FRIEDRICH LIST (1789-1846) Gabriel Galice Association Médium | « Médium » 2011/4 N° 29 | pages 234 à 247 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-medium-2011-4-page-234.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) !Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Gabriel Galice, « Friedrich List (1789-1846) », Médium 2011/4 (N° 29), p. 234-247. DOI 10.3917/mediu.029.0234 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Association Médium. © Association Médium. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium ISSN 1771-3757 Bonjour l’ancêtre Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium 234 contre l’amnésie et la désinvolture, un médiologue d’aujourd’hui célèbre un maître d’hier oublié ou négligé. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Ici, par Gabriel Galice Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium R éputé comme auteur du Système national d’économie politique, Friedrich List (1789-1846) est aussi le pionnier des chemins de fer allemands. C’est par le train et l’union douanière (Zollverein) qu’il promeut l’unité politique de l’Allemagne. Personnage aux carrières multiples, qui partage son existence mouvementée entre le Wurtemberg, les États-Unis et la Saxe, commémoré par les postes allemandes, ce stratège des chemins de fer et chroniqueur talentueux mérite l’attention du médiologue. Le fils de mégissier devient fonctionnaire royal Daniel Friedrich List apparaît sur le registre de baptême de Reutlingen, ville libre d’Empire, le 6 août 1789. Le nouveau-né étant alors baptisé au plus tôt, cette date est tenue pour celle de sa naissance. Il est le huitième enfant de la famille (six sœurs et un frère le précèdent), deux sœurs le suivent. Son frère Johannes (1787-1813) est né deux ans avant lui. Son père fait partie de la couche supérieure des mégissiers et occupe ainsi une position de notable. Les guerres de la France révolutionnaire ruinent la petite ville de Reutlingen, qui accueillera des troupes autrichiennes, hongroises et croates, des prisonniers et des émigrés français. Friedrich désespère sa mère : il est rétif aux études supérieures et ne veut pas reprendre l’atelier 235 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Friedrich List (1789-1846) Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium paternel. Il suivra des cours universitaires en auditeur libre. Il vit de près la crise économique, familialement et professionnellement. Rédacteur, conseiller aux comptes (Rechnungsrat) en 1816 puis commissaire royal du royaume de Wurtemberg en 1817, il est chargé d’enquêter auprès des populations sur les causes et modalités de l’émigration massive, aux ÉtatsUnis notamment. Il découvre la misère et les injustices. Le fonctionnaire devient pourfendeur de l’autorité politique et de son administration. En 1818, il épouse Karoline Seybold, née en 1789 à Buchsweiler (aujourd’hui ville alsacienne de Bouxwiller, à l’ouest de Strasbourg) de David Christoph Seybold, écrivain, professeur et pédagogue. Friedrich et Karoline List auront deux filles, Emilie et Elise, et un garçon, Oskar. Sans titre universitaire, il est le cofondateur et, momentanément, un pilier de la faculté économique d’État de Tübingen. Élu député au Landtag en 1820, il met en cause les choix budgétaires et fiscaux du pouvoir, radicalisant ses critiques. En 1822, il s’enfuit à Strasbourg, chez son ami Flachsland, qui l’initie au français et l’introduit dans les cercles de la ville, gagne ensuite Bâle. Jugé pour injures et calomnies envers les autorités, il sera condamné aux travaux forcés, puis emprisonné en forteresse. L’exil s’ensuivra, en Europe d’abord, aux États-Unis ensuite. Invité aux États-Unis par le marquis de La Fayette, rencontré à Paris en 1824 par le truchement de Victor Cousin, il échappe aux persécutions. 236 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Friedrich List Gabriel Galice Friedrich List Gabriel Galice et chroniqueur américain Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium En 1825, il débarque en Amérique avec épouse et enfants. Il accompagne La Fayette dans son voyage triomphal à travers le pays ; le sillage du marquis lui ouvre les portes de nombreuses personnalités. Sa tentative de s’établir comme fermier en Pennsylvanie échoue totalement. Il réussit mieux comme rédacteur en chef du journal en allemand Readinger Adler, de la communauté de Reading. Son « discours de Philadelphie » (en anglais) du 3 novembre 1827, devant un public de qualité sélectionné par la Société pour l’avancement des manufactures et des arts de Philadelphie, le fait reconnaître comme économiste de premier rang. Enthousiasmée, la Société « invite le professeur List à composer deux ouvrages, l’un savant, où la théorie sera complètement développée, l’autre populaire, destiné à la propager dans les écoles ». Il s’implique dans le débat sur l’industrialisation et les taxes douanières du pays, soutient les positions protectionnistes des fabricants de machines outils nécessaires à l’industrie cotonnière de Pennsylvanie, rédige sous forme d’articles l’esquisse de ce qui deviendra son Système national d’économie politique, puis décide de faire de l’économie pratique plutôt que livresque. « Le meilleur livre sur l’économie politique qu’on puisse lire dans cette contrée nouvelle, c’est la vie. » Les publications en sont différées d’autant. Il est initié franc-maçon par une loge de Reading, peut-être influencé par La Fayette. Il se lance dans l’exploitation d’un gisement houiller valorisé par une ligne de chemin de fer, acquiert des terres à bas prix, procède à 237 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium L’entrepreneur d’astucieux montages financiers. Il en tire de substantiels revenus. Le 30 juin 1834, neuf ans après avoir posé le pied sur le sol américain, List est nommé consul des États-Unis à Leipzig par le président Andrew Jackson. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Le « protectionnisme éducateur » et la puissance nationale De retour en Allemagne, List utilise abondamment la presse, lance des gazettes spécialisées ou intervient dans les revues existantes. En 1837, à la faveur d’un voyage à Paris, il prend connaissance d’une question posée par l’Académie des sciences morales et politiques, relative à la liberté et aux restrictions en matière de commerce. Ne disposant pas de la documentation pour étayer son propos, il n’est pas lauréat, mais se fait remarquer par le baron Charles Dupin, auteur en 1827 du tableau économique Forces productives et commerciales de la France. Voilà qui relance son chantier éditorial. Il pousse plus loin ses recherches historiques. La première édition du Système national d’économie politique – Le commerce international, la politique commerciale et l’union douanière allemande, paraît en 1841. List ferraille avec « la théorie régnante en économie politique », qu’il nomme « Die Schule » (L’École), à savoir les conceptions dominantes de David Ricardo et d’Adam Smith sur le commerce international. Son idée directrice est de situer l’échange économique dans l’équilibre des forces nationales : « Je fus conduit ainsi à la notion de la nationalité ; je trouvai que la théorie n’avait vu que l’humanité et les individus, et point les nations. Il devint évident pour moi qu’entre deux pays très avancés la libre concurrence ne peut être qu’avantageuse 238 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Friedrich List Gabriel Galice Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium à l’un et à l’autre, s’ils se trouvent à peu près au même degré d’éducation industrielle, et qu’une nation en arrière, par un destin fâcheux, sous le rapport de l’industrie, du commerce et de la navigation, qui, d’ailleurs, possède les ressources matérielles et morales nécessaires pour son développement, doit avant tout exercer ses forces afin de se rendre capable de soutenir la lutte avec les nations qui l’ont devancée. En un mot, je distinguais entre l’économie cosmopolite et l’économie politique 1. » Sa position heurte l’opinion commune : « Tous les fonctionnaires publics instruits, tous les rédacteurs de journaux et de brochures, tous les écrivains qui traitaient les matières économiques, élevés comme ils l’étaient à l’école cosmopolite, voyaient dans une protection douanière quelconque une abomination théorique : joignez à cela les intérêts de l’Angleterre et ceux des courtiers de l’industrie anglaise dans les ports maritimes et les places de foire 2. » Il montre, exemples historiques à l’appui, que les libre-échangistes ne le sont que quand le rapport des forces commerciales leur est favorable. Affaire de conjoncture plus que de dogme supposé entre libre-échangistes et mercantilistes. Les États n’ont cure des querelles académiques, ils sont libre-échangistes et mercantilistes, simultanément ou successivement. À la différence de ceux qui considèrent étroitement les facteurs de production et leur combinaison, List conçoit la richesse comme l’union des forces économiques et des forces politiques, des forces individuelles 1. Friedrich List, Système national d’économie politique, Gallimard, 1998, p. 41. 2. Id., ibid., p. 45. 239 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Friedrich List Gabriel Galice Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium et des forces collectives, des ressources et des institutions. « Nulle part le travail et l’économie, l’esprit d’invention et l’esprit d’entreprise des individus n’ont rien fait de grand là où la liberté civile, les institutions et les lois, l’administration et la politique extérieure, et surtout l’unité et la puissance nationale, ne leur ont pas prêté appui. Partout l’histoire nous montre une énergique action des forces sociales et des forces individuelles les unes sur les autres. […] Les individus ont beau être laborieux, économes, intelligents et inventifs, ils ne sauraient suppléer au défaut d’institutions libres. […] Nulle part l’influence de la liberté, de l’intelligence et des lumières sur la puissance, et, par suite, sur la force productive et sur la richesse du pays, n’apparaît plus clairement que dans la navigation 3. » La puissance nationale ne se divise pas, elle résulte de la synergie des conditions matérielles, institutionnelles et morales de la société. Pour List, l’économie politique étudie les forces productives, entendues comme « des capitaux matériels et moraux à la fois, des entrepreneurs, des industriels habiles, des ouvriers 4. » La navigation et plus tard les transports ferroviaires jouent un rôle décisif. Quand bien même il anticipe la révolution des communications, List cède au vertige de la technique et de son illusoire entraînement mécanique des consciences collectives et de leur harmonisation, de son rôle pacificateur. « Dès aujourd’hui, on peut prévoir avec certitude que, 3. Id., ibid., p. 220 et 221 4. Id., ibid., p. 107. 