13/14 WERTHER Jules massenet dossier pédagogique Dossier proposé dans le cadre du dispositif Lycéens à l’Opéra, financé par la Région Rhône-Alpes. Dossier réalisé sous la direction de David Camus Coordination générale élodie Michaud Rédaction des textes Jonathan Parisi Suivi de fabrication Aurélie Souillet Document disponible en téléchargement sur www.operatheatredesaintetienne.fr Contacts Clarisse Giroud Chargée de la médiation et de l'action culturelle 04 77 47 83 62 / [email protected] WERTHER JULES MASSENET Drame lyrique en 4 actes et 5 tableaux Livret d’Édouard Blau, Paul Milliet et Georges Hartmann D’après le roman épistolaire de Goethe Les souffrances du jeune Werther Direction musicale Laurent Campellone Mise en scène Laurent Fréchuret Décors Rudy Sabounghi Costumes Claire Risterucci Lumières Laurent Castaingt Werther Alexey Dolgov Charlotte Marie Kalinine Albert Lionel Lhote Sophie Magali Arnault Stanczak Le Bailli Frédéric Goncalves Orchestre Symphonique Saint-Étienne Loire Maîtrise du Conseil général de la Loire Grand Théâtre Massenet Vendredi 21 mars 20h Dimanche 23 mars 15h Mardi 25 mars 20h Durée 2h40 entracte compris - En français surtitré Une heure avant chaque représentation, propos d'avant spectacle par Jonathan Parisi, musicologue. Gratuit sur présentation de votre billet. Nouvelle production de l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne Décors, costumes et accessoires réalisés dans les ateliers de l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne SOMMAIRE Découverte de l’œuvre p.06 Jules Massenet La genèse de Werther Personnages et argument Guide d'écoute p.17 Werther àNotel’Opéra Théâtre de Saint-Étienne d'intention de Laurent Fréchuret Les maîtres d'œuvre Les solistes L'orchestre et le chœur Iconographie commentée de la production Pistes pédagogiques p.22 Piste 1 - Réécrire une scène de Werther Piste 2 - Mettre en scène les adieux de Werther et Charlotte Piste 3 - Le héros romantique dans Werther et les arts en général Ressources supplémentaires p.31 L’Opéra Théâtre de Saint-Étienne / Présentation générale Petite histoire d’une production Annexes p.34 Voix et tessitures Composition de l'orchestre Glossaire Bibliographie sélective DECOUVERTE DE L'OEUVRE Jules Massenet (1842 - 1912) 6 Qu’on le nomme ironiquement la « fille de Gounod », pour la sensualité de son écriture mélodique, qu’on l’accuse de plagier Richard Wagner ou qu’on lui reconnaisse enfin un style prédebussyste, Massenet ne laisse définitivement indifJules Massenet, Bruxelles, 1881 férent ni le simple auditeur ni le spécialiste. Né à Montaud, aujourd'hui quartier de Saint-Étienne, Massenet débute son apprentissage musical par le piano, que lui enseigne sa mère. Dès l'âge de six ans, la mutation professionnelle de son père entraîne toute la famille vers la capitale et le jeune garçon intègre dès 1853 le Conservatoire de Paris. Obtenant un premier prix de piano en 1859, puis un premier prix de contrepoint en 1863, Massenet concourt alors pour le grand prix de Rome. À l'âge de 21 ans, Massenet remporte alors cette distinction suprême qui fait désormais de lui un compositeur reconnu. Les vingt-six opéras qu'il compose dans sa carrière vont même l'élever au rang de compositeur le plus prolixe du théâtre lyrique français du XIXe, rencontrant En bref : Jules Massenet vu par Claude Debussy Au lendemain de la mort de Massenet, Debussy, chargé de la nécrologie du compositeur pour le journal Le Matin, écrit : « Ses confrères lui pardonnèrent mal ce pouvoir de plaire qui est proprement un don. À vrai dire, ce don n’est pas indispensable, surtout en art, et l’on peut affirmer, entre autres exemples, que jamais Focus sur Massenet et Saint-Étienne Parce-qu'elle a vu naître Massenet, la ville de SaintÉtienne a rendu à travers l'histoire de nombreux hommages au compositeur de Manon. L'un de ces premiers hommages date de 1912, soit l'année même de la disparition du compositeur, où le Théâtre municipal de la ville est baptisé Théâtre Massenet. En 1914, une plaque sculptée par Lamberton est apposée sur la pour la plupart l’approbation du public parisien, provincial, puis étranger. Si bien qu’à l’aube du XXe siècle, Massenet est un compositeur dont la renommée s’étend dans l’Europe entière, où les deux grands chefsd’œuvre populaires que sont Manon (1884) et Werther (1892) demeurent les plus joués. Compositeur mais aussi professeur de composition au Conservatoire de Paris, sa classe va accueillir Reynaldo Hahn, Alfred Bruneau, Gabriel Pierné, Xavier Leroux, Gustave Charpentier, etc. Titulaire du grand prix de Rome, élu à l’Académie des Beaux-Arts, élevé au grade de Commandeur de la légion d’honneur, Massenet reçoit tous les lauriers dont peut s’enorgueillir un compositeur de son temps. Pourtant, il demeure un musicien insaisissable, autant critiqué qu’adulé, un homme secret, superstitieux, fuyant les premières de ses œuvres et refusant le chiffre 13 dans la numérotation de ses manuscrits. Aujourd’hui la qualité et la diversité de son œuvre n’est plus à prouver, même si Massenet demeure surtout lié à la peinture de la femme, autant pour son écriture musicale soignée et voluptueuse, que pour son sens inné de la dramaturgie, la construction subtile et raffinée de ses personnages. Jean-Sébastien Bach ne plut, dans le sens que ce mot prend, lorsqu’il s’agit de Massenet. A-t-on entendu dire des jeunes modistes qu’elles fredonnaient la Passion selon Saint-Mathieu ? Je ne le crois pas. Tandis que tout le monde sait qu’elles s’éveillent le matin en chantant Manon ou Werther. » maison natale du compositeur, place de la Terrasse, rebaptisée à son tour place Massenet en 1920. Puis c'est une muse, érigée en 1929 avenue de la Libération, qui rend un nouvel hommage au compositeur. Sans parler du Conservatoire de la ville, appelé Conservatoire Massenet, ou de la grande salle de l'Opéra Théâtre, baptisée depuis 2001 Grand Théâtre Massenet. LA GENÈSE DE WERTHER Affiche de la création française de Werther, Opéra-Comique, 1893. Si le projet de composer un opéra consacré à Werther apparaît dès 1880 et précède donc la composition de Manon (1884), il faut attendre 1886 pour qu'un évènement tout particulier vienne raviver l'inspiration du compositeur. Massenet raconte alors : « Le dimanche 1er août 1886, nous étions, Hartmann et moi, allés entendre Parsifal au Théâtre Wagner, à Bayreuth. [... ] Après avoir parcouru ensuite quelques villes de l'Allemagne, visité différents théâtres, Hartmann, qui avait son idée, me mena à Wetzlar. Nous visitâmes la maison où Goethe avait conçu son immortel roman, Les Souffrances du jeune Werther. Je connaissais les lettres de Werther, j'en avais gardé le souvenir le plus ému. Me voir dans cette même maison, que Goethe avait rendu célèbre en faisant vivre d'amour son héros, m'impressionna profondément.» (Massenet, Mes Souvenirs, 1912). Georges Hartmann, l'éditeur de Massenet, profite même de ce séjour à Wetzlar pour offrir au compositeur un exemplaire du roman dans ce qu'il juge être la meilleure traduction française. Parcourant les célèbres vers d'Ossian, cités par Goethe, Massenet comprend alors que le projet de Werther ne le quittera plus... C'est ainsi que les librettistes Édouard Blau et Paul Milliet sont sollicités par Hartmann pour rédiger avec lui le livret en quatre actes de ce nouveau drame lyrique. L'œuvre, achevée dès 1887, est cependant mal accueillie par le directeur de l'Opéra-Comique, Léon Carvalho, qui la juge trop lugubre pour son théâtre. Mais le sort de Werther allait bientôt être scellé par un tout autre évènement. En effet, le 25 mai 1887, un incendie se déclare salle Favart et embrase l'édifice tout entier. Le directeur est bientôt démis de ses fonctions et l'OpéraComique devra attendre plusieurs années avant de réouvrir ses portes. La partition de Werther passe alors quatre années dans un tiroir avant que Massenet, contacté