APPEL A IDEES DE RECHERCHE SCIENTIFIQUE SPATIALE I. RENSEIGNEMENTS GENERAUX : I.1. INTITULE DU PROJET : SIMBOL–X Un télescope spatial de nouvelle génération dans la gamme 0.5 – 70 keV I.1. RESPONSABLE SCIENTIFIQUE : Nom, Prénom : Téléphone : Télécopie : e-mail : Adresse : FERRANDO, Philippe 01 69 08 44 38 01 69 08 65 77 [email protected] Service d’Astrophysique Bât. 709 Orme des Merisiers DSM/DAPNIA, CEA / Saclay 91191 Gif-sur-Yvette, Cedex Date : 6 mars 2004 Signature : Nom du Laboratoire ou de l’Organisme : CEA/DSM/DAPNIA/SAp & Fédération de Recherche APC (FR 2562) Forme juridique : EPIC Date : 6 mars 2004 Visa du Directeur de Laboratoire ou d'Organisme : 1 I.2. CO-PROPOSANTS : CEA / Service d’Astrophysique et associés : Monique ARNAUD Jean BALLET Jean-Marc BONNET-BIDAUD Rémi CHIPAUX Stéphane CORBEL Bertrand CORDIER Anne DECOURCHELLE Yaël FUCHS Paolo GOLDONI Andrea GOLDWURM Christian GOUIFFES Philippe LAURENT François LEBRUN Olivier LIMOUSIN Félix MIRABEL Doris NEUMANN Jacques PAUL Claude PIGOT Jérome RODRIGUEZ Jean-Luc SAUVAGEOT Michel TAGGER ____________________________________________________________________ Nom, Prénom : Téléphone : Télécopie : e-mail : Adresse : Date : ROQUES, Jean-Pierre Giovanni BIGNAMI Elisabeth JOURDAIN Julien MALZAC Alexandre MARCOWITH 05 61 55 64 53 05 61 55 67 01 [email protected] Centre d’Etude Spatiale des Rayonnements 9, avenue du Colonel Roche Boite postale 4346 31028 Toulouse Cedex 4 Signature : Nom du Laboratoire ou de l’Organisme : Forme juridique : Date : Visa du Directeur de Laboratoire ou d'Organisme : 2 ____________________________________________________________________ Nom, Prénom : MOUCHET, Martine Catherine BOISSON Téléphone : Télécopie : e-mail : Adresse : 01 45 07 75 22 01 45 07 77 09 [email protected] Observatoire de Paris-Meudon, DAEC/LUTH 5 place Jules Janssen, 92195 Meudon Cedex Date : Signature : Nom du Laboratoire ou de l’Organisme : Forme juridique : Date : Visa du Directeur de Laboratoire ou d'Organisme : ____________________________________________________________________ Nom, Prénom : PETRUCCI, Pierre-Olivier Nicolas GROSSO Thierry MONTMERLE Gilles HENRI Téléphone : Télécopie : e-mail : Adresse : 04 76 63 55 22 04 76 44 88 21 [email protected] LAOG – Laboratoire d’Astrophysique de Grenoble 314 rue de la Piscine, 38041 Grenoble Cedex Date : Signature : Nom du Laboratoire ou de l’Organisme : Forme juridique : Date : Visa du Directeur de Laboratoire ou d'Organisme : 3 ____________________________________________________________________ Nom, Prénom : BRIEL, Ulrich Günther HASINGER Wolfgang PIETSCH Norbert MEIDINGER Delphine PORQUET Lothar STRÜDER & Eckard KENDZIORRA (IAA – Tübingen) Téléphone : Télécopie : e-mail : Adresse : + 49 89 30000 3834 + 49 89 30000 3569 [email protected] Max-Planck-Institut für extraterrestrische Physik Giessenbachstrasse 85748 Garching Allemagne ____________________________________________________________________ Nom, Prénom : Téléphone : Télécopie : e-mail : Adresse : PARESCHI, Giovanni Sergio CAMPANA Oberto CITTERIO Gianpiero TAGLIAFERRI + 39 039 9991169 + 39 039 9991160 [email protected] Osservatorio Astronomico di Brera (OAB) – INAF Via E. Bianchi 46 - 23807 Merate (Lc) Italie ____________________________________________________________________ Nom, Prénom : TURNER, Martin Téléphone : Télécopie : e-mail : Adresse : + 44 116 252 3514 + 44 116 252 2464 [email protected] Dept. of Physics and Astronomy, Leicester University Leicester LE1 7RH Angleterre 4 II. OBJECTIFS SCIENTIFIQUES Le projet SIMBOL–X est un télescope haute énergie de nouvelle génération, couvrant par une seule instrumentation continue une gamme s’étendant des rayons X « classiques » aux rayons X « durs » ou « gamma mous », soit de 0.5 à 70 keV environ. En utilisant dans toute cette gamme un dispositif de focalisation réservé jusqu’alors aux rayons X de moins de 10 keV, via la construction d’un télescope de très longue focale s’appuyant sur deux satellites volant en formation, SIMBOL–X permet un gain d’environ deux ordres de grandeur en sensibilité et en résolution angulaire par rapport aux instrumentations classiques en X–durs. Cette gamme d’énergie est celle où les émissions thermiques laissent la place aux émissions plus dures