ÉVÈNEMENT Pr Mustapha Sadibelouiz* à Santé Mag Actuellement il n’existe, de par le monde, aucun traitement curatif de la maladie d’Alzheimer Propos recueillis par Tanina Ait Décrite, en 1906, par le médecin allemand Alois Alzheimer, la maladie d'Alzheimer est une pathologie neuro-dégénérative incurable. Elle entraîne, progressivement, la perte des fonctions mentales, notamment, de la mémoire; mais, également, des troubles du comportement (agressivité, irritabilité…). Le premier symptôme se manifeste par des pertes de mémoire, qui s'accentuent avec l’âge. Le professeur Sadibelouiz revient, dans cet entretien, sur la maladie. Ecoutons le spécialiste. nous pouvons estimer qu’il y a, grosso-modo, quelques 100 000 cas Alzheimer, en Algérie Santé Mag: Comment se présentent les signes de la maladie d’Alzheimer ? Pr Mustapha Sadibelouiz: La maladie se manifeste, souvent, par des troubles cognitifs; mais, toute perturbation de la mémoire, chez une personne, ne signifie pas, toujours, que celle-ci est atteinte de maladie d’Alzheimer. En effet, des troubles de l’attention peuvent se rencontrer, chez des individus préoccupés par un problème; ce qui engendre, donc, des oublis momentanés, sans atteinte des structures de mémorisation. Par contre, lorsqu’on parle de maladie d’Alzheimer, on constate un fléchissement des facultés intellectuelles, des troubles de la mémoire épisodique; 40 Santé-MAG N°54 - Septembre 2016 c’est-à-dire, tout ce qui concerne les évènements récents (par exemple, le patient ne se souvient plus de ce qu’il a mangé la veille). Par ailleurs, il y a ce qu’on appelle des troubles de la mémoire sémantique, c’est-à-dire que le sujet ne se souvient plus du nom des objets. Ainsi, lorsqu’on lui montre un stylo, il vous dira ça sert pour écrire; mais ne saura pas donner son nom exact. Il existe, également, des troubles du langage, des fonctions exécutives (abandon de certaines tâches difficiles, comme la préparation d’un repas, ou la conduite automobile), des difficultés à exécuter des gestes quotidiens et des troubles de la reconnaissance (agnosie). Le patient se souvient-il des visages connus de lui ? L’oubli des visages s’installe au stade final de la maladie; car, le patient ne peut plus reconnaître ses proches: épouse ou époux, enfants, frères sœurs,… On fait face, ainsi, à une prosopagnosie. Voilà, donc, comment se manifeste la maladie, d’évolution progressive; puis, elle devient chronique et se dégrade, parce qu’il y a une apoptose (perte neuronale), de façon très rapide. Ces symptômes débutent, en général, à partir de l’âge de 50 ans; voire, 60 ans et plus. A l’état normal et au fur et à mesure que l’on avance dans l’âge, il peut y avoir une atrophie corticale, phénomène na- ÉVÈNEMENT turel, qui fait que nous perdons des neurones; mais, pas en grande quantité et de manière aussi importante que dans la maladie d’Alzheimer. Comment établir un bon diagnostic de la maladie, à partir du moment où les trous de mémoire se rencontrent, dans différentes situations ? Le diagnostic est, d’abord, clinique, par l’anamnèse; on pose des questions classiques et directes, pour tester la mémoire; c’est-à-dire qu’on demande au patient: son nom, prénom, date et lieu de naissance; le jour, le mois, l’année… Par la suite, on fait des tests comme, par exemple, lui montrer trois images, dont il doit se souvenir et vous les nommer quelque temps après l’avoir mis dans une autre situation, comme compter de 10 à 1. Une personne indemne se rappellera; mais, le patient atteint de cette maladie ne s’en souviendra pas. L’imagerie est, actuellement, un moyen diagnostic fiable: l’IRM, cet appareil sophistiqué montre, souvent, la présence de lésions au niveau du lobe temporal et notamment, dans les structures de l’hippocampe. Pour en revenir à la maladie d’Alzheimer, lorsque des lésions vont jusqu’à atteindre le lobe frontal, à ce moment-là, le patient ne reconnaît plus rien et cela engendre des troubles du comportement. Je m’explique: au début, les lésions se trouvent au niveau des structures de l’hippocampe; ensuite, ces lésions peuvent évoluer vers le lobe frontal et alors, des troubles du comportement apparaissent, telle que l’irritabilité, l’agressivité et la perte des fonctions autonomes. Il devient, par la suite, grabataire, atteint