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mathématiques, en zoologie, pour avoir proposé une théorie géologie, une théorie de la
reproduction et du développement, pour avoir entamé une réflexion sur la notion d’espèce,
etc. Ici nous nous intéressons à deux textes publiés en 1749 et qui concernent directement la
question de l’histoire et des origines. Ils figurent tous deux dans le premier volume de
l’Histoire naturelle, vaste ouvrage en 36 volumes qui représente pratiquement les œuvres
complètes de Buffon.
Le premier de ces textes concerne ce que Buffon appelle l’« histoire et la théorie de la
Terre ». L’« histoire », ici, est simplement la description de la Terre et ne suppose aucune
idée de temps (comme dans l’expression « histoire naturelle). En revanche, la « théorie de la
Terre », implique la volonté d’expliquer les caractéristiques de la Terre (la répartition des
mers, des montagnes, etc.) d’après les lois de la physique. Buffon décrit donc la Terre (il
s’agit de ce qu’on appellerait aujourd’hui de la géographie physique), puis il propose une
théorie pour expliquer comment on en est arrivé à ce faciès. Cette théorie se caractérise par
l’importance accordée à l’action des eaux, ce qui est assez commun à l’époque, ainsi que par
la lenteur et la cyclicité des événements qui ont façonné le globe. Selon Buffon, la mer,
animée d’un mouvement général d’orient en occident (conformément aux prédictions de la
mécanique newtonienne) ronge les continents par l’est, tandis que l’érosion et
l’alluvionnement compensent cette perte, sur la façade occidentale, en produisant sans cesse
de nouvelles terres : il existe donc comme un « roulement » des terres émergées qui se
déplacent en quelque sorte d’est en ouest au fil du temps. Ce sont les courants marins qui
façonnent le relief en se frayant un chemin à travers les substances molles précipitées dans la
mer par l’érosion et le ruissellement : ils forment alors des montagnes et des vallées, dont les
angles se correspondent (c’est un des principaux faits que Buffon a relevés). Ces
« inégalités » du fond des mers, une fois émergées, constituent le relief des nouveaux
continents. Cette théorie s’inscrit donc dans la lignée des conceptions neptunistes en vogue
depuis plusieurs décennies. Surtout, elle est cyclique, et c’est un point essentiel car pour
Buffon (en tout cas en 1749), une véritable théorie scientifique se caractérise par le fait
qu’elle est fondée sur l’observation de faits qui se répètent un grand nombre de fois. Cela
exclut les faits isolés, les événements uniques.
Or, justement, le second texte, qui suit immédiatement l’« histoire et théorie de la
Terre », est consacré à la formation de la Terre et des planètes, c’est-à-dire un événement
unique et lointain. Résumons très rapidement le raisonnement de Buffon : il part du constat
que, dans le système solaire, les planètes (connues à son époque) tournent dans le même sens
et dans des plans très proches ; il faut donc imaginer une impulsion initiale qui puisse rendre
compte de cette particularité. Le seul scénario envisageable, selon Buffon, suppose
l’intervention d’une comète : l’un de ces astres, qu’on suppose alors très denses, et qui frôlent
parfois le soleil, aurait percuté l’étoile, en faisant jaillir un « torrent » de matière en fusion, se
divisant en autant de gouttes que de planètes ; ces dernières auraient alors acquis une forme
sphérique, légèrement aplatie aux pôles, toujours conformément aux prévisions de la
mécanique newtonienne. Mais ce qui nous intéresse ici, c’est plutôt le début du chapitre et la
manière dont Buffon présente son texte. D’emblée il revient sur la différence entre une théorie
scientifique et ce qu’il appelle un « système ». Alors qu’il a, comme nous l’avons vu, limité le
champ des théories aux événements répétitifs et observables, il s’autorise, en traitant de la
formation des planètes, une exception à la règle qu’il s’est imposée, mais il déclare qu’il ne va
proposer à ce sujet que des « conjectures », un « système ». Puisqu’il s’agit d’un événement
qui ne s’est produit qu’une fois dans l’histoire, la connaissance que l’on peut en avoir est par
conséquent d’une nature différente de celle d’une théorie dont le fondement est la constatation
réitérée d’une série de faits : « nous espérons par là mettre le lecteur plus en état de prononcer
sur la grande différence qu’il y a entre une hypothèse où il n’entre que des possibilités, et une
théorie fondée sur des faits, entre un système tel que nous allons en donner un dans cet article