mutations dans trois gènes différents (tableau 1). Les muta-
tions actuellement connues sont toutes à l’origine d’un
gain de fonction et donc d’une augmentation des courants
ioniques repolarisants. Ce gain de fonction peut être la
conséquence d’une augmentation de la conductance uni-
taire, d’une anomalie des propriétés de rectification, d’un
déplacement d’activation vers une phase plus précoce du
potentiel d’action ou encore d’une augmentation de cou-
rant repolarisant accélérant la phase terminale de la repo-
larisation [7-9]. Les gènes codants pour IK
ATP
et IK
Ach
sont
deux autres gènes candidats.
Peu de choses sont connues concernant les mécanis-
mes électrophysiologiques des arythmies observées dans
le syndrome du QT court. Les mutations décrites sont
toutes responsables d’un raccourcissement de la durée du
potentiel d’action ce qui, d’un point de vue théorique,
peut faciliter la survenue de fibrillation (au niveau auricu-
laire ou ventriculaire) par le biais d’une diminution de la
longueur d’ondes de circuits de réentrée. D’autre part, les
canaux ioniques n’étant pas répartis de manière homo-
gène dans le myocarde, l’anomalie d’un type de canal
peut aboutir à une majoration des hétérogénéités spatiales
de la repolarisation ventriculaire et constituer ainsi un
substrat fonctionnel de réentrée [11, 12].
Diagnostic
Compte tenu du faible nombre de patients connus
présentant le syndrome (quelques dizaines !), du faible
recul et de l’absence d’études importantes, il est particu-
lièrement difficile de faire des recommandations précises
pour la prise en charge et le traitement des patients atteints
de ce syndrome. Ce qui suit relève donc plus du bon sens
que d’une attitude médicale fondée sur les preuves.
La première étape du diagnostic doit consister à élimi-
ner les causes transitoires ou acquises de raccourcisse-
ment de l’intervalle QT. La durée de la repolarisation peut
être raccourcie par une hyperkaliémie, une hypercalcé-
mie, une acidose, une ischémie myocardique aiguë, une
hyperthermie, un phéochromocytome ou un traitement
digitalique ; toutes ces causes doivent donc être recher-
chées. Nous avons discuté plus haut des difficultés poten-
tielles de correction de la durée de l’intervalle QT en
fonction de la fréquence cardiaque. Le caractère court de
l’intervalle QT sera plus facilement documenté par la
répétition des électrocardiogrammes, par un enregistre-
ment Holter ECG des 24 heures et par une épreuve d’ef-
fort. Ces deux derniers examens permettent également
d’objectiver l’anomalie d’adaptation de l’intervalle QT
aux changements de fréquence cardiaque. L’exploration
électrophysiologique endocavitaire permet de mesurer
des périodes réfractaires courtes tant auriculaire que ven-
triculaire et le plus souvent de déclencher une fibrillation
ventriculaire [4, 5]. Il est trop tôt pour savoir si la positivité
de la stimulation ventriculaire programmée a une valeur
prédictive d’événement rythmique ventriculaire. La ré-
ponse à cette question ne pourra être connue rapidement
que si cet examen est réalisé de manière systématique.
Enfin, la notion de cœur sain doit être validée par une
échographie cardiaque et il ne faut pas oublier de réaliser
une enquête génétique et familiale la plus exhaustive
possible.
Traitement
L’histoire naturelle du syndrome étant encore très mal
connue mais caractérisée par un taux élevé de mort subite
dans les familles décrites, et en l’absence d’éléments
prédictifs de ce risque de mort subite, il semble légitime de
proposer l’implantation d’un défibrillateur automatique
aux patients symptomatiques ayant des antécédents fami-
liaux de mort subite [4, 7, 10]. Il faut signaler que les
caractéristiques de l’onde T observées dans ce syndrome
peuvent être à l’origine d’une sur-dérection de l’onde T
aboutissant à des chocs inappropriés [13].
La légitimité de l’implantation d’un défibrillateur est
encore renforcée par certaines observations de l’effet des
antiarythmiques dans ce syndrome. En effet, dans le syn-
drome du QT court de type 1 dans lequel la mutation est
responsable d’une augmentation de la composante rapide
du courant potassique rectifiant retardé (IKr), le blocage
sélectif de ce courant par le sotalol est inefficace aussi bien
in vitro qu’in vivo [4, 7]. En revanche, la quinidine qui
bloque de nombreux courants ioniques impliqués dans le
potentiel d’action ventriculaire semble capable d’allonger
la durée du QT, de restaurer une fréquence dépendante du
QT et de négativer la stimulation ventriculaire program-
mée chez les patients porteurs du syndrome du QT court
de type 1 [5, 14]. Ce résultat, qui n’est pas sans rappeler ce
qui est observé dans le syndrome de Brugada avec cette
molécule [15], devra cependant être validé par des études
cliniques prospectives et randomisées. Il faut également
rappeler que ni la quinidine ni les autres antiarythmiques
n’ont été testés dans les syndromes de type 2 et 3, de
description plus récente.
Enfin, il n’y a pas pour l’instant de données fiables pour
orienter la prise en charge des arythmies atriales observées
dans ce syndrome.
Tableau 1.Formes génétiques du syndrome du QT court
Type Gène Courant
ionique
Conséquences
fonctionnelles
Référence
SQTS1 KCNH2 IKr Gain de
fonction
7
SQTS2 KCNQ1 IKs Gain de
fonction
8
SQTS3 KCNJ2 IK1 Gain de
fonction
9
SQTS = short QT syndrome.
mt cardio, vol. 1, n° 5, septembre-octobre 2005 477
Revue
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