Info infectiologie Le SARM-AC : si facilement transmissible Dr Jean-François Roussy (avec la collaboration de Dr Alain Martel, M.D., FRCPC) J’ai récemment rencontré un patient présentant des lésions pustulaires sur une jambe. Celui-ci m’avait été adressé à la suite du développement d’un abcès important (voir la photo ci-contre). PRÉSENTATION CLINIQUE DU PATIENT Ce patient est un jeune sportif de 24 ans, sans antécédent médical, qui a développé des lésions pustulaires sur la jambe droite, pendant une période de deux semaines, peu de temps après un trauma à vélo. Il m’est adressé, car il a développé un abcès important sur la rotule droite, et ce, malgré un premier drainage des pustules et sept jours de traitement à la céphalexine. La jambe du patient est enflée et douloureuse, la rougeur est très importante. Le reste de sa peau est normale et il aurait fait de la fièvre au cours des deux dernières nuits. es abcès (ou L’identification de la pathologie dites r ent © e t des pustules) n ià unsabcès. a lésion sur la rotule h du t patient correspond abcès nel (ou euv Des n p e o l s g eà rrépétition ée er se produisant L des pustules)r seiproduisant chez en bonne cia e ppatient orisunsajeune t g u y a u s p qu’iloym santé signifient a anguille eroche; un rgerme potentiellement plus m rssous à répétition o onn our leu C e virulent et résistant pexpliquer pla condition du patient. c pourrait n Les coupie . chez un jeune o e ti prohibé er une u b i t im patient en istr sée esDans ler cas présent, la culture d’une des pustules mp i t i r e bonnetesanté etndnon auvtiosualiserconfirme vos soupçons (Encadré 1). En effet, on note la présence de Staphylococcus aureus résistant à la o r, chey signifient i VenL’utilisaetriqu’il f f méthicilline (SARM). De plus, il s’agit d’un type par,a g r ticulier de SARM, nommé SARM-AC (SARM acquis a anguille sous cha télé en communauté). roche (...). D Le SARM-AC Ce type de staphylocoque, le SARM-AC, est généralement retrouvé à l’extérieur de l’hôpital et il est génétiquement différent du SARM hospitalier. Fréquemment, il s’avère plus sensible aux antibiotiques que le SARM habituel, comme vous pouvez le constater dans l’antibiogramme de notre le clinicien février 2011 9 Info infectiologie Encadré 1 Rapport de la culture des pustules du patient Microbiologie Culture de la jambe Date de collection inconnue, le délai entre la collecte et l’analyse peut donc compromettre le résultat. Rapport d’état : Final Comment se transmet cette bactérie? Coloration de Gram : Cocci Gram positif rare Coloration de Gram : Aucune cellule vue Organisme 1 : Résistant à la méthicilline Croissance modérée de Staphylococcus aureus Staphylococcus aureus résistant confirmé par PCR Sensibilité aux antibiotiques Org. 1 Pénicilline R Cloxacilline R Céphalothine/ céphalexine R Érythromycine R Clindamycine S Triméthoprime-sulfa S Ciproflacine R Tétracycline S Vancomycine S 10 patient (sensibilité à l’érythromycine, TMP-SMX et tétracycline; voir l’Encadré 1). Dans la communauté, le SARM-AC cause souvent des infections de la peau et des tissus mous (furoncles et abcès sur les extrémités, puis sur les zones plus humides ou sujettes à des bris). Parfois, le SARM-AC peut causer des pneumonies nécrosantes et des bactériémies nécessitant des soins urgents. L’une des raisons expliquant cette tendance à l’abcédation et à la nécrose tissulaire est reliée à la production par le SARM-AC d’une cytotoxine, nommée Panton-Valentine leukocidin (PVL), qui lyse les cellules infectées en créant des pores dans leur membrane cellulaire. le clinicien février 2011 Le SARM-AC se transmet par un contact direct avec une personne colonisée ou infectée par cette bactérie. Ces personnes peuvent la transmettre à tout humain, objet ou surface qu’elles touchent avec leurs mains. Le lavage avec de l’eau et du savon (ou du gel alcoolisé) permet d’éliminer le SARM-AC présent sur les mains. Comme cette bactérie peut se transmettre par contact direct, notre patient doit être isolé s’il est hospitalisé et pendant son séjour