qui signent en particulier l’accélération de particules et la dynamique de l’accrétion de la matière sur un objet central massif. Ces phénomènes sont au cœur des objectifs scientifiques de SIMBOL–X. Avec une résolution angulaire meilleure que 30 secondes d’arc sur toute la gamme d’énergie, une grande couverture spectrale et une sensibilité inégalée au delà de 10 keV, SIMBOL–X sera particulièrement dédié aux études et aux « premières » suivantes : Dans le domaine de la physique de l’accrétion / éjection sur les trous noirs super-massifs et les objets compacts de masse stellaire : • la mise en évidence et la caractérisation de l’émission X–dur du trou noir central de notre Galaxie, SgrA*, dont la très faible activité reste une énigme. Cette émission, inobservable aujourd’hui, permettra de déterminer la dynamique de la matière autour de SgrA*, contraignant les différents modèles en concurrence. • la mesure du spectre et de la variabilité de l’émission des noyaux actifs de galaxies (AGNs), avec une précision inégalée sur la variabilité à court terme et sur la forme du continu haute énergie. Cette dernière est nécessaire non seulement à la compréhension de la géométrie en jeu à grande échelle, mais aussi à la détermination de la forme de la raie du fer, élement de diagnostic crucial de la physique relativiste proche du trou noir. • la mesure du spectre des binaires X de notre Galaxie, avec pour la première fois : l’observation possible d’objets à très faible taux d’accrétion (trous noirs en quiescence), l’étude de la variabilité temporelle rapide (QPO) au delà de 25 keV, et la détermination fine de la forme de la raie du fer en corrélation avec le continu haute énergie. Comme dans les AGNs, et SgrA*, les enjeux sont là aussi la compréhension de la physique de l’accrétion, de la formation de jets, et l’accès à la vitesse de rotation des trous noirs. • la détermination de l’émission dure des systèmes binaires des galaxies du groupe local, en particulier M31 et M33, observables pour la première fois au delà de 10 keV. Dans le domaine de l’accélération de particules aux plus hautes énergies, la spectro-imagerie de l’émission X–dur : • des jets de quasars et microquasars, émission qui pourra être, pour la première fois, séparée de celle de l’objet central, et determination ainsi de l’énergie maximale d’accélération dans des jets. • des restes de supernovae, dont on pense que les chocs sont responsables de l’accélération des rayons cosmiques jusqu’à 1014 eV. On déterminera ainsi les zones priviliégiées d’accélération, et on mesurera l’énergie maximale vraiment atteinte dans ces restes. • des amas de galaxies, dont l'emission à haute energie, très probablement due à la presence d'électrons relativistes, reste très mal connue. La cartographie qui en sera faite pour la première fois permettra de determiner son origine sans ambiguïte, fournira des diagnostics sur les processus d'accéleration par les chocs ou la turbulence et permettra de peser l'importance de la composante non thermique des amas (particules relativistes et champ magnetique) sur l’évolution de ces objets et sur la mesure de leur masse (quantité fondamentale pour la cosmologie). 5 SIMBOL–X s’attaquera par ailleurs à déterminer l’origine des deux composantes diffuses que sont : • l’émission haute énergie du centre de notre Galaxie, qui reste énigmatique malgré les avancées de XMM–Newton et de Chandra. La cartographie de cette composante dans le domaine des X–durs et sa comparaison aux cartes de plus basse énergie permettra de séparer les composantes thermiques et non thermiques, et de tester ainsi les nombreuses hypothèses faites sur les populations et leur localisation à l’origine de cette émisson (gaz chaud, électrons suprathermiques, relativistes). • l’émission du fond diffus X extragalactique. Si celle-ci est essentiellement résolue en sources ponctuelles en dessous de 10 keV, son origine reste à déterminer vers 30 keV au pic de sa densité d’énergie. Avec SIMBOL–X l’on pourra s’assurer de l’existence des sources très enfouies que l’on suppose contribuer à ce fond, les localiser précisément pour pouvoir ensuite déterminer leur décalage spectral et ainsi étudier l’évolution de la distribution de ces sources dans l’histoire de