d’un syndrome aphaso-apraxo-agnosique; autrement dit: incapacité à parler, à réaliser des gestes quotidiens et à reconnaître les membres de sa famille et même, les parties de son corps. Que faut-il faire, pour ralentir l’évolution de la maladie ? Actuellement, il n’existe, de par le monde, aucun traitement curatif de la maladie d’Alzheimer. Le traitement est symptomatique. Aussi, il faut le prescrire dès que le diagnostic est établi; c’est-à-dire, au début des signes, pour ralentir l’évolution, avec un suivi médical. Par ailleurs, le traitement ne repose pas, uniquement, sur les molécules; mais, également, sur les conseils prodigués à la famille du patient, pour une meilleure prise en charge. L’entourage du patient doit jouer un grand rôle; car, il ne faut jamais isoler le malade et au contraire, discuter, constamment, avec lui. La psychothérapie et la rééducation fonctionnelle sont, également, indispensables. Quelle est l’état des lieux, en Algérie ? On n’a pas, à proprement parler, de vraies statistiques; mais, si on se base sur les consultations, en neurologie et psychiatrie, nous pouvons estimer qu’il y a, grosso-modo, quelques 100 000 cas Alzheimer, en Algérie. L’espérance de vie, qui augmente, peutelle être un facteur de risque? En effet, on trouve beaucoup d’Alzheimer en ce moment, en raison de l’espérance de vie, qui augmente. Est–elle héréditaire ? Il n y a pas, à proprement parler, de transmission mendélienne. Il existe des formes familiales; mais, les formes sporadiques sont les plus importantes (90%) et peuvent impliquer des facteurs génétiques. En tout état de cause, des recherches sont menées, pour trouver une molécule à même de juguler la maladie. Pour l’heure, je rappelle que le traitement est purement symptomatique. Que préconisez-vous à la famille du malade? L’entourage du malade doit jouer son rôle, qui est d’être auprès du malade, lui parler constamment, pour le stimuler quelque peu; car, il n’est conscient de rien. Certes, il est difficile et combien douloureux, pour la famille, d’accompagner le patient souffrant de cette pathologie neuro-dégénérative; mais, elle doit être coopérative et indulgente. Il ne faut surtout pas négliger le traitement et les rendez-vous médicaux * Professeur Mustapha Sadibelouiz, - Chef d’unité de neurologie à l’EHS Ali AIT- IDIR – Alger. - Président de la Société algérienne de neurologie et de neurophysiologie clinque (SANNC). Du sport contre 5 maladies chroniques A petites doses, le sport entretient votre capital forme. Mais, avec un peu plus d’effort, les bénéfices sont autrement plus élevés, confirment des chercheurs australiens. La dépense énergétique diminue, en effet, le risque de développer 1 ou plusieurs des 5 maladies chroniques les plus dangereuses, pour le pronostic vital. Les bénéfices du sport, sur la santé, ne sont plus à prouver; mais, la plupart des publications se concentrent sur les effets d’une pratique ciblée sur une seule pathologie. Pour aller plus loin, des chercheurs ont évalué les bénéfices de disciplines pratiquées plusieurs fois par semaine. Première étape, l’analyse de 174 études, publiées entre 1980 et 2016. Ces travaux précisent l’incidence de 5 maladies chroniques (cancer du sein, cancer du côlon, diabète, maladie cardiaque ischémique et accident vasculaire cérébral, d’origine ischémique) en fonction de la pratique sportive. Résultat, «les patients les plus épargnés par ces maladies sont tous – sans exception – adeptes de sport», notent les scientifiques de l’Université de Washington. En moyenne, chacun pratiquait l’équivalent d’une séance de volley-ball, de badminton, d’aquagym, ou 6 kilomètres de marche, par semaine. Vous n’êtes pas adeptes de sport ? Sachez qu’il est possible d’intégrer votre dépense énergétique, dans les gestes du quotidien. La recette à suivre ? Chaque semaine assurez-vous d’avoir au compteur 10 minutes de marche, 15 minutes à passer l’aspirateur, 20 minutes de jardinage, 20 minutes de courses et 25 minutes de marche ou de vélo. En se pliant à ces consignes, les chercheurs australiens estiment que les bénéfices escomptés, pour éloigner le risque de développer une, ou plusieurs de ces 5 maladies chroniques, sont équivalents à ceux enregistrés, chez les sportifs N°54 - Septembre 2016 Santé-MAG 41