Psychomotricité dans le cadre du trouble des conduites

Psychomotricité dans le cadre du trouble des conduites : une réflexion
sur les conduites impulsives et leur prise en charge chez l’adolescent.
INTRODUCTION GENERALE
L’objet de mon mémoire est de proposer une réflexion autour de la prise en charge psychomotrice
dans le cadre d’un institut de rééducation regroupant des adolescents de 12 à 18 ans dont l’indication
d’internat est le trouble des conduites. Parce que ces adolescents rencontrent des difficultés multiples à
différents niveaux et que leur mode de fonctionnement prédominant est la conduite impulsive se
répercutant sur leur ajustement individuel global, parce que la prise en charge psychomotrice se doit de
prendre en compte en priorité les éléments qui font obstacle au bon déroulement du suivi, éléments qui ne
sont pas forcément sans rapport avec les troubles psychomoteurs constatés en tant que tels, enfin parce
que l’action du psychomotricien se doit de répondre et de s’associer à la demande institutionnelle,
l’essentiel de mon travail thérapeutique s’est porté sur les différentes approches des processus impulsifs et
les moyens de l’endiguer.
Dans un premier temps je décrirai les caractéristiques liées à cette population (éléments se
rapportant à la période adolescente, projet institutionnel, éléments concernant le trouble des conduites et
de l’adaptation, et énumération des troubles associés les plus fréquemment retrouvés). Puis je
m’attacherai à décrire les principaux troubles psychomoteurs rencontrés, et donc définirai d’une façon
large le rôle du psychomotricien dans l’établissement. Ceci constituera une introduction générale de mon
travail.
Dans une seconde partie, ma réflexion s’oriente sur l’impulsivité, trouble d’expression diverse
mais rencontré de façon majeure chez ces adolescents. Mon travail s’évertuera à définir d’un point de vue
clinique les différentes formes d’impulsivité rencontrées chez cette population, puis de faire le lien entre
ces différentes observations et les apports théoriques et considérations actuels : relations entre
l’impulsivité et les troubles des conduites, commorbidité des troubles impulsifs, mode de fonctionnement
de l’impulsivité au regard des modèles explicatifs neuropsychologiques et psychopathologiques actuels,
impulsivité secondaire ou primaire et cadres de définitions de ces différents types, étiologies possibles.
Après avoir discuter des difficultés de distinction des différentes formes d’impulsivité décrites, et
de ce fait des problèmes diagnostics rencontrés au regard des dossiers et des informations rapportées par
l’ensemble de l’équipe, j’exposerai un mode de fonctionnement hypothétique commun à ces différents
types d’impulsivité en lien avec les autres caractéristiques pathologiques présentées à un niveau
psychomoteur et l’effet possible d’une intervention sur l’impulsivité vis à vis des autres modules
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considérés. Mon travail pratique s’articulera autour de plusieurs points : Synthèse de la partie théorique
sur l’articulation possible entre troubles présentés et impulsivité constatée et donc axes de travail choisis
de ce fait, précautions à prendre aux vues des spécificités présentées par cette population, évaluations
initiales et projets individuels de prise en charge, séances types et réévaluations.
Une discussion sur les difficultés rencontrées et la place de l’impulsivité dans l’évolution des
prises en charges conclura mon travail, et amènera peut-être à de nouvelles perspectives d’actions futures.
PARTIE THEORIQUE
I - Présentation générale de la population concernée.
Mon travail s’est effectué dans l’institut de rééducation « la convention », situé au cœur de Auch,
dans le gers. Cette structure regroupe 43 adolescents et pré-adolescents âgés de 12 à 20 ans, présentant
des troubles du caractère et du comportement. Les jeunes dont j’ai effectué le suivi sont tous adolescents,
leur moyenne d’âge étant de 15 ans.
Pour mieux comprendre le contexte de travail dans lequel se situe le psychomotricien, il me
semble important de dissocier les comportements et modes de pensée revenant aux différentes pathologies
présentées par cette population, et ceux caractéristiques de la période adolescente.
I-1- La période adolescente.
