Vf
Année.
On
s'abonne
ù
Paris,
9/,
RUE
RICHELIEU;
Dans Ira départements
et
&
l'Étran
ger,
cta
Ions les marchands
àa
musique,
les
libraires ctani bu
rems
des
Messageries générales.
te Journal parait
le
dimanche.
18.
REVUE
ET
2
Mai
1847.
|Jri>
lt
ГЯЬошмавШ
:
Farts, un an
. .....
Sifr.
Départements
39 SO
Ktiauger
38
Annonces.
ЯОс. la ligne de
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lettres
p.
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foia.
23
c
i)onr6foîs.
GAZETTE MUSICALE
SOMMAIRE. Luther musicien (deuiiènie article]
; par BD.
FBI
IS.
Académie
royale
de
musique
:
Osnï [première représentation ).—Théâtre royal de l'Opéra
Comique
: le
Bouquet
de
l'infante;
par H.
BLANCHARD. MarieThdr'cse
,
Opéra
de
M.
N.
Louis.—Concert dramatique de M.
J.
Offenbach
;
par MAURICE
BOURGES.—Feuilleton:
les
Sept Notes
de la
gamme; par PAUL SMITH.
Nouvelles. —Annonces.
LUTHER MUSICIEN.
(Deuxième article.*}
Le docteur Martin Luihér passe tontes ses soirées
à
l'auberge
de
l'Aigle noir, dans
la
salle commune,
où
la même table
et la
même
chaise
lui
sont conservées
par les
soins
de
l'hôte qui déclare
n'a
voir jamais
eu de
pratique plus fidèle,
et qui
renverrait plutôt
toute
sa
clientèle
que de
manquer
un
seul jour
à lui
donner
sa
place accoutumée C'est dans
ce
lieu
que
Luther tient
ses au
diÊnces
du
soir, c'est
là
qu'il reçoit
ses
disciples
et ses
antago
nistes,
ses
amis élises eMemîsyeîd^^^
moi,
qui ont
tout simplement envie
de
voir
de
près
sa
célébrité.
Je n'eus garde
de
manquer
à l'y
aller trouver, comme
il
m'avait
engagé
à le
faire.
La salle de l'auberge
de
Y Aigle noir ressemble
à
nos estaminets
d'Anvers;
les
pratiques
y
sont assises autour
de
petites tables
Tort propres,,
et
boivent
du vin du
pays
ou de la
bière. C'est
de
(*) Voir
le
numéro
16,
ce dernier liquide que Luther se fait servir;
il y a
môme des gens
qui
lui
donnent
le nom
de papebière.
Ли
moment où j'arrivais,
il portttit précisément
à ses
lèvres
un
large
pot de
grès orné
de
peintures
et de
devises antireligieuses.
Il
m'adressa
la
parole
à
haute voix,
en
me faisant signe d'approcher,
et me
présenta
aux
personnes
qui
l'entouraient, parmi lesquelles
se
trouvaient,
comme
je l'ai su
ensuite, Philippe Mélanchton
,
Justus Jonas,
Aurifaher
et
Lang.
Je fus un peu
embarrassé
en me
présentant
au milieu
de ce
monde que
je ne
connaissais pas,
et
auquel j'é
tais inconnu.
s que le
docteur
t dit
que
j'étais
Flamand
et
musicien, chacun
me fit
amitié
et
voulut boire
à ma
sanlé. Dieu
sait commeut j'eusse regagné
mou
logis,
si
j'avais
dû
vider
mon
verre avec tous ceux
qui
voulurent trinquer avec
moi. Le
plus
souvent
je me
bornai
à
prendre une gorgée
de
lenr bière,
qui est
bien loin
de
valoir,
à
mon goût, celle qu'on nous sert dans
nos
estaminets.
Je fus
très satisfait quand toutes
ces
cérémonies
de
politesse furent terminées,
et
quand
je pus
observer
à
mon aise
. ceguiçepaçsait^utoui
de moi.
фе:аЬе{еиТ§Ш^ФйШга
du
diable
eu
disant
: A
iotit seigneur
tout honneur ! Après avoir exprimé diverses opinions très singu
lières,
il se tourna vers moi en prononçant ces paroles
: «Le
diable
est
un
esprit triste,
et il
afflige
les
hommes
;
aussi ne peulil
souf
frir
que l'on
soit joyeux.
De là
vient qu'il fuit
au
pins vite lors
qu'il entend
de la
musique
; et
qu'il
'
ne reste jamais
là où Ton,
chante
de
pieux cantiques. C'est ainsi
que
David délivra, avec
saj
harpe, Saiil
qui
était
en
proie
aux
attaques
de
Satan.
La mu
un
mm wm IDI M un
CHAPITRE Vni.*
LO
XNLON
DE 1B
PELILE
LOGE.
La tuite
de
Rafaele avait, je té Angelo
et sa
famille dans
un
trouble
si
grand,
qu'il
fut
impossible
à
Giuseppe
de
parler
a sa
sœur, comme
il en
avait l'inten
tion.
La
journée
se
passa
en
allées
et
venues,
en
conversalions avec
les
voi
sins,
les
amis,
qui
accouraient
a la
file pour savoir
les
détails
de
l'événement.
La ligure d'Angelo était belle d'indignation
et de
courroux.
Un
moment
il
avait
eu
l'idée
de se
mettre
à la
poursuite
du
fugitif,
mais
il
l'avait bientôt
rejetée
en
disant
:
Allons donc,
ce
serait
lai
faire trop d'honneur I... L'enfant
qui
déserte
la
maison paternelle
ne
vaut
pas
même qu'on
se
dérange pour
l'y
faire rentrer.
Le soir,
au
théâtre,
il y eut
redoublement
de
questions, d'exclamations.
Le
jeune Mocenigo
ne fut
pas
des
derniers
S
témoigner
sa
sympathie
:
C'est pourtant
moi,
ditil
à
Angelo,
qui
suis cause
de
tout celai... Mais
comment
me
douter qu'en
me
débarrassant d'une danseuse j'allais
le
priver
d'un enfant
I...
K'iinportci tu as droit
à
des dédommagements, et
je
ne veux
pas
le
les
faire attendre.
Alors,
s'approchant
de
Gabriella
et de
Giuseppe, Mocenigo leur montra
un
sùnrire plus bienveillant
que
jamais,
les
combla d'égards
et de
caresses.
