Lire le dossier du journal IvryMaVille n°482 de - Ville d`Ivry-sur

DOSSIER
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DÉCEMBRE 2016 lIVRY MA VILLE l23
Le dernier acte des travaux de la Manufacture des Œillets a levé
le rideau sur le premier acte du Centre dramatique national
du Val-de-Marne - Théâtre des quartiers d’Ivry. Un outil culturel qui
place Ivry au devant de la scène, ses habitants aux premières loges.
Inaugurons !
Les 10 et 11 décembre,
vous êtes cordialement
invités au lever de
rideau du nouveau
théâtre de la place
Pierre Gosnat,
à la Manufacture
des Œillets.
Voir le programme page 29.
P
Place Pierre Gosnat, au n°1, la Manufacture
des Œillets ouvre ses portes au Théâtre
des quartiers d’Ivry, unique Centre dramatique
national du Val-de-Marne… et du Sud
francilien.
Sous l’horloge centenaire de lancienne fabrique
d’œillets métalliques, propriété de la Ville
depuis 2009, l’heure est à l’art. Construit en
1891 et classé monument historique, le grand
« bâtiment français » abrite désormais une
salle de représentation entièrement modulable
de près de quatre cents places, sa petite sœur
destinée aux répétitions, ainsi qu’une vaste
halle arborant fièrement les marques de son
passé industriel. À ses côtés, le « bâtiment
américain », acheen 1924, accueille bureaux
et cours des ateliers amateurs du théâtre,
mais aussi le Crédac (Centre d’art contemporain
d’Ivry) et l’Epsaa (École professionnelle
supérieure d’arts graphiques et d’architecture
de la Ville de Paris). Nouvelle venue, l’extension
de bois vêtue, adossée à la halle pour abriter
loges et décors, ajoute des perspectives
réjouissantes à l’ensemble.
IVRY, TERRE DE THÉÂTRE
La métamorphose de cet emblème du
patrimoine ouvrier ivryen en fabrique de culture
à partager fut pourtant une longue bataille
politique et financière, initiée en 2003 par Pierre
Gosnat (1948-2015), alors maire de notre com-
mune. Portés par cette impulsion, l’État,
la Région, le Département et la municipalité
ont uni leurs efforts pour donner aux habitants
d’Ivry et des environs un lieu national de
création ayant pignon sur rue, ouvert à tous.
Ce pour un coût de 20 M €, financé à 38 %
(6,5 M € HT) par la Ville.
Forte du théâtre municipal Antoine Vitez, des
théâtres Aleph et El Duende, de la compagnie
Bergers en Scène et du Théâtre des quartiers
d’Ivry devenu Centre dramatique national (CDN),
Ivry est pavée de créativité en actes. Une
richesse culturelle qui se transmet à travers
les générations de publics et de pratiquants
(plus de deux cents Ivryens suivent les ateliers
amateurs fondés par Antoine Vitez !), faisant
de ce que d’aucuns voudraient élitiste une réelle
pratique de partage. Non, la culture n’est jamais
superflue. Elle est un besoin vital, un service
public et un droit duquel personne ne doit être
exclu. Et c’est finalement revenir aux racines
de ce qu’est un CDN que de l’affirmer.
Nés au lendemain de la Libération, les centres
dramatiques nationaux et régionaux furent
créés dans le but avoué de décentraliser
le théâtre, de le diffuser en périphérie des
capitales symboliques. De lui rendre sa fibre
populaire en renouvelant et réinventant son
répertoire dans de nouvelles terres de jeu.
Aujourd’hui, la France en compte trente-neuf,
dont sept en banlieue parisienne. Chacun a sa
particularité et offre des choix créatifs qui lui
sont propres, mais tous mettent le théâtre
à portée de chacun. Il ne saurait en être autre-
ment de notre Théâtre des quartiers d’Ivry,
Centre dramatique national du Val-de-Marne,
nicdans une manufacture chargée d’Histoire
qui, même si elles ne sont plus métalliques,
fabrique toujours des pièces !
Dossier réali par Florian Guéguen, Catherine
Mercadier, Sylvie Moisy et Daniel Paris-Clavel.
Fabrique
de pièces
La halle d’accueil du CDN
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CDN. Trois lettres pour signer le Centre dramatique
national. Le « N » est le plus important car il donne lADN
du CDN. C’est une scène nationale, disposant d’un
lieu dédié, labélisée par le ministère de la Culture et dotée
d’un cahier des charges. Une institution culturelle française
emblématique, unique au monde. Dirigé par un ou des artistes,
un CDN a pour mission première la création théâtrale : faire
découvrir l’écriture contemporaine et revisiter le répertoire.