l’Univers. Enfin, SIMBOL–X fournira de précieuses mesures dans d’autres domaines de l’astrophysique des hautes énergies, en particulier : • celui des sursauts gamma. Les capacités de repointage relativement rapide de SIMBOL–X (en dessous de l’heure pour la dynamique du vol en formation) vont en effet permettre de déterminer la variation temporelle et la forme spectrale de l’émission rémanente en X classiques et X–durs des sursauts, fournissant ainsi des contraintes importantes sur l’origine de cette émission. • celui des étoiles jeunes magnétiquement actives, très souvent dans des régions très denses et donc très fortement absorbées. La sensibilité de SIMBOL–X en X–dur permettra d’étudier les régions de formation d’étoiles en s’affranchissant des effets d’extinction, et d’étudier les phénomènes d’accélération autour de ces étoiles, phénomènes qui pourraient contribuer au rayonnement cosmique chargé. L’ensemble des objectifs scientifiques résumés rapidement ci-dessus est développé plus en détail dans le document scientifique joint à cette réponse. Par ailleurs, ils seront aussi discutés lors de l’atelier SIMBOL–X organisé les 11 et 12 mars 2004, atelier dont les présentations seront transmises au groupe ad’hoc du CNES, comme complément d’information. 6 III.SITUATION ACTUELLE DU THEME DE RECHERCHE Replacer le projet dans le contexte national et international L’étude des sites astrophysiques à forte émission non thermique, et accélérateurs de particules, est un domaine extrêmement dynamique aujourd’hui. C’est en particulier dû aux données nouvelles que fournissent les satellites X à forte sensibilité et fort pouvoir spectro-imageur en dessous de 10 keV (XMM–Newton et Chandra), et ceux en X–durs comme RXTE (ou le défunt BeppoSAX) qui permettent de caractériser les sources fortes jusqu’à plus de 100 keV, mais avec une sensibilité bien moindre que leurs homologues des X de moins de 10 keV, et sans capacité d’imagerie. Si la communauté la plus intéressée est bien sûr, en France, celle du GDR PCHE, les objectifs scientifiques de SIMBOL–X et ses potentialités devraient intéresser d’autres communautés, comme par exemple celle du PNC pour les questions de fond diffus ou d’étude des amas, ou le PNPS pour la physique stellaire. Bon nombre des thèmes scientifiques de SIMBOL–X sont aussi ceux d’IBIS sur INTEGRAL. Mais la technique de masque codé utilisée ne donne pas à IBIS la sensibilité et la résolution spatiale (12 minutes d’arc FWHM) nécessaire pour atteindre les objectifs de SIMBOL–X qui s’attaque à des sources d’émission à faible flux, ou qui demandent une bonne séparation angulaire. A titre d’exemples, il n’a pas été possible de savoir si l’émission haute énergie du centre de la Galaxie vue par IBIS est due ou non à SgrA* pour des questions de résolution angulaire, et l’on ne peut détecter que relativement peu d’AGN, et faire un spectre pour une poignée seulement pour des questions de sensibilité. En poussant l’utilisation des miroirs en incidence rasante au delà de leur limite actuelle, grâce aux possibilités de satellites volant en formation, SIMBOL–X va permettre à la gamme X durs jusqu’à au moins 70 keV de bénéficier des avantages révolutionnaires en termes de sensibilité et de résolution angulaire qu’apportent les systèmes à focalisation, comme en bénéficient depuis plusieurs siècles l’astronomie optique, et depuis une quarantaine d’année l’astonomie X « classique ». La sensibilité de détection de SIMBOL–X est representée ci-dessous, en regard de celles des télescopes X et gamma passés et présents. La sensibilité de SIMBOL–X est de moins de 1 mCrab à 10 keV et de 5 mCrab à 30 keV pour 100 ks d’observation. Elle est équivalente à celle d’INTEGRAL IBIS à 70 keV. Fig.S1 : Sensibilité de détection de SIMBOL–X pour une source ponctuelle, ou pour une émission diffuse intégrée dans un diamètre égal à 1 minute d’arc (0.8 arcmin2), comparée aux sensibilités de détection de sources ponctuelles d’autres instruments (estimations prélancement pour XMM, Chandra, et INTEGRAL). Le calcul est fait pour une détection à 5 s en un temps d’intégration de 100 ks. Cette double tendance, augmenter à la fois la résolution spatiale et l’énergie maximale de focalisation, est une priorité reconnue de l’ensemble