A
l'une
il
parla de'ses débuts, comme devant avoir lieu dans peu
de
jours;
à
!*] Voir
les
numéros
51
et 5ï
de l'année 1846,
et les
numéros
J, S, *, S, 6,7, 8,
9,
U, is, 14,
i5,
«i et 17 de
celte année.
l'autre
il fit
entrevoir
le
terme prochain
de son
noviciat
de
compositeur, l'as
surant qu'il fondait
sur lui de
grandes espérances,
et
ajoutant
que ce
serait
nneère brillante pour SaintChrysostome que celle
où la
prospérité du théâtre
s'appuierait
à la
fois
sur les
talents
de
la sœur et sur
le
génie
du
frère.
Cette perspective
fut
comme
un
éclair
qui
éblouit
le
pauvre jenae homme.
Dans
son
ravissement, dans
son
extase,
il
balbutiait des remerciements confus,
et Mocenigo l'interrompait
par des
protestations nouvelles.
Le
spectacle allait
commencer
;
Giuseppe
se
rendit
i sa
place ordinaire, accablé
du
poids
des
pensées
qui
encombraient
sa
tête. Pendant quelques minutes,
il
demeura
comme sourd
et
aveugle. Lorstm'enfin
il se
réveilla,
ses
yens
se
tournèrent
machinalement
du
côté
de la
petite loge,
et il n'y vit pas sa
sœur.
Où
donc
était~èllé?... Avaitelle oublié
sa
défense?...
A
l'instant même
les
soupçons
l'assiégèrent
en
foule
;
les
excessives cajoleries
de
Mocenigo, qui tout
à
l'heure
l'avaient enivré,
lui
apparurent sous
un
autre jour. Sans réfléchir davantage,
il saute
à
bas de
son
tabouret, descend l'escalier
de
l'orchestre, enjambe celui
du théâtre,
et
s'élance dans l'étroit corridor
qui
séparait
le
salon
de la
petite
loge...
Il
avait deviné jnsiel...
Sa
sœur
y
était avec Mocenigo, mais
la
porte
était entr'ouvérle,
et
Giuseppe n'avait
qu'a la
pousser'd'uu geste pour péné
trer dans
le
salon. 11 s'arrêta, dominé
par un
sentiment
de
curiosité plus
en
core
que de
prudence.
Il
voulut savoir
à
quels termes Mocenigo
et sa
sœur
en
étaient ensemble,
et il
écouta
s
les premiers mots
qui
parvinrent jusqu'à
lui,
son
sang
se
calma,
et
11
s'applaudit
de ne pas
s'être livré
â
quelque acte
violent,
car
Gahrlella faisait bonne contenance,
et il
était clair
que
Mocenigo
n'avait encore rien obtenn. Cependant l'astucieux patricien n'épargnait
pas
les séducUons
;
il
employait toutes les ressources d'une éloquence rompue
aux
plaidoyers galants. Gabrïelta n'opposait
S ses
attaques
que la
simplicité tran
quille
du bon
sens
et de
l'innocence.
REVUE
ET
GAZETTE MUSICALE
sique
est nn
présent
de
Dieu,,
qui est
tout à fait
en
opposition
avec l'esprit malin,
et
qu'on peut employer pour éloigner
les
pensées
et les
tentations dont
il
nous assaille.
Un
jourîl arriva
que
le
diable m'avaitlroûftlé
la
mémoire
au
point
que
j'avais
oublié
mes
prières.
Je
chantai
un
cantique,
et la
à^iotfrfemft
revint tout aussitôt,
s II
conta ensuite, toujours à propos
du1
diable, plusieurs histoires;
qui me
semblèrent plutôt faites pour
amuser
les
enfants
que
pour occuper
des
hommes sérieux, mais
que
ses
disciples admiraient avec une grande bonne
foi.
Le docgKlfireviiSt'encare suffecha^l^3e.laï0iu^ufe^saïfâ
doute
à
cafflse
de moi
et:
peur faii» hosûenr:
à
m^BB^essteHt,
ft
dit :«Lesrç#№tles^in^âevi^.eiBt e^o«wg^
&
m^iqfliiei.eajp
c'est unebifr ïeufc»
e4il%alîoBs
tfeproïêgerî&s arts Kbéraux,
âe
même
que les
sciences utiles.
Les
particuliers peuvent avoir
du
goût pour
les
arts
et y
prendre plaisir, maisF ils ïi''on*|as
tes
ressources nécessaires pour
les
faire fleurir. L» Bifcte ffiàss
ap
prend
que les
rois bons
et
pieux entretenaient
des
chanteurs
près
de
leur personne.
La
musique
est la
consolation
qui
con
vient vérUabJemenlaux esprits affligés,; elle rafraîchit
le
cœur
et
luirendlanaix,, comme
l'a dit
Virgile
: Tu
calamos
inflare
levés,
ego
dicefe.
versus.
Chante
les
notes,
moi je
chanterai
le
texte.
La
musique
est en
quelque sorte
une
discipline
et une
maîtresse
d'école; elle apprend
aux
gens
à
être plus aimables
et
plus doux,
plus modestes
et
plus intelligents.
Les
mauvais musiciens
et les
mauvais chanteurs, nous font mieux voir quel
bel art est la mu
sique,
par la
raisou
que le
blane
ne
ressort jamais mieux
que
lorsqu'il
a le
noir pour voisin,
M
Convenez,.mon respectablemaître,
que. si
Martin Luther
dit
dos choses
peu
raisonnables lorsqu'il
est
question
du
diable,,
il
parle
on. ne
p,eut..mieux
de
notre,
art.
II. aborda ensuite .d'autres
sujets
qui
m'intéressaient beaucoup moins,
et fit des
raisonne
meals queje.
ne
compris.pas. toujours. TJn jeune homme,
qui
me v.pyait. distrait pendant;
les
conversations théologies
du
docteur ayeçses .dis.ç^lesr,. sjappjçgçjva de..m,o,i 'e.fc.m'.adîessala
parole, ll.m'a^rarJA
au
nom de la
niusique, jèVoudtaïs raire' pacte d^âmitié avec
îdi.
Sa franchise
me
plut,
je me
sentis attiré vers
lui de
même qu'il
l'avait été vers moi; nous fûmes
en
peu d'instants
l'un
avec l'autre
comme d'anciennes.connaissances. IIm'apprit qu'il était élève
de Conrad RupfF.
