symétrique sur un nombre d’objets égal à son ordre. Ainsi, le groupe symétrique sur
n
éléments contient
une copie de tous les groupes de cardinal au plus
n
. Notons que l’hypothèse de finitude n’est pas
nécessaire : tout groupe s’injecte dans le groupe des bijections d’un ensemble de cardinal égal à l’ordre
du groupe. En revanche, lorsque le cardinal n’est plus fini, le groupe symétrique est trop grand pour
être compris : nous nous en sortons avec l’emploi de l’analyse. Si un groupe
G
possède une mesure de
Haar µ, on peut regarder l’espace de Hilbert des fonctions L2sur G:
L2(G, µ) = f:G−→ Cmesurable ZG
f2dµ < ∞.
Or, l’action de
G
par multiplication à gauche induit une action linéaire sur
L2
(
G, µ
): étant donné
g∈G
, on associe à
f∈L2
(
G, µ
)la fonction
Lgf
qui fait correspondre à tout
x∈G
la valeur
f
(
g−1x
).
Puisque la mesure
µ
est invariante, cette action est aussi unitaire. La conséquence que l’on en tire
est la suivante : tout groupe localement compact est isomorphe à un sous-groupe du groupe des
opérateurs unitaires dans un espace de Hilbert. D’après Shavgulidze, on peut développer une telle
analyse harmonique aussi pour un groupe de dimension infinie tel que le groupe des difféomorphismes
du cercle.
Une telle vision est utile lorsque l’on s’intéresse à la théorie des représentations linéaires d’un
groupe, mais elle est rarement d’utilité lorsque l’on veut étudier la dynamique non-linéaire. Une (rare ?)
exception apparait lorsque l’on se place dans le monde des groupes de Lie (on pense ici aux grands
résultats ergodiques obtenus pour les réseaux depuis Margulis). Mais encore, le dynamicien peut-il être
satisfait si un problème apparemment simple comme celui de comprendre l’image de la mesure de Haar
par l’application d’élévation à puissance
g7→ gk
, est difficilement abordable ? Même pour le groupe
linéaire
GLn
(
R
)cette question n’est pas si simple (heureusement la décomposition spectrale nous
sauve !). Les mesures de Haar ne sont pas proprement dynamiques : les objets naturels en dynamique
sont ceux qui sont invariants par conjugaison, non par composition d’un coté ! 1
Cependant, en reprenant le discours initial, une mesure « homogène » comme la mesure de Haar
est assez appropriée pour décrire le comportement générique au sens probabiliste : très souvent on
rencontre les mêmes phénomènes génériques sous les deux différents points de vue (topologique et
probabiliste), même si parfois les deux descriptions peuvent être contradictoires. Pour donner un
exemple fortement relié à la dynamique sur le cercle, les nombres diophantiens forment une partie de
mesure de Lebesgue totale dans R, alors que les nombres de Liouville forment un ensemble résiduel.
D’une nature un peu différente était la motivation du travail autour de Malliavin : au lieu d’une
analyse harmonique en dimension infinie, le calcul de Malliavin offre (entre autres) le bon cadre pour une
théorie des distributions de Schwartz en dimension infinie. En dimension finie, l’intégration par parties
est au cœur de la définition des distributions : en commençant par comprendre les transformations
qui laissent quasi-invariante une mesure sur un espace de dimension infinie, il est possible d’étendre
l’intégration par parties et d’étudier la régularité des transformations de l’espace.
3 Les mesures de Malliavin-Shavgulidze
Esquissons brièvement la construction de Malliavin et Shavgulidze : l’idée est brillante, l’explication
très simple ! Depuis Wiener, nous savons choisir uniformément une fonction continue sur le cercle
de moyenne nulle : nous appelons une telle fonction aléatoire pont brownien. Ensuite on définit le
difféomorphisme aléatoire par intégration, en choisissant uniformément par rapport à la mesure de
Lebesgue l’image d’un point donné (par exemple 0) : en termes plus précis, si
B
= (
Bt
)
t∈[0,1]
est un
pont brownien et
λ
une variable aléatoire uniforme sur [0
,
1] indépendante de
B
, nous définissons le
difféomorphisme aléatoire de Malliavin-Shavgulidze par
f(t) = Rt
0exp(Bs)ds
R1
0exp(Bs)ds +λ. (I.1)
1
. On pourrait argumenter qu’une mesure de Haar
µ
invariante à gauche permet de construire une mesure bi-invariante
(et donc invariante par conjugaison) : si
ι
:
G−→ Gop
est le morphisme vers le groupe opposé,
ι
(
g
) =
g−1
, alors
µ∗ι∗µ
est bi-invariante. Mais il s’agit d’une construction artificielle.
ii