par le Théâtre Impérial de Vienne, décide que « le peu de bon vouloir des directeurs français [l']avait rendu libre de disposer de cette partition ». Werther, l'un des sommets de l'art lyrique français, sera ainsi créé en langue allemande ! Ce seront donc le célèbre ténor belge Ernest Van Dyck, avec lequel Massenet va entretenir une correspondance assidue, et Mlle Marie Renard qui créeront Werther et Charlotte. Reçu en grandes pompes dans la capitale autrichienne, Massenet passe un séjour idéal et marquant. Il est traité en grand maestro par la direction de l'Opéra qui lui permet même de s'investir totalement dans les répétitions de l'œuvre, prenant en compte chacune de ses exigences, tant sur le plan musical que sur le plan scénique. Avant même de rejoindre Vienne, Massenet écrit d'ailleurs à Van Dyck au sujet des changements de décors, des effets de lumières, de l'effet de neige pour la nuit de Noël, se montrant alors très impliqué dans la mise en scène de sa nouvelle œuvre. Werther est ainsi créé le 16 février 1892 à Vienne et rencontre un tel succès que Léon Carvalho, ayant tout récemment repris la direction de l'Opéra-Comique, prie Massenet de bien vouloir lui confier la création française de l'œuvre pour la saison suivante. Onze mois plus tard, jour pour jour, Werther est ainsi créé en français à l'Opéra-Comique, remportant les faveurs du public parisien pour lequel il avait été initialement écrit. 7 Goethe ou les souffrances du vieil auteur... 8 Mort à l'âge de 82 ans, Johann Wolfgang von Goethe est resté toute sa vie, dans l'esprit de ses contemporains, comme l'auteur de Werther, au point d'entretenir une relation ambiguë avec son roman. Tout en ne ratant pas une seule occasion de s'enorgueillir du succès international de son œuvre, écrite à seulement 22 ans, Goethe va devoir endurer la curiosité du public le questionnant inlassablement quant à la véracité des évènements décrits. Ayant lui-même connu la mélancolie, le doute quant au suicide, et ayant surmonté cette crise existentielle en transformant le réel en poésie, rien ne fût plus douloureux pour Goethe que de voir le lecteur plus intéressé par l'anecdotique que la portée esthétique de son roman. Plus encore, une vie entière passée à exister à travers le seul prisme d'une œuvre de jeunesse, semble avoir pesé sur l'existence entière de l'auteur, au point d'affirmer : « Ah ! que de fois j’ai maudit ces pages folles qui aux hommes ont fait connaître mes juvéniles souffrances. Werther aurait été mon frère et je l’aurais tué, que sa triste ombre ne me poursuivrait pas davantage de sa vengeance. ». Goethe, par Joseph Karl Stieler, 1828 En bref : Les effets Werther ! Suite à la publication de l'œuvre, en 1774, une "fièvre Werther" s'empara de l'Allemagne entière avant de gagner peu à peu l'Europe. Les jeunes hommes s'habillaient en costume jaune et bleu, selon la tenue de bal de Werther, et les jeunes femmes en robes roses et blanches, à la manière de Charlotte. Mais plus encore, le succès du roman n'influença pas seulement la mode vestimentaire mais déclencha de très nombreux suicides par revolver, tant il faisait bon mourir à la manière du jeune héros. Aujourd'hui, l'expression "effet Werther" a été consacrée et désigne un phénomène social selon lequel la médiatisation d'un suicide en entraînerait une série d'autres, par contagion. Personnages et argument Personnages principaux Werther (ténor) - jeune poète Charlotte (mezzo-soprano) - fille aînée du Bailli Albert (baryton) - fiancé de Charlotte Sophie (soprano) - sœur cadette de Charlotte Le Bailli (baryton-basse) - père de Charlotte Schmidt (ténor) - ami du Bailli Johann (baryton) - ami du Bailli Bruhlmann (coryphée*) - jeune homme Kätchen (coryphée) - fiancée de Bruhlmann Fritz, Max, Hans, Karl, Gretel, Clara (voix d'enfants) - enfants du Bailli L’action en deux mots… Chargé d'accompagner Charlotte au bal, le jeune Werther se prend d'amour pour sa cavalière. Il n'aura alors de cesse de vivre à ses cotés. Mais la jeune femme est sur le point d'épouser Albert, ainsi qu'elle l'a promis à sa défunte mère. Mme Marié de l'Isle en Charlotte, Opéra-Comique, 1903 (Le Théâtre n°109, juillet 1903) Argument Acte I, La maison du Bailli : Juillet... Le Bailli de Wetzlar, veuf et père de huit enfants, responsabilité qui en a résulté, Werther, pris d'un élan fait répéter aux plus jeunes d'entre eux un cantique, passionné, lui avoue l'ampleur de son amour. Mais la tandis que ses amis Schmidt et Johann retrouvent voix du Bailli résonnant au loin et informant Charlotte Sophie, la cadette de la famille, pour évoquer ensemble du retour d'Albert, brise aussitôt cette idylle naissante. le bal qui sera donné le soir même. Passant en revue En un éclair, Charlotte se rappelle le serment fait à sa les différents invités, les compères ne tombent pas mère d'épouser Albert. Werther, désespéré, lui fait d'accord quant à celui qui fera un bon époux pour promettre de tenir parole, avant de s'avouer à lui-même Charlotte, l'aînée de la famille. Alors que le Bailli qu'il mourra sûrement de la voir mariée à un autre. accorde toute sa confiance à Werther, Schmidt et Johann trouvent celui-ci bien trop mélancolique et rêveur et préfèrent nettement Albert, son actuel fiancé. Tandis que Charlotte donne le goûter à ses frères et sœurs, Werther arrive à la demeure du Bailli. Celui-ci présente aussitôt le jeune homme à sa fille aînée, dont il vante d'emblée les soins maternels qu'elle prodigue à ses jeunes frères et sœurs depuis la disparition de son épouse. Le soir venu, Albert se présente à la maison du Bailli et trouve Sophie qui l'accueille chaleureusement et évoque avec lui son prochain mariage avec Charlotte. À leur retour du bal, Charlotte et Werther ne se doutent pas qu'Albert est de retour. Tandis que la jeune femme évoque la perte de sa mère et la Décor de l'acte I de Werther, Opéra-Comique, 1903 (Le Théâtre n°109, juillet 1903) * Les termes suivis d'un astérisque sont à retrouver p. 35 9 10 Acte II, Les Tilleuls : Septembre... Sur une place ombragée, Schmidt et Johann s'attablent à une taverne et observent les convives qui rejoignent le pasteur au temple afin de célébrer son anniversaire de mariage. Parmi les invités se trouvent Charlotte et Albert. Mariés depuis deux mois, ils semblent vivre le parfait amour. Au loin, Werther les observe, dissimulant son tourment. Mais Albert l'aperçoit bientôt et vient à sa rencontre pour lui dire quelques paroles réconfortantes. Tandis que Sophie apparaît un bouquet à la main, Albert explique à Werther que le bonheur n'est parfois pas si loin... Malgré cette tentative, le regard de Werther reste fixé sur Charlotte, qui arrive à son tour. Werther se trouble davantage et rejoint la jeune épouse pour lui confier une nouvelle fois l'ampleur de ses sentiments. Mais Charlotte reste stoïque et répond froidement : « Albert m'aime et je suis sa femme ! ». Elle prie alors Werther de bien vouloir l'oublier et de s'écarter pour toujours, avant de se radoucir un instant et de l'inviter à revenir pour Noël. Une fois seul, Werther songe au repos qu'il trouverait une fois mort. Il implore le pardon de Dieu, avant de s'éloigner. Alors que Sophie tente de le rattraper et le convie à rejoindre le cortège, Werther annonce son départ définitif et s'enfuit. La voyant en larmes, Charlotte s'inquiète du chagrin de sa sœur. Sophie lui apprend alors que Werther est parti... « pour toujours ». Acte III, Charlotte et Werther : 24 décembre, 17h... Dans la maison qu'elle partage avec Albert, Charlotte relit les lettres de Werther, sans réussir à les détruire. La dernière reçue, évoquant le suicide, l'inquiète particulièrement. Alors que Sophie entre les bras chargés de jouets, elle s'inquiète du comportement de Charlotte, de plus en plus distante. Lorsque Sophie comprend l'origine de cette inattention et évoque Werther, Charlotte perd