Éditorial Cahiers du CESAT n°8
Juin 2007
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Vers une véritable ingénierie
Logistique militaire
Par le Général de corps d’armée Jean-Loup MOREAU,
Commandant la Force Logistique Terrestre
usqu’à la refondation de l’armée de terre à la fin des années 90, le soutien logistique
du corps blindé mécanisé était simple: celui-ci disposait d’une autonomie initiale
complète, dès le temps de paix, qu’il fallait, en cas d’engagement, recompléter
après quelques jours de combat. Le problème majeur était l’organisation et la
conduite du soutien santé face à des taux de pertes élevés. Tout cela est
heureusement resté virtuel.
Après le changement géostratégique qui conduisit à la professionnalisation de l’armée
de terre, une telle logistique, distribuée dès le temps de paix, n’était ni rationnelle au plan
économique, ni nécessaire au plan militaire. L’armée de terre opta alors pour une solution
originale et novatrice qui combine la règle de l’unicité des ressources et le regroupement
des unités de soutien sous un commandement unique chargé de la préparation
opérationnelle, le commandement de la force logistique terrestre. Depuis, deux réservoirs
logistiques existent: l’un de ressources, l’autre de forces, dont le dimensionnement, la
modularité et la disponibilité autorisent les configurations les plus diverses, imposées par
les opérations à soutenir.
Une double séparation en découle: entre les unités de soutien et les unités de combat
d’une part, entre les unités de soutien et les ressources d’autre part. Une implication plus
forte des logisticiens dans les travaux préparatoires à l’engagement des forces devient
nécessaire pour réunir en ensembles opérationnels cohérents des moyens qui reposent
dorénavant dans des réservoirs distincts. L’intérêt du métier se trouve du coup valorisé.
La création d’une filière professionnelle et un cursus de formation associé le confirment.
Le succès de la formule est tel et la contrainte économique si pesante qu’une nouvelle
phase de concentration des ressources dans des réservoirs spécialisés sous la
responsabilité d’opérateurs interarmées a démarré. Le financement des opérations,
l’infrastructure de défense, les transports opérationnels, la maîtrise d’ouvrage de la
maintenance s’organisent selon un mode centralisé, le plus souvent sous la
responsabilité de l’état-major des armées, reprenant le modèle éprouvé des directions
centrales du service de santé des armées et du service des essences des armées. La
conduite centralisée des opérations d’externalisation est un autre exemple de cette
tendance de regrouper sous la responsabilité de l’état-major des armées la maîtrise
d’ouvrage, voire davantage, du soutien logistique opérationnel.