dans le domaine de la recherche. Même si le chercheur a des obligations suppl6mentaires à respecter a titre de scientifique, celles-ci ne devront en aucun temps occulter ses devoirs d6ontologiques à It6gard de son patient. Le médecin-chercheur doit tout moment être en mesure d'opérer une dissociation entre les objectifs thérapeutiques et les objectifs scientifiques d'une étude. Dans c e t exercice essentiel, l'éthique entre en jeu: le chercheur sera appelé à opposer les int6rêts immédiats des sujets aux autres objectifs, finalités et bénéfices inhérents à son projet de recherche. Cette dualité fait l'objet de la section suivante. b) Le cadre éthique "Si le fait d'enfreindre la loi est ghéralement contraire à It6thique, il ne suffit pas de s'y conformer pour s'acquitter de ses r e s p o n ~ a b i l i t é s . ~ ~ " . "P. Lesage-Jarjoura, J Lessard et S. Philips-Nootens, Eléments de responsabili4 médicale, Le droit dans le quotidien de la médecine, supra note 3 1 , à la p. 163. es trois Conseils, Guide d'éthique de la recherche avec des s M t s humains, prépar6 par le groupe de travail des trois Conseils, mars 1996, à la p. 12. 41 Si la loi est un repère incontournable dans la mesure où elle reflète un certain nombre de valeurs &hiquesr elle s'ajuste généralement lentement à l'innovation scientifique, à la nouveauté et à l'évolution des valeurs. Avec les progrès de la biotechnologie v6cus ces dernières années, une réflexion s'impose quant aux valeurs qui devraient guider les chercheurs dans un contexte où la science évolue plus rapidement que les normes officielles régissant l'usage des connaissances et des outils récemment acquis. A cet égard, le Canada est signataire de plusieurs traités internationaux (Code de N~remberg'~,Déclaration d'Helsinki", Déclaration universelle des droits de l'Homme, etc.) et est membre d'organisations internationales qui prévoient diverses exigences Bthiques en matiére de tenue d'essais cliniques. Certains outils nous permettent d'établir des normes de conduite dans le domaine de la recherche clinique. Les cornites d'éthique de la recherche7= sont un des modes de régulation de la pratique médicale. En effet, la Déclaration d'Helsinki prévoit à l'article 2 que: 73~eproduitdans G. Hottois et M.-if. Parizeau, Les mots de k, bioéthique, Bmxelles. Erpi Science, 1993, 375 p. 741bid. 7 5 ~ comite e demande par la Ddclaration d'Helsinki prend le nom d'lnstitutional Board Review aux Etats-Unis e t de Comité consultatif de protection des personnes dans la recherche biom4dicale en France. On doit ici rappeler la différence entre le comité d'éthique pour la recherche et le cornite d'éthique clinique. Ce dernier a également un r6le d'évaluation éthique, mais strictement au plan de l'activité clinique, c'est-&dire l'occasion de la dispensation usuelle des soins de santé aux patients. "Le projet et l'exécution de chaque phase de l'expérimentation portant sur l'être humain doivent être clairement definis dans un protocole expOrimental qui doit être soumis pour examen, commentaire et conseil à un comité désigné spécialement à cet effet, indépendant du chercheur et d u sponsor, à condition que la création de ce comité indépendant soit conforme aux lois et règlements en vigueur où s'effectuent les recherches expérimentales. Ces comités doivent se conformer au Code d'éthique de la recherche avec des sujets humains77 des trois Conseils qui apporte des balises fondamentales relativement au rôle et au fonctionnement des comités d'éthique. Le médecin est également aux prises avec un certain conflit d'intérêts entre ses devoirs en tant que médecin et ses obligations en tant que scientifique. L'argent ou le prestige que rapporte la recherche, les intérêts professionnels e t commerciaux, les promotions possibles sont autant de situations où il devient difficile de départager les intérêts spécifiques de la recherche de ceux, légitimes, du patient. II est d'ailleurs important de mentionner que le Code de déontologie des mt?decins7*prévoit à cet égard que: 76~6clarationd'Helsinki, reproduit dans G. Hottois et M.-H. Parireau. Les mots de la bioéthique. supra note 73. 7 7 ~ etrois s Conseils. Code d'4thique de la recherche avec des sujets humains. supra note 59. 78~upn, note 2, art. 2.03.49. "Le médecin doit sauvegarder en tout temps son indépendance professionnelle et éviter toute situation où il serait en conflit d'intérêts, notamment lorsque les intérêts en présence sont tels qu'il pourrait être porté B préferer certains d'entre eux à ceux de son patient ou que son intégrité ou sa loyauté envers celui-ci pourraient être affectées. " Drailleurs, son Code de d é o n t ~ l o g ~ ~ p r é v o même it certaines obligations suppl6mentairese0 relatives au contexte de la recherche: "Le médecin a le devoir de suivre une méthode scientifique et justifiée par la nature e t le but de sa recherche portant sur des sujets humains8' ." Dans un contexte d'expérimentation, il ne faut pas perdre de vue l'aspect bénéfique des soins qu'il a le devoir de prodiguer à son patient. Malheureusement, aucune disposition législative explicite n'existe Zi l'heure actuelle à cet effet en droit québécois. En France, par exemple. le Code de déontologie médicalea2accorde 79~upm note 2. ''voir dgalernent le Code de d6ontologie de l'Association médicale canadienne qui p r h o i t dgalernent certaines dispositions particulières B la recherche clinique aux articles 25, 26 et 27, Can. Med. Assoc. J., 155(8), 15 octobre 96. *'supra note 2 , art. 2.03.22. Voir ggalement l'article 5, L.S.S.S.S. supra note 10, art. 5. 820&ret du Gseptembre 7995portant Code de deontologie mddicae, art. 15. reproduit dans J.-P. Almeras et H. Péquinot, La déontoiogré médicale, Paris, Litec 1996, 308 p. Voir Rgalement la "Loi Huriet ", Loi du 20 décembre 1988 vot6e à l'initiative des sénateurs Huriet et Sérusclat portant sur la protection des personnes qui se prhtent à une recherche biomédicale. 44 un rôle proactif au médecin-chercheur l'endroit de son patient, tenant ainsi compte du caractère intuitu personae de leur relation: "Le médecin traitant qui participe en tant qu'investigateur doit veiller à ce que la réalisation de 18&ude n'altère ni la confiance qui le lie au patient, ni la continuité des soins."83 Nous sommes d'avis que cette façon de faire est souhaitable et pourrait avantageusement être intégrée à l'actuel Code de déontologie des médecinss4 québécois. En effet, étant donné qu'il y a toujours une part d'ignorance. une certaine incertitude à la base de tout projet de recherche, il serait opportun de d6finir davantage dans ce code, la nature de la relation médecin-patient dans ce cadre d'activité spacifique. On pourrait même aller plus loin et souhaiter, pour l'ensemble du Québec, un cadre législatif, réglementaire ou normatif permettant d'assurer une certaine uniformité dans l'élaboration et la conduite des projets d'expérimentation. La place grandissante de la recherche dans les hôpitaux, le raffinement des méthodes expérimentales, l'utilisation de procédures requérant la sélection des sujets de façon aldatoire ou la suspension du traitement feront en sorte que cette dualité médecin-chercheur demeurera un sujet litigieux dont les 83/d- 84~upranote 2. conséquences sociales et médicales semblent encore sous-estimées. ~ e a t c h ~ ~ i ~ uconcrbtement stre la complexité des problèmes éthiques rencontrés par le médecin-chercheur: "We do not need an ethic that will tell us that patients should be told of obvious, serious risks of side effects from a multi-drug chemiotherapeutic trial; we know that. We need some mechanism for deciding just how many of the countless smaller risks and concerns of the researcher should be discussed with the patient. We do not need an ethic that will tell us that it is immoral to continue t o give a placebo after a drug has been shown beyond doubt to be effective. We need an ethic that will deal with the stickier problem of when to stop a protocol prematurelyn. L'éthique doit et devra jouer un rôle fondamental dans la conception des protocoles de recherche, ainsi que dans leur mise en application. Cependant, bien que plusieurs comités d'éthique soient mis en place dans la grande majorit6 des Btablissements exerçant des activités de recherche, ceux-ci ne jouissent d'aucune reconnaissance légale formelle. En effet, les Iégislateurs, canadiens et québécois, bien qu'ayant édicté certaines règles et directives relativement B l'expérimentation, ont laisse une '=R.M. Veatch, The Patient as Partnec A Theory of Human Experimentation Ethics, Bloomington, Indiana University Press, 1989, à la p. 3. 