de la communauté mondiale des hautes énergies. Les deux grands projets Constellation X aux Etats Unis et XEUS en Europe, prévoient ainsi tous deux d’avoir une grande surface de détection jusqu’à au moins 40 keV. Le premier fait appel à quatre satellites indépendants, avec chacun un télescope X classique (énergie de moins de 10 keV) 7 et trois télescopes X durs ; ces derniers devraient être à base de miroirs en feuille d’aluminium multicouches avec une courte focale, ce qui donnera une résolution spatiale de 1 minute d’arc au mieux, pour une surface de 1500 cm2 à 40 keV. Le second fait appel à deux satellites volant en formation, dans un concept identique à celui de SIMBOL–X ; dans sa version nominale XEUS a des miroirs de technologie dérivée de celle d’XMM–Newton, aussi couverts d’un revêtement multi-couche, avec une surface similaire à celle de Constellation X à 40 keV, mais avec une bien meilleure résolution spatiale (de l’ordre de 2 secondes d’arc). Une version basée sur une optique plus légère, actuellement en développement mais encore très loin des besoins de XEUS, est à l’étude à l’ESA ; dans cette version XEUS serait toujours basé sur une très longue focale et deux satellites, mais serait placé en L2. Cette configuration nécessiterait deux lancements indépendants, un pour le satellite miroir et un pour le satellite détecteur (qui serait lancé indépendamment de l’ESA). La mise en configuration de vol en formation s’effectuerait par rendez vous en L2. Les dates des deux lancements prévus pour Constellation X sont maintenant placées en 2016 par la NASA. La date de lancement de XEUS n’est aujourd’hui pas spécifiée, mais ne peut pas être de façon même optimiste avant 2016, aux dires même du président du comité de direction de XEUS. En dehors de ces grands projets dont l’existence est probablement assurée, mais la date de lancement au-delà de 2015, il existe deux autres projets de satellites s’attaquant à l’imagerie à haute énergie de façon similaire à SIMBOL–X : NuSTAR et NeXT. NuSTAR est un projet américain en phase de pré-étude dans le cadre de la sélection en cours d’une prochaine mission SMEX. Il est basé sur un ensemble de quatre télescopes co-alignés avec une optique multicouche, monté sur un bras mécaniquement extensible pour donner 9 mètres de focale, et sur des plans focaux à base de détecteurs CZT. Le tout serait placé en orbite basse. La gamme d’énergie annoncée est de 6 à 80 keV, et la résolution angulaire de 40 secondes d’arc. Aucune surface efficace n’est donnée officiellement pour ce projet, mais elle serait bien plus faible que pour SIMBOL–X (communication privée). Indépendamment de la complication apparente d’un tel projet par rapport aux capacités des SMEX, qui peut faire douter de ses chances de sélection réelle, on peut aussi noter que l’énergie minimale de NuSTAR est très haute et ne permet de mesurer ni la raie du fer, ni la partie thermique des émissions, ni la densité de colonne, toutes quantités variables et cruciales pour l’interprétation de l’émission des sources hautement variables comme les AGNs et les trous noirs accrétants. Officiellement, deux missions SMEX devraient être sélectionnées à l’automne de cette année, pour des lancements en 2007 et 2008. Les autres projets en concurrence avec NuSTAR sont DUO (relevés en X dans la gamme d’énergie d’XMM, à but cosmologique) dont les chances seraient très fortes, IBEX (imagerie de l’interface entre héliosphère et milieu interstellaire), JMEX (étude de la magnétosphère de Jupiter), NEXUS (étude de la couronne solaire). NeXT est un projet d’instrument haute énergie japonais, pour la mission Astro-G. Il aurait de l’ordre de 1000 cm2 de surface de collection à 50 keV, pour une résolution spatiale de 30 à 40 secondes d’arc, avec une technique de miroirs multicouches. Son plan focal pourrait être une combinaison CCD et CdZnTe, comme proposé pour SIMBOL–X. Il est envisagé de lancer NeXT sur une fusée japonaise M-V, au début de la prochaine décennie. À la connaissance des proposants, aucune sélection officielle n’est aujourd’hui acquise. On peut enfin noter l’existence du projet américain EXIST du côté des hautes énergies. Ce projet dont l’objectif scientifique est un grand relevé au delà de 10 keV utilise