© L’Encéphale, Paris, 2009. Tous droits réservés.
L’Encéphale (2009) Supplément 4, S127–S128
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
journal homepage: www.elsevier.com/locate/encep
l’humeur (dépressifs, maniaques ou mixtes) ou encore de trou-
bles anxieux. De plus, certains contextes peuvent également
générer de tels comportements sans que ceux-ci soient pour
autant intégrables à quelque syndrome psychiatrique. En n,
rappelons que la comorbidité, c’est-à-dire l’association de
plusieurs troubles, est fréquente chez l’enfant et l’adolescent.
Le(s) diagnostic(s) éventuel(s) et le choix de la thérapeutique
dépendront donc de multiples aspects, en particulier de l’éva-
luation diachronique. L’apparition récente de manifestations
agressives chez un jeune sans antécédents notables peut par
exemple être symptomatique d’un épisode dépressif majeur
ou de l’utilisation de substances psycho actives.
Le trouble des conduites (TC) tient une place particu-
lière dans la psychopathologie de l’enfant et de l’adoles-
cent : l’agressivité en est la composante fondamentale. Le
retentissement social est souvent au premier plan car le TC
se traduit par la persistance et la répétition de comporte-
ments bafouant les droits d’autrui et les règles sociales.
Pour retenir ce diagnostic, le sujet doit avoir présenté au
moins trois des symptômes suivants dans les 12 mois précé-
dents (DSM IV) : agression de personnes ou d’animaux, des-
truction de biens, fraudes ou vols, violations graves des règles
établies. Les comportements agressifs peuvent se traduire par
des brutalités, menaces, intimidations, bagarres, l’utilisation
d’une arme (bâton, couteau…), cruauté physique envers des
animaux et/ou des personnes, des vols commis en affron-
tant la victime, ou encore des viols et rapports sexuels sous
contrainte. Le trouble des conduites peut se décliner sur un
mode dimensionnel : conduites « manifestes » (destructri-
ces : agression ; non destructrices : opposition), ou conduites
Comportements agressifs et violents
chez les adolescents
J.-P. Reneric*, M.-P. Bouvard
Pôle Universitaire de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent, Hôpital Charles Perrens, 121, rue de la Bèchade,
33076 Bordeaux cedex
Les comportements agressifs, actes destructeurs, alterca-
tions physiques sont fréquents chez les enfants et adoles-
cents. Dans la majorité des cas, de tels comportements ne
sont pas pathologiques : isolés ou ponctuels, contextuels,
ils sont sans gravité. Ils peuvent s’inscrire dans le cadre
d’un développement psychoaffectif normal, surtout chez
les petits et à l’adolescence. Ces comportements peuvent
néanmoins être problématiques : des interventions psycho-
thérapiques ou psychosociales auprès de l’enfant et de sa
famille, permettront d’en éviter la répétition.
Cependant une minorité de ces enfants et adolescents
resteront incapables de se maîtriser et de contrôler leur
explosivité. Leurs comportements agressifs et/ou violents
seront répétitifs. Ils se manifestent alors dans des environ-
nements divers (famille, école, collège…) et retentissent de
manière signi cative et durable sur le fonctionnement global,
l’intégration scolaire ou familiale, l’équilibre émotionnel et
le développement affectif. Ces manifestations persistantes
conduisent les parents et parfois les enseignants à demander
une consultation médicale spécialisée, parfois à l’issue d’un
passage par le service des urgences de l’hôpital.
Avant de pouvoir être « traités », ces comportements agres-
sifs répétitifs nécessitent une évaluation clinique rigoureuse,
tenant compte des particularités développementales du sujet
et de son environnement. En effet des troubles divers peu-
vent se manifester par des comportements violents : le trou-
ble des conduites, le trouble oppositionnel avec provocation,
les troubles explosifs intermittents et le trouble dé citaire de
l’attention/hyperactivité. Mais l’agressivité est également fré-
quente chez les jeunes souffrant par exemple de troubles de
* Auteur correspondant.
Con its d’intérêts : non.
J.-P. Reneric, M.-P. BouvardS128
« cachées » (destructrices : violations de propriétés ; non des-
tructrices : fugues). Non traité, le TC aura des conséquences
néfastes à long terme : sur le plan académique et profession-
nel (arrêt de la scolarité malgré des compétences normales,
chômage, non emploi) ; problèmes relationnels et conjugaux ;
abus de substances (drogues, alcool) ; criminalité ; mort pré-
maturée (suicide, conduites à risque…).
Les options thérapeutiques incluent des thérapies cogni-
tives et comportementales, individuelles, familiales ou grou-
pales, axées sur l’école et la maison [1, 2]. Elles sont surtout
développées dans les pays nord-américains où plusieurs
programmes ont montré leur ef cacité. Prises en charges
institutionnelles et approches psycho dynamiques font éga-
lement partie de la palette des outils thérapeutiques.