immédiatement contenance. Lui faisant promettre de rejoindre le reste de la famille pour la veillée de Noël, Sophie laisse finalement sa sœur à ses pensées. Implorant le seigneur de lui donner la force d'affronter cette épreuve, Charlotte assiste au retour inattendu de Werther, plus préoccupé que jamais. Il n'a pu s'empêcher de venir au rendez-vous fixé depuis l'été. Charlotte joue alors l'indifférence et lui reproche même d'avoir songé à partir « pour toujours ». Elle lui rappelle qu'il est le bienvenu et qu'ici rien n'a changé. « Rien que les cœurs » répond Werther, tout en posant le regard sur le mobilier familier, dont le bureau et sa boîte de pistolets... Charlotte lui tend même les quelques vers d'Ossian qu'il avait commencé à traduire. Werther les relit alors, plein de résignation puis se jette aux pieds de Charlotte qui le repousse une nouvelle fois, avant de se laisser aller contre lui. Prenant conscience qu'elle se trouve dans les bras d'un autre homme, Charlotte se dégage et court s'enfermer dans sa chambre, expliquant que c'est lui qu'elle fuit. Werther est alors résolu à en finir. Lorsqu'Albert revient, préoccupé par le retour de Werther, il trouve Charlotte très angoissée et la questionne alors. Le domestique apporte un mot de Werther qui souhaite emprunter les pistolets d'Albert pour un « lointain voyage ». Acceptant de les lui prêter, Albert confie à son épouse le soin de préparer la fameuse boîte. Mais à peine a-t-elle remis les pistolets au domestique que Charlotte réagit et se précipite dehors à la poursuite de Werther. Acte IV, La Mort de Werther : La nuit de Noël... Après un interlude symphonique pendant lequel la neige se dépose sur les toits de Wetzlar, Charlotte arrive enfin au cabinet de travail de Werther. Mais il est déjà trop tard, Werther est étendu au sol, inanimé. Elle est d'abord horrifiée par la vue du sang, puis se jette sur lui pour le prendre dans ses bras. Il revient à lui un instant et Charlotte lui demande pardon pour sa sévérité. Mais Werther confie qu'il préfère bien mourir que de l'avoir détournée de son devoir. Alors que Charlotte tente d'appeler du secours, Werther l'en empêche. Il n'a besoin d'aucune autre aide que la sienne. Prise de remords et de compassion, Charlotte lui avoue enfin son amour et l'embrasse passionnément. Tandis que retentissent au loin les voix des enfants, chantant leur cantique de Noël, Werther se redresse. Il confie ses dernières volontés à Charlotte puis s'écroule, sans vie. Guide d'Écoute Sur le plan orchestral, la partition de Werther s'inscrit en parfaite adéquation avec la dimension intimiste du sujet traité et nécessite un orchestre de taille modeste. Mais il ne faut pas négliger dans l'établissement de la nomenclature* d'orchestre, que Massenet souhaitait inscrire durablement ses œuvres aux répertoires de nombreux théâtres. Ainsi, il ne fallait pas composer pour un orchestre trop vaste, que la plupart des salles de province n'aurait jamais pu constituer ni faire tenir dans leurs fosses. Sur le plan formel, différents thèmes - relatifs à des personnages, des situations, mais surtout à des sentiments - parcourent et structurent l'ensemble de la partition. Chacun de ces thèmes, aussi vivants que sont les personnages eux-mêmes et les sentiments ressentis, peuvent varier, changer d'aspect, de courbe, de rythme, gardant pourtant toujours une identité propre et marquée. En cela, même s'il s'en est souvent défendu, Massenet s'inscrit en quelque sorte dans la lignée de Wagner et de ses fameux leitmotiv*, mais d'une façon sûrement moins radicale, plus tempérée, donc plus française. Nous pouvons lister, parmi l'ensemble des thèmes parcourant la partition, ceux qui semblent les plus prégnants : - le thème de "l'amour passionné", - le thème du "calme de la nature", - le thème de Charlotte, - le thème de "Charlotte vue par Werther" - le thème du "clair de lune", - le thème des "sentiments ambigüs de Charlotte". À travers sept pistes musicales, le guide d'écoute suivant propose alors de découvrir les passages-clés de l'œuvre, tout en prêtant attention à l'emploi de ces différents thèmes, à leurs réapparitions et à leurs mutations. 11 Note Si nous recommandons comme enregistrement musical la version de Werther dirigée par Kent Nagano et interprétée par Jerry Hadley (Werther) et Anne Sofie von Otter (Charlotte), la plupart des extraits musicaux proposés dans ce guide d'écoute se trouvent facilement sur divers supports CD et DVD, de même qu'en ligne. Première page du manuscrit d'orchestre de Werther, BnF Opéra, RES-542 (1-3) Écoute n°1 - Prélude de Werther Le prélude de l'œuvre se présente déjà comme une page extrêmement dramatique. Non pas tragique, mais intense et exaltée, comme les sentiments du héros. Il se construit autour de deux thèmes, très différents et du même coup complémentaires, celui de "l'amour passionné" et celui du "calme de la nature". Le premier thème, très lyrique et éclatant, débute par un martèlement d'accords et convoque une orchestration massive et brillante, où les violoncelles (instrument le plus proche de la voix d'un homme) assurent les transitions. Tout est ici mobilisé pour évoquer l'élan amoureux, vif et passionné de Werther. Le deuxième thème, plus vaporeux, est d'abord présenté par les cordes munies de sourdines*, dans une orchestration plus délicate et aérée, avant de laisser entendre les différents vents, assurant la dimension champêtre de ce thème consacré à la nature. Préfigurant la fin tragique de Werther, fou d'amour pour Charlotte, ce prélude établit déjà le lien entre l'embrasement amoureux et l'apaisement par la nature, que le héros ne trouvera qu'une fois mort, qu'une fois retourné à la terre. Écoute n°2 - Acte I, air de Werther : « Je ne sais si je veille... » 12 La première apparition de Werther est l'occasion, comme souvent à l'opéra, d'une présentation musicale du tempérament du personnage. C'est le violoncelle, instrument de l'orchestre dont l'ambitus* est le plus proche de la tessiture d'un homme, qui prend d'abord la parole. Jouant dans le registre aigu et répétant six fois un "mi", le violoncelle exprime d'abord toute l'hésitation contemplative de Werther, s'avançant vers la maison du Bailli. Puis il égrène un flot de quadruples croches vives et rêveuses, exprimant toute la sensibilité du jeune homme, avant de présenter un motif descendant, plutôt mélancolique, voire sombre, rappelant cet autre trait de caractère du héros. Cette même ligne mélodique est ensuite reprise par les violons et agrémentée d'un accompagnement de la harpe et de la flûte, qui peignent ensemble un écrin verdoyant, tendre et romantique autour de Werther. Le héros fait alors son entrée tel un somnambule, hypnotisé par la nature qui l'environne, au point de demander avec hésitation et sur une seule note répétée : « alors c'est bien ici la maison du Bailli ? ». Cette première intervention est à peine achevée, que réapparaît le thème du "calme de la nature", déjà présenté dans le prélude (cercle vert). La réapparition du thème est directement à l'initiative des mots de Werther, qui débute ainsi son premier air : « Je ne sais si je veille, ou si je rêve encore... ». Continuant de se développer, le thème très serein de la nature établit alors un dialogue contrastant avec la ligne vocale très passionnée de Werther. Une section centrale, plus apaisée et extatique, laisse entendre des harmonies nouvelles, avant que le hautbois, la clarinette, le cor anglais, la flûte, chaque fois solistes, viennent incarner chacun des éléments vus par Werther exprimant : « tout m'attire et me plaît... ». Enfin, la ligne vocale gagne en intensité et s'étire sur les mots « Ô nature ! Enivre-moi », et atteint bientôt son paroxysme sur les mots « et toi, soleil, viens m'inonder de tes rayons ! », quand tout l'orchestre, dont les cordes ont ôté leurs sourdines, revient d'une seule et même voix, donnant une véritable sensation d'éclairage sonore. Werther se tait alors sur la réapparition du cantique chanté par les enfants, comme une sorte de prédiction de la vie qu'il pourrait avoir en compagnie de Charlotte. Écoute n°3 - Acte I, Werther : « Ô spectacle idéal d'amour et d'innocence » Alors que Werther découvre enfin Charlotte et que celle-ci embrasse les enfants pour leur dire au revoir, il se laisse aller à un élan passionné. Sa ligne vocale, sur les mots « Ô spectacle idéal », reprend le matériau mélodique du thème de Charlotte, déjà entendu lors de la première apparition de celle-ci. Le thème de "Charlotte vue par Werther" se présente alors comme un condensé du thème de Charlotte, condensé de notes (il est plus court) mais aussi condensé d'énergie. 