une technique de masque codé avec un détecteur CdZnTe de 8 m2. Les caractéristiques résultantes en termes de résolution angulaire (5 minutes d’arc) et de sensibilité de 5 10-13 ergs cm-2 s sont bien moindres que celles de SIMBOL–X (< 30 secondes d’arc, 2 10-15 ergs cm -2 s), ce qui rend les objectifs scientifiques de SIMBOL–X tout à fait inatteignables par EXIST. Au vu des calendriers des très grands projets, et des incertitudes sur les autres projets, SIMBOL–X sera en toute probabilité le premier instrument spatial focalisateur au-delà de 10 keV. Ceci garantit, au bénéfice de la communauté astrophysique française, des résultats scientifiques et des découvertes de tout premier ordre. 8 IV. DESCRIPTION DU DISPOSITIF EXPERIMENTAL Décrire le dispositif expérimental et le scénario de mission envisagé Le télescope SIMBOL–X est dans son principe similaire aux télescopes X classiques (tels XMM–Newton et Chandra). Il s’appuie ainsi sur une optique à base de miroirs attaqués en incidence rasante, dans la configuration optimale dite de Wolter I, optique focalisant les rayons X sur un plan détecteur où s’effectue la mesure de la position, de l’énergie, et du temps d’arrivée de chaque photon incident. Il existe un angle limite d’attaque pour que la réflexion ait lieu, et cet angle est d’autant plus petit que l’énergie des photons à réfléchir est grande. L’obtention d’une optique focalisatrice pour des énergies de plusieurs dizaines de keV, avec une surface efficace importante, passe ainsi par une géométrie permettant de très faibles angles d’attaque pour des grands diamètres de miroir, c’est à dire de très grandes longueurs focales. Dans le cas de SIMBOL–X, une distance focale de 30 mètres a été jugée comme offrant le meilleur compromis surface efficace / énergie maximale / complexité du plan focal / complexité du miroir. Une telle distance focale ne peut être raisonnablement atteinte qu’en séparant physiquement le système optique du plan focal, c’est à dire en construisant un télescope sans tube s’appuyant sur deux satellites volant en formation comme indiqué sur la figure ci-contre. La charge utile de SIMBOL–X a fait l’objet d’une publication détaillée à la conférence SPIE d’août 2003 (Ferrando et al., Proc. SPIE 5168, 65, astro-ph/0309424). La faisabilité du vol en formation pour SIMBOL–X a quant à elle fait l’objet d’une étude poussée par une équipe du PASO du CNES, étude dont les conclusions ont été présentées au début 2004. Nous reprenons très succinctement ici les principaux points relatifs à la charge utile, à la faisabilité du vol en formation, et au scénario de mission envisagé. De plus amples informations peuvent être obtenues dans l’article cité ci-dessus pour ce qui est des différentes composantes de la charge utile, ainsi qu’auprès du PASO (ou des proposants) pour ce qui est de la pré-étude de l’ensemble de la mission. Charge utile Le miroir Le miroir sera fourni par l’Observatoire Astronomique de Brera (OAB, Merate, Italie), dont les équipes ont une longue expérience de fabrication de miroirs en rayons X. Elles ont en particulier fourni les miroirs de BeppoSAX, de Jet–X (et donc de SWIFT) et ont développé la technique de fabrication des miroirs d’XMM–Newton, la fabrication industrielle ayant été sous-traitée à l’industriel italien MediaLario. Un montage similaire sera mis en place pour SIMBOL–X. L’optique nominale pour SIMBOL–X est basée sur des coquilles de nickel recouvertes d’une couche réflectrice de platine en utilisant une technique identique à celle des miroirs d’XMM–Newton (dont la couche réflectrice est en or). Le tableau et la figure ci-dessous donnent les caractéristiques essentielles de cette optique. 