Préparatifs pour soigner la maladie à virus Ébola dans des établissements de soins de santé Août 2014 Ce document comporte ce qui a été appris à l’hôpital soutenu par la SIM au Libéria. Pendant les premiers quatre mois depuis le début de l’épidémie, presque tous les malades du virus Ébola ont été soignés à ELWA, un hôpital missionnaire comptant 40 lits. Vu que la capacité d’accueil d’un hôpital (nombre de lits), le nombre de personnel et les ressources disponibles peuvent varier énormément d’un milieu à l’autre, ce plan pourrait être modifié afin de correspondre au milieu unique de chaque hôpital. Nous avons tenté de dresser cette liste de mesures dans l’ordre où elles devraient être effectuées. L’établissement de soins de santé devrait identifier deux cliniciens responsables qui s’engageront à diriger la réponse à la maladie à virus Ébola. Dans l’idéal, ceux-ci doivent être un médecin et un infirmier / infirmière ou un professionnel de la santé de niveau intermédiaire. Chacune de ces personnes devraient être bien respectée, avoir de fortes compétences en leadership et être quelqu’un qui s’est avéré très fiable. Les deux responsables doivent recevoir une copie imprimée du manuel de 138 pages des Médecins sans Frontières intitulé « Directives concernant la fièvre hémorragique virale»* et l’extrait de 20 pages comportant le projet de texte « Gestion de malades du virus Ébola. » Chaque responsable devrait étudier soigneusement ces documents et devenir un expert local dans la matière. Quelques sections sont spécifiques à ceux qui travaillent dans une unité Ébola, mais la plupart s’applique à tout hôpital situé en région à risque d’accueillir des cas d’Ébola. Les responsabilités de ces responsables exigeront un temps important et on devrait prendre des mesures afin de les décharger de certaines de leurs autres responsabilités. L’administration hospitalière devra collaborer avec les responsables de la réponse à la maladie à virus Ébola afin de rédiger un projet de budget et devra obtenir un financement spécial pour couvrir les frais supplémentaires nécessaires afin de répondre adéquatement en cas de besoin. Si le virus Ébola est déjà dans le pays, demandez un financement d’urgence du Ministère de la santé. Tout membre du personnel doit recevoir une formation obligatoire au sujet du respect des précautions de contact, de l’hygiène des mains et de l’isolement. Chaque membre du personnel doit recevoir deux heures de formation toutes les 2 à 4 semaines sans quoi il ne sera pas autorisé à travailler. (Le programme de formation utilisé à l’hôpital ELWA sera bientôt accessible.) Cette formation doit impliquer le personnel de chaque service y compris la cuisine, la blanchisserie, le bureau d’affaires, la pharmacie et le laboratoire. Il pourrait s’avérer difficile de convaincre toute l’équipe de nuit d’assister à la formation pendant la journée, mais ceci est absolument nécessaire. D’après notre expérience, l’équipe de nuit est au plus haut risque. 1 de 5 Il faut mettre en place des systèmes de pénalités et de récompenses afin d’y arriver. La formation obligatoire ne saurait être exagérée. La direction de l’hôpital devra prévoir la communication régulière avec le Ministère de la santé en ce qui concerne la préparation pour traiter la maladie à virus Ébola dans votre installation et les ressources qui pourraient être rendues disponibles par le Ministère de la santé. Les responsables de la clinique de la maladie à virus Ébola, en collaboration avec les responsables des urgences, devront établir un service de triage, avec un protocole de triage, devant la salle d’urgence et devant le service de consultation externe. Cette zone devrait être suffisamment large pour permettre 20 pieds (6.096 mètres) d’espace entre les autres patients et ceux dans la zone d’attente. Un garde sera placé devant la salle d’urgence chargé de la protéger. Des cas suspects ne doivent pas accéder à aucune zone commune de traitement. Servez-vous des définitions de cas suspects ou probables indiquées à l’annexe 3.B (pages 85 et 86) du manuel des Médecins sans Frontières. Aussitôt que possible, l’hôpital devra acquérir tout le matériel nécessaire pour répondre aux critères appropriés des standards d’hygiène et des précautions de contact. • Thermomètres à infrarouge non tactiles (plusieurs seront nécessaires) • Poudre de chlore ou 40 gallons (151.416 litres) d’eau de Javel • Seaux de chlore, avec fausset, pour se laver les mains – un pour la salle d’urgence, un pour chaque salle d’hôpital, un pour le service d’admission (un des malades travaillait comme commis dans le service d’admission), un pour l’aire des visiteurs et au moins 4 pour l’unité d’isolement. • Blouses jetables avec manches pour la salle d’urgence (On peut commander sur Internet Medline