13 Écoute n°4 - Acte I, scène et duo de Werther et Charlotte : « Il faut nous séparer... » Introduite par un interlude musical présentant le thème du "clair de lune" (cercle orangé), cette grande scène entre Charlotte et Werther clôt le premier acte. Ici et tout au long de l'œuvre, le thème du "clair de lune" symbolise une sorte d'équilibre fragile entre la passion et la raison. Il réapparaît alors en deux versions, l'une enflammée l'autre résignée. La scène débute sur les mots prémonitoires : « il faut nous séparer... », prononcés par Charlotte qui tente de mettre fin à l'entrevue et de rentrer dans le logis devant lequel Werther vient de la raccompagner. Mais Werther est bien trop attendri par Charlotte pour la laisser filer. Alors qu'elle lui dit « vous ne savez rien de moi », il lui répond « mon âme a reconnu votre âme » soutenu par l'orchestre qui fait réentendre le thème de "Charlotte vue par Werther". Charlotte propose alors son premier air et confie à Werther ses sentiments à l'égard de sa mère disparue. Ces aveux tendres et mélancoliques touchent profondément Werther qui, dans une réaction pour le moins inadaptée mais extrêmement romantique et exaltée, s'exclame : « Rêve ! Extase ! Bonheur ! » tandis que la voix monte par pallier, note à note (cercles bleus), dans une progression mélodique accompagnée d'un immense crescendo* orchestral. L'ensemble traduisant ainsi la montée du sentiment amoureux, d'abord progressif, puis éclatant et incontrôlé. Le thème du "clair de lune" réapparaît alors (cercle orangé), plus d'une octave plus haut, dans une version extrêmement brillante et fougueuse, jouée fortissimo* par les trombones soutenus des timbales. 14 Devant tant d'emportement et cet aveu amoureux, Charlotte revient à elle et tente de mettre un terme à l'entrevue. La voix du Bailli, résonnant subitement et apprenant à Charlotte qu'Albert est revenu, va interrompre définitivement la déclaration passionnée de Werther qui se retire alors, résigné, tandis que l'orchestre fait réentendre le thème du "clair de lune" qui s'égrène tristement aux cordes (cercle orangé). Écoute n°5 - Acte II, chanson à boire Le deuxième acte s'ouvre sur une page musicale beaucoup plus légère avec son thème orchestral aux allures de chanson à boire, tellement spontané et entraînant qu'il est bientôt repris en chœur par Schmidt et Johann qui s'exclament : « Vivat Bacchus ! ». Puis dans un effet de contraste saisissant, intervient l'orgue annonçant la célébration du pasteur dans une formule sobre et cérémoniale. Comme à son habitude, Massenet qui aime jouer avec les contrastes, fait se superposer le thème joué à l'orgue et de nouveaux commentaires de Schmidt et Johann, dérivés de la mélodie de la chanson à boire ! Écoute n°6 - Acte II, duo Charlotte et Werther : « N'est-il donc pas d'autre femme... » Rejointe par Werther qui l'a aperçue sur le parvis du temple, Charlotte ne tarde pas à exprimer sa position : « Albert m'aime et je suis sa femme ! ». Elle demande alors à Werther s'il n'existe pas d'autre femme, libre de l'aimer lui. Sous ces mots apparaît alors un nouveau thème musical caractérisant les "sentiments ambigus de Charlotte". En effet ce thème semble se former à partir du thème de "l'amour passionné" de Werther, reprenant le même rythme mais épousant une courbe mélodique inverse. Tandis que le thème amoureux de Werther monte passionnément vers l'aigu (cercle rouge), celui des sentiments de Charlotte descend froidement vers le grave (cercle violet). 15 Plus encore, le thème des "sentiments ambigus de Charlotte" réapparaît plus loin (cercle violet), et prend ici tout son sens... Cette fois Charlotte ne prie pas Werther de trouver une autre femme, mais lui demande au contraire de ne pas l'oublier et de penser à elle. 16 Écoute n°7 - Acte III, air de Werther : « Pourquoi me réveiller, ô souffle du printemps ? » Intervenant à la fin du troisième acte et scellant le destin du héros, cet air, sans doute le plus célèbre de toute la partition, met en musique les vers d'Ossian (publiés en anglais vers 1763 et rendus célèbres dans l'Europe entière). Construit en deux strophes quasi identiques, la deuxième gagne pourtant en intensité dramatique et finit notamment par un saut de sixte*, intervalle* extrêmement lyrique et passionné. L'accompagnement, confié à la harpe et aux violoncelles, reste très discret et poétique. Il est d'ailleurs aisé d'associer le violoncelle, au timbre mélancolique, à Werther lui-même, et la harpe au barde écossais qu'était Ossian. WERTHER à l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne Note d'intention LE VILLAGE ET L’ETRANGER Avec l’opéra, ce qui m’émeut et me met au travail, ce sont, à l’écoute de la musique, les émotions, les actions, les situations, les pensées, les intuitions qu’elle appelle, les silhouettes qu’elle fait apparaître, les mouvements qu’elle met en marche (le mouvement d’une main valant celui d’un raz de marée, ou la chute d’un empire, la chute d’un flocon). Et puisqu’ici, au lieu de parler les hommes chantent… quelque chose réinvente toute la vie, la réalité est enchantée, sublimée, trouée - et ce qu’on voit par ce trou c’est la liberté d’inventer, dans un autre temps, un autre monde. Une histoire. Et c’est une histoire que nous allons raconter. L’histoire de Werther, révolté contre la vie et ses petits arrangements. Werther oubliant tout, donnant tout pour Charlotte qui ne peut pas lui rendre, qui se tait, et va le faire mourir avec ce silence, et va s’enterrer ellemême dans le silence de la vie. C’est une histoire que nous allons raconter. Celle du village et de l’étranger. Celle de deux mondes face à face, impossibles reflets. Celle de l’image de Charlotte dans un miroir brisé, tout à la fois enfant, mère, fille, sœur, femme et amante. Déjà morte et encore vivante, Charlotte habite la forêt gelée des sentiments, avec son mari, les enfants, et les promesses faites aux parents. Et un beau soir vient l’étranger au village. Werther est un vertige, un buisson ardent. Ce qu’il montre du doigt est sublime et insupportable, un paysage inaccessible. Cette histoire vient d’un livre qui a traversé le temps, Les souffrances du jeune Werther, un paquet de lettres, un pavé jeté dans le jardin humain par le jeune Goethe en 1774. Mais Goethe a aussi écrit un traité des couleurs, et des milliers de pages sur les nuages… Alors, nous chercherons des figures plutôt que des figurants, une météorologie des situations plutôt qu’une psychologie des personnages, les actions de la chair et du sang humain, les climats et les mouvements de l’âme. Car l’amour est une pensée, un air, un arc tendu, une situation sensuelle, de tous temps, du 18ème de Goethe au 19ème de Massenet ou de Rimbaud, du 20ème de Kurt Cobain jusqu’à aujourd’hui. Pour l’amour à mort, peu importe l’époque. Et pour lieu, au bord du village, une forêt, comme chambre d’échos de feuilles, de terre, de lumière et de vies minuscules. Je voudrais que nous cheminions entre les arbres avec cette musique de la fin d’un monde, avec cette musique de chambre, avec ce chœur d’enfants, avec la mélodie singulière