à l’urgence (chambre seule ou unité attitrée, puis gants, blouse et lavage des mains avant et après toute visite à la chambre du patient pour le personnel soignant). Ces mesures visent à empêcher la transmission de la bactérie aux autres patients et au personnel. Le patient atteint de SARM-AC retournant dans la communauté doit éviter de partager des items personnels (serviette ou rasoir) avec ses proches. De plus, il doit avoir une bonne hygiène des mains et éviter d’exposer ses plaies. Il existe cinq facteurs de risques principaux (en anglais, il s’agit des 5Cs) : • Endroits bondés (Crowded conditions); • Promiscuité (close Contact); • Manque d’hygiène (lack of Cleanliness); • Partage d’items personnels, comme une serviette ou un rasoir (sharing Common personal items); • Bris de la peau (Compromised broken skin). Quels sont les facteurs de risque de ce type d’infection? Info infectiologie Ainsi, des groupes d’individus à plus haut risque dans la communauté émergent : les athlètes, les membres d’équipes sportives (surtout concernant les sports de contact, tels le soccer, le football, la lutte, etc.), les consommateurs de drogues intraveineuses, les prisonniers, les militaires, les hommes ayant des contacts sexuels avec d’autres hommes et les personnes résidant dans des dortoirs. Notre patient a quelques facteurs de risque d’infection à SARM-AC : il est jeune et sportif et il a eu des bris cutanés à la suite de sa chute à vélo. Comment procède-t-on au traitement du SARM-AC? L’approche générale du traitement dépend du type d’infection cutanée et des tissus mous, ainsi que de la gravité de la présentation clinique. Le drainage Lorsqu’il s’agit d’un abcès, il faut impérativement le drainer. Le traitement post-drainage varie selon divers experts. En effet, certains d’entre eux considèrent qu’un abcès non compliqué d’un diamètre de moins de 5 cm ne nécessite pas d’antibiothérapie subséquente. Les soins de plaie habituels seraient alors suffisants. CONCLUSION DU CAS DU PATIENT Notre patient ayant ressenti de la fièvre, il peut s’avérer prudent de le garder en observation en attendant le bilan (formule sanguine complète, ions, urée, créatinine et hémocultures). De la vancomycine 1 g q 12 heures est débutée après l’incision et le drainage de l’abcès. De nouvelles cultures du pus doivent être envoyées au laboratoire pour évaluer de possibles changements de résistance aux antibiotiques. Cependant, il peut être raisonnable de laisser partir le patient si le bilan de base est normal et s’il n’y a pas de signes systémiques d’infection. En effet, il s’agit d’un patient jeune, en bonne santé et fiable. De plus, nous avons déjà une culture récente de ses plaies. Ainsi, du TMP-SMX DS 2 co p.o. 2 f.p.j., pour 10 à 14 jours, a été débuté en externe, avec un suivi rapproché après 24 à 48 heures. L’antibiothérapie Par contre, dans le cas d’un abcès de plus de 5 cm, il faut, après le drainage, traiter le patient avec un antibiotique pris oralement, pour lequel la bactérie s’avère sensible pendant 10 à 14 jours. Les agents de choix sont le TMP-SMX, la clindamycine ou le linézolide (seulement si les autres agents sont non tolérés par le patient ou en cas d’échec). L’utilisation des fluoroquinolones est à proscrire dans le traitement du SARM-AC. En effet, plusieurs cas de résistance à cette classe d’antibiotiques en cours de traitement sont décrits dans la littérature. Le traitement parentéral initial avec la vancomycine sera débuté chez les patients souffrant de fièvre ou d’autres signes d’infection systémique et chez tout patient diabétique ou immunosupprimé, en attendant le bilan et la culture finale. Le passage subséquent à une antibiothérapie orale est possible, selon l’évolution clinique et la culture. C Dr Roussy est résident IV en microbiologieinfectiologie. Il pratique présentement au Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke. Dr Martel est microbiologisteinfectiologue, interniste. Il pratique présentement au Centre hospitalier de l’université Laval. le clinicien février 2011 11