Je fus
forcé de lui avouer que
je ne
connaissais
pas
ce
maître,
ce qui
parut
le
surprendre..Il
me le
montra près,
'dûdocteur Luther,
et me
parla
de lui en ces
termes: «Conrad
Rupifi est.une dés. lumières
de la
musique,
de
notre temps;
il
,
remplit,..conjointement avec Jean Wallher,
ce
personnage
au
visage sévère que vous voyez assis
visàvis.
du docteur,
les
fonc
tions
de
professeur
de
chant
et de
maître
de
chapelle
du
prince
de Saxe. Quand notre grand Luther s'occupa
de,
.composer
la
nouvelle lïthurgie allemande,
¡1
écrivit ait prince Jean pour
que
RftjjSf
et
Wàlther vinssent l'aider
de.
leurs conseils.pour
la
partie
rows&ealèi.Yoïtr vous faire connaître tout
de
suite
nos
excellents
compositeurs,
je
vous dirai
de
regarder
cet
homme dont
la fi
gure
est si
rouge
et qui se
penche en riant vers
son
voisin
; il se
nomme Georges RbaW.
Ce fut lui qui
dirigea,
il y a
quelques
an
nées,
.àleiri^^.owilpdt.ïB^rej^ l'écafede ^M.Thomas,
la
mejSs&àdoQaevoix
$ le
T^Meum.
qui
fujtfflftt cUanteSs à l'occa
sion
de h
faneuse disante entlje
le
èteeteare* Jea» Sek.
»
Vo«sae connaissez e»ns â^vtepssmêmelesnoniS'de ces com
positeurs dont
me
parlait mon nonvelami,
et qui
sont,
à ce
qu'il
I
g»raîl. eëtèlwêjs
en
Allemagne. C'est qu'ils n'ont fait
ni
motets
BÂ
madrigaux,.mais
des
cantiques qu'on
ne
chante
pas et
qu'on
ne chantera jamais, sans doute, dans notre Flandre fidèle
ca
tholique. Luther, suivant
ce que me dit mon
interlocuteur,
demandait toujours cbnseil
à
Rupff
et à
Wallher pour
ses in
novations musicales,,
et ne
terminait rien sans avoir
eu
leur
approbation
;
mais comme:
ce
qu'il .avait préparé était toujours
aussi près
de la
perfection qu'il
est
donné
à
l'homme dîen
ap
procher, ceux dont
il
avait réclamé l'aide n'avaient
le
plus sou
vent
qu'à
donner leur approbation
et à
copier
la
musique qu'a
vait composée
le
maître, ce que
du
reste
ils
déclarent euxmêmes,
car
ils
sont plus jalouxdé
sa
gloire
que de la
leur. —Pendant
que nous devisions ainsi,
un
personnage
que je
reconnus pour
être celui que mon jeune camarade m'avait désigné sous
le nom
de Walther,rs'approcha
de
nous,
et,
prenant
la
parole
: «
Rupff
et
moi nous nous souviendrons toujours
des
conférences
que
nous
avons eues avec
le
docteur lorsqu'il nous appela pour nous faire
travailler
à la
liturgie
de l'a
nouvelle Église. Chacune
de ses pa
roles
fut un
rayon luminenx dirigé, dans l'obscurité
du
doute,
sar chaque poin.t
0.$^»
fallait éclairer
ïl
employa;
le
huitième
ton pour l*Épître,,:jet
le
sixième
ton
pour l'Évangile,
en
disant
:
Zès'pà'roîes
de
JésusChrist étant remplies
de
douceur, nous
con
sacrerons
le
sixième
ion à
l'Evangile,
et
saint Paul étant
un
ap&tre
austère, nous emploierons
le
huitième
ton
pour l'Epître*
Ilconrposa
la
musique desÉpïtres,
des
Évangiles,
du
Quidridie,
me
la
chanta
et me
demanda mon, avis
Il me
retint pendant
près
de
trois semaines
à
Vitteniberg, occupé
à
écrire
la mu
sique qu'il avait faite
; je ne le
quittai
que
lorsque
la
première
messe allemande
eut êtê
célébrée dans
les
paroisses.
Je dus
emporter
à
Turgati
Une
description exacte
du
résultat
de ces
Centrons danstla loge,
M
disaitelle; vous
m'avez,
amende
ici
pour
me
montrer vos.tableaux, votre riche ameublement,,
vos
vases
de
Chine...
à.pré
s.eftt.il
est
temps
d'aller
vole
le
spectacle.!...
Encore un instant'..... répondait. №oçenigo; comment
un
opéra,, que vous
savez
par
cceur, peutil vous tenter
à ce
point î... Dans
la
loge,
on
cause
mal,
au lieu qu'ici nons sommes stbjen
!...
Voyons,
cûr,issim,a,.vous
savez
que
je ïous.airae,
et
YODS,
estce,q,ue vous.serez toujours insensible?.... estee
qu'en retour
de
tout
ce
que j'ai, fait,,de
ce que je.
ferai pour vous,
je
n'aurai
pas seulement
un
tendre regard.* un. dqux sourire:?..... Tenez.,
je ne
suis,
pas
exigeant.;,
je me
contenterai seulement
d'uqe
promesse, parce
que je
suis
sur
que
voua êtes loyale...
Vous avez bien raison, seigneur; voilà, pourquoi
j.e
ne, vous promettrai
rien.
Rien!.. mais alors
si je ne
vous accordais pas, de. délai.,
si je
faisais; va
loir
mes
droits tout
de
suite
!...
V'is droits, seigneur?
Khi
mais sens doute, vous in'cn.,avezdonué,.cruelle*
en
m'iuspirant
un
attachement plus
vif que je ne
saurais vous
le
foire comprendre
I...
Vnus.m.'en
avez donné
en me
laissant, malgré vous, lire dans,
ce
petit cœur
qui
n'est
pas aussi barbare
que
vous voudriez
me le
persuader!
Om se
connaît
en
femmes, chère enfant
:
vous
n'êtes
pas la
première
qui
vous soyez assise
sur
ce soplw, mais
jê
vous jure
que, si
vous
le
voulez, vous serez
la
dernière
I...
Seigneur,
'je ne
pense
pas au
moins vous avoir donné
le
dtoiL
de
m'ûir
sulter,
et je
vausd,éctare...
En parlant ainsi,,.Gabriella
se
leva
et
voulut
se
précipiter vers
la
porte, mais
Mocenigo
la
prit
par les
deux mains
et la
força
de se
rasseoir.
Du tout, vous
ne
sortirez
pas
encore... .qu'estce
que
cela signifie? vous
me déclaie»,!....,
El moi,
.dope,
.Grovez^vousqufcj.e
m'ai pas ausstmes déclara
lionsâ vous.faîrel...D'ahOili.3evous.ai déclaré que je vous aimais... estce donc
si révoltant,
si
infâme?...
Jé
vous
ai
déclaré
que, si
vous
le
vouliez, vous
se
riez désormais
la
seule
et
unique maîtresse
de mon
cœur
1...
Ladessus vous
TOUS
récriez, vous entrez dans
une
sainte.colère
!.,. Je
vous demande
un peu
s'il
y a de
quoi?