46 grande place B l'interprétation des principes moraux guidant les divers acteurs de la recherche. Les chercheurs ont certes besoin d'une certaine liberté d'action afin d'accomplir leurs projets, la recherche étant, par sa nature, une activité innovatrice. Au-dela de la difficulté et de l'impossibilité de prévoir l'ensemble des situations problématiques par une législation coordonnée et formelle, on peut dire que de façon générale, le législateur a préféré la réflexion morale à la contrainte procbdurale. Cet état de fait en a amen6 plusieurs à s'interroger sur l'absence de mécanismes formels de contrôle, d'Bvaluation et de suivi des projets de recherche: "Un encadrement e t un contrôle plus efficaces e t efficients de la recherche clinique en institution e t dans le secteur privé doivent être imaginés. Le d6fi est de concevoir, dans la réalité dconomique actuelle, un encadrement e t un contrôle qui prennent en compte le soutien au développement de la recherche, la protection de valeurs fondamentales e t des personnes intéressées. A notre avis, il serait davantage approprié de reconnaftre au sein de la Loi sur les services de santé et les services sociau~' et de sa 86~onseilda la santé et du bien-&re, Enjeux dthiques d m s le secteur de /a sanr4 e t du bien&re: besoin d'intervention?, Rapport remis au ministre de la Santé et des Services sociaux, Juin 1997, à la p. 87. 8 7 ~ u p r note a IO. 47 réglementation, le rôle que jouent les comités d'éthique de la recherche en faveur de la protection des sujets qui se prêtent à l'expérimentation. Cette mesure donnerait, a notre avis, davantage de "dents" aux comités d'éthique de la recherche et diminuerait d'autant les risques associés 8 la dualité médecin-chercheur que nous avons exposée plus tôt. Ces comités pourraient éventuellement élaborer des mécanismes de surveillance ou de suivi 8 l'égard des médecins-chercheurs afin que tous prennent conscience que l'éthique fait partie intégrante de l'esprit et du jugement scientifiques. Au-delà de leur traditionnel rôle à I'égard de l'approbation du protocole de recherche, ceux-ci pourraient jouer un rôle beaucoup plus actif au regard de I'évolution et du déroulement des projets de recherche. De même, les comités d'éthique de la recherche étant régis par des normes coordonnées, ceux-ci pourraient être générateurs de "précédents", ce qui pourrait vraisemblablement engendrer une certaine uniformité dans leur fonctionnement interne et au plan de l'application des principes. II serait Bgalement intéressant que les établissements définissent davantage leurs attentes B 1°6gardde la recherche clinique, notamment lors de l'octroi de statuts et priviléges aux rn6de~ins.~* Le conseil d'administration 88/d.,art. 237. Le dernier alinda de cet article prdvoit que la C.M.D.P. peut faire, au directeur général de l'établissement, une recommandation portant, entre autres, sur les obligations qui peuvent être rattachées à la jouissance des privilhges octroyes par le conseil d'administration. 48 d'un établissement au sein duquel se déroulent des activités de recherche doit effectuer une certaine surveillance de la qualité de ces activités, notamment en définissant clairement quelles sont les compétences e t obligations demandées aux médecins-chercheurs dans la pratique de telles a c t i ~ i t e s ' ~ . Par ailleurs, certaines normes objectives o n t été proposées par les trois Conseils concernant l'évaluation de la valeur éthique des projets de recherche. Aussi, il est essentiel, pour que ceux-ci soient éthiquement valides, qu'ils répondent par l'affirmative aux trois questions suivantesso: - La recherche est-elle scientifiquement valide? - La valeur générale de la recherche est-elle suffisante? - Les sujets sont-ils traités avec respect e t dignité? Le médecin-chercheur aura, tout au long d u projet de recherche, à se poser ces trois questions. Faire une évaluation éthique exige, tel un bon raisonnement scientifique, de dépasser la simple application mécanique et dogmatique pour faire preuve de r6flexion. de perspicacité e t de sensibilité. Nous verrons, dans la prochaine section, travers diverses réalités de *'voir d'ailleurs, à cet effet, l'article 172(1) L.S.S.S.S. supra note 10. '*las trois Conseils. supra note 72, B la p. 2 4 . 49 la recherche clinique, quel rôle incombera au médecin-chercheur, face au respect des droits des patients qui acceptent d'être sujets de recherche. C) Le cadre clinique Dans les faits, lorsqu'une personne participe 9 une expérimentation, elle accepte de mettre sa personne, son corps ou une partie de son corps à la disposition du chercheur dans le but de faire avancer la science, tout en espérant, à des degrés divers, en retirer des profits personnels. Au Québec, la recherche clinique est régie par un ensemble de règles, élabor6es par la communauté scientifique, qui ont pour but de s'assurer de la validité des résultats obtenus. Tous les protocoles de recherche doivent être élaborés en conformité avec ces règles. Le protocole de recherche constitue la pierre angulaire de tout projet d'expdrimentation. II contient les balises devant être respectées par le chercheur, conform6ment aux bonnes pratiques cliniques établies par le milieu scientifique et entérinées par divers organismes reconnuss1. g'~itons, par exemple, le Conseil de recherchas médicales du Canada, le Fonds de la recherche en santé du Quebec, Santé Canada, la Direction générale de la protection de la santé. 50 Ainsi, le protocole de recherche doit minimalement contenir les éléments suivants: "a) l'objectif du projet, b) la pertinence scientifique du projet, c) la nécessith d'avoir recours 3 des sujets humains, d) la nature des mesures à effectuer, e) la nature des méthodes qui seront utilisées, f) la nature et l'importance des risques et des désagréments auxquels peuvent être exposées les personnes appelées 21 participer 2I un projet de recherche, g) la nature de l'information qui sera transmise au sujet de recherche, h) un relevé de la litthrature pertinenteg2." Comme nous l'avons vu plus tôt, le Conseil de recherches médicales du Canada a élabore certaines lignes directricesg3afin d'assurer la sécurité des participants à un projet de recherche. Concrètement, il s'agit de respecter intégralement le protocole, de surveiller les sujets de recherche pendant la durée de l'étude et de divulguer tout incident malheureux qui peut survenir dans le cadre d'un projet. Cette mesure vise à évaluer si cet événement est lié à l'activité de recherche et, le cas échéant, d'arrêter, s'il y a lieu, la poursuite de l'expérimentationg4. 