La pratique artistique amateur y est aussi favorisée.
Issus de la centralisation dramatique, ils visent à contrer
le désert culturel en région et en banlieue. Cofinancés par l’État
(majoritaire) et les collectivités territoriales, ils sont conçus
comme un service public, avec des tarifs attractifs compris
entre 5 et 15 €. Dans les salles parisiennes cet automne,
la place pour
Les Femmes savantes
coûtait entre 30 € et 60 €.
Chaque CDN a son propre projet artistique. Celui du Théâtre
des quartiers d’Ivry, Centre dramatique national du
Val-de-Marne, est marqué par les collaborations internationales,
à travers le « Théâtre des quartiers du monde ».
Dernier des CDN, celui d’Ivry a pour spécificité d’être ados
au Département :
« C’est une chance pour le Val-de-Marne
d’avoir le seul CDN du sud francilien. Dès le début, nous avons
été impliqués dans le projet,
se réjouit Évelyne Rabardel,
vice-présidente du conseil départemental.
Ça répond à une
volonté partagée par Ivry et le Département de permettre
à chacun d’accéder à l’imaginaire, au beau, au sensible et
à l’excellence pour tous. Nous pouvons être très heureux ! »
l
INSTITUTION CULTURELLE
LADN du CDN
Ce mois-ci, le Tâtre des quartiers d’Ivry devient Centre dramatique national
du Val-de-Marne, CDN pour les intimes. Que se cache-t-il derrière ce sigle ?
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DOSSIER
De gauche à droite : le foyer (halle d’accueil avec bar et librairie) ; le lanterneau (salle de répétition et de petits spectacles)
sous la verrière ; la grande salle modulable et l’extension contenant arrière-scène, loges, décors, costumes...
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DÉCEMBRE 2016 IVRY MA VILLE 25
« J’ai le plaisir de faire le
théâtre de ma ville ! »
Paul Ravaux
Architecte (RCC Architectes) du Centre dramatique national.
J
’habite Ivry et j’ai le plaisir de faire le théâtre de ma ville !
Auparavant, j’avais notamment restauré l’opéra Garnier
et le Théâtre de lAthénée à Paris, ainsi que la seconde
salle de l’Odéon – les ateliers Berthier. Surtout, il y a vingt ans,
j’ai eu l’occasion de rénover le bâtiment américain de
la Manufacture pour y installer lÉcole supérieure des arts
décoratifs. Les menuiseries étant en très mauvais état,
nous avons dû démonter les façades vitrées, les restaurer
et remonter.
Un CDN nécessite une polyvalence car il y a de plus en plus
de spectacles en coproduction, exigeant de pouvoir monter
les mêmes décors d’un théâtre à l’autre. Et peu de théâtres
possèdent une salle transformable de quatre cent places comme
celle-ci, qui laisse une liberté totale au metteur en scène !
Pour obtenir cette polyvalence, nous avons créés huit blocs
de quarante-cinq gradins assemblables comme on veut.
Il fallait aussi préserver un espace suffisamment important
pour comprendre ce qu’était authentiquement la Manufacture
des Œillets et son monde ouvrier. Dans la grande halle,
je voulais conserver l’esprit du bâtiment, ne pas restaurer à
tout crin. Le fait de récupérer cette moitié de halle pour en
faire un vaste foyer ayant la même capacité que la salle est un
élément d’accueil moins intimidant qu’un bâtiment neuf,
l’on n’ose rien toucher. On n’a pas l’impression de rentrer dans
une institution, notamment parce que l’on n’est pas dans
le schéma classique du théâtre avec ses vestibules : en passant
la porte, nous sommes tout de suite dedans. Cette notion
de proximité tourne autour du foyer, de son caractère inhabituel
et accueillant. L’extension, elle, outre de servir de cage de scène
pour le rangement des décors, exprime le renouveau
de ce bâtiment français, comme le bâtiment américain l’avait
précédemment renouvelé. Ainsi, la Manufacture traverse les
XIXe, XXeet XXIesiècles !
Ci-contre : l’horloge de la Manufacture restaurée
et la grande halle d’accueil.
Page 24 : les gradins modulables de la salle de théâtre.
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C
’est en 1972 que naît le Théâtre
des quartiers d’Ivry (TQI) à l’insti-
gation dAntoine Vitez, l’un des plus
grands dramaturges du XXesiècle, et avec
le soutien de Jacques Laloë, maire de la
ville.
