Suivi échographique des IVG médicamenteuses
Yves Ardaens
Résumé
L’IVG médicamenteuse peut être pratiquée jusqu’au 63e jour d’aménorrhée. Elle doit cependant suivre un
protocole spécifique selon la date de la grossesse.
Aussi, pour réaliser une telle IVG, il est nécessaire d’une part d’affirmer le siège intra-utérin de la grossesse
en éliminant une GEU et d’autre part de dater la grossesse.
Par ailleurs, il est indispensable, après l’IVG, de s’assurer de l’expulsion complète.
À chaque étape, en dehors de l’examen clinique, de la symptomatologie et du dosage de l’hCG, l’examen
échographique est souvent indispensable. Cependant, les images échographiques peuvent être sources
d’erreurs d’interprétation. Aussi, ce document reprend les principales situations échographiques susceptibles
d’être rencontrées à chaque étape.
Summary
Medical termination of pregnancy up to 63 days amenorrhoea is now authorised and routinely carried out in
many countries. The treatment regimen used and protocols followed are variable and depend on the stage of
the pregnancy.
Thus, before commencing the treatment, it is vital, as far as is possible both to confirm that pregnancy is
intra-uterine (so excluding ectopic pregnancy), and to date the pregnancy.
After the intervention it is essential to confirm termination of the pregnancy and reassuring to document
complete evacuation of the uterus.
After taking in to account patient symptoms, results of clinical examination and the hCG level, an ultrasound
examination is frequently used at each juncture. Nevertheless, ultrasound images are open to errors of
interpretation which can lead to unnecessary interventions.
This paper reviews the main features of ultrasound imaging at each stage of medical termination of
pregnancy.
Avant l’IVG médicamenteuse
Affirmer la grossesse et éliminer une grossesse extra-utérine (GEU)
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Seule la présence d’un embryon ou d’une vésicule ombilicale (VO), au sein d’une image échographique de
sac ovulaire intra-utérin, permet de poser un diagnostic formel et donc d’éliminer un pseudo-sac gestationnel.
Sac ovulaire et vésicule ombilicale
Vers 5 semaines d’aménorrhée (SA) : diamètre ovulaire moyen entre 6 et 10 mm.
On repère la vésicule ombilicale sous forme de deux petits échos parallèles, séparés de 1 à 2 mm,
excentrés, au contact de la paroi ovulaire. Quelques jours plus tard, la totalité du contour apparaît nettement
avec un diamètre moyen qui augmente rapidement jusqu’à 3 à 5 mm (figure 1).
Sac ovulaire embryonné
Vers 5 semaines et 3 jours d’aménorrhée ou 24 jours de grossesse, l’embryon est théoriquement visible, par
voie endovaginale, lorsque sa longueur se situe entre 1 et 2 mm (figure 2). L’activité cardiaque est
habituellement repérable dès que l’embryon est visible, avec un rythme assez lent (80 bpm). Les battements
du tube cardiaque se voient parfaitement en mode B et la fréquence peut s’évaluer en mode TM : il est inutile
d’effectuer un écho-Doppler de l’embryon à ce stade.
Au total
• Un sac ovulaire de plus de 10 mm doit normalement contenir une vésicule ombilicale.
• Un sac ovulaire de plus de 16 mm doit normalement contenir un embryon vivant.
• Un embryon de 4 mm ou plus doit normalement présenter une activité cardiaque.
Situations douteuses et images pièges
Schématiquement, trois situations douteuses sont possibles : la cavité utérine paraît vide ; on visualise une
petite image liquidienne ; l’image ressemble à un pseudo-sac gestationnel .
La cavité utérine paraît vide ou est mal visible
Un utérus mal visible ou une cavité utérine apparemment vide par voie sus-pubienne impose de recourir à la
voie vaginale (figure 3). Si les conditions d’examen restent insuffisantes (obésité, grand utérus, fibromyome,
cicatrices), il faut :
• refaire le dosage de l’hCG afin de surveiller l’évolution ;
• renouveler l’échographie après 48 heures ;
• dans le doute et si le taux d’hCG est supérieur à 1 500 UI, la suspicion de GEU l’emporte toujours.