du mourant, avec le dialogue chanté des amants, avec les préludes bouleversants, le souvenir de Wagner et la pudique prémonition de musiques à venir. Toutes les musiques d’une société rivalisant avec le chant instinctif des oiseaux… Je cherche à mettre en jeu le village et ses rituels, ici dans la forêt qu’il essaye d’apprivoiser, avec des bals, des chants sacrés, des chansons à boire, des poésies en vers, des mariages en blanc, des noces d’or, des funérailles et des jeux d’enfants. Les gestes d’une communauté traversée par le non-dit, l’humilité, la jalousie, la tendresse, la pitié, les rires de survie, le refuge de la cérémonie, les saisons comme seule raison, la solitude, l’abandon, l’alcool, la ferveur, la peur de Dieu, la résignation, la force de l’habitude, la blessure, la pudeur, les moments de grandeur, la violence et l’ennui. Pas d’entrées et de sorties, mais des apparitions et des disparitions. Pas de seconds rôles ou de petits rôles, tous sont précieux, chacun son rôle. Chacun son histoire, de nouveau-né ou de vieillards, d’amoureux délaissé, de maire du village, d’ivrogne, d’illuminé, de salaud ou de bon vivant. Ils sont tous là, les habitants, à s’épier, à se réchauffer. Et Werther s’est enfui. Il s’est évadé de la forêt. Exilé du monde, de lui-même, pauvre Werther, albatros humain que ses sentiments de géants empêchent de respirer, impossible Werther pour qui respirer c’est déjà être consentant… L’inactif Werther est passé à l’acte suprême. C’est la fin d’une histoire. L’aveu (trop tard) de Charlotte, la digue qui cède, la neige, le sang, le sapin foudroyé, la forêt dégelée des sentiments. Pas de printemps pour Werther. Trois saisons et l’enfer. Le droit chemin vers l’inconnu, la page blanche. Et de ce rêve romantique, tous se réveillent sauf un. Fait divers : un coup de feu traverse le chant des enfants, une nuit de Noël. Et tout le paysage se remet en mouvement. Ils sont rentrés chez eux, et cette histoire dans la grande histoire, sous le regard des enfants, dont la présence primordiale annonce les histoires de demain. « Personne n’est coupable » disait Shakespeare. Et tout est joie pourtant, car ici, ce qu’on ne peut pas dire, ce qu’on ne peut vivre, on peut le chanter. Et le tragique est métamorphosé. Laurent Fréchuret Metteur en scène 17 les maîtres d’œuvre Laurent Campellone Direction musicale 18 Après avoir étudié chant, violon, tuba, percussions et philosophie, Laurent Campellone se tourne vers la direction d’orchestre. Talentueux et hyperactif, il a été invité à diriger près de 250 œuvres symphoniques et plus de 50 partitions lyriques en Europe et dans le monde. Directeur musical de l’Opéra Théâtre et de l’Orchestre Symphonique Saint-Étienne Loire depuis 2004, il entreprend un travail en profondeur sur la qualité artistique de cet ensemble et lui permet de s’engager dans une nouvelle phase de développement. Laurent Campellone a été nommé, en 2012, Chevalier de l'Ordre des Arts et des Lettres. Laurent Fréchuret Mise en scène Directeur du Théâtre de Sartrouville et des Yvelines de 2004 à 2012, Laurent Fréchuret est un artiste complet. Sensible aux beaux-arts et à l’écriture, cet artiste natif de Saint-Étienne fonde le Théâtre de l’Incendie. Après un sublime Barbe-Bleue, original à souhait, cet alchimiste de la voix et de l’image est revenu en 2012 avec L’Opéra de quat’sous de Kurt Weill à l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne en coaccueil avec La Comédie. Cette saison le public pourra (re) découvrir sa version de Werther de Massenet et de Richard III de Shakespeare. Rudy Sabounghi Scénographie Depuis ses débuts Rudy Sabounghi partage son amour de la scène avec quelques fidèles artistes européens, ce qui l’a mené sur des scènes aussi différentes que le Théâtre de Bussang et la Scala de Milan, la Schaubühne et le Berliner Ensemble, la Comédie Française et la Cour d’Honneur du Festival d’Avignon, ou encore le BAM de New York. Très attaché à Saint-Étienne où il a collaboré à La Comédie sur les spectacles de Jean-Claude Berutti et de Vladimir Steyaert de 2002 à 2011 et à l’Opéra Théâtre où il a créé en 2011 le décor de La Navarraise. Il intervient également dans les grandes écoles de théâtre, au TNS (Strasbourg), à l’ENSATT de Lyon ou encore au Conservatoire de Musique de Paris. Laurent Castaingt Lumières Depuis plus de vingt-cinq ans, Laurent Castaingt partage ses activités entre théâtre et opéra. Il a créé des lumières notamment pour Alfredo Arias, Bernard Murat, Jean-Claude Berutti, Roman Polanski, Alain Delon, Vincent Delerm, JeanClaude Auvray et Jean-Louis Grinda. Ses recherches ont également donné lieu à l’installation Écorces vives (festival Arbres et Lumières de Genève) ainsi qu’à Planet of Vision (Exposition universelle de Hanovre 2000). Il crée aussi les scénographies de spectacles de Jean-Louis Grinda (Les Contes d’Hoffmann), Elsa Rooke (Midsummernight’s Dream) et Marguerite Borie (Salomé à Monte-Carlo, Liège et à Vienne). Il a reçu trois nominations au Molière de la meilleure lumière. les solistes Alexey Dolgov Ténor Acclamé par les critiques tant pour ses aptitudes vocales que pour son jeu d’acteur, le ténor sibérien Alexey Dolgov travaille avec des chefs d’orchestres de renom tels Placido Domingo, Alexander Shelley et Dmitri Jurowski et sa carrière connaît une tournure internationale importante. Les prochaines saisons, il interprétera Pinkerton (Madama Butterfly), Tamino (Die Zauberflöte) et Cavaradossi (Tosca) à Houston Grand Opera, Edgardo (Lucia di Lammermoor) à l’Opéra de Lille, Rodolfo (La Bohème) à Deutsche Staatsoper de Berlin ou encore Lensky (Eugene Onegin) à Bayerische Staat de Munich. Il collaborera également à Metropolitan Opera de New York et à l’Opéra de Montréal. Il est soliste principal au Théâtre Bolshoï. Marie Kalinine Mezzo-Soprano Née en 1979, Marie Kalinine commence ses études musicales à la Maîtrise de Radio-France, puis débute l’étude du chant lyrique auprès de Christiane Eda-Pierre et au Conservatoire Supérieur de Paris. "Révélation 2007" d’Eve Ruggieri qui l’engage pour le rôle-titre de Carmen avant de l’inviter dans son émission "Musiques au Cœur cinq étoiles", elle a fait récemment ses débuts au Festival d’Aix-enProvence, dans le rôle de Vénus (Orphée aux Enfers d’Offenbach), sous la baguette d’Alain Altinoglu. Elle revient cette saison à l’Opéra Théâtre de SaintÉtienne après avoir interprété avec ferveur Anita (La Navarraise), Santuzza (Cavalleria Rusticana) et le Prince Raphaël (La Princesse de Trébizonde) lors des deux dernières saisons. Lionel Lhote Baryton Le baryton belge Lionel Lhote commence ses études musicales à l’Académie de Musique de La Bouverie-Frameries. Il poursuit sa formation vocale au Conservatoire Royal de Mons et la conclut au Conservatoire Royal de Bruxelles en obtenant un Premier Prix de Chant Concert et un Diplôme Supérieur de Chant Opéra avec la plus grande distinction. Depuis quelques années sa carrière internationale prend un important essor. Parmi ses futurs projets figurent La grande Duchesse de Gerolstein à Liège, Barbe-Bleue à Nancy, Falstaff à Tours, La Bohème à l’Opéra de Paris, Roméo et Juliette à Monte Carlo, L’Heure espagnole au Festival de Glyndebourne. Magali Arnault Stanczak Soprano Violoncelliste de formation, Magali Arnault Stanczak étudie le chant à la Haute École de Musique de Genève, au Royal College of Music de Londres puis au CNSMDP. Durant la saison 2012-13, elle est membre de la troupe de l’Opéra Comique à Paris où elle interprète La Fée dans Cendrillon et la doublure de Ciboulette. Pour la saison 2013-2014, on pourra l’entendre dans les rôles de La Princesse Fantasia (Voyage dans la lune, Offenbach) aux opéras de Fribourg et Lausanne et de Barbarina (Les Noces de Figaro, Mozart) aux opéras de Dijon et Saint-Étienne. 