9 Diamètre Max/min Longueur focale Hauteur du miroir Configuration Nombre de coquilles Couche réflectrice Angles min et max Materiau des coquilles Epaisseur des coquilles Masse du miroir Champ de vue (50 % vignetting) Résolution angulaire (HEW) Surface collectrice @ 30 keV Consommation électrique 600/290 mm 30000 mm 600 mm Wolter I 100 Pt o 0.07 /0.142o Ni 0.12/0.30 mm 213 kg 6 arcmin 30 arcsec 580 cm2 200 W Caractéristiques du miroir nominal de SIMBOL–X La puissance électrique mentionnée (200 W) correspond au contrôle thermique des miroirs, nécessaire à assurer la stabilité des qualités optiques, sur l’orbite et pour un miroir entièrement ouvert sur le ciel (des deux côtés). Cette puissance pourrait être largement diminuée si une protection thermique transparente aux X était placée en entrée et sortie du miroir. Il est important de noter que si ce miroir répond aux exigences scientifiques de la mission, il y a deux possibilités d’amélioration que l’on peut envisager d’examiner en phase A en collaboration étroite avec l’étude de mission, dans un processus d’optimisation de l’ensemble. La première consiste à augmenter la masse du miroir dans les mêmes conditions de technologie, ce qui permettrait d’améliorer la résolution angulaire via une meilleure rigidification des coquilles. La seconde consiste à couvrir les coquilles extérieures d’un revêtement multicouche, technologie maitrisée par l’OAB, qui permettrait de gagner en surface jusque vers 70 keV, et de permettre ainsi à SIMBOL–X de s’attaquer à la détection des supernovae jeunes via la mesure des raies du 44Sc, fils du 44Ti. Le plan focal Le plan focal doit couvrir largement l’ensemble du champ de vue, avoir des capacités d’imagerie permettant le suréchantillonage de la tâche focale, bénéficier d’une efficacité de détection maximale sur toute la gamme d’énergie couverte par le miroir, fournir une mesure d’énergie précise au niveau des raies élementaires, en particulier du fer, et une datation des temps d’arrivée autorisant les études de variabilité rapide. Il doit aussi avoir une forte capacité de réjection des bruits de fond parasites induits par le passage des particules chargées. Cet ensemble de contraintes conduit à un concept de détecteur à deux plans imageurs, tel que montré dans le schéma de principe ci-dessous. Le premier plan imageur rencontré par les photons en provenance du miroir sera à base de silicium, et détectera les photons de basse énergie. Le second sera à base de cristaux de CdZnTe garantissant l’absorption totale des photons jusqu’à 80 keV. L’énergie de transition entre les deux plans, correspondant à une transparence de 50 % du silicium, est située à 17 keV. Le tout sera muni d’une anticoïncidence active pour minimiser le bruit de fond, et d’un filtre optique pour supprimer la lumière optique et UV parasite. 1 0 Schéma de l’ensemble détecteur du plan focal L’imageur basse énergie sera une matrice monolithique de détecteurs à dérive en silicium (« SDD »), de 450 mm d’épaisseur, lus par des amplificateurs DEPFET intégrés. Ils sont développés par le Max Planck Institut à Garching. Cet ensemble est très flexible au niveau de l’adressage des pixels pour la lecture, et la lecture est elle même très rapide (quelques micro-secondes pour une ligne complète). Ces détecteurs ont aussi l’avantage de fonctionner à température ambiante, comme le reste du plan focal. La lecture rapide donnera la possibilité de faire travailler les détecteurs en anti-coïncidence les uns par rapport aux autres, et ainsi de réduire considérablement le bruit de fond. La taille des pixels, sur laquelle la technologie permet une très grande flexibilité, sera la même que celle de la matrice CdZnTe, soit 500 mm. L’électronique de lecture des SDD sera livrée avec le plan détecteur par le MPE–Garcing. L’imageur haute énergie sera une mosaïque de détecteurs pixellisés à base de CdZnTe, de 2 mm d’épaisseur. Ce type de cristal, très similaire au CdTe qui fonctionne de manière particulièrement satisfaisante sur INTEGRAL/IBIS, est maintenant envisagé dans la plupart des projets d’astronomie X–durs et gamma. Il a l’avantage d’avoir un fort pouvoir d’arrêt, d’offrir une résolution spectrale amplement suffisante pour les besoins de SIMBOL–X (~ 600 eV FWHM à 60 keV), et de fonctionner à température ambiante. Le pas des pixels choisi est de 500 mm, pour des cristaux de 1 cm de côté. La figure cicontre montre comment cette mosaïque pourrait être agencée dans le plan focal. Schéma de positionnement des 37 matrices de CdZnTe Ces détecteurs, et leur électronique de formant le plan imageur haute énergie de SIMBOL–X. lecture associée (ASIC IDeF–X) font actuellement l’objet d’une étude R&D CNES conduite par Olivier Limousin au CEA/DAPNIA. Les premiers prototypes de la chaîne de développement de ces ASICs ont été fondus, et sont en cours de tests au laboratoire où ils montrent des caractéristiques très prometteuses. Enfin, le filtre optique sera constitué d’une feuille de 0,1 mm d’aluminium, que le MPE envisage de déposer directement sur le plan silicium. La nature précise du détecteur d’anticoïncidence reste quant à elle à définir. Il pourrait s’agir d’un scintillateur plastique lu par une ou plusieurs photodiodes. 