Le jeudi 23 juin 2016, le Royaume-Uni a voté en faveur d’une sortie de l’Union
européenne. On utilise l’expression « Brexit » pour désigner ce départ. Cette
décision du Royaume-Uni a été suivie par l’élection de Donald Trump en tant que
président des États-Unis en novembre 2016. Durant sa campagne présidentielle,
M. Trump a clairement exprimé son appui à l’égard des mesures de défense
du commerce américain, y compris l’application de taxes sur les importations
vers les États-Unis, ainsi que son opposition quant aux accords commerciaux
multilatéraux de vaste portée, comme le Partenariat transatlantique de commerce
et d’investissement (PTCI). Il a même été jusqu’à menacer de mettre fin à
divers accords de libre-échange, notamment ceux qui existent entre les États-
Unis, le Canada et le Mexique. Il a en outre promis de se retirer du Partenariat
transpacifique (PTP) dès le jour de son entrée en fonction.
Ces différents événements ont provoqué une incertitude considérable quant
à l’avenir des relations commerciales entre l’UE, le Royaume-Uni et les États-
Unis. Ce qui constituait depuis longtemps une situation d’échange bilatéral
– entre les États-Unis d’un côté et l’UE (y compris le Royaume-Uni) de l’autre
– se transformera en une relation tripartite : un triangle transatlantique. Les
entreprises américaines réagissent déjà à l’incertitude créée par cette relation
tripartite. En effet, plus de trois quarts de celles-ci ont affirmé que l’incertitude
liée à l’avenir de la réglementation du commerce a un impact direct, tant positif
que négatif, sur leurs décisions actuelles en matière d’investissement.
Notons que chacune de ces trois relations (entre les États-Unis et le Royaume-Uni,
entre les États-Unis et l’UE, entre le Royaume-Uni et l’UE) dépend d’un ensemble
de circonstances uniques et que chaque relation a une incidence sur les autres.
Le commerce entre les États-Unis et
le Royaume-Uni
Plus d’un tiers des entreprises américaines établies au Royaume-Uni
affirment qu’elles pensent à se relocaliser ailleurs dans l’UE en raison
du Brexit. En outre, plus de la moitié des entreprises américaines qui
exportent des marchandises vers l’UE indiquent qu’à cause du vote en
faveur du Brexit, elles sont plus enclines à contourner le Royaume-Uni en
vue de faire affaire avec d’autres pays de l’UE. De surcroît, suite au Brexit,
le marché intérieur du Royaume-Uni à lui seul risque de ne pas être assez
attrayant pour soutenir l’envergure actuelle des liens commerciaux entre
les États-Unis et le Royaume-Uni.
Toutefois, en l’absence d’une relation privilégiée entre les États-Unis
et l’UE, il est plus probable que les investisseurs américains continuent
de percevoir le Royaume-Uni comme une passerelle attrayante vers le
marché unique de l’UE, du moins si le Royaume-Uni réussit à conserver
certains éléments clés de l’accès dont il dispose actuellement. L’échec
potentiel du TTIP pourrait donc donner l’occasion aux États-Unis et
au Royaume-Uni de conclure un solide accord bilatéral qui faciliterait
l’investissement américain au Royaume-Uni, lequel pourrait conserver un
libre accès au marché de l’UE. Un accord de ce type est dans le domaine
du possible. Paul Ryan, le président de la Chambre des représentants aux
États-Unis, a manifesté son appui à un accord de libre-échange entre les
États-Unis et le Royaume-Uni et il décrit ce dernier comme un « allié
indispensable ».
Il n’est donc pas surprenant de constater que la plupart des entreprises
américaines sont en faveur à la fois d’un Brexit « souple » (66,6 %), dans
le cadre duquel le Royaume-Uni conserve un accès privilégié au marché
unique, de même que d’un accord commercial direct (81,8 %) entre les
États-Unis et le Royaume-Uni.
Le commerce entre
les États-Unis et l’UE
Quatre-vingt-seize pour cent des entreprises américaines affirment
qu’elles font actuellement face à des obstacles non tarifaires lorsqu’elles
traitent avec l’UE. Le PTCI vise à réduire tant les tarifs que les obstacles
réglementaires qui compliquent le commerce entre les États-Unis et l’UE
et le rendent plus coûteux. Trois quarts des entreprises américaines sont
au courant du PTCI, et les sociétés de ce pays estiment que le PTCI aura
une plus grande incidence sur leurs affaires qu’un accord bilatéral entre les
États-Unis et le Royaume-Uni ou que le Partenariat transpacifique (PTP),
cet accord multilatéral que les États-Unis envisageaient conclure avec 11
autres pays côtiers du Pacifique.
