5
imaginez bien que quand je dis cela, il va y avoir des conséquences sur la psychanalyse
puisque la psychanalyse c’est de la parole.
Mais pour l’instant, quand j’explique cela, je ne veux pas parler spécifiquement de la
psychanalyse mais d’une notion générale. Bien entendu ça n’empêche pas que depuis dix
mille ans il y ait des dérives dans la conception de la médecine par les médecins eux-
mêmes. Aujourd’hui il y a des lois puisque les médecins ne comprenaient plus le rôle de la
parole dans la médecine, il y a des lois pour punir les médecins qui ne discutent pas avec
les patients du diagnostic et du traitement. Puisque les médecins ne comprenaient plus
qu’il n’y a pas de médecine sans parole, il a fallu faire des lois pour punir, pour qualifier de
délit le fait que les médecins n’expliquent pas aux patients pourquoi ils pensent qu’ils ont
une maladie, quelle est cette maladie, quelles sont les conséquences du traitement
chirurgical, etc.
On voit bien que s’il a fallu faire une loi pour dicter aux médecins de parler à leurs
patients, c’est qu’en trop grand nombre ils ne le faisaient plus. Mais on ne peut pas se
contenter de manière technocratique de dire: si l’on oblige les médecins à parler avec les
patients, c’est pour qu’il y ait un bon contrat.
Alessandra Guerra
— Ce n’est pas la loi qui fait un bon contrat, c’est la parole…
François-Régis Dupond Muzart
— Il faut les explications pour que la personne comprenne
le contrat. Le problème c’est que tout en n’en tirant pas les conséquences, personne n’a
jamais nié que les paroles entre le médecin et le patient jouaient un très grand rôle dans
le succès du traitement, dans le moral du patient, dans le rétablissement de l’opération
chirurgicale… Donc si on si l’on impose aux médecins de parler avec leurs patients, c’est
pour des raisons d’efficacité de la médecine et pas seulement pour des raisons juridiques
de contrat. À partir de là, même si on n’a pas de science sur ce qui se passe par la parole,
personne ne conteste que cette parole est essentielle pour la santé du patient. Même les
“scientistes les plus technocratiques” ne nient pas cela,
sauf par le biais de qualifier la
parole de… placebo, ce qui est tout-à-fait intéressant: donc je suis en train en vous
répondant de vous faire du placebo. Parce que le patient qui avale un placebo, il ne sait
pas que c’est du sucre, mais si c’est la parole qui est dite placebo, il est difficile de ne pas
s’en apercevoir, qu’il s’agit de parole. Donc en niant le rôle thérapeutique et y compris
médical de la parole en la qualifiant de placebo, on tourne en rond, puisqu’il n’y a pas de