Petite image liquidienne infracentimétrique : œuf ou image « piège » ?
Entre 4 et 5 SA : la vésicule ombilicale n’est pas encore visible et la couronne trophoblastique n’est pas
toujours très nette.
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Sur le plan morphologique, il est impossible de différencier à ce stade un petit sac ovulaire d’une glande
kystique endométriale ou d’autres images pièges :
• Les kystes intra glandulaires sont fréquents en cas de réaction déciduale et peuvent se voir notamment
en cas de GEU. Ils forment des petites images liquidiennes pouvant atteindre 2 à 3 mm, parfois multiples
avec aspect glandulo-kystique ; ils peuvent simuler un petit œuf voire même e^tre associés à un sac ovulaire
(figure 4).
• Les images intracavitaires : les rétentions liquidiennes (hématométrie, hydrométrie, pyométrie) et surtout
les polypes intracavitaires glandulo-kystiques qui sont parfois très trompeurs (figure 5).
Images myométriales sous-muqueuses
On observe de petits fibromes sous-muqueux en nécrobiose ou des nodules d’adénomyose, particulièrement
trompeurs car ils sont fréquemment lutéinisés et prennent un aspect en cocarde. La situation
extramuqueuse de ces images permet de redresser le diagnostic (figure 6) .
Devant une petite image « kystique » centro-utérine, mesurant de 2 à 10 mm, éléments en faveur du diagnostic d’œuf intra-utérin :
• l’œuf est initialement intramuqueux et non intracavitaire ;
• la présence d’une couronne trophoblastique qui va rapidement différencier l’œuf d’une glande kystique
qui ne se modifie pas au contrôle échographique ;
• la croissance : un œuf normal grossit d’environ 1 mm par jour à cette période et rapidement
apparaîtront les structures embryonnaires, vésicule ombilicale puis embryon ;
• néovascularisation au site d’implantation en Doppler couleur (fig 7).
Image ovulaire de grande taille et vide : pseudo-sac ou œuf non évolutif ?
Ce piège correspond soit à une hypertrophie endométriale entourant une hydro-hématométrie, soit à une
caduque détachée avec épanchement central .
Le diagnostic différentiel repose alors sur les arguments suivants :
• la localisation du sac : l’œuf est habituellement excentré, alors que le pseudo-sac est central. La coupe
frontale de l’utérus, éventuellement en mode 3 D, peut être utile pour apprécier cette localisation et
différencier une grossesse intra-utérine angulaire d’une grossesse extra-utérine interstitielle (figure 7 a
et b ).;
• la structure : la grossesse intra-utérine forme une double « couronne » échogène correspondant à la
caduque et au trophoblaste, alors que le pseudo-sac n’est formé que d’une seule couronne
endométriale (fig 8) ;
• le Doppler : formé d’endomètre, le pseudo-sac n’est entouré d’aucun flux de type artériel ou veineux. La
mise en évidence d’un flux artériel ou veineux avec vitesse circulatoire > 20 cm/s affirmerait la nature
ovulaire de l’image et éliminerait un pseudo-sac (sensibilité 84 %, spécificité 100 %).
Dater la grossesse
L’échographie doit être corrélée au dosage d’hCG plasmatique.
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On retiendra les normes d’interprétations suivantes :
• hCG < 10 mUI/ml : pas de grossesse ;
• hCG entre 10 et 500 mUI/ml : repérage échographique ± ;
• hCG entre 500 et 1 000 mUI/ml : l’œuf mesure 1 à 3 mm ;
• hCG entre 1 000 et 7 000 mUI/ml : la valeur de 1 500 mUI/ml est aujourd’hui retenue comme seuil de
visualisation d’un œuf intra-utérin par voie vaginale, ce seuil de « visibilité » étant porté à 2 500 par voie
abdominale ;
• hCG > 7 000 mUI/ml : un œuf intra-utérin est toujours visible et il contient une vésicule ombilicale
caractéristique ;
• hCG > 10 000 mUI/ml : l’embryon et l’activité cardiaque sont habituellement retrouvés.