Elle est arbitrairement comprise entre les âges de 11 à 20 ans. Elle se caractérise par de profonds
changements physiques, psychologiques et sociales. Elle débute à un moment précis, variable en fonction
des individus, déterminé par l’apparition de certaines transformations : accélération rapide de la
croissance du squelette et les débuts du développement sexuel sur le plan physique, accélération du
développement cognitif et la consolidation de la formation de la personnalité sur le plan psychologique,
ainsi que l’élaboration du futur rôle de jeune adulte sur le plan social. Il est important de distinguer la
puberté qui est un processus physique de transformation caractérisé par le développement des caractères
sexuels secondaires, et l’adolescence, qui correspond à l’adaptation de la personnalité à toutes ces
transformations. Ces deux processus sont synchrones généralement mais peuvent exister des décalages
(comme une croissance retardée ou précoce) pouvant entraîner des séquelles psychologiques (sentiment
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d’infériorité, faible estime de soi, perte de confiance..) du fait d’une grande dépendance de l’adolescent
envers le regard de ses pairs.
·Transformations hormonales : L’augmentation des hormones sexuelles (oestradiol et
testostérone) est progressive au cours de l'adolescence, avec un pic à 16-17 ans pour se stabiliser ensuite à
l’âge adulte. Ces hormones influent sur le fonctionnement du système nerveux central, notamment sur
l’humeur et le comportement. Des taux élevés de testostérone ont été corrélés à l’agressivité et
l’impulsivité chez certains adultes masculins. Le milieu de l’adolescence est une période où tous les
comportements et expériences sexuels sont possibles.
·D’un point de vue psychologique et cognitif, la pensée devient abstraite, conceptuelle et
orientée vers le futur (stade des opérations formelles et du raisonnement sur un matériel abstrait, d’après
Piaget). Cette période est marquée par une grande créativité (musiques, lectures, écrits, art..), une volonté
d’indépendance en s’opposant fréquemment aux parents. On observe une forme de négativisme
l’adolescent refuse que lui soient dictés ses conduites, ses choix. Il devient un moyen actif d’exprimer
verbalement la colère. Progressivement, les adolescents intègrent à leur propre système de valeurs
d’autres valeurs et de nouvelles identifications se produisent. Le groupe de pairs est un mode de relation
privilégié, intensifiant le degré de séparation d’avec les parents. Il est généralement constitué de jeunes
d’âge et d’intérêt semblables. Malgré tout, le support social procuré par les parents joue un rôle tampon
dans les situations d’urgence. Les adolescents sont extrêmement sensibles au regard de leurs pairs et tout
écart dans l’apparence, le code vestimentaire, ou le comportement peut entraîner une diminution de
l’estime de soi. L’estime de soi repose sur l’acquisition de la compétence pendant l’adolescence. Un
sentiment de compétence s’acquiert dans l’accomplissement d’une tâche que la société d’aujourd’hui
considère comme importante. L’incapacité de poursuivre une scolarité peut entraîner des difficultés pour
établir une identité professionnelle satisfaisante, et de surcroît, une identité sociale désirable et reconnue.
·Du point de vue du développement moral (partage de certaines valeurs, normes, droits et
devoirs) l’adolescent à ce stade de développement intériorise les principes éthiques et le contrôle de la
conduite. L. Kohlberg (in, Synopsis de Psychiatrie) décrit trois stades de développement du jugement
moral, inspiré des concepts piagétiens : Le premier niveau est la moralité pré-conventionnelle où la
punition et l’obéissance aux parents sont les facteurs déterminants. Le second est la moralité
conventionnelle du rôle où l’enfant essaie de se conformer pour gagner l’approbation et conserver de
bonnes relations avec les autres. Enfin le troisième est la moralité des principes moraux quand l’enfant se
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conforme volontairement aux règles sur la base d’un concept de principes éthiques et fait exception aux
règles dans certaines cas.
·Certains comportements à risque peuvent apparaître durant la période adolescente comme
l’utilisation de l’alcool, du tabac, et d’autres substances, l’activité sexuelle désordonnée (particulièrement
dangereuse en raison des risques de contamination virale), et certains comportements augmentant les
risques d’accidents tels que conduire rapidement, pratiquer des sports dangereux. Dans la plupart des
statistiques de mortalité adolescente, les accidents sont les premières causes e mortalité (40% des
accidents sont routiers). Dans une évolution normale, ces comportements régressent vers des prises de
décision plus responsables. L’étude des phénomènes violents montre que les crimes perpétués par les
jeunes sont en augmentation ces dix dernières années. Les homicides sont la deuxième cause de mortalité
chez les sujets âgés de 15 à 25 ans. Le principal facteur favorisant la violence serait l’absence de soutien
paternel ou équivalent (autorité). Les facteurs niveau socio-économique et niveau d’éducation n’entrent
pas comme déterminants dans les résultats d’étude. La famille rapporte peu d’altercations majeures.