Et si
a'
mon
tour j'en faisais autant,
si je
vous disais
:
Votre
froideur, vraie
ou
feinte,
me
blesse... votre
m.épris
sincère ou„joué
m'humi
lie
et
m'outrage...
Je
vous signifie donc qu'à
l'avenir
!a protection
que je
vous
avais accordée,
je
vous ïaretire...
les
débuts,
sur
lesquels vous comptiez,
je
m'y oppose...
les
entrées que
je
vous
al
données,
a
vous
et â
votre frire Giii
seppe, j'elêss'upprîme... Enrmmot,je.devîens votre ennemi,,celui.de voire
frère,
de
votre père,
de
toute votre famille
!
Ah
seigneur
!
s'écria
Gabriella,
ne
dites
pas
cela,
je
vous en
ju'jejl...
Et
pourquoi
ne le
diraisfc pas? reprit Moceuigo, voulant profiter
de
t'avantage
que la
terreur
de
Gabriella semblait
lui
offrir, pourquoi.
n'Useraisje
pas demesdroits aussi bien
que
vcus
des
vôtres?...
Je
vans déclaré*
uu
con
traire
. que ma
résolution
est
prise,
et nue
rien
ne
pourra
la
changer. Vous
fites libre, entièrement
libre
de
choisir
le
parti qucv.ous jugerez.
Je
meilleur...
Je
m'en
remets
a
vous,... prononcez
et,
pour preuveque jeue veux ajicu
nement gêner votre conscience,
je
vais molinfime ouvrir ceue porte.... afin
qUe vous puissiez sortir
si
vous
le
voulez.
L'action
accompagna
si
vivement
la
parole,
que
MocenJgO surprit Gi'uscppe
écoutant derrière
la
port?,
les
yeux ardents,
les
lèvres Crispées,
les
mainsser
rées
l'une
contre l'autre.
A son
aspect, Gabriella poussa
un cri, et
Mocenigo
recula
en
arrière, frappé
de ce
coup
de
théâtre, auquel
il
s'attendait
si peu.
[tasuite
au
prochain numéro.),.
PAUL
SMITH.
DE PAKIS.
4^7
travauxjptSfr^pïïs'Êtfteî
an
princeife
ïa
pWt
'du
docteur.
» '
Bue voi&> jd'iiiœ
te;e
extraordinaire, aons interrompit
en
criant
de
manière
à
ébranlerlesmurs
deXAigïe noir
:
«Walther
I
Walther
I.
». C'était
le
docteur
qui s'j
ni patientait d'avoir adressé,
plusieurs lois
ta
parole
à son
ancien conseiller
en
fait
de
mu1
sique sans queceluiei Petit entendu .tout occupé qu'il était
de.
me conter
ce
que jeviens
de
vous transcrire.
«
Waltheivcontinua
le docteur,
il ne
suffit pas
de
faire l'éloge delà musique,
il
faut'
mettre
les
préceptes
en
praliquectchante^au lieu de prononcer
de vaines paroles.
Le
diable
ri,l
peutêtre
en
voyant
de
grands;
théologiens comme nous vider.de longs.pols
de
Mère dansun;
cabaret.
Vous n'êtes pour rien dans ceci, vous Melanchlon,
qui préférez
une
bouteille
de
vieux
vin à
un
tonneau
de
bière.,;
futce
de
bière d'Embeck,
ce en
quoi
il
nr'est impossible
de
vous,
approuver, soit
dit en
passant.
—te
diable rira*noins
si
nous;
chantons, car
je
vous
l'ai
déjà
dit,,
il
hait,
lui
artisan
de
désordre:
étde trouble,
la
musique,
qui
est
le
symbole
de
l'ordre harnio,
nieux. Chantons donc
et
servezvous
de
vos meilleures
YOÏX;
en
tonnez àVéémoî
:
Mensch, Willst
du
Uben..
»
Tons
les
disciples
se rassemblèrent autour
du
maître,
et,
joignant leur voix
à la
sienne,, chantèrent
la
mélodie qu'il leur avait indiquée. Quel beau
chant, quelle savante harmonie! jamais
je
n'avais entendu
de:
musique
qui
m'eût fait autant
de
plaisir, j'avais
les
larmes
aux
yeux;
lé
docteur
s'eu
aperçut
et me
lendit
sa
main,
que
je
pris,
.
j'en
fais l'aveu, toute main d'hérétique qu'elle
fût.
Après
ce
mor
'
oean
de sa
composition, Martin
dit
quelques mots
à
voix basse
à .
ceux
qui
étaient près
de
lui,
et ils
commencèrent
un
autre chant
que.je reconnus,
s
s
premières notes, être
un
madrigal
de
Roland
de
Lattre. C'était
une
politesse pour moi, que.d'exécuter
en ma présence l'œuvre
d'un
compatriote,
et
de quel compatriote,
3e celui qu'on
a
surnommé partoutle prince
des
musiciens
de
son temps! Quand
ces
messieurs eurent fini,
je
les
remerciai
de
mon niîêtrx
de
leur courtoisie,
et je les
félicitai
sur
leurs belles
.
voix,
car
j'en
ai
rarement entendu d'aussi sonores, même parmi
les chantres
de
notre cathédrale.
Le âbcteitM'^àrl^^^I^^&^^^^ptl^f 4?liaiji.£pji;
)
nail d'être exécuté. «Puisque
le
Seïgnear Dieu mous accorde
des
dons aussi précieux durant celte
vie, qui
n'est qu'un véritable
bourbier,
que
serace doue dans
la vie
éternelle.,
où
tout sera
disposé
de
la
manière,
la
plus parfaite
et la
pïus„accomglie
?
La '
faculté d'entendre sans cesse
de
belle musique exécutée
par des
voix mélodieuses
et
par
des instruments d'une justesse parfaite,
est
le
plus grand: bonheur
que
Dieu puisse réserver
à
ceux
qui
se sont bien conduits
eu
ce
monde.
»
Quelqu'unvint présenter
à
Luther
un
jeune homme
qui
avait
l'intention
de
sefaire maître d'école.
Le
docteur interrogea
ce
jaune homme
sur ses
études
et en
reçut
des
réponses satisfai
santes; puis
il lui
demanda's'il savait
la
musique,
ce à
quoi
il
lui
fut
fait timidement
un
âveunégatif. «Alors,
mon
cher
ami,
dit LuLlier
an
jeune homme,
ne
songez
pas
à
devenir institu
teur,
ou
du
moinsne comptez
pas sur
mon appui pour cela. Mon
opinion
est
que
la
musique doit occuper
une
place importante
dans l'enseignement qu'on donne aux enfants*
et
qu'un bon maître
d'école doit avoir
des
notions
de
cet
art. Si
mon avis
sur
ce point
était.partagé,
il
viendrait unjonr oui'Allemagne entière liraitla
musique comme
la
Bible. » Le jeune homme
se
retira tristement,
maïs sans conserver de rancune contre celui qu'ils regardent tous
ici coœme.un père.