Corrélation entre date de grossesse, taux d’hCG plasmatique et échographie
Date de la grossesse Taux d’hCG (mUI/ml) Échographie vaginale
4-5 SA < 10 10-500 Pas de grossesse œuf non visible
5-6 SA 500 - 1000
Diamètre ovulaire : 5-10 mm
Embryon : 1-3 mm (visible dans un
tiers des cas) Activité cardiaque
repérable
5-6 SA 1000 - 1500 Embryon : 3-6 mm Battements
cardiaques
> 2 500 Visible par écho sus-pubienne
7 SA > 7 000 Embryon > 6-7 mm
hCG > 1 000-1 500 mUI/ml + œuf non visible : suspicion de GEU
L’echo-Doppler (figur 9)
Le mode Doppler peut être très précieux dans l’identification d’une grossesse débutante dont le diagnostic
est douteux, mais il est nécessaire de disposer d’une imagerie couleur d’une très grande sensibilité.
Le Doppler couleur permet de repérer la néovascularisation qui se développe dans l’endomètre, au contact
du trophoblaste, dès l’implantation de l’œuf (FIG 9). Un signal couleur est même parfois identifiable dans la
zone d’implantation, avant même la visualisation du sac ovulaire et le retard de règles. Il s’agit d’un flux
artériel à basse résistance (Index de Résistance IR = 0,40 à 0,50) avec des vitesses systoliques dépassant le
plus souvent 20 cm par seconde. Ce type de flux similaire à celui d’un corps jaune ne se rencontrerait pas
dans l’endomètre normal et permettrait pratiquement d’exclure une GEU.
La mise en évidence d’un flux de type veineux a moins de valeur car il peut se voir en cas de réaction
déciduale, quel que soit le siège de la grossesse.
Après l’IVG médicamenteuse
Le moment optimum pour faire l’échographie est fonction des signes fonctionnels et de l’augmentation
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éventuelle du taux d’hCG.
Il est donc essentiel de prêter une attention particulière à l’aspect de la cavité utérine et d’évaluer l’épaisseur
endométriale .
L’échographie sera demandée surtout si le taux d’hCG plasmatique décroît de façon trop lente ou
insuffisante, notamment lorsqu’au contrôle il reste supérieur à 20 % du taux initial.
Différents aspects échographiques peuvent être retrouvés après l’ IVG médicamenteuse.
Expulsion complète (figure 10)
La cavité est vide. L’endomètre est absent ou peu abondant, entourant parfois une petite hématométrie
résiduelle.
Grossesse persistante
La poursuite d’une grossesse évolutive survient dans 1 à 5 % des IVG médicamenteuses. Elle est suspectée
par le dosage d’hCG et facilement confirmée par l’échographie. L’évacuation par aspiration doit être
proposées rapidement.
Rétention d’œuf mort
L’échographie peut montrer un œuf non embryonné, non évolutif ou aspect d’œuf clair, souvent hypotonique
et aplati. Cet aspect nécessite une aspiration chirurgicale ou une nouvelle dose de misoprostol.
Rétention ovulaire partielle
La présence d’une cavité épaisse homogène dont l’épaisseur peut atteindre 10 à 15 mm est habituelle après
IVG médicamenteuse et ne doit pas forcément alerter (fig 11 )
La présence de structures hyperéchogènes intra cavitaires n’est pas synonyme de rétention trophoblastique
et ne doit pas conduire à un curetage systématique, car ces images peuvent correspondre tout aussi bien à
des caduques ou à des caillots . C’est la situation la plus délicate, car il est souvent difficile en échographie
d’identifier le trophoblaste avec certitude.
Dans cette indication, le doppler couleur et pulsé peut être utile car la présence d’un signal Doppler artériel
dans la cavité plaide en faveur d’une rétention trophoblastique (figure 12). À l’inverse, l’absence de signal
Doppler au sein d’une cavité épaisse de moins de 15 mm, est plutôt rassurante ; en effet, il s’agit le plus
souvent de débris de caduques et de caillots qui s’expulseront spontanément ou après une nouvelle prise de
prostaglandines (figure 13).
En pratique
L’échographie endovaginale est l’examen de référence avant une IVG médicamenteuse pour confirmer la
grossesse, sa localisation et sa datation.
Le contrôle échographique après IVG n’est pas toujours indispensable. Il entraîne en effet des curetages
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