9 2 ~ Deschamps. . P. Vinay et S. Cruess, Rapportsurl'évaluation des mécanimes de contr6le en matitre de recherche clinique au Qut?bec, présenté au ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec, 1995, p. 44. 93 es trois Consei/s, Code d'éthique de la recherche avec des sujets humains, supra note 5 9. 9411 est B noter que ces lignes directrices n'ont aucune force contraignante et que leur application est laissée à la bonne volonté des medecins, des membres des cornites d'éthique et des établissements h8tes des projets de recherche. 51 Ces protocoles devront dgalement faire l'objet d'un examen par un comité d'éthique de la rechercheg5qui verra à ce que le projet conduise à un gain réel de connaissances et, d'autre part, a ce que les personnes qui accepteront de participer a cette expérimentation seront bien protégées quant à leur intégrité, leur liberté e t leur vie privée. Ce cornit6 devra également s'assurer que le protocole de recherche soit en conformité avec la réglementation de Santé Canada qui prévoit certaines normes à respecter dans la tenue d'essais cliniques. Parce que les essais cliniques sont des btudes dans de nouveaux domaines de traitement, les risques ne sont pas toujours connus à l'avance. Les essais peuvent comporter des avantages, aussi bien que des dangers inconnus et des effets secondaires. En matière clinique, le patient doit savoir ce qu'implique une étude, quels sont les effets secondaires envisagés et. autant que possible, à quelles inconnues ou a quels risques il s'expose. Par exemple, la randomisation, la prise de médication simple ou a double insu ou encore le recours au placebo sont autant d'éléments d'incertitude pour le patient et même pour le médecin traitantg6 qui doivent absolument être discutés avec le sujet de recherche. 95~6c/.mtion d8He/shki, Texte bioéthique, supra note 73. reproduit dans G. Hottois et M.-H. Parireau. Les mots de la gs~ensonsau cas particulier de la prise de m6dication B double insu. 52 Mais qu'en est-il du bienfait que le patient peut espérer de sa participation à un protocole de recherche? La recherche et la thérapie se confondent parfois en u n même concept lorsqu'abord6es dans leur réalité expérimentale. En effet, la distinction entre les recherches "thérapeutiques" et les recherches "non thérapeutiques" demeure, dans bien des cas, plutôt ambiguë. Par exemple, les recherches faisant usage d'un placebo n'apportent aucun bienfait immédiat au sujet qui le reçoit: ce dernier est même. dans une certaine mesure, privé, au profit de la tenue de l'expérimentation, de certains des soins qui existent dans un contexte normal de soins de santé. En matière de recherche clinique. dans bien des cas. c'est à long terme que l'on espère véritablement pouvoir guérir les patients. Déjà, au Québec, les personnes atteintes de cancer sollicitées à participer à une expérimentation. sont incitées par la Fondation québécoise du cancer, a poser les questions suivantes dans le but de prendre une décision libre e t éclairée: - - - "Quel est le but de l'étude? Qu'arrivera-t-il dans mon cas avec ou sans ce nouveau traitement de recherche? Quelles sont les autres possibilit6s. leurs avantages et inconvénients? Y a-t-il des traitements standards pour mon cas e t comment l'étude s'y compare-t-elle? Si l'étude clinique m'occasionne des complications, à quel - traitement médical aurai-je droit? Quel genre de suivi thérapeutique est prévu à long terme dans l'étude clinique?"97 II est à noter qu'il y a actuellement peu de m6canismes de contrôle des milieux de recherche cliniques par les organismes subventionnairesg8. A notre avis, étant donné qu'il s'agit dans plusieurs cas de fonds publics. certains mécanismes de surveillance au plan de la protection des sujets de recherche pourraient être instaurés par les divers organismes subventionnaires. Ces réalités cliniques, telles que définies e t vécues par les patients, sont présentes à toutes les étapes de la recherche. Aussi, nous analyserons de plus près les principales questions qui touchent de façon concrète la protection des personnes. 97~ondation qudbdcoise du cancer, "Qu'est-ce qu'un essai clinique?", Montreal, 1994, p. 10. 98~artainsorganismes subventionnaires tels le FRSQ ne proposent pas de directives particulières Si suivre lors de l'octroi de bourses ou de subventions aux institutions. Voir à cet égard l'article 8 1 de la Loi favorisant le développement scientifque et technologique du Québec, L.R.Q. c. D-9.1 qui prévoit que le FRSQ a pour mandat de "promouvoir et d'aider financiérement la recherche, la formation e t le perfectionnement des chercheurs dans le domaine de la santé". 54 6 ) Le rôle du m6decin face aux questions touchant le respect des personnes Le médecin-chercheur étant habituellement l'intervenant le plus près du patient dans un contexte de recherche clinique, il importe que certaines normes de conduite soient respectées afin que les patients se prêtant a une expérimentation puissent être traites avec respect, équit6 e t discrétion. Voyons comment le médecin devra agir face aux questions visant spécifiquement le recrutement, le consentement, I0intégrit& physique, la sécurité, ainsi que de la préservation de la confidentialitb e t de la vie privée. a) Le recrutement Contrairement à ce qui se passe dans un contexte usuel de soins, c'est rarement le patient qui choisit son médecin en matiére de recherche clinique. II devient beaucoup plus difficile de parler de contrat intuitu personaeg9. C'est plutôt le chercheur, dans ce cas, qui s'affairera à recruter les sujets dont l'état de santé est le plus compatible avec le protocole de recherche qu'il doit suivre. La recherche impliquant une certaine part de risques, le médecin doit faire preuve d06quitéet de justice lorsqu'il recrute des sujets. II serait immoral - ''voir supra. à la p. 26. 55 de faire toujours subir le poids de la recherche aux mêmes groupes de la société. Si l'ensemble de la société bénéficie de la recherche médicale, il semble de bon aloi que ce soit dans son ensemble qu'elle doive en assumer les risques e t les inconvénients. Ce principe vise ZI éliminer les risques d'abus pour certaines catégories de citoyens, tels les prisonniers ou les personnes socio-bconorniquement défavorisée^'^. En effet, il est permis de penser que ces groupes pourraient être intdressés par une compensation financière1'' ou d'autres avantages offerts par les promoteurs de projets de recherche. A cause des bénéfices102 qu'ils pourraient en retirer, il est probable qu'ils donneraient plus facilement leur consentement, qu'ils accepteraient de subir des risques que d'autres groupes, en mesure de refuser, jugeraient inacceptables. De plus, les trois Conseilslo3 ont adopté des règles relatives à loOcelane veut pas dire pour autant qu'il faille les exclure des projets de recherche. En effet, les trois Conseils sont d'avis que les groupes désavantages ne doivent pas être exclus, si cette élimination a des effets néfastes sur la vaIidit6 scientifique du projet ou entraîne la privation injuste, pour les membres de ces groupes, des avantages de la recherche: Les trois Conseils, Code d'éthique de la recherche avec des sujets humains, supra note 5 9 à la p. 5-2. '*IL= Code civil du Québec pr6voit que les sujets ne peuvent être r6rnun6res pour participer à une expérimentation. En effet, l'article 25(2) C.C.Q. prévoit que l'expérimentation ne peut donner lieu à aucune contrepartie financiére hormis le versement d'une indemnité en compensation des pertes et des contraintes subies. 