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F801 • Virus et bactéries : en quoi sommes-nous responsables ? • www.frm.org 3
En 1928, en Grande-Bretagne, Alexander
Fleming découvre la pénicilline - probablement la
plus grande découverte de la médecine - . Ce
n’est qu’à partir de 1943 qu’elle est utilisée en
masse grâce au travail de biochimistes qui
réussirent à la produire en quantité suffisante. A
cette époque, les bactéries étaient tuées par de
faibles doses de pénicilline ; progressivement,
ces doses ont dû être augmentées. Les
bactéries initialement sensibles sont devenues
pour la plupart résistantes aux antibiotiques. Il en
a été de même pour tous les antibiotiques
commercialisés ultérieurement.
Quelle est la cause de cette évolution ? Face
aux antibiotiques, seules les bactéries
résistantes survivent. Elles subissent ainsi de la
part de l’homme (inventeur de ces antibiotiques),
ce qu’on appelle une « pression de sélection ».
La grande force des bactéries est leur vitesse de
multiplication : certaines peuvent se dédoubler
en quelques minutes. En se multipliant, elles
peuvent subir des mutations génétiques qui
peuvent donner, de façon aléatoire, aux
générations suivantes des capacités à résister
aux antibiothérapies. Outre les mutations
génétiques, d’autres mécanismes contribuent au
développement de résistances. On parle par
exemple de transfert de gènes ou bien encore de
« conjugaison bactérienne ». Ce dernier
mécanisme consiste en un sorte d’accouplement
entre une bactérie donatrice et une bactérie
réceptrice, accouplement au cours duquel il y a
un échange de morceau d’ADN. Si ce morceau
d’ADN contient les informations génétiques
induisant une résistance à un antibiotique, la
bactérie réceptrice devient alors, elle-aussi,
résistante.
Pire encore, certaines bactéries développent des
résistances contre plusieurs antibiotiques. Il
s’agit alors de bactéries dites « multirésistantes
». De telles bactéries sont souvent incriminées
dans les infections nosocomiales* : ces bactéries
siègent dans le tube digestif de l'homme puis,
par exemple à l’occasion d’une intervention
chirurgicale, contaminent une plaie opératoire.
Nombre d’espèces de bactéries présentent
désormais des souches multirésistantes à
plusieurs antibiotiques.
Certains cas peuvent s’avérer aujourd’hui
préoccupants pour la santé humaine :
Les bactéries responsables de méningites
purulentes – méningocoques et pneumocoques -
devenus résistants à la pénicilline posent un
problème thérapeutique : comment les traiter
face à des germes résistants ? L’apparition de
cas de méningites cérébro-spinales, causées par
un méningocoque résistant est également un
phénomène nouveau. Il est d’autant plus grave
que la mort peut survenir en moins d’une journée
si aucun traitement ne se montre efficace.
Le bacille de la tuberculose (Mycobacterium
tuberculosis), dans certains cas, est devenu
préoccupant. La résistance à la rifampicine* est
très grave car c'est l'antibiotique le plus utile.
Dans les prisons américaines, on relève des cas
de bacilles tuberculeux multi-résistants. Or, la
tuberculose est devenue une « maladie sociale »
car elle touche surtout les gens en situation de
précarité extrême (sans domicile fixe,
populations désœuvrées…).
Certaines souches de Staphylococcus aureus
(staphylocoque doré), résistants à la méticilline*
(SARM), sont également résistantes à de
nombreux autres antibiotiques. Elles deviennent
par exemple résistantes à la vancomycine* qui
est un des derniers antibiotiques utilisables.
Depuis plus de cinquante ans, les experts de
l'OMS* ont émis des recommandations pour le
« bon usage des antibiotiques ». Malgré les
campagnes d’information et de prévention, ces
recommandations ont du mal à être suivies.
C’est ainsi que le staphylocoque est devenu très
rapidement résistant à la pénicilline G. En
quelques années, 90 % des souches de
staphylocoque doré sont devenues résistantes à
la pénicilline.
Pourtant l'OMS* recommande :
> De ne traiter par antibiotique (en toute logique)
que des malades infectés par des bactéries et
non des malades infectés par des virus. Par
exemple, en France, les rhinopharyngites virales
qui affectent les enfants tous les hivers ont été
traitées par des antibiotiques pendant quarante
ans. Cette pratique est aujourd’hui réduite.
> De proscrire des antibiothérapies préventives
chez les malades non infectés, mais
susceptibles de l’être (principalement des
personnes immunodéprimées). En effet,
pourquoi prescrire une telle thérapie et surtout
quand l'arrêter ? Il semble que cette pratique soit
toujours d’actualité dans certains services
hospitaliers.
> De respecter la prescription médicale. En
France, un antibiotique ne peut s’obtenir que sur
prescription médicale. Il est inutile (voire même
dangereux) de prendre des antibiotiques sans
avis médical. Par ailleurs, il faut respecter la
durée et la posologie du traitement. Des