1 1 Outre l’électronique de lecture proche rapidement mentionnée ci-dessus, la charge utile comprendra également un boîtier de gestion de l’ensemble du plan focal. Il s’occupera de la mise sous-tension et du paramétrage des détecteurs, ainsi que de l’acquisition des données des différents détecteurs, de leur mise en coïncidence, et du formattage de ces informations pour transmission à la télémétrie. Le tableau ci-dessous résume les caractéristiques de la charge utile « plan focal », ainsi que les performances de l’ensemble du télescope. Caractéristiques de l’ensemble instrumental Gamme d’énergie 0.5–70 keV Résolution spectrale 130 eV 1% Résolution angulaire < 30 sec d’arc @ 6 keV (SDD) @ 60 keV(CZT) Caractéristiques plan focal Diam. plan focal hors tout 15 cm Température plan focal ≤ 20° C Nb boîtiers électronique 4 Volume total électronique 33 litres Connaissance du pointage < 3 sec d’arc Consommation totale 40 W Champ de vue 6 min arc (50 % vign.) > 550 cm2 E < 35 keV 150 cm2 @ 50 keV 10 cm2 @ 67 keV Masse totale 40 kg Surface efficace Débit de données 48 kbits/s Sensibilité 5 10-8 ph/cm2/s/keV < 40 keV (5 s, 100 ks, DE = E/2) Sensibilité, débit de données Pour conclure sur les performances instrumentales, nous donnons ci-contre la courbe de sensibilité de SIMBOL–X pour la détection de sources ponctuelles (1 Ms, 3 s, DE = E/2) Cette sensibilité est aussi celle pour la mesure du flux diffus dans une zone ayant un diamètre d’une minute d’arc. Cette courbe a été calculée en prenant des hypothèses très réalistes, voire pessimistes, sur le bruit de fond interne de l’instrument, et tenant compte du bruit de fond diffus du ciel (bulle locale et fond extragalactique) responsable de la remontée à basse énergie. On a porté sur la même figure la sensibilité d’IBIS sur INTEGRAL, telle que mesurée en vol. La télémétrie a été dimensionnée pour pouvoir transférer au sol tous les évènements correspondant à une source d’intensité « 1 Crabe », pour laquelle le détecteur CdZnTe comptera environ 50 c/s, et le SDD environ 450. En se basant sur 96 bits par événement comme pour les données EPIC/MOS sur XMM–Newton, la transmission de l’ensemble des données d’une telle source nécessite 48 kbits/seconde. Le taux de comptage des évènements de bruit de fond est, comme pour XMM–Newton, négligeable par rapport au photons de la source. Pour les rares sources d’intensité plus forte, des stratégies simples de sélection et de compression de données seront mises en œuvre afin de conserver tous les photons les plus énergétiques, et de ne perdre aucune précision sur l’information scientifique à plus basse énergie. 1 2 Orbite, contraintes de positionnement, faisabilité et scénario de mission Orbite et durée de la mission Il n’y a pas de contraintes très fortes sur l’orbite, en dehors de celle de ne pas être dans les ceintures de rayonnement. L’étude du PASO a montré qu’une orbite terrestre proche est impossible du point de vue vol en formation, du moins pour le type de satellite de masse moyenne envisagé. Il faut alors s’éloigner suffisamment de la terre pour sortir des ceintures. L’expérience XMM montre que le bruit de fond peut être fort jusqu’à environ 75 000 km (à l’inclinaison d’XMM), si bien qu’il faut être situé en dessus pour les observations. C’est la seule contrainte scientifique dure pour le choix d’orbite. Il y a deux autres contraintes scientifiques souhaitables, mais non vitales pour la mission. La première est de permettre des observations ininterrompues pendant toute leur durée (typiquement 50 à 100 ks), pour les études de variabilité. La seconde est de pouvoir rediriger la direction de visée à n’importe quel moment pour répondre à des alertes comme celle des sursauts gamma. L’orbite choisie dans l’étude CNES/PASO pour SIMBOL–X répond à toutes ces contraintes. C’est une orbite circulaire terrestre