19 L'orchestre et le Chœur lyrique Frédéric Goncalves Baryton 20 Après des études en Droit des affaires à la Sorbonne, Frédéric Goncalves obtient un Premier Prix de Chant au CNSM et est admis à l’École d’Art Lyrique de l’Opéra de Paris. Il participe aux masterclass de José Van Dam, Sena Jurinac, Vera Rozsa, Régine Crespin, Michel Sénéchal et Kurt Moll. Il s’illustre surtout dans les répertoires des XIXe et XXe siècles, que ce soit en italien (Il Campanello, La Traviata, La Bohème, Madama Butterfly), en allemand (Abu Hassan, Parsifal, Elektra, Der Rosenkavalier) et surtout en français : il est régulièrement invité pour Faust, Mignon, Manon, Le Roi d’Ys, Werther, mais aussi L’Heure Espagnole, Cyrano d’Alfano ou Les Dialogues des Carmélites. L'Orchestre Symphonique Saint-Étienne Loire Créé en 1987, l’OSSEL a su s’élever au rang des grands orchestres français. En devenant Directeur musical de l’orchestre en 2003, Laurent Campellone entreprend un travail en profondeur sur la qualité artistique de cet ensemble. L’OSSEL est un acteur culturel incontournable qui accomplit une mission essentielle d’éducation et de diffusion du répertoire symphonique et lyrique. L’Orchestre a su acquérir une solide réputation, en particulier dans le répertoire romantique français. En 2013, l'enregistrement par l'OSSEL du Mage de Massenet, fruit d'une collaboration entre le Palazzetto Bru Zane et l'Opéra Théâtre de SaintÉtienne, se voit récompensé : Choc de Classica, Diapason découverte et Diamant d'Opéra Magazine. Maîtrise du Conseil général de la Loire Créée en 1992 par le Conseil général, la Maîtrise du Conseil général de la Loire est l’une des dix maîtrises en France fonctionnant sur le principe du mi-temps pédagogique et la seule gérée directement par un département. Elle regroupe actuellement 150 élèves garçons et filles de la 6e à la terminale. En plus de la vingtaine de concerts que la Maîtrise donne chaque année dans le département, elle prépare des solistes et des chœurs d’enfants pour les productions lyriques. Ses élèves participent régulièrement à divers festivals estivaux comme ceux de La Chaise-Dieu et d’Ambronay. 21 ICONOGRAPHIE COMMENTéE DE LA PRODUCTION L’ensemble des décors et costumes de Werther a été réalisé dans les ateliers de l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne. Voici les maquettes des décors réalisés par Rudy Sabounghi pour les trois tableaux principaux de l'œuvre. Pour comprendre le détail des étapes de création d'une production d'opéra, voir la page 32 de ce dossier. 22 23 24 PISTES PEDAGOGIQUES PISTE 1 Piste 1 - Réécrire une scène de Werther Objetif : Actualiser et/ou réécrire une scène en se mettant à la place de l'auteur Outils : Livret de Werther, roman de Goethe Les Souffrances du jeune Werther Mots-Clés : Adaptation, réécriture, transposition, pastiche Quand Massenet compose la partition de Werther (1892), le roman de Goethe (1774) est déjà vieux de 118 ans ! Pourtant Massenet y voit là un sujet tout à fait contemporain, capable de lui inspirer l'une de ses plus grandes œuvres. Aujourd'hui, 122 années nous séparent de la création de cet opéra qui continue pourtant de nous bouleverser, soit presque le même nombre d'années qui séparaient les œuvres de Goethe et Massenet. Pourquoi alors ne pas essayer nous aussi de prendre la plume et d'inscrire dans notre siècle l'histoire de Werther ? Cette piste pédagogique propose ainsi aux élèves de s'essayer à réécrire une scène de Werther. Elle peut prendre différents angles possibles : réécrire la scène dans un autre style littéraire (façon tragédie grecque, théâtre de boulevard, théâtre de l'absurde, etc...), écrire une parodie humoristique de la scène, ou encore actualiser la scène en adoptant le langage d'aujourd'hui. 25 Page de titre de la première édition des Souffrances du jeune Werther, 1774. PISTE 2 Mettre en scène les adieux de Werther et Charlotte Objectif : S e mettre à la place des acteurs et du metteur en scène en essayant de jouer un extrait de l'œuvre Outils : Extrait du livret de Werther, extraits vidéos Mots-Clés : Mise en scène, espace de jeu, jeu d'acteur, gestuelle Cette piste pédagogique propose aux élèves de s’essayer à la mise en scène afin de comprendre que chaque nouvelle production, à l’opéra, propose un regard neuf et unique sur l’œuvre. En prenant comme support le texte de la scène où Werther rend sa dernière visite à Charlotte (fin de l'acte III), les élèves se répartiront en groupes comportant 4 interprètes (Werther, Charlotte, Albert et un domestique) et 1 ou plusieurs metteur(s) en scène. Chaque groupe pourra alors se réunir sous forme d’ateliers pour réfléchir à la façon de mettre en scène ce passage, c'est-à-dire la façon d’organiser cette scène dans l’espace : quel espace de jeu définir, où se positionner, à quelle distance les uns des autres, quand se déplacer… et la façon de la jouer : quelles attitudes, quels gestes, quels regards, quelle intonation de voix, quel débit de paroles, quels accessoires, etc… ? Dans cette scène, Charlotte s'abandonne pour la première fois dans les bras de Werther avant d'être prise de remords. Elle s'enferme alors aussitôt dans sa chambre, ce qui provoque le départ définitif de Werther qui emprunte à Albert ses pistolets pour un "lointain voyage"... Fin de l'Acte III, 26 Charlotte, Werther, Albert, un domestique CHARLOTTE (dans les bras de Werther) Ah ! (se redressant, affolée) Ah ! Moi ! moi ! dans ses bras ! (s'enfuyant) WERTHER (subitement revenu à lui implorant Charlotte) Pardon ! CHARLOTTE (résolument) Non! Vous ne me verrez plus ! WERTHER Charlotte ! CHARLOTTE (avec un reproche déchirant) C'est vous, vous que je fuis l'âme désespérée ! Adieu, pour la dernière fois ! (Charlotte s'enfuit et ferme la porte de la chambre sur elle) WERTHER (Werther se précipitant sur ses pas, atterré) Mais non... c'est impossible ! Ecoute-moi ! Ma voix te rappelle ! Reviens ! Tu me seras sacrée ! Reviens ! Reviens ! Ton fils, ton bien aimé, ton amant va mourir ! Emportant avec lui l'éternelle torture, ma tombe peut s'ouvrir ! (Il s'enfuit) ALBERT (entrant préoccupé et sombre, durement) Werther, est de retour... on l'a vu revenir ! (changeant de ton, avec étonnement) Personne ici ? la porte ouverte sur la rue... Que se passe-t-il donc ? (Il se dirige vers la chambre de Charlotte) Charlotte! (plus haut avec insistance) Charlotte ! CHARLOTTE (terrifiée à la vue de son mari) Ah ! ALBERT(d'un ton bref ) Qu'avez-vous ? CHARLOTTE (de plus en plus troublée) Mais... rien... ALBERT (insistant) Vous semblez émue... troublée... Rien ! pas un mot... elle se tait... Soit ! Adieu donc! Charlotte a dicté mon arrêt ! CHARLOTTE (cherchant vainement à se remettre) Oui... la surprise... (remontant vers la porte du fond) Prends le deuil, ô nature ! Nature ! ALBERT (méfiant presque violent) Et qui donc était là ? CHARLOTTE (balbutiant) Là ? CHARLOTTE (reculant épouvantée) Qui ? moi ? ALBERT (sombre) Répondez ! (Un domestique entre apportant une lettre. Albert remarque sa présence et se tourne vers lui brusquement) Un message ? (Albert reconnait l'écriture et regarde fixement Charlotte) De Werther ! ALBERT (indifférent et la fixant) Sans doute... CHARLOTTE (ne pouvant retenir un cri de surprise) Dieu ! ALBERT(gravement et sans perdre Charlotte de vue) « Je pars pour un lointain voyage... voulez-vous me prêter vos pistolets? » CHARLOTTE (à part, se sentant défaillir) Il part ! ALBERT (continuant) « Dieu vous garde tous deux! » CHARLOTTE (terrifiée) Ah ! l'horrible présage ! ALBERT (à Charlotte, froidement) Donnez-les-lui! (Charlotte, comme fascinée par le regard de son mari se dirige machinalement vers le secrétaire sur lequel est déposé la boîte aux pistolets) CHARLOTTE (à part) Quel regard ! (Albert se dirige vers sa chambre à droite, et avant d'y entrer il regarde encore Charlotte qui remonte vers le domestique auquel elle remet la boîte. Le domestique sort. Albert froisse la lettre qu'il tenait à la main, la jette au loin avec un