toutes les vraies et durables illustrations du pays » : c’est-à-dire,
notamment, les chefs des familles ayant siégé dans la Chambre
des pairs ou le Sénat impérial et leurs descendants en ligne
directe ; les propriétaires justifiant de dix mille francs de
contributions directes ; les cardinaux et les évêques ; les
maréchaux et officiers généraux ; les premiers présidents de cours
d’appel et les ministres et anciens ministres.
Le duc de Broglie entend « assurer au Sénat vis-à-vis de l’autre
Chambre, en droit, l’égalité, en fait, la prépondérance
5
»;
notamment en attribuant au Sénat des droits égaux à la Chambre
en matière de finances et en l’associant « à un certain degré à
l’action du gouvernement ». Le Sénat connaîtrait ainsi, en premier,
des projets de loi concernant les douanes ou les travaux publics,
ainsi que des projets de règlements d’administration publique. Il
ferait, également, office de Cour de cassation, de Tribunal des
conflits et de Cour de justice politique.
B. La France nouvelle de Prévost-Paradol
« Figure intellectuelle »
6
marquante du Second Empire, membre
de l’Académie française, le publiciste Lucien Anatole Prévost-
Paradol (1829-1870), que les contemporains appelaient plutôt
Paradol, est le plus brillant représentant de la génération libérale
de 1860. Candidat malheureux aux élections législatives de 1863,
comme il le sera à celles de 1869, Paradol publie en 1868 un essai
politique au grand retentissement, La France nouvelle, traçant « le
plan d’une réforme qui embrasse tout l’État, depuis l’exercice du
droit de suffrage, source de toute autorité, jusqu’àl’organisation et
au fonctionnement du pouvoir suprême. »
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1. La prépondérance de la Chambre élue au suffrage universel
Paradol part d’un constat simple : « La Révolution française a
fondé une société, elle cherche encore son gouvernement. » Pour
lui, ce gouvernement ne peut être que « démocratique et libéral ».
Démocratique, parce que largement fondé sur le suffrage
universel : à condition, toutefois, que l’exercice de ce suffrage soit
garanti par les libertés « nécessaires, la liberté de la presse, la
5. C’est nous qui soulignons.
6. J.-É. GICQUEL, « Les idées constitutionnelles de Prévost-Paradol », Revue administrative,
nº 316, 2000, p. 395 et s.
7. A. PRÉVOST-PARADOL,La France nouvelle, réédition Les mémorables, Perrin, 2012, p. 40.
Les citations suivantes de Paradol seront extraites de cet ouvrage.
La « Constitution de la III
e
République »
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