102~ertaines sollicitations a joindre les rangs d'un projet de recherche ont une apparence de rémundration déguisée. Voir B cet effet P. Deschamps, P. Vinay, S. Cruess, Rapport sur l'évaluation des mécanismes de contr6le en matihre de recherche clinique au Qu&bec,supra note 92, aux pages 74-75. 0 3 ~ e strois Conseils, Code d8&hique de la recherche avec des sujets humains, supra note 59, aux pages 6-3 et suiv. 56 certains groupes pouvant être plus vuln6rables dans ce contexte: les femmes, les personnes âgées, les personnes atteintes de troubles mentaux, les sujets ayant donné des directives pr6alablesf les populations soumises à des règles disciplinaires, ainsi que les patients en situation d'urgence ou de danger de mort. L'expérimentation pe voir des conséquences très sérieuses si~r les sujets de recherche, d'où la nécessité de formuler des critéres de sélection sévères lors du recrutement. II ne faut pas oublier qu'il s'agit bien 18 de risques supplémentaires pour les sujets et ce, même si le protocole de recherche pravoit qu'ils seront suivis de trés près par l'équipe m6dica1e'~. Le professeur Cotnoir insiste même sur l'importance, lors de la redaction de protocoles de recherche, que des critéres d'exclusion y soient clairement Ceux-ci serviront à l'expérimentation renferme potentiellement plus établis. retrancher les patients de pour lesquels méfaits que de bénéfices.'05 '040n peut, par exemple, penser à la recherche lorsqu'un placebo est utilisé ou lonqu'un groupe-témoin est prive de soins pour un certain temps. lo5 Cotnoir, ~. La mise en marché du medicament en droit pharmaceutique canadien, Cowansville, Yvon Hais, 1994, à la p. 123. 57 Le médecin-chercheur est régulièrement placé dans une position délicate lorsqu'il s'agit de recruter un patient. Ayant, dans certains cas, établi une relation de confiance avec son patient, le médecin posshde de nets avantages dans cette négociation, car c'est lui qui occupe la position de force. On peut ici soumettre quelques situations conflictuelles susceptibles de survenir pendant la phase de recrutement: -le cas du chercheur qui doit trouver u n certain nombre de patients à l'intérieur d'un laps de temps déterminé, faute de quoi, sa contribution au projet pourra être c o m p r ~ r n i s e ' ~Dans ~ . un tel contexte, il peut être tentant pour un médecin de taire certains aspects du projet de recherche afin de s'assurer de la participation du sujet sollicitb. -le fait que le patient puisse également s'inquiéter qu'un éventuel refus puisse entacher sa relation future avec son médecin e t que la qualit6 des soins qu'il recevra s'en trouve diminuée, étant donné, dans certains cas, l'état de dépendance dans lequel il se trouve. -la tentation, pour le chercheur, de présenter I'exp6rimentation comme étant une "solution-miracle", notamment compte tenu de la plus grande '06~xernplerapport6 dans P. Deschamps, P. Vinay, et S. Cruess, Rapportsuri'évaluation des m6canismes de contrôle en matiire de recherche cfinique au Québec, supra note 92, 8 la p. 74. 58 disponibilité de certains madicaments. Étant donné que, dans le domaine de la recherche, le médecin est Bgalement tenu à une obligation de moyens, il doit s'abstenir de garantir un résultat. Cela pourrait créer des attentes irréalistes auprès des patients, ainsi que de grandes déceptions, surtout chez les personnes très malades ou très vulnérables. -le cas oh on informe le patient en traitement qu'il est devenu nécessaire pour lui de se soumettre à un test ou un examen e t que les délais existant dans le systéme actuel font en sorte qu'il ne peut s'en prévaloir, à moins qu'il ne participe à tel projet de recherche, auquel cas il pourrait subir le test ou l'examen pre~qu'imrnédiatement~~~. -finalement, le scénario où le patient désire se retirer de 1'6tude presqu'à la toute fin; un chercheur pourrait alors être tenté de déroger aux règles éthiques en le soumettant à des pressions indues pour mener son projet a terme et rentabiliser l'investissement financier qui Une fois les sujets recrutés, le chercheur ( été fait sur it être indépendant de la méthode de r a n d o m i s a t i ~ n ~ Cette ~ ~ . règle assurera également la validité de lo7p. Deschamps, P. Vinay et S. Cruess, Rapportsurl'&a/uation des mécanismes de contrôle en mati&e de recherche dinique au Québec, supra note 92, la p. 76. '081bid. 72, l o 9 ~ s trois s Conseils, Guide d'éthique de la recherche avec des sujets humains, supra note la p. 18-2. 59 la recherche sur le plan scientifique, tout en constituant une mesure de protection supplémentaire pour les sujets. Nous ne saurions ici passer sous silence les obligations qu'a le patient lorsqu'il participe à un protocole de recherche. Comme dans le cadre de la dispensation des soins, le patient est appelé à participer a son plan d'intervention1'O. Comment ce devoir a la participation peut-il se concilier avec un protocole de recherche standardisé qui n'offre, dans bien des cas, que peu de latitude tant au chercheur qu'au patient? Comme théoriquement la recherche a pour but l'avancement de la science, le patient doit considérer sa participation comme un apport à un projet social. Dans cette perspective, il se doit d'être conscient de l'importance du rôle qu'il devrait assumer au meilleur de ses capacités. A cet égard, le comité df6thique devrait porter un jugement sur le caractère raisonnable des efforts qui pourront être exigés du patient. Comme nous l'avons vu, le chercheur devra faire preuve de circonspection lorsqu'il recrute des sujets de recherche. Une fois recrutes, ses devoirs ne s'arrêtent pas "OL.SS.S.S., la: il doit obtenir ieur consentement libre et éclairé supra note 10, art. 10. et s'assurer de le conserver tout au long de I'expérimentation. b) L'information et l'obtention du consentement Dans le cadre d'un traitement médical normal, le consentement aux soins est nécessaire. Ainsi, le législateur impose le principe de l'autonomie de la personne: celle-ci ne pourra être soign6e contre sa volont6 que dans certaines conditions bien précises." ' En matière d'expérimentation, le consentement du patient est encore plus fondamental à l'éthique de la recherche; en effet, c'est le procédé d'acquiescement qui va légitimer des actes qui autrement pourraient s'av6rer invasifs ou abusifs. Les regles relatives au consentement à I'expérimentation sont similaires à celles du traitement rnbdical mais sont appliqu6es avec plus d ' i n t e n ~ i t e . " ~ II est nécessaire qu'il en soit ainsi, compte tenu de la marge d'inconnu à laquelle le patient s'expose, celle-ci étant supdrieure aux aléas habituellement rencontrés dans la pratique de la médecine traditionnelle. En effet, c'est le " ' ~ r t .1 0 et ss. C.C.Q. Voir Bgalernent la L.S.S.S.S., supra note 1 0 art. 8 et 9, ainsi que le Code de ddontologie des médecin, supra note 2, aux articles 2.03.22, 2.03.28, 2.03.29. ' 1 2 ~ . D.-Castelli et M. Cadoratte, 'L'expBrirnentation biomédicale et 18inviolabilit6 de la personne: autod6termination ou protection de l'intégrité physique" (1994) 25 R.G.D. 1 7 3 à la p. 198. 61 respect du principe de l'autonomie, de la dignitd e t de l'intégrité de la personne qui la protege contre un usage â b i i ~ ide i son corps e t ce, même si la démarche est faite dans l'intérêt d'autrui ou de la science. Comme nous l'avons v u en premiere partie, le consentement doit être fiore et é~lairé.''