Polyethylene Thumb Loop Style Isolation Gowns pour $0.50 USD la pièce). La quantité à commander dépend du nombre de patients passant par la salle d’urgence et le nombre de lits dans l’hôpital, mais nous recommandons d’avoir une très grande quantité en stock. • Gants. (Il faudra essentiellement deux fois le nombre de gants utilisés actuellement) • Équipement de protection individuel pour 2 à 4 semaines (on utilise généralement entre 12 et 14 combinaisons par jour en s’occupant d’un à quatre malades d’Ébola, car des équipes de 2 à 3 personnes entrent dans l’unité d’isolement tous les 3 à 4 heures approximativement). Jetables o Combinaisons de protection Tyvek ou Tychem par Dupont (Tailles XXL et moyen). Avant l’utilisation de toute autre combinaison, contrôlez son étanchéité. o Capuchon / masque Tyvek (isoclean ou microclean) o Masque N95 (bec de canard est le meilleur) o Gants d’examen o Gants chirurgicaux (taille 6.5, 7.5, 8) à porter par-dessus des gants d’examen Réutilisables o Bottes en caoutchouc (pointures 7 (39), 8 (41), 10 (44), 12 (46)) o Visières o Tabliers en caoutchouc o Gants résistants en caoutchouc 2 de 5 • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • Plusieurs rouleaux de ruban à conduits (quelques combinaisons comportent des passepouces. On peut les porter en toute sécurité sans lier la manche au gant à l’aide de ruban adhésif, mais lorsque la combinaison n’a pas de passe-pouces, il faut du ruban à conduits pour attacher le gant). 3 pulvérisateurs (un pulvérisateur utilisé pour le jardinage est acceptable). Une pompe à levier carré fonctionne mieux qu’un pulvérisateur rond avec une pompe sur la partie supérieure). Tenues de salle d’opération qu’on peut réserver aux soins des malades d’Ébola. (Après les avoir portées, trempez-les dans une solution d’eau de Javel pour 1 heure avant de les laver). Seaux ou chaises percées (beaucoup de patients ont des diarrhées qui ressemblent au choléra) Bassines larges et peu profondes qui serviront de bains de pied Plusieurs poubelles en plastique d’à peu près 40 gallons (151.416 litres) pour y mélanger la solution de chlore et pour y tremper des tabliers, des tenues et des bottes. Sacs à ordures épais (très résistants) Tensiomètre électronique à utiliser uniquement chez des cas confirmés (on ne peut pas ausculter la tension artérielle à travers la combinaison Tyvek) Oxymètre de pouls à utiliser chez des cas confirmés Bouteilles d’oxygène ou concentrateurs d’oxygène et tubulures Sondes urinaires Foley et kits d’insertion (À utiliser tôt dans le traitement. La gestion du volume est l’élément principal du traitement et un débit urinaire de 0.5 ml / kg / h devra être maintenu) Couvre-matelas en plastique (plusieurs) Matelas supplémentaires Linge et chemises d’hôpital pour les patients (Généralement, on se débarrassera du linge et des chemises sales, alors assurez un approvisionnement abondant) Couches pour adultes Serviettes de dessous Chux Tubulure IV, canules IV, matériel du rinçage IV Seringues, aiguilles, alcool Solutés IV Lactate Ringer (un patient a besoin de 6 à 8 litres par jour à certains moments) Supplément de potassium IV (l’hypokaliémie peut être sévère chez ces patients qui souffrent de diarrhées abondantes) Dextrose 50 % (D50) Ceftriaxone Lévofloxacine (Levaquin) pour voie orale Azithromycine pour voie orale Omeprazole Paracétamol ou acétaminophène Médicaments antipaludéens (Coartem ou artesunate IV) Multivitamines Vitamine A, complexe de vitamines B et vitamine C Médicaments parentéraux contre la nausée (nous avons évité le métoclopramide vu son effet prokinétique à cause des diarrhées dont la plupart des patients souffrent) 3 de 5 • • • • Diazépam Analgésiques parentéraux (d’après notre expérience, 2 mg de morphine trois fois par jour était un anti-diarrhéique plus efficace que l’Immodium ou le Lomotil chez les patients qui souffraient de diarrhées abondantes) Trousses d’analyse des groupes sanguins (si le laboratoire de référence n’est pas en mesure de faire ou refuse de faire des analyses de groupes sanguins) Compléments nutritionnels (tels que Plumpy’Nut® ou des frappés nutritionnels) Mettez sur pied une chaîne d’approvisionnement fiable. Des livraisons fréquentes pourraient s’avérer nécessaires pour le réapprovisionnement en matériel. Identifiez les membres du personnel et les médecins qui sont prêts à soigner ces malades. Développez un plan de travail pour le personnel qui comporte des aménagements dans les horaires de travail ainsi qu’un mécanisme de compensation de sorte qu’ils puissent se consacrer entièrement aux soins de ces patients. Identifiez une zone dans l’hôpital qui sera transformée en salle d’isolation pour des cas suspects. Il faudrait peut-être dresser une tente ou construire une structure temporaire. Identifiez un