Cependant, malgré le vaste appui manifesté en ce sens, tout semble
indiquer que le PTCI ne progressera pas à court terme, ni d’ailleurs à long
terme. Compte tenu de l’imminent échec du PTCI, il semble qu’à court
et moyen terme, la relation commerciale entre les États-Unis et l’UE
changera très peu. Ainsi, il reste toujours à voir dans quelle mesure les
États-Unis traiteront directement avec l’UE suite au Brexit, ou si le pays
choisira plutôt d’investir davantage au Royaume-Uni pour l’utiliser comme
passerelle vers l’UE.
Cependant, le délai découlant du déclenchement de l’application de
l’article 50 et l’approche sélective que le Royaume-Uni pourrait adopter à
l’égard de la législation de l’UE laissent présager que des divergences sur
le plan des normes et des exigences surviendront inévitablement entre le
Royaume-Uni et l’UE. Si les négociations mènent plutôt à l’adoption de
la position d’un Brexit « rigide », l’attractivité du Royaume-Uni à titre de
porte d’entrée vers l’UE pour les États-Unis en matière d’investissement
risque d’être fortement remise en question. Un tournant qui pourrait
avoir un effet néfaste sur le marché intérieur du Royaume-Uni, dans
la mesure où les divergences relatives aux normes et aux exigences de
l’UE signifieraient que les mêmes produits américains ne pourraient être
vendus à la fois au Royaume-Uni et dans l’UE.
Le commerce entre le
Royaume-Uni et l’UE
À la suite de sa sortie de l’UE, le Royaume-Uni conservera néanmoins
l’accès au marché unique de l’UE au même titre que tous les autres pays
du monde, y compris les États-Unis. Ce sont les termes particuliers de cet
accès qu’il tentera de négocier. Plus le Royaume-Uni conservera son accès
privilégié au marché unique, plus le Brexit prendra une forme souple, de
même, plus le Royaume-Uni renoncera à son accès actuel, plus le Brexit
adoptera une forme rigide.
Les deux tiers des entreprises américaines rêvent d’un Brexit souple, et
la moitié d’entre elles souhaitent une « sortie en douceur » à la manière
de la Suisse ou de la Norvège. Même si ces deux modèles sont souvent
invoqués dans les discussions, il est fort improbable que l’un ou l’autre
ne soit adopté. Il existe cependant d’autres options de Brexit souple qui
demeurent réalistes. Une voie se dessine et elle semble soit mener à l’idée
d’une union douanière (dans une forme indéterminée), soit au modèle de
l’Ukraine, c’est-à-dire une zone de libre-échange approfondi, ou même, à
un partenariat continental.
Même si d’un point de vue économique, l’idée d’un Brexit souple est
attrayante pour le Royaume-Uni, il reste que pour y parvenir, ce dernier
devrait probablement continuer de se plier aux lois de l’UE, une position
qui serait politiquement intenable. Rappelons en effet que le rapatriement
du pouvoir décisionnel du Royaume-Uni quant à des questions cruciales
est au cœur même du vote en faveur de la sortie de l’UE et, qu’à ce titre,
les électeurs ont été on ne peut plus clairs.
Les mesures à prendre maintenant
Quatre-vingt-quinze pour cent des cabinets juridiques américains nous
ont confié qu’ils auront besoin de l’aide et de conseils de tiers pour
bien s’adapter au Brexit. Le type de soutien nécessaire variera selon les
secteurs, ainsi qu’au fil du temps, alors que la forme que prendront les
relations commerciales au sein du triangle transatlantique se précisera.
Les entreprises peuvent cependant prendre des mesures d’atténuation
des risques, y compris des vérifications de la chaîne d’approvisionnement
et l’évaluation des effets potentiels de toute divergence réglementaire,
de même que faire des efforts pour établir des liens au sein d’associations
commerciales et de lobbying.
RÉSUMÉ
RAPPORT SUR
LE BREXIT
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