~c'est ainsi que le mddecin-chercheur se devra de donner au patient sollicité toute I'information necessaire afin que ce dernier connaisse son diagnostic. les aspects principaux du traitement (dont les risques) et les alternatives. ' j4 Cette obligation de renseignement sera donc accrue dans un contexte de recherche. La jurisprudence québécoise a même pr6cisé qu'une personne qui se soumet à un acte qui n'est pas nécessairement b6néfique pour sa santé devra recevoir une quantité d'information plus grande que pour un traitement médical thérapeutique habituel. ' l D'ailleurs. les auteurs Lesage-Jarjoura, Lessard e t Philips-Nootens insistent sur l'importance pour le medecin de donner toute I'information nécessaire sur le but de l'intervention: " 3 ~ r t . 10 et 1399 C.c.Q. '14code de déontologie des m&decins, supra note 2, an. 2.03.29. ''5~bure& c. Cohen, [1988] R.J.O. 2424 (C.A.); Engstromc. Courteau, 119861 R.J.Q. 3048 (C.S.). "Le médecin doit Bgalement spécifier le but poursuivi par l'intervention. notamment si la visée est d'ordre thérapeutique (fonctionnel) ou non thérapeutique. Cette simple distinction aura une influence sur la décision puisque, de toute Bvidence. l'intérêt en jeu diffère (...): le patient sera davantage hésitant à subir une intervention risquge si elle n'est pas nécessaire.n11s II incombe par conséquent au médecin de mentionner les traitements les plus conservateurs existant dans la pratique de la médecine traditionnelle et non uniquement ceux qui sont disponibles dans le cadre du protocole de recherche. De cette façon, le patient sera davantage en mesure d'effectuer un choix éclairé. En matière d'expérimentation. la jurisprudence québécoise prévoit même que le médecin devra donner des informations, non seulement sur les risques probables mais aussi sur les risques possibles. Dans l'affaire Weiss c. S ~ l o r n o n ~on ' ~ a, juge que le médecin-chercheur. lors d'une experimentation non-thérapeutique, doit divulguer au sujet tous les risques connus. même s'ils sont hautement improbables, pour que le consentement soit valide. Dans cette cause. le tribunal a rappelé que tout examen de contrôle qui est habituellement réalisé pour le dépistage ou pour parvenir à un diagnostic et qui se situe dans le cadre d'un protocole de recherche fait partie du contenu informationnel qui 16p. Lesage-Jarjoura, J. Lessard et S. Philips-Nootens, E16ments de responsabilitt? médicale, supra note 31, à la p. 116. "'[19891 R.J.Q. 731 (C.S.). 63 doit être devoild au patient, dans la mesure où il y a un risque à procéder à un tel examen. Dans cette affaire, le tribunal en est arrivé à la conclusion spécifique qu'il n'y a pas eu de consentement libre et éclair6 de la part de monsieur Weiss, car les médecins-chercheurs ont omis de l'informer que l'injection de fluoresc6ine comportait un risque rare, mais connu par eux, de mort subite par crise cardiaque.' Ce jugement, critiqué par certain^"^, amène la délicate question: tout dire, c'est quoi dire? Peut-on penser que, si le médecin-chercheur communique absolument tous les risques au patient, y compris ceux qui sont extrêmement rares, ce dernier ne sera qu'amen6 logiquement à refuser toute participation à quelqu'expérimentation que ce soit, même la plus banale? Cette situation, selon nous, compromettrait de façon serieuse le développement de la recherche clinique: c'est pourquoi nous sommes d'avis que l'obligation d'information se doit d'être modutée, notamment en fonction du type de Voir ce sujet, B. Freedrnan et K.C. Glass, "Weiss c. Solomon: A Study in Institutionel Responsibility of Clinical Research", 18 Law, Medicine & Health Care, 1990, 395-403: "( ...) judgment may prove more effective at frightening investigators and their institutions, than at educating them to their responsibilitiesn, à la p. 402. '19 64 recherche et des conséquences de la participation ou de la non-participation à celle-ci pour le patient et pour son entourage. Dans Halushka c. University o f S a s k a t c h e ~ a n 'la ~ ~Cour , avait décidé en ces termes: "Such being the duty owed by a physician t o his patient in ordinary medical practice. the duty t o inform is at least as great, if n o t greater, in the case of those engaged in medical research t o persons who offer themselves as subjects for experimentation because in the latter case there can be no exception t o t h e requirements of full disclosures (. ..) " Dans cette cause. un Btudiant a accepte de se faire endormir par un agent anesthésique local pour la modique somme de 50S. Or, au cours de l'intervention. I'btudiant a subi un arrêt cardiaque et a dû être hospitalisé pour 10 jours. Au surplus, ses facultés intellectuelles se sont affaiblies il un point tel qu'il a dû abandonner ses études. Lors du procès, il fut démontré que I'étudiant ignorait que la substance utilisde était à l'étape initiale de son développement et que, pendant son sommeil, on introduirait un cathéter se rendant jusqu'au coeur. Le tribunal n'a pas eu de difficulté à reconnaître l'Université coupable de négligence e t ce, même si I'étudiant avait préalablement signé un document contenant une clause excluant la 1 2 0 ~ a / ~ ~c.h University ka of Saskatchewan, (1 966) 53 D.L.R. 436 (C.A. Sask.). responsabilité de l'institution. Le médecin-chercheur se devra non seulement d'informer le sujet sur les risques et avantages de la recherche pour lui-même, mais 6galernent des buts poursuivis afin que le sujet puisse juger de la valeur de l'effort collectif auquel il parti~ipe.'~' Une fois que ce consentement est donn6, il ne constitue jamais, tout comme dans le cas de la médecine traditionnelle, un chèque en blanc pour tout ce que le médecin-chercheur estime souhaitable: étant donné l'inconnu relié à la recherche, nous sommes d'avis que le consentement doit être intimement lié et restreint à l'expérimentation Zi laquelle le patient aura préalablement acquiesce. Le consentement doit également être libre. Comme nous l'avons vu précédemment, une personne gravement malade aura plus de difficulté à résister à la pression d'un médecin avec lequel elle a, par ailleurs, développé une relation de confiance. De plus, l'espoir de gu&ison, minime dans le cas de certaines expérimentations, pourrait éventuellement deformer l'évaluation que certaines personnes gravement malades pourraient avoir de leur état de 12' l'auteur Eric Gagnon dans Les cornirés d'éthique, la recherche mt5dicale 9 t'épreuve, supra note 69 mentionne qu'une personne pourrait avoir des objections d'ordre moral, religieux ou politique à participer à une étude ayant des objectifs qu'elle r6prouve (ex. v6rifier la relation entre l'intelligence et la race), à la p. 37. santé. Certaines a ~ t e u r e s 'proposent ~~ même. pour protéger la liberté de décision du patient contre toute pression directe ou indirecte. même involontaire, qu'on devrait exiger que le mddecin-traitant qui recrute ne soit aucunement implique dans la poursuite de l'expérimentation. Ce type d'exigence peut se comparer 21 celle du médecin qui constate la mort en cas de pr6levement d'organes aprhs le d d c ~ s ' ~ ~ . Malgré les bonnes intentions visees par cette proposition, nous sommes d'avis qu'il est davantage dans I'int6rêt du patient de continuer en tout temps à avoir accès au m8decin-cher~heur'~~. y compris lorsqu'il doit exprimer son consentement. En effet, le consentement doit de toute manière être constamment recherché par ce dernier et ce. tout au long du projet de recherche. En d'autres termes, le patient a droit de se retirer en tout temps, en particulier s'il y a des changements au niveau de ses attentes. II est important que le patient ait en permanence de véritables occasions de se '"M. D.