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boire devant d’autres, parler de soi, exposer
un sujet, poser des questions, etc. Les tech-
niques d’exposition peuvent également être
utilisées avec efficacité lors de traitements
individuels. Dans ce cas, il est intéressant de
pouvoir faire participer un ou plusieurs
cothérapeute(s) à certaines séances. Une
autre particularité des techniques d’exposi-
tion dans le traitement de la phobie sociale
est le fait que le sujet ne s’expose pas uni-
quement aux situations anxiogènes (prendre
la parole dans un groupe) mais aussi aux
conséquences redoutées (être critiqué, avoir
des “blancs”, trembler). Ainsi, par exemple,
lorsqu’il exposera un sujet devant le groupe,
un autre membre du groupe aura comme
consigne de montrer des signes d’ennui
(bâiller, tousser, etc.). Lors de la pratique thé-
rapeutique des jeux de rôles, son interlocu-
teur va réagir d’une manière agressive. Par-
fois, c’est le sujet qui va produire des
comportements redoutés : il va chercher à
trembler, à avoir des “blancs”, etc. Ce type
d’exposition doit, bien évidemment, être
mené avec prudence et très progressivement.
Partant du principe que les sujets souffrant
de phobie sociale n’ont jamais appris – ou
ont désappris – certaines compétences
sociales, l’entraînement aux habilités
sociales individuellement ou en groupe va
leur permettre cet apprentissage au travers
de jeux de rôles. Il s’agit essentiellement de
permettre au sujet d’acquérir un comporte-
ment verbal et non verbal affirmé. Les
thèmes les plus fréquemment travaillés sont
savoir engager, maintenir et terminer une
conversation, formuler des demandes, des
refus et des critiques, répondre aux critiques,
faire des compliments et y répondre. La
restructuration cognitive sera plus facile-
ment utilisée en thérapie individuelle qu’en
thérapie de groupe. Il s’agira, comme tou-
jours, de repérer dans un premier temps les
pensées automatiques négatives et les dis-
torsions cognitives (erreurs de logique telles
que généralisation, inférence arbitraire),
puis de mettre à jour les croyances incons-
cientes qui, une fois activées, dirigent la vie
des patients (schémas cognitifs). Dans la
phobie sociale, les schémas les plus fré-
quents sont des schémas de soumission (“Je
dois toujours faire plaisir à tout le monde
pour être aimé”), d’exigences élevées (“Je
dois toujours tout réussir pour être aimé”) et
d’hypervigilance critique des autres (“ Les
gens se surveillent en permanence les uns
les autres, et tout signe de faiblesse est jugé
négativement”). Le travail de modification
cognitive passera par des techniques verbales
(dialogues socratiques, évaluation des
avantages et inconvénients des schémas)
et des techniques non verbales (exposition
in vivo ou en jeux de rôles).
Études d’efficacité
La plupart des études (6, 7) montrent une
amélioration significative des patients souf-
frant de phobie sociale après une TCC d’une
durée limitée. Les résultats semblent se
maintenir dans le temps, ce qui n’est pas le
cas des traitements médicamenteux. Il paraît
difficile, cependant, d’identifier l’ingrédient
thérapeutique le plus efficace (exposition en
groupe, en individuel, modification cogni-
tive, entraînement aux compétences
sociales), étant donné que la plupart des pro-
grammes thérapeutiques proposent des asso-
ciations.
Le trouble obsessionnel
compulsif
Modèles
Adaptant la théorie des deux facteurs de
Mowrer (8, 9), les comportementalistes pos-
tulent que, dans le trouble obsessionnel com-
pulsif (TOC), des pensées obsessionnelles
se sont trouvées conditionnées à la peur qui
est, par la suite, maintenue par l’évitement
(rituels). Rachman et al. (10)ont conduit une
série d’études pour vérifier le modèle com-
portemental dans le TOC. Ils ont trouvé, en
effet, que :
– l’exposition à l’obsession augmente
l’anxiété ;
– si le patient est autorisé à ritualiser,
l’anxiété décroît sur le moment, pour être
égale, voire supérieure à l’exposition sui-
vante ;
– si les rituels sont empêchés, l’anxiété
décroît plus lentement (environ 1 heure) ;
– si le patient n’a pas ritualisé son anxiété,
lors de l’exposition suivante, elle sera moins
importante.
Ainsi, la prévention des rituels, bien
qu’anxiogène sur le moment, permet de pro-
gressivement diminuer l’anxiété lors des
exercices d’exposition jusqu’à une dispari-
tion totale.
Salkovskis (11)développe un modèle cogni-
tif du TOC. Il part de la constatation qu’il
n’existe pas de différence de contenu entre
les obsessions des sujets normaux et celles
des sujets obsessionnels, et que plus de 80 %
des sujets normaux présentent des idées
intrusives. Cependant, les obsessions nor-
males diffèrent des idées intrusives du TOC
par leur fréquence moindre, leur durée limi-
tée, le fait qu’elles puissent être rejetées sans
difficulté et que les réactions émotionnelles
qui les accompagnent disparaissent rapide-
ment. Selon Salkovskis, les obsessions sont
le résultat des interprétations erronées et
catastrophistes des pensées, images ou pul-
sions intrusives. Les sujets souffrant d’un
TOC ont des schémas cognitifs inconscients
de responsabilité et de culpabilité qui vont
conduire aux pensées négatives catastro-
phistes : “C’est épouvantable de penser
cela”, “Je suis abject”, etc. Dans un
deuxième temps, le sujet obsessionnel va
chercher à neutraliser, à annuler ces pensées
par des rituels mentaux ou comportemen-
taux. Il va également chercher constamment
à être rassuré par des thérapeutes ou il va ten-
ter de chasser ces pensées. Les pensées et les
rituels neutralisants vont avoir l’effet para-
doxal de renforcer les schémas de culpabi-
lité, de responsabilité et de danger.
Techniques thérapeutiques
Une des techniques les plus efficaces
dans le traitement des rituels comporte-
mentaux et mentaux est celle de l’expo-
sition avec prévention de la réponse. Il
mise au point
Mise au point