geste de colère et entre vivement dans la chambre. Une fois seule, Charlotte se rend compte de la situation, elle semble se remettre et court prendre une mante qui est déposée sur un des fauteuils) CHARLOTTE (avec force) Dieu! tu ne voudras pas que j'arrive trop tard ! (Elle s'enfuit, désespérée) 27 PISTE 3 Le héros romantique dans Werther et les arts en général Objectif : Étudier le profil psychologique de Werther et chercher des figures similaires dans l'art en général Outils : Livret de Werther, roman de Goethe Les Souffrances du jeune Werther Mots-clés : Romantisme, nature, mélancolie, contemplation, idéalisme Cette piste pédagogique propose, par la lecture de scènes-clés du livret de Werther, de s'intéresser au profil psychologique de Werther et du même coup aux caractéristiques du héros romantique. En menant une réflexion avec les élèves sur les caractéristiques du héros romantique, cette piste pédagogique pourra prendre différentes formes. Ainsi, il sera possible de relever dans le livret de Werther des scènes illustrant les grandes caractéristiques du héros romantique. De la même manière, il sera possible de chercher dans la littérature d'autres exemples de héros romantique afin d'en comparer les traits avec Werther et de réfléchir sur ce qui peut les réunir ou au contraire les différencier. Enfin pour rendre cette piste encore plus concrète, et dans une acception plus large du terme de "romantique", il pourra être envisagé une recherche de supports actuels illustrant les aspects du héros dit "romantique" (chanson actuelle, film, livre, BD, manga, peinture, photographie, illustration, etc.). 28 Caractéristiques du héros romantique : Nous pouvons dresser un portrait du héros romantique selon les trois axes suivants : 1 Le héros romantique est en proie à des sentiments exaltés, il est contemplatif, mélancolique. Souvent solitaire et méditatif, il mène une réflexion existentielle et philosophique permanente. Il possède une vision idéalisée de l'amour, mais une vision sombre du monde. 2 Le héros romantique est bien souvent inadapté au monde dans lequel il vit, la société nie ses aspirations et il s'y sent prisonnier. Il possède une trop grande lucidité quant à la condition humaine et se trouve alors dépassé par la grandeur de sa conscience, celle de la nature, celle de Dieu. Il souffre de ce que l'on appelle le "mal du siècle". 3 Le héros romantique possède une certaine soif d'absolu et d'idéal qui font de lui un éternel insatisfait, menant une quête insatiable, celle de tout ressentir, tout comprendre, celle qui le ferait s'élever au-dessus de ce monde trop exigu pour lui. Relevé des scènes caractéristiques du héros romantique dans Werther : Concernant l'exaltation de ses sentiments, citons au premier acte l'air de Werther « Je ne sais si je veille ou si je rêve encore ! ». Dans cet air le héros évoque une « nature pleine de grâce, Reine du temps et de l'espace » avant de confier qu'un « monde se révèle à [ses] yeux éblouis ! » et que « tout [l'] attire et [lui] plaît ! ce mur et ce coin sombre, cette source limpide et la fraîcheur de l'ombre» et de formuler enfin le vœu suivant : « enivre-moi de parfums ! (...) Ô nature ! Et toi, soleil, viens m'inonder de tes rayons ! ». Sur son inadaptation à la société et le "mal du siècle" dont il souffre, citons au troisième acte l'air célèbre de Werther, tiré du lied d'Ossian, « Pourquoi me réveiller, ô souffle du printemps ». Dans cet air le héros nous confie ses doutes quant au sens de son existence : « Demain viendra le voyageur se souvenant de ma gloire première et ses yeux vainement chercheront ma splendeur, ils ne trouveront plus que deuil et que misère ! ». Quant à sa soif d'absolu, citons simplement le suicide du héros au quatrième acte, qui par ce geste témoigne de son impossibilité à vivre dans ce monde et de son aspiration à goûter quelque chose de plus grand. 29 La Mort de Chatterton, Henry Wallis, 1856. 30 RESSOURCES SUPPLEMENTAIRES L’Opéra Théâtre de Saint-Étienne Bénéficiant d’une notoriété nationale et internationale importante, l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne se situe parmi les maisons d’opéra les plus dynamiques en termes de public. L’Opéra Théâtre de Saint-Étienne est un établissement de la Ville de Saint-Étienne soutenu par le Conseil général de la Loire, la Région Rhône-Alpes et le Ministère de la Culture. Le Chœur Lyrique Saint-Étienne Loire et l’Orchestre Symphonique Saint-Étienne Loire placés sous la direction musicale de Laurent Campellone sont les acteurs essentiels d’une programmation qui sait également s’ouvrir aux artistes de tous les horizons. La vocation première de l’Opéra Théâtre de SaintÉtienne est une vocation lyrique : avec ses propres ateliers de construction de décors et de réalisation de costumes, l’Opéra Théâtre produit et coproduit chaque saison de nouvelles œuvres lyriques. L’institution a également pour mission de proposer au plus grand nombre une programmation riche avec une exigence de qualité dans les domaines de la musique classique (musique symphonique, musique de chambre...), de la danse, du théâtre, en allant également vers des formes aussi diverses que le cirque, le cabaret... L’Opéra Théâtre remplit également une mission capitale auprès du jeune public, proposant une saison dédiée, riche et variée. Enfin, dans le domaine de l’action culturelle et de la médiation, l’Opéra Théâtre, en relation avec de nombreux partenaires (universités, Éducation nationale, écoles de musique..), souhaite développer ses propositions aux personnes n’ayant pas spontanément accès à la culture (politique tarifaire, décentralisation des concerts...). Des visites guidées sont également organisées. Certaines représentations sont précédées 1 heure avant le début du concert d’un Propos d’avant-spectacle (présentation sous la forme d’une conférence). 31 Petite histoire d’une production Le directeur détermine les différents "titres" qui seront programmés durant la saison. Il choisit ensuite un metteur en scène pour la production d’un opéra. Ce dernier associe un certain nombre de collaborateurs au projet dont un décorateur éclairagiste et un costumier. À ces derniers d’imaginer la conception des décors et des costumes tout en se conformant à des critères résolument déterminés : état d’esprit du spectacle, contexte historique et découpage acte par acte de l’ouvrage, caractéristiques techniques de la scène, budget consacré à la production. La première étape concrète du projet consiste généralement en la présentation des maquettes. Celles-ci sont paramétrées par le directeur technique qui connaît toutes les contraintes du théâtre, tandis que les responsables d’ateliers conseillent les concepteurs pour définir les techniques et les matériaux les plus adaptés à la réalisation des décors et costumes. 