-Castelli et M. Cadoreîte, supra note 112, b la p. 205.5. ' 2 3 ~ 4~5., C.C.Q. '"une solution mitoyenne pourrait dgalement être envisagea en demandant aux chercheurs de rechercher l'avis d'un autre médecin extérieur à la recherche à chaque fois qu'ils voudront recruter un nouveau patient: cet avis offre une garantie suppl4mentaire que l'intérêt du patient ne sera pas sacrifie au prof'rt de I'intéret des chercheurs. retirer de tout protocole de recherche s'il le désire.125 Le professeur Cotnoir mentionne également que le consentement doit être maintenu de façon formelle tout au long de Ifexp6rimentation e t ce. dès qu'il y a une modification au protocole initial126: " (. ..) si des conditions du protocole sont modifiées pendant la poursuite des essais cliniques, il faudra alors considérer le consentement initial comme caduc e t requérir une nouvelle expression de la volont6 du sujet en lui expliquant toutes les nouvelles implications. rc 127 Mentionnons également certaines circonstances où le médecin doit s'adapter A son interlocuteur ou à une situation extraordinaire. Ainsi, il n'abordera pas de la même façon le jeune adulte scolarisé, la personne âgée atteinte de la maladie d'Alzheimer ou l'immigrant fraîchement arrivé. II devra s'assurer de leur comprhhension subjective en fonction de leurs caractéristiques personnelles, sociales e t culturelles. Le mbdecin-chercheur aura Bgalernent beaucoup de difficult6 à obtenir 12'~estrois Conseils. Code d'éthique de la recherche avec des sujets humains, supra note 59, à la p. 1-1 4. '2611 est h noter que toute modification au protocole initial survenant en cours d'expérimentation devrait être soumise par le chercheur au comit6 d'éthique de la recherche de son établissement pour fins d'examen. ' "M. Cotnoir, Le mise en marche du mddicament en droit pharmaceutique canadien. supra note 105, à la p. 135. 68 un consentement libre et éclairé dans un contexte d'urgence. Est-ce même réellement possible? II est plus que probable qu'une personne dans cette situation ne puisse facilement donner son consentement en toute connaissance de cause. La notion de consentement éclairé nous semble alors illusoire. Étant donne le caractére solennel et complexe d u consentement aux soins dans le domaine de la recherche, le l6gislateur québ6cois a posé comme exigence que le consentement soit constat6 par 6 ~ r i t . Le l ~ deuxième ~ alinéa de l'article 24 du Code civil du Québec prévoit, par ailleurs, que ce consentement peut toujours être révoqué, même verbalement. II n'est donc pas surprenant que plusieurs discussions soient alimentées par les é16ments qui devraient figurer au formulaire de consentement. Le consentement à l'expérimentation étant fondamental au plan éthique et juridique, les membres du comité d'experts sur l'évaluation des mécanismes de contrôle ont souligné la difficulté qu'a le citoyen moyen à comprendre le l2'~rt.24, C.c.0. II en est de même pour les soins gui ne sont pas requis par 1'6tat de sant6 ainsi que pour l'aliénation d'une partie du corps. Les auteurs Kouri et Philips-Nootens dans "L'utilisation des parties du corps humain pour fins de recherche: l'article 22 du Code civil du Qu6becm (1994-95) 25 R.D.U.S. 359, mentionnent que l'exigence d u consentement écrit a pour but de temperer un exces d'enthousiasme passager et d'obliger le donneur à refléchir avant de participer à u n acte médical potentiellement risque et ne comportant aucun avantage pour lui. style de redaction des formulaires de c o n ~ e n t e r n e n t ' ~ ~ . De même, le fait d'exiger la signature d'un formulaire de consentement ne doit pas devenir un geste routinier pour le chercheur. Celui-ci demeure, tout comme dans le contexte habituel des soins, responsable de s'assurer de la bonne compréhension du patient e t doit lui fournir un délai raisonnable pour accorder ce consentement. Le consentement A l'expérimentation visant avant tout a protéger l'intégrité physique e t morale du sujet, le rôle du médecin-chercheur a l'égard de la sauvegarde de 18int6grit6 e t de la s6curit6 mérite une analyse plus attentive que nous aborderons à la section suivante. c ) La sauvegarde de I8int6grit6et de la sdcurit6 Si, comme nous l'avons vu, on ne peut porter atteinte à l'intégrité de la personne'30 sans son consentement libre et éclairé dans un contexte de soins, il en est de même a forfrori dans le domaine de la recherche clinique. 12'p. Deschamps, P. Vinay, S. Cruess, Rapportsur l'évaluetion des rndcanismes de contrôle en matiike de recherche clinique au Québec, supra note 92, à la p. 78. Le comité souligne le peu d'empressement que l'on semble avoir à faciliter la compréhension qu'une personne pressentie pour participer & un projet de recherche doit avoir de ce que comporte pour elle sa participation à un tel projet. l3'~rt.3 et 10, C.C.Q. 70 Pour les trois Conseils, la protection de I'int6grit6 du sujet ne se situe pas qu'au niveau de l'intégrité physique. La perte d'estime de soi, le remords ou le sentiment d'être exploité ou humilié sont des atteintes à l'intégrité morale dont le médecin-chercheur doit également tenir compte dans son travail. De même, toute recherche entreprise sans le consentement du sujet est une atteinte à son integrité et constitue des voies de fait pour lesquelles le responsable peut être pour~uivi'~'.Pensons, de l'A.D.N. et au test de dépistage du V.I.H.: titre d'illustration, a l'étude de tels prélèvements chez l'humain ont des conséquences qui vont au-delà de la simple dtude technique. En effet, ils comportent non seulement des risques, mais surtout des possibilités de préjudices psychologiques et sociaux encore mal connus132. L'équipe de recherche doit donc fournir des garanties au sujet avant que celuici ne s'implique dans une telle étude. Aussi, afin d'assurer la sécurité des sujets pendant toute la durée de l'expérimentation, le chercheur'33 doit porter une attention particulière et 1 3 2 ~ aexemple t comporte également des cons6quences specifiques sur les plans de la confidentialite et de la vie privée voir infra aux pages 74 e t suivantes. 133~ est ~ important de rappeler que l'article 2.03.22 du Code de ddontologie des mddecins supra note 2 prévoit que "Le médecin qui entreprend une recherche portant sur des gtres humains doit suivre une methode scientifique et justifide par la nature et le but de sa recherche." 71 constante 3 l'évolution des connaissances dans ce domainelu. De même, il se doit d'aviser le comité d'éthique de la recherche de tout changement au protocole qui a Bt6 initialement convenu avec ce dernier. Nous ne saurions trop insister sur l'importance de sensibiliser les médecins-chercheurs à leur rôle social en accomplissant des activités de recherche: aussi, à cet effet, nous sommes d'avis qu'il serait opportun que les établissements assurent une formation continue à leur intention afin de les sensibiliser aux conséquences éthiques et juridiques de leurs actes. Même si une personne, en participant à une expt5rimentation. s'expose a un certain nombre de risques et de complications, sa sécurité doit constituer une préoccupation majeure pour les chercheur^'^'. II est évident que la part d'inconnu et de risques inhérente Ci tout projet de recherche ne dispense aucunement le médecin de son obligation de suivi: au contraire, elle l'accentue. Ainsi, la répartition aléatoire des patients dans les cohortes, l'existence d'un groupe de personnes recevant un placebo et l'arrêt de la prise de la médication sont autant de situations qui peuvent, dans certains cas, occasionner des complications au patient. Elles nécessitent donc un suivi encore plus étroit que dans un contexte régulier de soins. lJ4/d.,art. 2.03.1 5. Tout comme dans le cas de la pratique traditionnelle de la medecine, le médecin-chercheur a un devoir accru de se tenir à jour et 8 le perfectionner ses connaissances. Le médecin-chercheur oeuvrant dans un domaine d'avant-garde, il se doit, 8 notre avis, d'être à la fine pointe des connaissances dans son champ de pratique. 