Dix heures venaient
de
sonne* S la: grosse horloge
de la
ville.
Luther
ne
quitte jamais plus lôïj jamais plus} tard, l'auberge
de
l'Aigle
noir.
Il se
leva,
et,
après
£vo
rhT
an
adieu cordial
à
tous
ceux qui
se
trouvaient présents, il partit..Le plus grand nombre
de
ses
disciples
le
reconduisit jnsqu'àsa; porte.
Je
suivis macii
,» nateraeit$:,|*endant
que
je me
dirigeais,
â
mon
tour, vers tnôn
, !..
.logis,.jefUsapejoins
par
Rhavv, rimpritneftfdes ouvrages
de Lu
,';;ther,
et
atttèu&lnimême;
II
m'engagea
à
aller visiter leiende
Afeain
son
officiBé^en
me promettant de me faire Voir les épreuves
d'Une nouvelle collection
dè
cantiques
de
différents composi
teurs,
qui va bientôt sortir île ses presses.
Je
me
rendis
à
l'heure convenue chez George ftbâW.
Je
ne
vis
pas seulement chez
lui
l'ouvrage dont
il
m'avait parlé* ïHai$>aussi
l'ë'recùeil entier des compositions
3e
Lnther, qu'il
a
rassemblées,
ët dont aucun autre que
lui
ne possède sans doute
une
suite com
plète.
J'ai
parcouru
ce
recueil,
et,
cour dire
la
vérité,
le
talent
musical
du
docteur Martin m'est apparu plus grand encore
que
par ce
que
j'avaistiéjà vn
et
entendu. Parfois
ses
mélodies offrent
'des réminiscences d'anciens cantiques catholiques qu'il avait
chaulés
si
souvent, soit étant écolier, soit dans
sou
cloître; mais
plus souvept eïtes sont originales.
Ses
adversaires
ont
prétendu,
a
ce
que
me t
Rhaw, qu'il
s'était
presque toujours borné
à
mettre des .paroles allemandes
à la
place
s
paroles latines,
et
'qu'il avait change
peu
de
chose
à la
musique donnée sous
son
nom.
Je
puis vonscertifier qu'il
n'en est
rien.
La
connaissance
de
notre
art,
qnejedôisà vos.excellentes leçons,
m'a mis à
même
d'en pouvoir juger.
Je
tiens
d'un de
ses disciples qu'il
ne
voulait
pas qu'on adoptât les. paroles allemandes
à
l'ancienne musique
du texte latin. Ce texte,
la
mélodie,
le
rhythme, lotit, suivant lui,
devait avoir
un
caractère national.
Ne
trouvezVous pas, maître,
cfu'il
y a
bien assez
de
choses
à
reprocher
à
Luther,
et
qu'il
est
déjà bien assez chargé
de
ses
péchés contre
la
sainte Église sans
que
l'on nie son
mérite
de
compositeur.
Il y a
quelque chose
de
plus vrai, c'est
que
Luther
s'est
servi pour plusieurs cantiques
d'airs populaires allemands; mais
ici
on
n'e
peut
lui
prêter
l'in
tention d'avoir voulu tromper
ses
conteinporaîns
: ces
airs, tout
le monde
les
connaît, personne
ne
s'avisera
de les
lni
attribuer.
El encore,
s'il
n'est
pas
l'auteur
des
mélodies,
il est du
moins
celui
de la
belle harmonie qui leur
est un si
grand ornement.
Je
nè
sais quel, jugement
la
postérité portera
sur
Martin Luther
•au sujet
de ses
actes contre l'Église catholique,
sa
mère, qu'il
a
frappée
et
qu'il frappe encore chaque jour d'une main parricide;
mais
ce
que
je
crois pouvoir vous affirmer, c'est qn'il sera con
sidéré çpmmeijn grand musicien.,
"
Avant de quitter WJftemherg,
j'allai
rendre
une
'dernière
vi
site
au
docteur.
II
me
fit,.comme
la
première fois,
un
accueil
cordial. Quand.nous nous quittâmes, ilme
fit
présent
d'un cau
thrue nouveau qu'il venait
de
composer,
et qui est
éerit
de sa
main,
en
me
priant
de le
conserver, sinon pour l'amour
de lui,
du moins pour l'amour
de
l'art
que
nous cultivons tous deux. Je
vous envoie
çe
manuscrit pour
que
vous jugiez
si je me
suis
trompé quand
j'ai
dit
que
Luther
est
expert
en la
science .mu
sicale.
Adieu,
mon
cher maître, croyezmoi votre élève bien recon
naissant.
JÈRÔSIE SE COCEX.
Malheureusement
le
manuscrit
de
Luther dont parle
le
jeune
musicien Anversais n'était
pas
joint
aux
lettres
que le
hasard
a.
fait tomber entre
mes
mains.
J'ai
fait
de
vaines recherches pour
Ie retrouver
;
j'ai Fait sans succès des démarches auprès des per
sonnes auxquelles échurent
des
lots dans
la
vente
où
le
paquet
d'autographes
me fut
adjugé.
Si,
par
impossible,
je
parvenais
à
mettre
la
maie
sur ce
curieux document,
je
m'empresserais
d'en
faire parvenir
une
copie
à la
Gazette
musicale.
E.
FÉTIS.
ACAEÉMIE
IïOVALE
DE
MUSIQUE.
OZAÏ,
ballet en 2 actes1 et6 tableaux, par
M.
CORALLI
;,musîque de
M.
CASIMIR
GIDE
;
décors de
M.
CICEHI.
{Première
représentation.
)
Ce ballet devait s'appeler
la
Taïtienne,
et il
s'appelle
Ozaï;
les principaux rôles devaient être jonés
par
Carlolta Grisi,
Pe
I
REVUE
ET
GAZETTE MUSICALE
titpa.> Adèle Dumilâtre,
et ils le
sont
par
mademoiselle Pluu-
kett,
M.
Desplaces
et
mademoiselle Eniarot. Hélas!
sur
quoi
.donc compter ici-bas?...
Argument.
Je ne
sais trop pourquoi
le
programme
se
sert
de
ce
mot
quasi-latin,
que ne
comprennent.pasl.es dames,
au
lieu
de celui
d''àvdntrscène, qui
leur
est.
très familier. Autrefois,
il
est vrai, c'était le.mot d'usage
:
c'est un argument, mais
ce
n'est
pas une raison.