240 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Friedrich List Gabriel Galice Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium dans quelques dizaines d’années, grâce au perfectionnement des moyens de transport, les peuples civilisés seront, dans leurs rapports à la fois matériels et moraux, unis entre eux aussi étroitement et plus étroitement encore que les différents comtés de l’Angleterre ne l’étaient il y a un siècle. Déjà, les gouvernements des nations continentales possèdent dans le télégraphe le moyen de s’entretenir les uns avec les autres, presque comme s’ils se trouvaient en un seul et même lieu […] Plus l’industrie avance, plus elle s’étend également sur les différentes contrées, moins la guerre devient possible. Deux peuples également avancés en industrie se feraient mutuellement plus de mal en une semaine qu’ils ne pourraient en réparer dans l’espace d’une génération 5. » Le pionnier des chemins de fer allemands Ardent pionnier du Zollverein (union douanière supprimant les frontières intérieures allemandes), il crée une association et, en 1830, un journal, le Zollvereinsblatt. List comprend qu’il faut donner une base matérielle au projet économique (union commerciale, puis douanière) et politique. Cette base matérielle, ce sont les chemins de fer. Il y investit son temps et son argent, connaît des déconvenues mais fait avancer les choses et la cause. Il lance en 1835 le premier numéro de son Journal du chemin de fer et magazine national. Les projets technique et politique sont clairement liés. 5. Id., ibid., p. 240. 241 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Friedrich List Gabriel Galice Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Pour List, les voies ferrées satisfont des visées économiques (elles concourent aux forces productives) mais aussi militaires et politiques. La première ligne Leipzig – Dresde est inaugurée en 1839. Entre 1840 et 1841, List réunit et systématise ses réflexions sur les chemins de fer dans une série de trois articles. Le troisième est publié à part dans la Revue trimestrielle allemande. Il préconise un réseau constitué de quatre « lignes nationales ». Dans les dernières années de sa Premier numéro du Journal du chemin vie, il se lancera dans une diplomatie de fer et magazine national, lancé par privée, voyageant en Angleterre, en Friedrich List en 1835. Autriche et en Hongrie, rencontrant Metternich, échafaudant des alliances (à connotation racialiste parfois) entre « puissances unies d’Europe » et dans un jeu d’équilibre avec les États-Unis. En 1839, son fils Oskar, engagé dans la Légion étrangère, meurt du typhus en Algérie. Accablé de difficultés financières, malade, en état de grande dépression, il se suicide dans un champ à Kufstein en 1846. 242 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Friedrich List Gabriel Galice Friedrich List Gabriel Galice célèbrent List Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium La Société Friedrich List (Friedrich-List Gesellschaft) est fondée en 1926. Son conseil d’administration compte 18 savants, 12 représentants de la politique et de l’administration et 8 représentants du monde économique. Le premier président est le directeur de l’Institut de recherche sur l’économie mondiale de Kiel. Les membres sont des personnalités en vue de la république de Weimar. L’Allemagne nazie s’accommode d’un détracteur du cosmopolitisme, sans s’attarder sur ses exigences de libertés. Les nationaux-socialistes saluent un « martyr de l’économie politique allemande ». Après 1945, les deux Allemagnes font chacune de List un usage approprié. En 1955, on procède en Allemagne fédérale à la refondation de la Société Friedrich List. En 1962, (un an après l’édification du mur) la République démocratique allemande dirigée par Walter Ulbricht donne son nom à l’École supérieure des transports de Dresde, fondée en 1952. Elle lui consacre en 1981 – un timbre-poste de 25 pfennigs. La vignette jaune, de facture rétro réaliste socialiste, montre à gauche le bâtiment, au centre le professeur et à droite les étudiants dans l’amphithéâtre, en bas la mention (en petits caractères) Hochschule fur Verkehrswesen « Friedrich List » Dresden 6. Ce qui n’empêchait aucunement les critiques marxistes des thèses économiques de List. Karl Marx contesta vertement les positions 6. École supérieure des transports Friedrich List Dresde. 