à 81 500 km d’altitude, dans le plan de l’écliptique, avec une période de 3 jours solaires. Contrairement aux satellites comme INTEGRAL ou XMM–Newton, qui plongent régulièrement dans les ceintures à électrons, cette orbite n’introduit en elle-même aucune limitation sur la durée des observations. Combinée aux capacités de télémétrie bas et haut débit envisagées sur les satellites, elle permet aussi de n’utiliser qu’une seule station sol à heures régulières, celle de Kourou dans l’étude PASO, pour l’acquisition des données qui se ferait deux fois par orbite comme indiqué dans le schéma ci-contre où les positions de SIMBOL–X et Kourou (KRU) sont données à 1,5 jours d’écart. Le satellite reste de plus en contact permanent avec le sol, par un lien bas débit qui permet entre autres de changer de direction de visée sur alerte. Les sources célestes qui feront l’objet de demandes d’observation avec SIMBOL–X sont en très grand nombre, et variables, si bien que l’on peut facilement imaginer une utilisation intense et fructueuse de cet observatoire pendant de nombreuses années. Si nous nous tenons au cœur des objectifs de la mission, nous estimons qu’une durée effective de 2 ans d’observations est nécessaire pour les réaliser. En tenant compte des périodes de recette en vol, d’étalonnage, etc., une durée totale de mission de 3 ans est demandée. Contraintes de positionnement des satellites Les observations sont pointées vers une cible céleste fixe, qui doit être visée par le télescope de façon continue pendant une durée au moins aussi grande que 100 ks, durée typique d’une observation longue. Il est demandé que la direction de visée absolue soit conservée à ± 10 secondes d’arc pour ne pas introduire de variations trop importantes des paramètres optiques de l’observation en un point donné. Il est aussi demandé que cette direction de visée soit connue à chaque instant avec une précision meilleure que ± 3 secondes d’arc. Les contraintes scientifiques sur la position relative d’un satellite par rapport à l’autre sont : 1. maintien de la distance focale à ± 1 cm près le long de l’axe (f = 30 m), pour assurer une qualité de focalisation constante, 1 3 2. maintien de l’angle axe du miroir / plan focal à 90 degrés ± 8 degrés, pour assurer une qualité d’image constante, 3. maintien de l’axe du miroir au centre du plan focal à ± 1 cm, afin d’assurer que l’ensemble du champ de vue du miroir reste en permanence dans l’intégralité du plan focal. Faisabilité et scénario de mission L’équipe CNES/PASO a étudié en détails de très nombreux scénarios au niveau des plateformes satellites, des équipements, des possibilités de lancement, etc. Cette étude a tout d’abord démontré la faisabilité de la mission proposée, avec les contraintes demandées. Parmi les solutions possibles, une solution optimale en termes de simplicité, de robustesse de concept, et de coût a été dégagée. Cette solution consiste à utiliser pour SIMBOL–X deux satellites dédiés, lancés par une fusée Soyuz équipée d’un étage Fregat. Dans ce scénario, l’ensemble est mis à poste quasi-directement après lancement grâce à la poussée donnée par l’étage réallumable Fregat, à laquelle est ajoutée une poussée supplémentaire procurée par les propulseurs hydrazine du satellite miroir. Une fois sur son orbite circulaire, les deux satellites sont séparés, et sont mis dans la configuration de vol en formation requise. La figure ci-dessous montre la configuration de l’ensemble au lancement, avec l’étage Frégat surmonté du satellite miroir, lui même surmonté du satellite détecteur, et juste après la séparation sur l’orbite finale. Configuration des satellites au lancement, et après séparation sur l’orbite finale Il est important de noter que cette solution réutilise de façon maximale des équipements ou des sous ensembles des filières Myriade et Proteus, de satellites en développement (Pléiades) ou en vol (Grace). Au niveau des masses, l’ensemble des deux satellites (le composite) a une masse d’environ 1000 kg, en incluant la masse de gaz nécessaire au maintien du vol en formation (propulsion par gaz froid, N2). Cette masse est partagée en ~ 270 kg pour le satellite détecteur et ~ 730 kg pour le satellite miroir (avec 46 kg d’hydrazine pour le lancement). 1 4