32 Le premier travail de construction se déroule dans les ateliers de menuiserie et de serrurerie qui réalisent chacun de leur côté les différents éléments du décor. L’assemblage du décor est ensuite confié à l’atelier de construction. Les parties monumentales sont conçues comme un puzzle qui doit pouvoir se manipuler et s’assembler en scène avec aisance et rapidité. Légers tout en étant rigides, les différents éléments sont confectionnés dans des dimensions qui leur permettent d’être transportés dans des containers pour les tournées à venir. Une fois la base structurelle du décor réalisée, celle-ci est habillée par l’atelier de décoration après avoir fait occasionnellement l’objet d’un équipement électrique (installation de moteurs, d’éclairages ou de dispositifs sonores). Son personnel, constitué de peintres et de sculpteurs issus, dans la majorité des cas, d’écoles des Beaux-Arts, doit être rompu à toutes sortes de techniques de reproduction : faux marbres, faux stucs, peintures de genre sur tous supports, fabrication d’ornements et d’accessoires (casques, boucliers, ceintures, parures, etc.) dans des matériaux divers : bois, acier, terre, matières synthétiques (mousse de polyuréthane expansée, résine, latex). Dans un décor, ne sont construites et peintes que les parties laissées apparentes au public. L’aspect donné aux différents accessoires répond aux critères de la vraisemblance et de l’illusion. L’art des ateliers de création d’un théâtre est un art du faux : tel chaudron de cuivre martelé est fabriqué en mousse, tel socle de granit a pour support une armature de fer ou de bois, elle-même recouverte de toile plissée peinte alors en trompe-l’oeil, etc. Une fois achevé l’ornement du décor, celui-ci est installé sur la scène pour effectuer les essais d’éclairage. Certaines retouches sont apportées par la suite : estompage d’une colonne trop brillante, rehaussements de couleur d’un accessoire, finition des joints des éléments à assembler. Pour la confection des costumes, le costumier procède à l’échantillonnage des étoffes, de leurs coloris, de l’harmonie qu’elles peuvent générer une fois assemblées. Parfois, lors d’exigences particulières, certains tissus font l’objet d’une fabrication spéciale tandis que d’autres sont retravaillés à seule fin de provoquer un effet singulier. Transformations des couleurs, modifications de la texture : la réalisation de costumes de scène constitue un travail artisanal où chaque pièce mérite une attention particulière pour s’adapter au mieux à la personnalité de l’interprète qui la portera. Une fois les textiles sélectionnés, l’élaboration du patron de chaque costume, ainsi que la coupe des tissus et leur assemblage, sont effectués sur mannequin. Après un essai en l’état, le costume est à nouveau ouvragé et se trouve agrémenté d’accessoires, de bijoux et différents autres ornements, jusqu’à trouver son aspect quasi définitif. De la même façon que pour le décor, les costumes nécessitent réajustements et retouches jusqu’aux dernières répétitions. Dans tous les cas, tous les éléments de décoration et de costumes réalisés pour un spectacle sont répertoriés et classés afin que lors des représentations aucun incident ne puisse venir altérer le déroulement du spectacle. C’est souvent au lendemain de la “générale” que le travail de création s’achève tout à fait. Atelier de fabrication des costumes Atelier de constructuion des décors : menuiserie Atelier de construction des décors : serrurerie Atelier de construction des décors Représentation de La Princesse de Trébizonde (mai 2013- Opéra Théâtre de Saint-Étienne) 33 Montage des décors sur le plateau du Grand Théâtre Massenet ANNEXES Voix et tessitures Une voix pour un personnage Les différents registres de la voix humaine s’adaptent par leur extension, leur timbre, leur caractère et leurs capacités techniques à différents genres de personnages. Le choix que fait le compositeur est donc très important pour que le rôle incarné par le chanteur soit crédible. Voix de femmes 34 Soprano C’est la voix la plus aiguë chez les femmes. Il existe plusieurs caractères de voix. La soprano "colorature" : capable de faire des vocalises rapides et de monter dans les extrêmes aigus du registre. Ce sont généralement des rôles de magiciennes, de poupées, de personnages enchantés en lien avec le surnaturel et le monde des dieux. La soprano "lyrique" : une voix claire et expressive qui s’adapte aux personnages des amoureuses, des jeunes filles. La soprano "dramatique" : elle a une couleur obscure, veloutée idéale pour incarner des personnages plutôt graves comme les reines, les femmes fières ou d’âge mûr. Personnage de soprano très connu : la Reine de la Nuit (La Flûte enchantée). Mezzo-soprano C’est la voix moyenne chez les femmes. La voix de mezzo s’adapte aux personnages de jeunes garçons, de femmes séduisantes ou à des personnages au caractère tragique. Personnage célèbre de mezzo très connu : Carmen (Carmen) Alto C’est une des voix féminines les plus graves. C’est une voix souvent utilisée pour personnifier des nourrices, des vieilles dames ou des guerriers. Il existe une voix encore plus grave, c’est celle de contralto. Voix d’hommes Ténor C’est une des voix les plus aiguës chez les hommes (on trouve également une voix encore plus aiguë : celle de contre-ténor). Selon la couleur et le caractère de la voix, on distingue le ténor "léger", "lyrique" ou "dramatique". C’est souvent la voix du ténor qui incarne les héros à l’opéra. Ténors célèbres : Roberto Alagna, Luciano Pavarotti, Placido Domingo... Baryton C’est la voix moyenne chez les hommes. Les rôles attribués au baryton sont par exemple : Comte Almaviva (Les Noces de Figaro), Barbe-bleue, Falstaff, Pelléas. Barytons célèbres : Dietrich Fischer-Diskau, José Van Dam... Basse C’est la voix la plus grave chez les hommes. Souvent la voix de basse incarne des personnages terribles comme des démons, des hommes méchants, parfois aussi la basse représente la voix de Dieu. Elle peut incarner également des personnages rassurants, comme les bons pères de famille. Composition de l'orchestre Trompettes Trombones Cors Piano Harpe Violons II Violons I Clarinettes Bassons Flûtes Hautbois Altos Chef Tubas Violoncelles Contrebasses Glossaire Bibliographie Ambitus Sur Werther Étendue d’une mélodie entre sa note la plus grave et sa note la plus aiguë. Coryphée Chef du chœur dans le théâtre grec, le coryphée désigne à l'opéra un personnage qui s'extrait du chœur pour prendre la parole seul. Crescendo Terme italien désignant une augmentation progressive de l'intensité sonore, allant par exemple de la nuance piano (doux) à la nuance fortissimo (très fort). Fortissimo Terme italien désignant une nuance d’intensité sonore et signifiant « très fort » (par opposition au pianissimo). Intervalle de sixte, saut de sixte Distance sonore entre deux notes, dont l’une est le degré 1 et l’autre le degré 6 d’une gamme donnée. L’intervalle de sixte possède une couleur très lyrique, chantante et extrêmement passionnée. Exemple : Do, (Ré, Mi, Fa, Sol), La. Leitmotiv Motif musical associé à une idée ou un personnage, et qui revient à plusieurs reprises au cours d'une œuvre. Le leitmotiv possède une identité propre et marquée en termes de mélodie, rythme, timbre, tout en étant capable de muter et donc d'illustrer les transformations de l'idée ou du personnage qu'il représente. Le leitmotiv en musique, renvoie directement à l'univers du drame wagnérien. Nomenclature Terme généralement utilisé pour nommer la formation orchestrale spécifique à une œuvre donnée. Sourdine Objet permettant de diminuer l'intensité sonore d'un instrument de musique. La forme, la matière et le mode d'utilisation d'une sourdine est propre à chaque instrument. Tessiture Ensemble continu de notes pouvant être émises par une même voix de façon homogène. Il existe différentes tessitures de voix : soprano, alto, ténor, baryton, etc. (cf page 34) Johann Wolfgang von GOETHE, Les Souffrances du jeune Werther, Paris : Livre de Poche, 1999. Werther, L'Avant-Scène Opéra n°61, Paris : Editions Premières loges, 1994. Sur Massenet Jules MASSENET, Mes souvenirs, 1/ Paris : P. Lafitte & Cie, 1912 ; 2/ Gérard Condé éd., Paris : Plume, 1992. Brigitte OLIVIER, Jules Massenet : Itinéraire pour un théâtre musical, Arles : Actes Sud, 1996. Sur l'opéra, ses métiers et la mise en scène BOISSON, Bénédicte ; FOLCO, Alice ; MARTINEZ, Ariane, éd., La mise en scène théâtrale de 1800 à nos jours, Paris : puf, 2010. BOLL, André, L’Opéra, spectacle intégral, Paris : Olivier Perrin, 1963. L'envers du décor, ouvrage collectif, catalogue de l'exposition du Centre National du Costume de Scène, Montreuil : Gourcuff Gradenigo, 2012. 35 Retrouvez l’Opéra Théâtre de Saint-étienne sur internet www.operatheatredesaintetienne.fr Jardin des Plantes - BP 237 42013 Saint-Étienne cedex 2 [email protected] Locations / réservations du lundi au vendredi de 12h à 19h 04 77 47 83 40