Quand ce n’est pas le cas, cet échec peut provenir de troubles mentaux chez l’enfant, des parents, ou les
deux. Environ 20% des adolescents ont un trouble mental qui peut être diagnostiqué. Parmi les
diagnostics les plus fréquents, on retrouve les troubles de l’adaptation, les troubles anxieux et dépressifs,
troubles souvent associés à un comportement délinquant, à un trouble oppositionnel et à l’échec scolaire,
tous susceptibles de contribuer à une dysharmonie familiale (in, Synopsis de Psychiatrie).
On peut déjà comprendre que ces éléments sont importants pour orienter notre approche auprès de
cette population. En effet, la période adolescente est marquée d’une quête d’autonomie, passant souvent
par un discrédit de l’adulte, des oppositions fréquentes (notamment refus d’aide) et un manque d’intérêt
pour ce qu’on peut proposer. Il est donc essentiel pour cette tranche d’âge de cerner les intérêts du jeune,
mobiliser sa motivation et établir une relation d’adulte, même si les comportements qu’ils adoptent
montrent parfois une réelle immaturité.
I-2- Indications pour un institut de rééducation.
La population reçue à l’institut de rééducation de Auch est constituée d’enfants et d’adolescents
présentant des troubles du caractère et du comportement capables toutefois de bénéficier d’un support de
prise en charge classique (scolarité, formation professionnelle, ateliers éducatifs..) et pour lesquels le
projet individuel est orienté vers une réinsertion ou insertion en milieu ordinaire. La tranche d’âge
accueillie permet une intervention modulable de 1 à 5 ans en fonction des diverses problématiques
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rencontrées et évolutions de projet. Au sein d’un institut de rééducation comme celui-ci, la fonction d’un
placement est avant tout thérapeutique et propose la mise en place d’un cadre visant à permettre à
l’adolescent d’analyser les conflits qu’il vit au sein du milieu familial et qui limitent ses possibilités de
maturation (in, projet institutionnel). Les enfants et adolescents accueillis ont des personnalités
différentes, certes, mais qui possèdent en commun la caractéristique de s’être exprimées à un moment
donné dans le comportement et notamment dans le passage à l’acte, quel qu’en soit la forme. La
traduction de ce type de trouble trouve tout son retentissement sur l’entourage, familial et scolaire
notamment.
Sur un plan clinique, les troubles du comportement sont variables en fonction de l’âge, du milieu
où ils se produisent et de la tolérance de celui-ci. Aussi, c’est surtout pendant la période scolaire que de
tels troubles sont dépistés. Les symptômes d’appel, relevés par l’enseignant, sont essentiellement :
instabilité, indiscipline, comportements agressifs à l’égard des autres enfants ou des adultes, difficultés
scolaires portant sur les apprentissages ou dans les attitudes à l’égard de l’école : absentéisme, fugues,
école buissonnière, refus.
Dans les populations d’adolescents et pré-adolescents accueillis, ce sont les conduites antisociales
et délinquentielles qui s’additionnent ou relayent les précédentes, telles que les vols, toxicomanies,
incivilités importantes. Sur le plan du contexte psychopathologique, l’admission des jeunes, enfants ou
adolescents, qu’elle soit prononcée à la demande des services sociaux ou institutionnels, est souvent
motivée par la présence des dits troubles. L’admission va prendre en compte différents axes : Famille, et
apports pluridisciplinaires possibles, ainsi que les souffrances psychopathologiques pouvant sous-tendre
ces comportements :
- Anxiété, troubles phobiques, obsessions..
- dépression
- Une nette tendance à l’extériorisation des conflits et un déni de la réalité des troubles.
- Une organisation franchement psychopathique de la personnalité caractérisée par des troubles
donnant lieu à des actes sans contrôle ni retenue, perturbant l’intégration sociale.
Ces différentes pathologies ont permis la composition de groupes de jeunes pré adolescents et
adolescents, structurés selon un objectif précis : Permettre une évolution positive dans un cadre
professionnel offrant un soutien scolaire, psychologique, social, pédagogique, et des prises en charge
diverses adaptées aux difficultés de chacun.
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