Donc, nous sommes dans
unes
iles.de l'Océanie, fameuses
par
la
douceur
de
leur climat
et de
leurs mœurs. L'une
s
plus
jolies insulaires
a
recueilli
un
jeune Français, naufragé dans
ces
parages, hospitaliers. Elle,
le
cache
aux
habitants
de
l'île,
qui
pourtant
ne
sont
pas
anthropophages. Vous croyez 'déjà
que le
jeune Français adore
la
jeune insulaire? C'est possible; mais
il
aime encore bien plus ardemment mademoiselle
de
Bougainville,
sa cousine, qu'il
a
laissée
en
Fraoce,
et
qu'il devait épouser.
« Jusqu'ici,
dit le
libretto,
ses
regrets
ont été
aseez vifs pour
» l'empêcher
de s'unir à
Ozaï.
» Je
trouve
que s'unir
n'est
pas
mal.
Un vaisseau
se
montre,
une
chaloupe aborde;
M. de
Bougain-
ville lui-même preud possession
de
l'île
au
nom.du
roi de
France
et
y
plante
le
drapeau français. Cela fait,
il
repart sans même
se
donner
le
temps
de
dire deux mots
aux
naturelles
du
pays, mais
il
en
emporte
un
échantillon
en la
personne d'Ozaï,
qui
s'est
en-
dormie fort
à
propos.
Et le
jeune Français?...
Le
malheureux,
renfermé dans
sa
grotte,
ne
s'aperçoit
de
l'arrivée
de
ses compa-
triotes
que
quand
ils
sont déjà partis
!
Il se
jette
à la
nage
; il
les rattrape. M. de.Bougainville reconnaît
en lui son
neveu
!
Nous voici
en
France
:
l'éducation .d'Ozaï
a
marché vent
en
poupe; mais Surville,
le
jeune Français qu'elle idolâtre tou-
jours,
ne l'en
aime
pas
davantage. Malgré
les
petits serments
qu'il
lui
a faits, il songe même
à/MMIV
à
une autre,
à sa
cousine.
Ôzâï découvre: le.mystère,
et,
comme
M.
de
Bougainville vient
de
recevoir
du roi
l'ordre
de
faire le tour
du
monde,
au
moment
où
il
va
s'embarquer
a
Marseille, Ozaï reparaît tout
à
coup
en
cos-
tume taïtien
sur
l'air
:
Rendez-moi
ma
patrie,
Ou
laissez-moi
mourir
I...
M. de Bougainville consent
à
reconduire-la pauvre jeune fille.
Ozaï quitte
la
France
; ce
n'était
pas la
peine
d'y
venir
!
Ce canevas
à
deux grands torts
: il
manque
de bon
sens
et
d'intérêt.
La
seule personne aimable n'est
pas
aimée
: le
jeune
Français
est un
être
à
part,
qui n'a
rien dans
la
tête
ni
dans
le
cœur. Avec
un peu de
passion
il
obtiendrait grâce, maïs
il est
froid comme marbré
et sot
comme
un
panier.
Les accessoires, valent mieux
que le
fond, quoiqu'il
y ait
beau-
coup
à
retrancher
aux
divertissements
du
premier
et du
second
actes.
Qui
ne
sut se borner!... M.
Goralli
s'est
abandonné trop
complaisamment
à la
peinture
des
récréations taïtiennes,
et il a
déployé,
s le
lever
du
rideau,
un
luxe d'érudition
que je
l'en-
gage
à
réduire
de
moitié.
Les
décors sont, très beaux, très soi-
gnés
;
les
vaisseaux manœuvrent, virent
de
bord
; une
flotte
en-
tière
met à la
voile.
La
musique
est
digne
de
l'auteur
de
celle
du
Diable-Boiteux
et de la
Tarentule.
Tantôt conçue dans
le
sys-
tème
du
pot-pourri, plus souvent formée d'inspirations origi-
nales,
elle abonde
en
motifsdevalses, galops,polkas
et
antres,
qui
de
l'orchestre
de
l'Opéra passeront immédiatement
à
celui
du Château-Rouge,
de
Manille. Ozaï sera
la
Providence
du bal
champêtre.
Carlotla Grisi.aimant mieux plaider que danser, mademoiselle
Plunkett
a
pris
sa
place
;
elle n'est pas encore
à
l'âge
des
procès.
C'est
une
Taïlienne fort agréable,
ce qui
fait que
le
jeune Fran-
çais est'vraiment inexcusable
:
aussi
le
public
lui
donne-t-il
complètement tort. Tant mieux pour mademoiselle Plunkelt,
mais tant
pis
pour
le
ballet I
R.
THEATRE ROYAL
|)E
L'OPÉRA-COMIQUE.
ÛPÏSA-COMllJffS
EN 3
ACTES,
Libre!»
de MM. de
PLAKÀRD
et
LEDVEN
;
partition
de M.
Aorara
BOIELDIEU.
(Première représentation.)
Le public tout spécial des premières représentations, composé
en grande partie
de
juges
et de
jugeurs
,
mats surtout
de
per-
sonnes forcement bienveillantes, aime
à
connaître d'avance
le
nom
des
coupables
et de
leurs complices
qui
sont
sur le
point
d'être exécutés
;
c'est-à-dire quels sont les auteurs dont
le
sort
va
se décider. On tire des conjectures
de
leurs précédents
et
de leurs
antécédents, comme
on dit en
assez mauvais frauçais
à
notre
chambre législative.
Le
nom
de
l'auteur
des
librelli
du I'ré-aux-
Clercs et de Marie
circulait dans
la
salle avant
la
représenta-
lion ,
uni à
celui d'Adrien Boïeldieu,
qui
réveille
le
souvenir
de
tant
de
succès
et de
tant
de
mélodies élégantes
et
spirituelles;
et
si
quelques uns disaient
que le
génie
est
rarement héréditaire,
quelques autres citaient
la
famille Vernet, dans laquelle
le
lalcnt
s'est
transmis
de
père
en
fils.
Le
Bouquet
de
l'infante
est un
ouvrage dans
le
genre
qu'a im-
porté
M.
Scribe
à
l'Opéra-Coraique, moins
le
dialogue spirituel
du créateur
de
cette poétique. Comme dans
le
libretto
des
Dia-
mants
de
la
couronne,
dont î'aclion
se
passe
en
Portugal
et met en
relief
une
jeune reine fort aventurière,
la
pièce
dè
M.
de
Planard
nous montre
un
prince royal
de la
maison
de
Bragauce
qui
prend
sous
sa
protection
don
Fabio
da
Sylva, jeune gentilhomme por-
tugais exilé
et
dépouillé
de ses
biens
par le roi de
Portugal,
et
qui
s'est
fait corsaire pour trouver l'occasion
de se
venger
des
injustes persécutions royales.