243 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Les Allemagnes Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium nationales et bourgeoises de List, écrivant notamment : « Monsieur List tient le parachèvement de la société bourgeoise pour l’idéal auquel aspirer 7. » Timbre émis par la RDA en 1981 pour l’école supérieure des transports Friedrich List. Timbre émis par la RDA en 1989 pour commémorer le bicentenaire de la naissance de List et le 150e anniversaire de la ligne LeipzigDresde. 244 Pour le bicentenaire de la naissance de List, l’Allemagne communiste fait paraître en 1989 un nouveau timbre de 15 pfennigs, moins didactique, plus sobre que celui de 1981, reproduisant la lithographie réalisée en 1845 par Josef Kriehuber. En petits caractères, à gauche, « Friedrich List, né en 1789 » ; dessous, en gros et en caractères gothiques, « Première voie ferrée longue distance allemande – LeipzigDresde 1839-1989 ». 7. « Herr List hält die vollendete bürgerliche Gesellschaft für das anzustrebende Ideal ». Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Friedrich List Gabriel Galice Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Timbre émis par la RFA en 1989 pour le bicentenaire de la naissance de List. En 1989, la République fédérale d’Allemagne conduite par Helmut Kohl honore elle aussi Friedrich List par un timbre-poste commémoratif de sa naissance ; en novembre, le mur tombe. La vignette gris clair pastel de 1,70 DM représente List au premier plan et un train à vapeur au second plan ; en haut, en gros caractères, « Friedrich List 1789-1846 » ; à gauche, la mention « homme politique et économiste » (Politiker und Volkswirtschafler). Il est remarquable que les timbres réalisés en 1989 par les deux Allemagnes juste avant l’unification se ressemblent (même emprunt à la lithographie de Kriehuber), alors que la vignette communiste de 1989 diffère beaucoup de celle de 1981. En 1989, Reutlingen, sa ville natale, commémore par un livre prestigieux le bicentenaire de sa naissance. L’ouvrage, richement illustré, s’intitule Friedrich List et son temps ; le sous-titre en est : « Économiste, pionnier du chemin de fer, publiciste politique ». La quatrième de couverture mentionne la citation de Karl Marx indiquée plus haut. 245 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Friedrich List Gabriel Galice Friedrich List Gabriel Galice Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Friedrich List récolte le dédain de « l’École » qu’il fustigea. Pas plus aujourd’hui qu’hier il ne fait recette chez les économistes « cosmopolites » (Zygmunt Bauman dirait « mondialisés ») qui tiennent le haut du pavé. Sa réflexion sur « les industries dans l’enfance » inspire utilement des pays en développement ou émergents. Sa pensée prépare des travaux aussi différents que ceux d’Alfred Marshall (districts industriels), d’Oliver E. Williamson (économie institutionnelle), de François Perroux (les relations économiques sont des rapports de forces comportant conflit et coopération), d’Amartya Sen (rôle de la liberté et de la coopération dans le développement), de Joseph Stiglitz, de Robert Reich (The Work of Nations, bizarrement traduit en français par L’économie mondialisée…), de Michel Beaud (Le Système national/mondial hiérarchisé). Dans la lignée de List, le libéral atypique Maurice Allais (1911-2010), prix d’économie de la Banque centrale de Suède en hommage à Alfred Nobel, préconisa des mesures protectionnistes, critiqua la construction européenne et s’opposa au « consensus de Washington ». La notoriété médiologique de List est aussi grande (et moins controversée) que sa réputation d’économiste. Le peintre et graveur viennois Josef Kriehuber, par sa lithographie, confère à Friedrich List une image d’éternité abondamment copiée. Les chemins de fer allemands ont prospéré, ouvrant la voie à l’Union douanière, puis à l’unité allemande, en 1870. Les postes allemandes, à l’Est et à l’Ouest, lui rendirent hommage. Les œuvres complètes (articles, livres, correspondance) de 246 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Conclusions List comportent plusieurs volumes, d’abord publiés par la société savante qui porte son nom. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Singulier destin d’un patriote transnational qui contesta l’« économie cosmopolite » au nom de l’« économie politique ». List n’a guère l’esprit de corps ; il est un éclaireur, un « communicateur », un homme de réseaux, associatifs, journalistiques, diplomatiques, commerciaux ou ferroviaires. Bibliographie Friedrich List und seine Zeit, Nationalökonom, Eisenbahnpionier, Politiker Publizist, Stadt Reutlingen – Heimatsmuseum und Stadtarchiv, 1989. Friedrich List, Système national d’économie politique, Gallimard, 1998. Ingrid Schöberl et Günter Moltmann, Aufbruch nach Amerika – Friedrich List und die Auswanderung aus Baden und Württemberg 1816/17, R.Wunderlich, Tübingen, 1979. Je remercie Renate Müller, qui m’a gracieusement procuré la documentation nécessaire. Gabriel Galice est vice-président de l’Institut international de recherches pour la paix à Genève (GIPRI). À paraître : La « Mondialisation » sans les peuples ?, Cahier 9 du GIPRI, L’Harmattan. 247 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 82.125.45.134 - 18/08/2015 09h10. © Association Médium Friedrich List Gabriel Galice