« Le terme Quartiersamené par
Vitez a son importance,
relève Adel Hakim,
actuel co-directeur artistique du TQI.
Ivry
a toujours été une ville à la périphérie de
Paris, sensible à la diversité sociale
et culturelle. »
Avec cette volon
farouche de faire
« théâtre de tout »
,
Antoine Vitez investit des lieux ordinaires
pour y monter des textes classiques et
imagine une école ouverte à tous, faisant
le lien entre amateurs et professionnels
(lire page 28). Les directeurs successifs
du TQI, de Philippe Adrien à Adel Hakim
et Elizabeth Chailloux, en passant
par Catherine Dasté, auront à cœur
d’enraciner chacun à leur manière ce
« petit arbre de théâtre »
, cher à Antoine
Vitez. Devenu une figure incontournable
du théâtre populaire et décentralisé,
le TQI se voit décerner en 2003 le
prestigieux label de « Centre dramatique
national (CDN) en préfiguration ». Le 20
juin 2015, il devient CDN à part entière
lors de la pose de la première pierre de
la Manufacture des Oeillets, prenant ainsi
le relais d’un autre théâtre, CDN depuis
1982 : le Campagnole.
SUR LA ROUTE
L’histoire du Campagnole, créé en 1975,
est celle d’un théâtre vagabond. Après
dix ans passés à Chatenay-Malabry,
il emménage à Corbeil-Essonnes avant
d’en être chassé en 1995 par Serge
Dassault, le nouvel édile qui décide
tout-à-trac d’amputer le théâtre de
la moitié de ses subventions. C’est le
début d’une période d’errance pour
le théâtre, qui trouve d’abord refuge à
Paris puis Arcueil. Avant son transfert
au Théâtre des quartiers d’Ivry, en 2003,
avec le soutien de la Ville et du
Département.
« Je dois être le recordman
français du déménagement de théâtre,
sourit Dominique Lerminier, aujourd’hui
directeur technique du TQI et ancien
compagnon de route du Campagnole.
Nous avons été un CDN itinérant pendant
de nombreuses années, ballotés au gré
des affres politiques. Jusqu’à ce que nous
soyons accueillis au TQI, dans une ville
le théâtre signifie vraiment quelque
chose. »
Désormais Centre dramatique national,
ne manquait plus au TQI qu’un lieu
conforme aux exigences du nouveau
label. C’est chose faite en 2009, avec
l’acquisition par la Ville de la Manufacture.
« Nous sommes peut-être le seul CDN
du département, mais quelle beauté…
,
s’émerveille aujourd’hui Elizabeth
Chailloux, directrice artistique.
C’est
magnifique ! Et c’est grâce à la ville d’Ivry
et ses habitants que ce projet est né. »
E T L E C D N F Û T
Des coulisses à la scène
Comment le Théâtre des quartiers dIvry est-il devenu un Centre dramatique national ?
Histoire d’un heureux évènement.
26 IVRY MA VILLE DÉCEMBRE 2016
DOSSIER
Dominique Rocher, ici dans son nouvel atelier de couture
à la Manuf’.
L
es gestes sont sûrs et précis. Le tissu, d’abord brut,
commence progressivement à prendre forme entre les
mains expertes de Dominique Rocher, la costumière
attitrée du Théâtre des Quartiers d’Ivry (TQI).
« Je fabrique
un tablier pour les serveurs du bar
, commente-t-elle tout en
repassant l’étoffe fraîchement découpée.
C’est la priorité en
vue de l’inauguration. Ensuite, je m’attèlerai aux costumes pour
la pièce d’Adel Hakim,
Des roses et du jasmin
. Une petite
quarantaine de tenues à préparer, un jeu d’enfant »
, rigole celle
qui habille comédiens et comédiennes depuis une trentaine
d’années. Comme Dominique, ils sont nombreux à s’activer
en amont de chaque représentation. Car la scène d’un théâtre
est le lieu dans lequel se concrétise, l’espace d’un instant,
le travail de toute une équipe. Il y a bien sûr la mise en scène
et la scénographie. Mais aussi toute une partie technique moins
connue : régisseur lumière et plateau, machiniste, électricien,
régisseur son et vidéo... Sans oublier les missions administratives
et de relation avec le public. Anticipant leur installation à la
Manufacture, le TQI a ainsi procédé à l’embauche de huit
personnes, passant de quatorze à vingt-deux permanents. Pour
que le jour de la première, seul le spectacle compte.
TRAVAIL D’ÉQUIPE
Derrière le rideau
Une pléiade de personnes sactive en coulisse pour laussite de chaque spectacle.
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