Ces
projets
de
vengeance
ne
l'em-
pêchent point d'aimer
une
jeune orpheline, Ginelta,
qui a
pour
père adoptif
un
nommé Pascalez, écrivain public
et
enlumineur
délivres
de
piété,legîoeoso
do la
pièce,
qui, de son
côté, aime
une jeune fille nommée Gnbrjelle. Tous
ces
personnages sont
servis
à
souhait
par un
chancelier, un'faniitter
de
i'ihqiiisilion
et
un alguazil
de
cour nommé Gusman,
qui ne
connaît
pas
d'obsta-
cles quand
il
s'agit
d'être agréable
à ses
maîtres.
Don
Fabîo
s'introduit dans
les
jardins
de la
résidence royale pour enlever
le
roi, son
fils
et
même l'infante; mais, repoussé dans celte
at-
taque nocturne
par le
prince royal, dans lequel
il
reconnaît
le
jeune homme
qui lui a
sauvé
la vie
quelques jours auparavant
en
le
secondant
de
sonépée contre deux assaillants
qui
voulaient
lui enlever Ginetta,
il se
laisse arrêter
et
condamner
à
mort.
C'est sous
le
coup
de
celle condamnation capitale,
à
laquelle
ne
peut le-soustraireleprïnce royal, que noire héros
se
meut, assez
péuiblement pour
le
speclateur, pendant tout
le
troisième acte.
Cette situation, triste
et
sombre,
est
infiniment trop prolongée
pour
le
genre
de
l'Opéra-Comique. Enfin
cet
état
de
choses cesse:
je
roi,
qu'on
ne
voit
pas,
pardonne
au
coupable
et lui
fail
oc-
troyer
sa
grâce
au
moyen
d'un
bouquet
que
l'infante, qu'on
ne
voit pas non pins, jette aux pieds
du
prince royal,
son
frère. Celte
mystérieuse
et
fantastique
loi
d'amnistie permet
à don
Fabio
d'épouser
sa
Ginetta,
et à
l'écrivain public
de se
marier
à sa
cousine Gabriel)e.
Ce libretto,
ni
meilleur
ni
plus mauvais qu'un autre,
est
l'ait
avec celte entente
de la
scène
qui
caractérise
le
talent
de
M. Pla-
nard
, et
montre
son
expérience
de la
scène lyrique.
Nul
auteur
n'a jamais mieux
su ce qui
convient
au
compositeur.
La
thèse
de
ce dernier était donc heureusement préparée
par un
libretlo
musical,, mais difficile
à
soutenir
par la
mission qu'il
s'est
done
de
ne pas
faire dégénérer
le nom
qu'il porte.
M. Boteldieu
n'en est
plus
à
son- coupd'essai,
et l'on
aimerait
à
lui
voir frapper
des
coups
de
maître.
Il a le faire
facile, mais
quelque peu arriéré
par la
simplicité trop claire
de sa
mélodie
et
la naïveté
de ses
modulations.
A
Dieu
ne
plaise
que
nous nous
fassions l'avocatdes idées romantiques
en
musique; mais
il
reconnaître que
le
chant
est
devenu plus passionné
et les
accora-
_
DE PARE». íki
pagnements plus compliqués qu'ils ne l'étaient jadis. Le naturel
est une belle qualité; mais
il y a
le naturel insignifiant, niais,
plat., comme,
il y a le
naturel facile, élégant, noble, élevé.
M- Boïeldieu nous semble se tenir au milieu, de ces deux naturels :
c'est la pointe d'originalité, cet inattendu
si
nécessaire pour-
veiller l'auditeur blasé
par les
styles
si
divers qu'on essaie
à
présent, qui fait défaut-à
M.
Boïeldieu.
Sa
muse est trop hon-
nête fille, trop décente; elle ne
se.
permet pas le plus petit écart.;
elle nous fait l'effet de considérer les muses de Beethoven,
et de
Weber comme ces dames trop hardies
du
temps
de la
régence,
qui
ne
suivaient que les caprices
de
leur imagination.
C'est parce que l'auteur de Marguerite
et
du Bouquet de- l'in-
fante est. jeune,
et
qu'il porte
un
nom éminemment musical,,
qu'il faut l'engager
à
payer tribut,
à ce
qu'on appelle l'inspira-
tion. Son ouverture, qui débute hardiment
en
soi mineur,
an-
nonçait une sorte
de
verve
et
d'entrain; mais
le
compositeur,
craiguant sans doute d'avoir crié d'une: voix trop haute
: Je
chante
le
vainqueur
des
vainqueurs
de la
terre, descend presque
aussitôt aux petites musarderies à la mode, à cette matière qua-
drillée
et
gahppée qu'on croit absolument nécessaire dans
une
partition d'opéra-eûmique. Nous savons bien que cela
est
joli,
que cela caresse, flatte f e goût
du
gros public
;
mais
si
l'on
est
obligé
de
lui payer ce tribut de mélodie, pourquoi ne pas la faire
plus neuve ou
la
relever par une harmonie plus piquante?
L'introduction
en
quatuor pour deux soprani
et
deux ténors
est fort jolie; elle finit
par un
nocturne délicieux
on ne
peut
mieux écrit pour les voix,
et
accompagné avec une heureuse so-
briété d'orchestre. Cette charmante mélodie
à
quatre voix
est
précédée d'un dialogue scénique pour
ces
mêmes voix
qui-
moigne
du
bon sentiment
de la
déclamation musicale dans.le
compositeur. Après
ce
morceau vient
un
autre quatuor beau-
coup moins remarquable ; puis ensuite une romance louchante
:
Vous voyez hienqu'il
est mon
père, fort bien dite par mademoi-
selle Lavoye.
L'amour, l'amour console,
Et
vieiiltoutembellir;
Même quand il désoie,
est un rondo chanté par Mocker (Pasealez}
¡
d'une facture, sinon
originale,
du
moins joyeuse
et
pleine d'entrain. Audran (Don
Fabio
da
Sylva) vient chanter
un air
plus prétentieux qui com-
mence eu
ut
mineur, passe aussitôt en
tit
majeur, puis attaque
crûmenlle ton
de
mi bémol. Cela peut passer pour une modula-
tion hardie, originale
;
mais ce n'est pas cette originalité-là
que
les amateurs
de la
pureté
du
style réclament d'un compositeur.