13'p. Deschamps, P. Vinay, S. Cruess, RapportsurlVvsluation des m&anismes de contrdle en matigre de recherche clinique au Québec, supra note 92 8 la p. 125.5. 72 La question du suivi devient toutefois trhs complexe dans certaines situations comme, par exemple. la prise de médication à double insu; le médecin, tenu dans l'inconnu presqu'autant que le patient. est alors dans une position tres délicate qui pourrait Bventuellement le placer en conflit d8int6rêts. II doit donc, dans ce cas, bien faire comprendre au patient qu'il ne pourra, dans c e contexte, prendre de décision en fonction de ses besoins e t intérêts, t o u t comme ce serait normalement le cas dans la pratique clinique. En effet. un des objectifs de la recherche est de connaître les effets secondaires; ceux-ci peuvent se prtisenter autant à court qu'à long terme. On peut donc penser que l'obligation de suivi doit, dans le cas de certains protocoles de recherche, s'étendre dans le temps et ce. même après que le patient ait obtenu son congé. II ne faut pas oublier qu'en matière de responsabilité médicale, le patient est tenu d'assumer les risques "normauxn en autant que ceux-ci n'ont pas été causés par la négligence ou l'imprudence du chercheur ou d'un membre de son r 5 q ~ i p e . III~est ~ d'ailleurs raisonnable dfinf8rer qu'un médecin désirant faire avancer la science en oeuvrant dans le domaine de la recherche se doit de connaître à fond toutes les données de la science médicale dans son secteur d'activités. lJ6voiren ce sens, Weiss c. Solomon, supra note 11 7 . 73 Comme le mentionne le Cornit6 d'experts sur l'évaluation des mécanismes de contrôle en matiere de recherche clinique, le patient victime de complications inhérentes à l'imprudence ou à la négligence du chercheur court des risques de ne jamais en être informé13'. Ceci peut s'expliquer, entre autres, par la peur d'éventuelles poursuites judiciaires de la part du sujet. Celui-ci, de son côté, peut aisément penser que si on ne lui a transmis aucune information additionnelle, c'est qu'il s'agit d'une conséquence normale inhérente à son état de sant6 ou à Ifexp6rimentation. On a d'ailleurs déplor6 le peu d'empressement des promoteurs et, par ricochet, des chercheurs, à présenter des politiques et des textes clairs quant aux coûts qu'un promoteur est prêt à assumer advenant une complication reliée au projet de recherche.138 Les trois Conseils ont d'ailleurs émis la règle13' suivante, en cas de dommage accidentel: " Les commanditaires, les établissements, les comités d'éthique de la recherche et les chercheurs ont l'obligation éthique de s'assurer collectivement de l'existence de clauses permettant de faire face aux responsabilit6s juridiques en cas de pertes et de dommages physiques subis par les sujets de recherche." 13'p. Deschamps, P. Vinay, S. Cniess, RapportsurI'.valuation des mdcanismes de contrdle en matibre de recherche chique au Québec, supra note 92 à la p. 7 9 . 13*/bid, A la p. 80. ' 3 9 ~ e trois s Conseils. Guide d'ethique de la recherche avec des sujets humains. supra note 7 2 à l a p . 11-1. Est-il besoin de souligner ici que le sujet se prêtant à une expérimentation le fait de bonne foi tout en sachant, dans bien des cas, qu'il n'en retirera aucun avantage immédiat. II serait donc inadmissible de lui faire courir des risques de façon indue. d) La préservation de la confidentialit6 et la protection de la vie privée Bien qu'en ce qui touche le secret professionnel, les régies soient les mêmes que pour un contexte de médecine traditionnelle. il est capital que l'on puisse fournir à la personne qui se prête à une expérimentation toutes les garanties nécessaires pour que sa vie privée, ainsi que la confidentialité des données qui la concernent, soient respectées.la SelO n le Reglement sur l'organisation et l'administration des établissement^'^', les dossiers de recherche constituent des dossiers distincts du dossier de I'usager en dtablissement de santé. Même s'ils sont assujettis aux mêmes règles que le dossier de l'usager, il a été rapporté que 14%oir notamment les dispositions concernant la confidentialitk du dossier de l'usager aux articles 17 et ss. LSSSS, supra note 10. La Loisur l'accés aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, supra note 13 et la Loisw /a protection des renseignements personnels dans le secteur privt?, supra note 14 édictent également certaines normes quant Si l'utilisation de renseignements personnels par des tiers. 1 4 ' ~ u p nnote , 34, art. 50. 75 les dossiers de recherche ne sont pas toujours traites de la même façon que les dossiers hospitaliers et qu'ils ne sont pas necessairement sous le contrôle de l'archiviste médical. '42 Les médecins devront faire preuve de circonspection dans l'utilisation de ces données et informer le patient que d'autres chercheurs pourraient avoir accés à leur dossier'" pour des fins de recherche et d'enseignement.'" On peut penser de façon particulière à la complexe question de la propriete des banques de données. Qui en est le proprietaire? Est-ce l'établissement de santk? Est-ce l'organisme subventionnaire ou l'entreprise p r i ~ e e ? ' ~ ~ Aussi, les trois Conseils ont recommandé que les renseignements confidentiels obtenus pour un projet précis de recherche ne soient utilises que 14'p. Deschamps, P. Vinay, S. Cruess, Rappm sur18~va/ualiondes mécanismes de contrdfe en matikre de recherche clrnique au Québec, supra note 9 2 à la p. 87. ' " ~ e professeur Jean-Guy Fréchette dans Accés légal aux dossiers de santé des usagers, Rock Forest, Association québécoise des archivistes médicales, 1993, à la p. 41 9, prévoit que I'autorisation prévue doit être spécifique (ex. "tous les dossiers où iI y a eu ablation d'un rein durant les années 1985 à 1989"). Le chercheur ne doit avoir accès qu'aux dossiers dont il a besoin pour les fins de sa recherche. ' v o i r B cet effet le second alinda da l'article 1 9 LSSSS supra note 1 0 qui prévoit que:"Toutefois un professionnel peut prendre connaissance d'un tel dossier à des fins d'étude, d'enseignement ou de recherche, avec l'autorisation du directeur des services professionnels ou, à défaut d'un tel directeur, avec I'autorisation du directeur général(.,.)". II est également possible et souhaitable à notre avis que le directeur des sewices professionnels ait l'aval du comité d'éthique de l'établissement avant de donner une telle autorisation. 14%oir notamment sur cette question les articles 18(8)et 21 de la Loisur la protection des renseignements personnek dans le secteur privé supra note 14, et les articles 59(5) et 125 de la Loi sur l'acc&s aux documents des organismes publics et sur la protection des renser'gnements personne/s supm note 13, où, selon certaines modalités e t avec I'autorisation de la Commission d'accés à l'information, les entreprises privées de m6me que les organismes publics peuvent communiquer des renseignements personnels à une personne. 