usages détournés des médicaments - FMC Franche

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“ USAGE DETOURNE DES MEDICAMENTS”
Pr JP Kantelip
Le détournement d’un médicament s’inscrit plus largement dans le cadre du mésusage qui se
définit comme une utilisation non conforme au RCP. Il peut conduire le plus souvent à un
usage abusif, c’est-à-dire à l’utilisation excessive et volontaire, permanente ou intermittente
d’un principe actif non conformément à l’usage médical habituel. Dans ce contexte, la classe
thérapeutique la plus fréquemment impliquée, est celle des psychotropes en raison pour
certains d’entre eux de leur potentiel à induire des dépendances. Il peut s’agir également de la
recherche à améliorer des performances dans des situations apparentées ou entrant
directement dans le cadre du dopage, ou encore il peut tout simplement correspondre à une
pratique d’automédication. Quelque soit les buts du détournement, les risques de survenue
d’effets indésirables graves sont significatifs avec pour conséquence un surdosage avec des
effets toxiques, un renforcement des pharmacodépendances et l’apparition d’interactions
médicamenteuses dangereuses.
Des études épidémiologiques récentes utilisant les banques de données de l’Observatoire
Français des Drogues et des Toxicomanies et du Réseau des Centres d’Evaluation et
d’Information sur la Pharmacodépendance de l’Afssaps ont mis en évidence l’existence d’un
détournement important du clonazépam (Rivotril®) majoritairement chez des sujets ayant un
comportement déviant mais également chez des sujets “non déviants” avec des posologies de
clonazépam élevées et des associations avec la buprénorphine. Le rapport TREND 2004 de
l’Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies fait apparaître que le clonazépam
tendrait à remplacer le flunitrazépam (Rohypnol®) d’abord comme médicament prescrit puis
comme médicament détourné. Les utilisations des médicaments bêta 2 agonistes pour
améliorer les capacités physiques à l’exercice en endurance sont bien connues, aussi ces
produits sont largement détournés de leur usage médical. En plus de leur action
bronchodilatatrice, ils possèdent à fortes doses la propriété de majorer la masse musculaire, de
diminuer la masse grasse en se comportant comme de véritables anabolisants non hormonaux.
Les effets cardiovasculaires des bêta 2 agonistes peuvent conduire à déclencher des douleurs
angineuses, des infarctus du myocarde, des troubles du rythme voire des morts subites. Le
sildénafil (Viagra®) et ses congénères : vardénafil (Lévitra®) et tadalafil (Cialis®) ne sont
pas utilisés que pour améliorer les performances sexuelles, c’est l’effet vasorelaxant du lit
vasculaire pulmonaire qui est recherché pour améliorer la fonction respiratoire et accélérer
l’adaptation à la haute altitude. Les effets indésirables graves de ces médicaments (inhibiteurs
sélectifs de la phosphodiastérase de type 5) sont la survenue de crise d’angor, d’accident
ischémique cérébral ou de mort subite par troubles du rythme cardiaque. Bien entendu tous les
médicaments peuvent être détournés de leur usage thérapeutique. La surveillance des classes
pharmacologiques à risques doit être accentuée. Elle exige une vigilance particulière des
pharmaciens d’officines vis-à-vis des ordonnances pouvant être suspectées de falsifications et
leur collaboration avec les prescripteurs. A ce titre, les bases de données de l’assurance
maladie constitue un outil pharmaco-épidémiologique intéressant pour la surveillance du
détournement des médicaments. Les objectifs en terme de prévention de ces pratiques
frauduleuses sont :
1 - la sécurisation des prescriptions à partir d’ordonnances rendues difficiles à falsifier.
2 - le renforcement des liens entre le prescripteur et le pharmacien qui assure la délivrance des
produits.
3 - un contrôle en étroite relation entre les firmes pharmaceutiques et les organismes de prise
en charge.
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