Un chœur
de
corsaires grands seigneurs vient, après
un
petit
duo saus importance musicale, chanter une conspiration sur uu
air de gondolier et de tra,la,
la
qui nous afait penser à
la
Barca-
rolle, malencontreux opéra. On aurait préféré que ce chant des
conspirateurs rappelât, par le contraste scénique
et
musical,
le
cheeur
des
exilés
dansBéniowski.
Un
petit trio syllabiqtie, ex-
primant
la
peur qu'éprouvent Pasealez,-Ginetta
et
Gabrielle
d'être mandés
à la
cour, crainte peu logique
et
d'un drama-
tique faux, précède une cachucha d'un: caractère tout.ibérien,
et
qui a fait beaucoup d'effet. Ce morceau a été bissé;
il a
de la cou-
leur
et
plaira dans
les
salons comme
à la
scène. Après ce mor-
ceau, aussi commercial que musical, vient un
ajr
dePascalez sur
ses talents calligraphiques, dans
les
diverses écritures. Cet air
est plein de mouvement, de vie
et
de comique ;
et sur
les assu-
rances que l'écrivain donne
de son
adresse
à
tracer des billets
doux
, le
compositeur fait intervenir sur ce dernier mot une ca-
dence rompue d'un ingénieux
et
spirituel effet.
Le trio
con
cori, après l'arrestation de Fahio, lorsque
ce
per-
sonnage dit :
Lui, qui m{a
comme
un
frère prêté
son
secours, est
d'un bon style vocal
; et
puis, vient un morceau d'orgue
; et
puis
un chœur religieux assez ordinaire
; et
puis le finale peu saillant
dusecond acte. Le troisième commence par
un air
des plus bril-
lants,
chanté par Ginetta,
qui ne se
doute
pas du
danger
que
court son Fabio, car elle ne vocaliserait pas d'une façon si joyeuse.
Elle ne sait pas,
la
pauvre fille,
non
plus
que
Pasealez
et
Ga-
brielle qui viennent.Aire en
tluo.
: On
chantera,
on
dansera, que,
selon l'expression historique de M. de Salvandy,
ils
chantent
et
dansent sur un volcan. Don Fabio, condamné à.niort, vient, par
une faveur spéciale du roi, subir sa peine dans
la
petite. île où
il
esl né
;
il y
arrive dans une barque qui rappelle une situation
à
peu près pareille dans
le
Bré-aux-Clercs, situation
que la
voix
sombre du violoncelle dramatise au plus haut degré. Enfin Fabio,
qui va
s'unir
à
celle qu'il aime, chante une romance
sur
cette
antithèse
:
Ah
!
le plus beau jour de ma vie
Sera mou dernier jour!
Et le drame musical finit par cette mélodie touchante
et
noble,
fort bien dite par Audran, qui fait
des
progrès comme aclenr,
mais
qui
abuse, comme chanteur,
de la
vibration.
Ce
moyen
d'expression fait tomber celni
qui
l'emploie trop fréquemment
dans
la
sensiblerie musicale,
et
rappelle cette excellente plaisan-
terie d'Arnal
:
J'ai beaucoup couuii un mouton qui chantait ainsi.
Mocker
s'est
montré, comme toujours, chanteur gracieux, adroit,
et comédien intelligent. Mademoiselle Lavoye perd chaque jour
de son ton précieux et pointu que donne l'inexpérience des choses
tendres
et
douces, de la vie. Son talent d'actrice
y
gagne,
et !e
public aussi.
Sa
sosur, mademoiselle Marie Lavoye,
a
dit. genti-
ment son rôle
de
Gabrielle. C'est donc
un
succès d'acteurs, d'au-
teurs et de compositeur,
sur
lequel cependant aons engageons
tout ce personnel
à ne se
pas irop exaller l'imagination.
HENRI
BLAKCH-,IBD.
MARIE-THÉRÈSE,
Grand optra en 4 actes; musique de M.
X.
LOUIS.
Le bruit du succès
de
cet ouvrage nous
est
arrivé d'échos
en
échos.
M. Louis
a
tenté une chose difficile, et il
y a
mis une per-
..séyërauce qui, doit
t
o.u tard
le
conduire
à.
son but. Sachant
parfàït.eœen;t ;qtlë tonte, la. renommée qu'il
s'est
acquise,
que
tonte
la
popularité dont
il
jouit comme virtuose
et
compositeur
instrumental
ne
suffiraient pas encore
à lni
ouvrir
un
des deux
théâtres lyriques de Paris,
il
s'est
adressé
à
Lyon,
la
seconde
ville du royaume ;
il y a
donné d'abord un opéra-comique
en un
acte,
qui avait pour titre :
Un
duel
à
Valence. C'était
un
coup
d'essai dont, malgré
la
faiblesse
du
poème,
le
mérite
fut ap-
précié. M. Louis
y,
trouva lui-même l'avantage de s'assurer
de sa
vocation,
et
s lors
il
se mil
à
composer quelque chose de plus
élevé, de plus fort. Il obtint de deux auteurs exercés,MM. Cormon
etDutertre,
le
librelto d'un grand opéra
en
quatre actes,
et, le
19 février dernier, Marie-Thérèse
fut
représentée pour
la
pre-
mière fois.
0
Af/teiiïensJ combien
il en
coûte pour vous plaire !
Car YOUS comprenez qu'en Imvaillant pour Lyon, l'habile artiste
avait toujours Paris en vue,
et
ne songeait qu'à s'en rapprocher.
Si son opéra-comique n'avait diminué
les
distances que d'une
vingtaine
de
lieues, son grand opéra lui en
a
fait faire au moins
soixante
ou
quatre-vingts. Maintenant le voilà tout porté
:
cent
lieues eu deux ans, ce n'est pas aller du train d'une locomotive;
mais que voulez-vous?
le
chemin
de fer de
Paris
à
Lyon n'est
pas encore établi, elle sera-t-il jamais pour la musique?
Ou
a
beaucoup parlé
de
décentralisation (pardonnez-nous ce
mot barbare, d'autant plus barbare qu'il est plus long)
;
mais
c'est Une des choses
qui se
prêchent toujours
et qui ne se
font
jamais
: là
où elles existent,
il n'y a
pas
eu
besoin
de
les prê-
cher. Faites que la France,ait dans son sein sept ou huit villes
à
peu près égales
en
importance
et
en influence, comme l'Italie
et
l'Allemagne, alors vous aurez autant de théâtres, qui se vaudront
l'unTautre,
et
sur lesquels
il
sera également glorieux, également
productif de se faire joner. Autrement Paris sera toujours Paris,
le Léviathan
des
cités
du
royaume,
la
seule capable
de dis-
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