chemin sécuritaire par lequel on peut y transférer des patients suspects sans entrer dans d’autres aires communes ou zones de soins. S’il n’y a pas de toilettes réservées aux malades d’Ébola, on devra creuser une fosse, y superposer une plate-forme et une chaise d’aisance, l’entourer de murs de bâches et ériger un toit. Identifiez le laboratoire qui recevra des échantillons à analyser afin de dépister la présence ou l’absence de la maladie à virus Ébola et obtenez des contenants d’échantillon pour les transporter. Vous aurez peut-être besoin de consulter le laboratoire à ce sujet et de regarder à l’annexe no 6 (pages 90 et 91) du manuel des Médecins sans Frontières pour connaître les normes. Déterminez si ce laboratoire est en mesure de faire l’analyse des groupes sanguins. Sinon, approvisionnez-vous de trousses d’analyse nécessaires pour faire l’analyse des groupes sanguins dans l’unité. Du sang soupçonné de contenir le virus Ébola ne doit pas être transmis au laboratoire général de l’hôpital. Du sang frais entier (à utiliser de préférence entre 2 à 4 heures après avoir été prélevé) peut être utilisé en cas de complications hémorragiques dans les milieux où le plasma frais congelé n’est pas disponible. Établissez une politique de prendre la température de chaque employé au début de chaque quart de travail. Une voie courante d’infection des professionnels de la santé est par leurs collègues qui travaillent quand ils sont malades. Au moins une fois par semaine et pendant chaque quart de travail, pratiquez des exercices avec des substituts de patients dans la salle d’urgence et au service de consultation externe. Un surveillant / responsable doit enregistrer toutes les observations, bonnes et mauvaises, durant l’exercice. À titre éducatif, fournissez immédiatement au personnel ces commentaires. Observez les précautions de contact, l’utilisation appropriée des équipements de protection personnels (au moins une blouse, visière et des gants), l’isolement du patient, le protocole de triage, les procédés de désinfection correctes de soi-même et de la zone de triage, les mesures d’hygiène des mains, les mesures pour éviter des prises de sang au laboratoire. Un membre du personnel 4 de 5 qui ne donne pas preuve de son engagement à se protéger et à protéger les autres contre l’infection du virus Ébola ne doit pas être autorisé à travailler jusqu’à la fin de l’épidémie. Des stratégies pour l’éducation de la communauté doivent être développées (affiches, messages diffusés à la radio, distribution de circulaires, présentations dans des églises, programmes scolaires, etc. . .). Mettez l’accent sur le fait que le taux de survie est beaucoup plus élevé (nous estimons à 50% approximativement) chez ceux qui se présentent pour être soignés tôt dans l’évolution de la maladie. Mettez sur pied un plan sanitaire pour éliminer les déchets produits par les soins de malades suspects et confirmés. Si un ingénieur en eau et assainissement est disponible, demandez une consultation. En l’absence d’un expert local, nous avons fait des fosses sanitaires suivantes, tel que recommandées par les consultants des MSF : • Une fosse de 5 pieds (153 cms) de profondeur et de 4 pieds (122 cms) de largeur a été creusée pour y brûler les déchets. Au-dessus de cette fosse, il y a un toit en métal monté sur un cadre métallique d’une hauteur d’à peu près 4 pieds (122 cms) du sol afin d’empêcher que le trou se remplisse d’eau pendant des averses. Un mélange qui se compose d’une partie d’essence avec 10 parties de gazole (carburant diesel) est versé sur les déchets avant de les allumer. (N’UTILISEZ PAS D’ESSENCE TOUTE SEULE, CAR ELLE EST TRÈS INFLAMMABLE ET CAUSERA DE GRAVES BLESSURES ET BRÛLURES) • Une fosse de 4 pieds (122 cms) de profondeur et de 2 pieds (61 cms) de largeur a été creusée pour y déposer les objets tranchants. Le fond a été recouvert de béton d’une profondeur de 4 à 6 pouces (10 à 15 cms). Une grille en métal aux barres d’armature a été placée à deux pieds (61 cms) au-dessus du fond en ciment. Les objets tranchants sont gardés dans une petite boîte en carton épais qui, une fois remplie, est placée sur la grille et brûlée. Les objets tranchants tombent à travers la grille au fond de la fosse en ciment. Une fois l’épidémie déclarée terminée, du béton sera versé dans la fosse à une épaisseur de 12 pouces (31 cms), scellant les objets tranchants dans le béton. Ensuite, on remplira la fosse de terre. Veuillez noter que ce document est en cours d’élaboration. Envoyez vos commentaires et vos suggestions éventuels à [email protected] et [email protected] *Pour l’instant, ce manuel des MSF n’existe qu’en anglais Note de la traductrice : Comme dans le cas de Liberia et Libéria, Ebola et Ébola sont tous les deux utilisés en langue française. 5 de 5