Les sujets pour lesquels les comportements agressifs et
violents sont persistants, envahissants et répétés dans le
temps seront susceptibles de recevoir un traitement phar-
macologique. Les traitements interviennent le plus souvent
en deuxième intention, à titre palliatif, en cas d’inef cacité
des prises en charges psychosociales ou en cas de danger
pour le sujet lui même ou les autres. Les traitements ciblent
soit des troubles spéci ques sous-jacents dont l’agressivité
est une manifestation, soit l’agressivité elle-même indépen-
damment de troubles associés. Il est recommandé de traiter
en première intention le trouble pouvant générer de l’agres-
sivité et d’adopter ensuite une approche plus purement
symptomatique. Trois grandes classes pharmacologiques ont
été étudiées dans cette indication, à partir d’un rationnel
basé sur la neurobiologie de l’agressivité et de l’impulsivité :
les antipsychotiques, les thymorégulateurs (lithium et anti-
convulsivants), les psychostimulants [3, 4, 5].
Conclusion
Les traitements pharmacologiques les plus étudiés dans les
troubles du comportement perturbateurs avec agressivité
et/ou violence restent à ce jour les antipsychotiques aty-
piques : ils ont l’avantage d’une ef cacité rapide avec une
bonne tolérance à court, moyen et long terme. Les thymoré-
gulateurs ont un intérêt lorsque des uctuations d’humeur,
une explosivité ou un trouble bipolaire sont associés au TC.
En n, les psychostimulants et la clonidine ont des effets
intéressants en cas de trouble dé citaire de l’attention
avec hyperactivité (TDA/H). La comorbidité apparaît donc
déterminante dans le choix du traitement pharmacologique
des comportements agressifs et/ou violents. Cela suppose
une évaluation rigoureuse non seulement de manière caté-
gorielle et transversale (inventaire des symptômes, syndro-
mes, troubles) mais aussi longitudinale et dimensionnelle.
La prise en charge d’un TC devrait avant tout être pré-
ventive. Cela suppose une ré exion précoce des divers
intervenants auprès de l’enfant (parents, enseignants, édu-
cateurs…) lors de l’observation de comportements agressifs
ou « anti-sociaux » comme modalité univoque et/ou dura-
ble d’interaction avec autrui. Des programmes de guidance
parentale sont utiles, visant à contenir des comportements
de l’enfant ou à prévenir leur consolidation.
Références
[1] Connor DF, Carlson GA, Chang KD et al. for Stanford/Howard/
AACAP Workgroup on Juvenile Impulsivity and Aggression.
Juvenile maladaptive aggression : a review of prevention,
treatment, and service configuration and a proposed research
agenda. J Clin Psychiatry 2006 ; 67 : 808-20.
[2] Institut National de la Santé Et de la Recherche Médicale
(INSERM) : Expertise collective Trouble des conduits chez
l’enfant et l’adolescent, éditions Inserm, 2005, 428 pages.
[3] McDougle CJ, Stigler KA, Posey DJ. Treatment of aggression in
children and adolescents with autism and conduct disorder. J
Clin Psychiatry 2003 ; 64 : 16-25.
[4] Ruths S, Steiner H. Psychopharmacologic treatment of aggression
in children and adolescents. Pediatr Ann 2004 ; 33 : 318-27.
[5] Steiner H, Saxena K, Chang K. Psychopharmacologic strate-
gies for the treatment of aggression in juveniles. CNS Spectr
2003 ; 8 : 298-308.
Principes de traitement pharmacologique des comportements agressifs durables chez l’enfant et l’adolescent (NB : les traitements
pharmacologiques lorsqu’ils sont nécessaires sont toujours associés à une prise en charge psychosociale et/ou psychothérapique)
Diagnostic principal (hors troubles envahissants
du développement et schizophrénie) Diagnostic secondaire
ou dimension clinique Molécules ou classes
pharmacologiques conseillées
Pas de trouble spéci que
Contexte environnemental
et/ou réactionnel
Prescription transitoire (en cas d’agitation importante
et/ou dans les manifestations réactionnelles) :
– hydroxyzine – cyamemazine
Trouble affectif :
dépression, manie, anxiété Traitement spéci que du trouble :
- antidépresseurs - thymorégulateurs
- anxiolytiques - antipsychotiques
Trouble des conduites Antipsychotique :
– risperidone – olanzapine
TDA/H
Impulsivité Psychostimulants :
– methylphenidate - nouveaux antipsychotiques
- clonidine
Trouble de l’humeur
Fluctuations de l’humeur
Explosivité
- lithium - divalproex
- carbamazepine - nouveaux antipsychotiques
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