76 pour ce projet.'46 Cette régle doit. notre avis, être respectée afin de donner tout son sens à la notion de consentement éclairé. Certains auteurs ont d'ailleurs soulevé avec raison les risques potentiels d'atteinte à la vie privee et 21 l'autonomie de la personne en permettant la réalisation de recherches ultérieures non identifiées avec des parties du corps, notamment dans le domaine de la g6nétique"'. D'ailleurs, la Cour Suprême du Canada a clairement dit dans R. c D yment1 : "L'utilisation du corps d'une personne, sans son consentement, en v u e d ' o b t e n i r des renseignements à son sujet, constitue une atteinte a une sphére de vie privée essentielle au maintien de sa dignité humaine." Là encore. le formulaire de consentement joue un rôle important pour assurer le patient que la confidentialité des données de son dossier de 14'~es trois Conseils, Code d'éthique de la recherche avec des sujets humains, supra note 59 Ci la p. 3-5. On y prévoit, toutefois, que les comités d'éthique de la recherche peuvent, dans certains cas, donner leur aval à une utilisation secondaire des données en fonction des éléments suivants: a) un consentement éclairé des personnes ayant fourni les données, b) une stratégie appropriée d'information des participants e t c l une consultation avec un groupe représentant les personnes ayant fourni les donnees. 1 4 7 ~ . Kouri ~. et S. Philips-Nootens, " L'utilisation des parties du corps humain pour fins de recherche: l'article 22 du Code civil du Québec" supra note 128. Les auteurs mentionnent également, à la p. 370, l'importance d'obtenir le consentement explicite du patient pour le jumelage des données nouvellement recueillies avec des renseignements d6j& contenus en banque ou dans d'autres banques. '%98812 R.C.S. 41 7. 77 recherche soit respectée. II faut plus qu'une declaration d'intention ZI cet égard: le formulaire devrait contenir une description des procédures prises14' pour assurer la conf identialit6 e t pour clarifier les responsabilités de toutes les parties en cause. 14911 est b noter que le Cornite d'expetts sur I'bvaluation des mdcanismes de contrôle en matière de recherche clinique a recommande aux établissements de santé d'adopter une politique sur la constitution des dossiers de recherche et sur l'utilisation de bases de données créées par les chercheurs pour des fins de recherche. Voir, A cet effet, P. Deschamps, P. Vinay et S. Cruess, Rapport suri'évafuation des m8csnisrnes de contrdfe en matrëre de recherche cfinique au Québec, supra note 92 aux p. 87-88. On pense notamment à toutes les regles visant à anonymiser les donnees lorsqu'une compagnie defrayant les coûts de la recherche souhaite avoir accés aux résultats de celle-ci. CONCLUSION De nos jours. le développement des sciences pharmacologiques, médicales et biologiques passe nécessairement par I'expérimentation sur l'être humain. Une fois admise la nécessité d'avoir recours à I'expérimentation, la difficulté résulte dans la recherche de mécanismes de contrôle efficaces et dans l'élaboration de normes juridiques et éthiques qui reflétent ce que notre soci6té juge moralement acceptable. Comme nous l'avons vu. le médecin est Ifinterm6diaire privilégié pour le patient face à tout établissement de santé réalisant des activités de recherche. Par ailleurs. le médecin est place dans une situation où peuvent naître de potentiels conflits d'intérêts, de par la dualité des rôles de soignant et de chercheur qu'il exerce. En effet. dans un contexte usuel de soins, le médecin a de nombreux devoirs et obligations touchant principalement l'information et l'obtention du consentement. l'obligation de soigner adéquatement, d'assurer le suivi approprié et. enfin, de conserver le secret professionnel. Le médecin-chercheur, pour sa part, n'a pas de statut particulier face à la loi: en plus d'assumer les mêmes devoirs et les mêmes obligations qu'un médecin placé dans un contexte de soins, celui-ci doit y ajouter tous ceux qui sont liés à la recherche clinique. Cette situation g6nère de serieux questionnements éthiques compte tenu que, dans certains cas, les moyens utilisbs peuvent porter atteinte à la protection et a la sécurité du sujet de recherche. Cette antinomie des rôles place donc le médecin-chercheur dans une situation inconfortable qui nécessite un certain encadrement. Bien que nous ayons suggbrb quelques solutions afin d'atténuer cette dualité, il est trés difficile d'établir des cadres bien définis dans le domaine de l'expérimentation car sa nature exploratoire impose des zones d'incertitude importantes, comportant des flous de tous ordres (juridique, éthique, moral, etc .) . II y aura toujours, dans le domaine de la recherche, par définition, des impondérables, des sentiers inexplorés et inattendus qui ne pourront être appréciés qu'après coup et qui font appel, au moment où ils se présentent, au bon jugement du médecin-chercheur. Ces zones d'ombre ou de flou juridique, éthique et moral doivent donc être ré6valuées en cours de route et font l'objet de cas d'espéces que le m6decin seul - et ce, bien que nous le considérions - comme l'interlocuteur privilégié à cet 4gard ne peut difficilement évaluer et trancher en toute objectivit6. 80 Cet état de fait met en évidence la nécessité d'avoir des lignes de conduite obligatoires. adaptees aux aléas de la recherche et au respect des droits du patient, à toutes les étapes du processus de I'expérimentation. Si les contraintes à l'intention des chercheurs sont trop exigeantes ou rigides, le succès de l'expérimentation peut s'en trouver entravé, alors que, s'il y a trop de laxisme, il peut y avoir des torts causés au patient. Cette problématique engendre la necessite de former des comités d'éthique de la recherche et de leur accorder une reconnaissance légale formelle au sein même de la L o i sur les services de santé et les services sociaux'5o. Ceci favoriserait une certaine uniformité dans leur mise sur pied et leur fonctionnement et contribuerait à accumuler des donnees objectives axées vers la qualité de la pratique medicale et la protection du patient. Mais avant tout, les comites d'éthique de la recherche, qui se doivent d'être multidisciplinaires, flexibles et polyvalents, devront être reconnus comme des partenaires de choix afin d'ajuster l'action des chercheurs en fonction d'impératifs qui peuvent se situer dans des domaines qui ne leur sont pas nécessairement familiers. Ces comités sont, selon nous. absolument essentiels afin d'assurer, en toute impartialité, un certain degré d'objectivité et d'uniformité dans le déroulement des projets de recherche. 81 Ces comités devraient être considérés non comme une entrave au travail du médecin-chercheur, mais plutôt comme une aide ou un support important, compte tenu de la complexité des problématiques liées a la recherche clinique. Non seulement pourront-ils apporter un dclairage indispensable sur une partie des questions pouvant se poser, mais également prendre sur eux la part des responsabilités qui est inhérente à leur raison d'exister. BIBLIOGRAPHIE MONOGRAPHIES ALMERAS, Jean-Pierre et Henri PEQUIGNOT, La d&ontologie médicale, Paris, Litec, 1996, 308 p. AMBROSELLI, Claire, "Le Code de Nuremberg et l'éthique médicale" dans Comités d'éthique 9 travers le monde, Paris, Editions Tierce, 1989, p. 49. BARREAU DU QUÉBEC ET CHAMBRE DES NOTAIRES DU QUÉBEC, La réforme du Code civil, Personnes, successions, biens, Ste-Foy, Les Presses de 18Universit6Laval, 1993, 81 2 p. BAUDOUIN, Jean-Louis, La responsabilit6 civile, 4e édition, Cowansville, Les éditions Yvon Blais, 1994, 1241 p. 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Loi sur les archives, L.R.Q., c. A-21.1. Loi sur les services de santé e t les services sociaux, L. R.Q., c. S-4.2. R&g/ernentsur /a tenue des dossiers d'un médecin, R.R.Q.. 1981. c. M-9, r . 19. Règlement sur /'organisation et I'admiistration des établissements, R .R .O. 1981 c. S-5, r. 6. IMAGE EVALUATION TEST TARGET (QA-3) APPLIED IMAGE. lnc -. --- 1653 East Main Street Rochester. NY 14609 USA Phone: 716i48XKMCi Fax: 7161288-5989 --- O 1993. Appiied Image. lm. All Righis Resenred