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hausse des prix agricoles. C'est le cas du maïs qui est utilisé aux Etats-Unis pour la
production d'éthanol alors qu’il constitue l’aliment de base pour les Mexicains. Or son
rendement énergétique est médiocre, ce qui n’est pas le cas de la canne à sucre qui est
utilisée au Brésil. La croissance des agrocarburants produits à base de maïs alimente, par
ce biais, la flambée des prix. Se pose ainsi une sorte de dilemme entre rouler ou manger,
l’affectation de la surface agricole à leur production se faisant aux dépens de la production
de matières premières destinées à l’alimentation7.
1.4 Spéculation des marchés financiers sur les matières premières
Pour expliquer l’engouement récent des spéculateurs pour le marché des matières
premières, on évoque généralement la politique monétaire menée par la Réserve fédérale
américaine depuis 2001. La Fed, - la banque centrale des Etats-Unis -, est ainsi accusée
outre-Atlantique d'avoir favorisé les bulles spéculatives de ces dernières années, en
maintenant des taux d'intérêt trop bas. S'ils étaient justifiés pour soutenir l'activité
économique, cette politique "d'argent facile" a encouragé les emprunteurs à acheter à crédit
des actifs financiers ou immobiliers dans l'espoir d'une plus-value à la revente. En quête de
rendements élevés, le marché des matières premières offrait, dans ce contexte d’excès de
liquidités, des perspectives de profits juteux.
La spéculation sur les matières premières n’est cependant pas un phénomène nouveau. La
libéralisation mondiale des capitaux, menée dès les années 80, et la dérégulation
internationale des marchés financiers, ont exacerbé cette tendance. Mais l’éclatement de la
bulle immobilière aux Etats-Unis (crise des «subprimes ») a mis en lumière leur « dualité ».
En effet, dans un contexte où la crise financière internationale les a érigées au rang de
« valeurs financières sûres », les matières premières ont progressivement acquis le statut
d’actifs financiers objets de spéculation. Les "matières premières" permettent aux acteurs
financiers d’augmenter la diversité de leurs portefeuilles. Autrement dit, s'ils ne sont pas
à l'origine de cette hausse des prix, les fonds spéculatifs spécialisés dans les matières
premières amplifient cette tendance, ainsi que l'instabilité du marché à court terme.
1.5 "Effet domino" de la hausse des prix des matières premières
Comme les matières premières interviennent dans la production de produits variés, la
hausse initiale de leurs prix a un effet boule-de-neige. Par exemple, le fait que les engrais
ou les insecticides, utilisés massivement dans le système agricole productiviste, soient
produits à partir du gaz et du pétrole affecte à plus ou moins brève échéance le prix des
aliments. Ou encore, la demande en agrocarburants aux Etats-Unis n’a pas seulement
provoqué une hausse des prix du cours du maïs, utilisé pour la production de bioéthanol.
Elle a provoqué la flambée du prix des produits qui en contiennent, tels que la tortilla, qui
constitue la nourriture de base des Mexicains. La hausse du cours du maïs s’est également
répercutée sur le prix de la viande ou des produits laitiers parce qu’il sert d’alimentation
pour les animaux. Enfin, l’usage par la pétrochimie et l’industrie des plastiques de
l’amidon de maïs ou de la pomme de terre en remplacement du pétrole renforcera la
hausse des produits d’alimentation de base ou dérivés… Dans un autre registre, la hausse
7 La production du « pétrole vert » exige beaucoup de surfaces agricoles. Dès lors, tout développement,
même limité, des agrocarburants risque immanquablement de se faire au détriment de la sécurité
alimentaire, dans un monde où 800 millions d'hommes et de femmes ne mangent pas à leur faim et qui
comptera 2,5 milliards de bouches supplémentaires à nourrir d'ici 2050.